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16/09/2022 | FRANCE | N°18/11701

France | France, Cour d'appel d'Aix-en-Provence, Chambre 4-3, 16 septembre 2022, 18/11701


COUR D'APPEL D'AIX-EN-PROVENCE

Chambre 4-3



ARRÊT AU FOND



DU 16 SEPTEMBRE 2022



N° 2022/ 178



RG 18/11701

N° Portalis DBVB-V-B7C-BCYQ2







SAS BAHIA





C/



[W] [P]

























Copie exécutoire délivrée le 16 Septembre 2022 à :

- Me Michel KUHN, avocat au barreau de MARSEILLE



- Me Christian SALORD, avocat au barreau d'AIX-EN-PROVENCE































Décision déférée à la Cour :



Jugement du Conseil de Prud'hommes - Formation de départage de MARSEILLE en date du 14 Juin 2018 enregistré au répertoire général sous le n° 17/00134.





APPELANTE



SAS BAHIA, demeurant [Adresse 2] - [Localit...

COUR D'APPEL D'AIX-EN-PROVENCE

Chambre 4-3

ARRÊT AU FOND

DU 16 SEPTEMBRE 2022

N° 2022/ 178

RG 18/11701

N° Portalis DBVB-V-B7C-BCYQ2

SAS BAHIA

C/

[W] [P]

Copie exécutoire délivrée le 16 Septembre 2022 à :

- Me Michel KUHN, avocat au barreau de MARSEILLE

- Me Christian SALORD, avocat au barreau d'AIX-EN-PROVENCE

Décision déférée à la Cour :

Jugement du Conseil de Prud'hommes - Formation de départage de MARSEILLE en date du 14 Juin 2018 enregistré au répertoire général sous le n° 17/00134.

APPELANTE

SAS BAHIA, demeurant [Adresse 2] - [Localité 3]

représentée par Me Michel KUHN, avocat au barreau de MARSEILLE substitué par Me Marie BAUQUIS, avocat au barreau de MARSEILLE et Me Maité BATAILLE, avocat au barreau de VAL-DE-MARNE

INTIMEE

Mademoiselle [W] [P], demeurant [Adresse 6] - [Localité 1]

représentée par Me Christian SALORD, avocat au barreau d'AIX-EN-PROVENCE

*-*-*-*-*

COMPOSITION DE LA COUR

En application des dispositions des articles 804 et 805 du code de procédure civile, l'affaire a été débattue le 28 Juin 2022, en audience publique, les avocats ne s'y étant pas opposés, devant Madame Estelle DE REVEL, Conseiller, chargée du rapport, qui a fait un rapport oral à l'audience, avant les plaidoiries.

Ce magistrat a rendu compte des plaidoiries dans le délibéré de la cour, composée de :

Madame Pascale MARTIN, Président de Chambre

Madame Ghislaine POIRINE, Conseiller faisant fonction de Président

Madame Estelle DE REVEL, Conseiller

Greffier lors des débats : Mme Agnès BAYLE.

Les parties ont été avisées que le prononcé de la décision aurait lieu par mise à disposition au greffe le 16 Septembre 2022.

ARRÊT

CONTRADICTOIRE

Prononcé par mise à disposition au greffe le 16 Septembre 2022

Signé par Madame Estelle DE REVEL, Conseiller et Madame Florence ALLEMANN-FAGNI, Greffier, auquel la minute de la décision a été remise par le magistrat signataire.

***

EXPOSE DU LITIGE

Mme [W] [P] a été engagée en qualité de réceptionniste par la société SHM selon contrat à durée indéterminée à temps complet du 8 septembre 2011.

Le 1er mai 2014, son contrat de travail a été transféré à la société Bahia.

Dans le dernier état de la relation contractuelle, régie par les dispositions de la convention collective nationale des hôtels, cafés, restaurant, Mme [P] exerçait la fonction de réceptionniste, niveau 1, échelon 3, et percevait une rémunération mensuelle brute de 1 972,66 euros.

Le 12 août 2016, la salariée a été convoquée à un entretien préalable à un éventuel licenciement pour motif économique, fixé au 24 août suivant.

Le 2 septembre 2016, elle s'est vue notifier son licenciement pour motif économique et impossibilité de reclassement et a accepté le contrat de sécurisation professionnelle le 7 septembre suivant.

Contestant le caractère réel et sérieux de la rupture, Mme [P] a, le 23 janvier 2017, saisi le conseil des prud'hommes de Marseille.

Par jugement du 14 juin 2018, le conseil statuant en sa formation de départage a :

- dit que le licenciement de [W] [P] est dépourvu de cause réelle et sérieuse,

- condamné la société Bahia à verser à [W] [P] la somme de 15 000 euros à titre de dommages et intérêts pour licenciement dépourvu de cause réelle et sérieuse,

- dit que cette somme portera intérêt au taux légal à compter du présent jugement, et ce jusqu'à parfait paiement,

- condamne d'office la société Bahia à rembourser à Pôle Emploi les indemnités de chômage perçues par [W] [P] dans la limite des six premiers mois indemnisés,

- dit que le présent jugement sera notifié, à la diligence du greffe de la juridiction, à Pôle Emploi,

- déboute Mme [P] de sa demande indemnitaire au titre du préjudice moral,

- condamne la société Bahia à verser à [W] [P] la somme de 1 500 euros au titre de l'article 700 du code de procédure civile,

- condamne la société Bahia aux entiers dépens de la présente procédure,

- Dit n'y avoir lieu à exécution provisoire,

- déboute les parties de leurs demandes plus amples ou contraires.

La société Bahia a relevé appel de la décision le 12 juillet 2018.

Aux termes de ses derniers conclusions notifiées par voie électronique le 9 juin 2022, la société Bahia demande à la cour de :

' infirmer le jugement rendu par le conseil des prud'hommes de Marseille le 14 juin 2018 en ce qu'il dit le licenciement injustifié et condamne la SAS Bahia;

En conséquence,

- constater l'existence de recherches de reclassement et par conséquent dire le licenciement fondé,

- constater la suppression de poste et dire justifié le motif du licenciement,

- dire infondées les demandes de Mme [P] et l'en débouter,

- la condamner à titre reconventionnel à payer à la SAS Bahia la somme de 3 000 euros au titre de l'article 700 du code de procédure civile outre les entiers dépens de première instance et d'appel'.

Aux termes de ses dernières conclusions notifiées par voie électronique le 12 janvier 2022, Mme [P] demande à la cour de :

' Constater que le licenciement économique d'un salarié ne peut intervenir lorsque tous les efforts de formation et d'adaptation ont été réalisés et que le reclassement de l'intéressé ne peut être opéré dans l'entreprise ou dans les entreprises du groupe auquel l'entreprise appartient,

Constater, dire et juger que l'employeur, la SAS Bahia, dans le cas d'espèce s'agissant d'un groupe important n'a jamais fait de proposition de reclassement en faveur de la salariée Mme [W] [P], qu'il se contente de produire quelques lettres en réponse de la part d'établissements qui indiquent ne pas embaucher,

Constater que l'employeur, la SAS Bahia, n'a pas respecté dans les courriers qu'il a adressé le fait d'intégrer le CV de la salariée et/ou ses aptitudes et compétences et ce, suivant la jurisprudence constante de la chambre sociale de la cour de cassation,

En conséquence, dire et juger que le licenciement est dépourvu de cause réelle et sérieuse,

Constater, dire et juger sur le point de la réalité de la situation économique que l'employeur qui invoque dans sa lettre de licenciement des motifs économiques ne verse aux débats aucune pièce de nature à les justifier (3 derniers bilans, liasses fiscales déposées au tribunal de commerce, comptes d'exploitation, etc...)

Constater également qu'il n'est pas versé aux débats le registre du personnel permettant de se convaincre de la suppression du poste de la salariée (qui constitue la conséquence d'un licenciement économique)

SUR L'APPEL PRINCIPAL:

Confirmer le jugement dont appel et ce avec toutes ses conséquences de droit sauf à voir porter le montant des condamnations aux sommes telles que sollicitées ci-après,

SUR L'APPEL INDICENT:

Infirmer le jugement dont appel en ce qu'il a limité le quantum des condamnations sollicitées

STATUANT A NOUVEAU :

Condamner l'employeur, la SAS Bahia à régler à la salariée, Mme [W] [P],:

- dommages et intérêts pour licenciement dépourvu de cause réelle et sérieuse 42 000 euros

- dommages et intérêts pour préjudice moral 10 000 euros

- intérêts au taux légal sur l'ensemble des condamnations à intervenir, à compter de la demande en justice

- dépens et article 700 du code de procédure civile 3 000 euros'.

Pour l'exposé plus détaillé des prétentions et moyens des parties, il sera renvoyé, conformément à l'article 455 du code de procédure civile, aux conclusions des parties.

MOTIFS DE LA DECISION

A titre liminaire, la cour rappelle qu'en application des dispositions de l'article 954 du code de procédure civile « la cour ne statue que sur les prétentions énoncées au dispositif » et que les 'dire et juger' et les 'constater' ne sont pas des prétentions en ce que ces demandes ne confèrent pas de droit à la partie qui les requiert hormis les cas prévus par la loi ; en conséquence, la cour ne statuera pas sur celles-ci, qui ne sont en réalité que le rappel des moyens invoqués.

Sur le bien fondé du licenciement

La lettre du 2 septembre 2016 énonce, à titre de motif de licenciement, ce qui suit :

'Suivant nos échanges lors de cet entretien, nous vous avons exposé les raisons de ce licenciement justifié par les faits suivants:

1) Les motifs, éléments matériels et originels :

- baisse d'activité

- perte de chiffre d'affaires conséquente sur les 8 premiers mois de l'année 2016

- concurrence accrue dans notre secteur d'activité

- forte dégradation de trésorerie

- obligation de remise aux normes qui entraînerait un financement trop important

2) en quoi ces motifs entraînent la nécessité de procéder au licenciement:

- difficulté de trésorerie

- découverts bancaires constant

- retard de paiement des charges sociales

- retard de paiement des loyers

- retard de paiement des prestations des tiers

- retard de paiement des taxes diverses

- nécessité de pérenniser et de sauvegarder les emplois restants

- obligation de sécuriser et mettre aux normes l'établissement avant fermeture administrative.

Ces motifs nous conduisent à supprimer votre poste au sein de l'entreprise.

Par ailleurs, nous avons recherché toutes les possibilités de reclassement et les différents aménagements possibles pour vous offrir un emploi de reclassement.

Dans le respect de mes obligations en matière de reclassement, nous avons sollicité un certain nombre d'entreprises dans le même secteur. Aucune de ces entreprises n'a donné de suite favorable.

Dans ces conditions, nous n'avons donc pas d'autre solution que de prononcer votre licenciement pour motif économique.'

Pour soutenir que le licenciement est dépourvu de cause réelle et sérieuse, la salariée invoque l'absence de preuve du motif économique, le non respect par l'employeur de son obligation de reclassement au sein du groupe Adonis dont la société faisait partie, et enfin le fait que les courriers adressés à quelques entreprises n'intégraient pas son curriculum vitae, ni ses aptitudes et compétences.

La société soutient que la réalité du motif économique ressort des documents comptables qu'elle produit et n'était pas contestée en première instance.

Elle indique avoir, conformément aux exigences légales, procédé à des recherches de postes auprès de structures dont l'organisation, l'activité et le lieu d'exploitation permettaient la permutabilité de la salariée dans le groupe.

Elle considère qu'il n'existe pas de groupe fondé sur la seule existence de dirigeant commun.

1) Sur le motif économique

L'article L.1233-3 du code du travail, dans sa rédaction applicable au litige, dispose que constitue un licenciement pour motif économique le licenciement effectué par un employeur pour un ou plusieurs motifs non inhérents à la personne du salarié résultant d'une suppression ou transformation d'emploi ou d'une modification, refusée par le salarié, d'un élément essentiel du contrat de travail, consécutives notamment à des difficultés économiques ou à des mutations technologiques.

Le licenciement pour motif économique est dépourvu de toute cause réelle et sérieuse si la réalité des difficultés économiques à l'origine de la suppression d'emploi n'est pas établie.

En l'espèce, comme justement relevé par le juge départiteur, la réalité du motif économique ressort des pièces produites par la société, à savoir des bilans comptables déficitaires sur les exercices 2013, 2014 et 2015, des pièces comptables faisant état d'une dette de 991 643 euros au 7 septembre 2016 et du registre du personnel.

En conséquence, la réalité du motif économique et son incidence sur l'emploi de la salariée, à savoir la suppression de celui-ci, sont bien établies.

2) Sur le reclassement

En application de l'article L.1233-4 du code du travail, dans sa version applicable au litige, soit avant l'ordonnance du 22 septembre 2017, l'employeur est tenu avant tout licenciement économique, d'une part, de rechercher toutes les possibilités de reclassement existant dans le groupe dont il relève, parmi les entreprises dont l'activité, l'organisation ou le lieu d'exploitation permettent d'effectuer la permutation de tout ou partie du personnel, d'autre part, de proposer ensuite aux salariés dont le licenciement est envisagé tous les emplois disponibles de la même catégorie ou, à défaut, d'une catégorie inférieure.

La notion de groupe est plus large que celle admise à partir du 23 septembre 2017, date d'application de l'ordonnance susvisée, désignant le seul groupe formé par une entreprise appelée entreprise dominante et les entreprises qu'elle contrôle dans les conditions définies aux articles L.233-1 et suivants du code de commerce.

Le licenciement d'un salarié ne peut être légitimement prononcé que si l'employeur a préalablement satisfait à son obligation générale de reclassement. A défaut il prive donc le licenciement de cause réelle et sérieuse.

L'obligation de reclassement étant individuelle à chaque salarié, l'employeur est tenu de rechercher, pour chacun des salariés dont le licenciement est envisagé, en considération de sa situation particulière, avant la notification du licenciement, toutes les possibilités de reclassement envisageables au sein de l'entreprise, et il lui appartient de justifier, par des éléments objectifs, des recherches qu'il a effectuées en ce sens et de l'impossibilité dans laquelle il s'est trouvé de procéder au reclassement du salarié dans un emploi équivalent, de même catégorie, voire de catégorie inférieure.

La charge de la preuve de la configuration du groupe de reclassement n'incombe pas plus à l'employeur qu'au salarié, le juge forme sa conviction à partir des éléments apportés par les deux parties.

En l'espèce, pour justifier avoir satisfait à son obligation de reclassement au niveau du groupe auprès des sociétés répondant aux critères de permutabilité susvisés, la société Bahia produit :

- les mails et courriers postaux de demandes de disponibilité de postes pour le reclassement de Mme [P] adressés le 8 août 2016 par la responsable comptable de la société Bahia à trois sociétés : la SARL Adonis Aix, l'hôtel du [Adresse 8] et la société Adonis [Localité 5],

- les réponses négatives à ces demandes,

- une réponse négative datée du 10 août 2016 de l'hôtel Network Leading Ecxellence, comme suit : 'j'ai contacté les hôtels que ma société représente dans la région (Grand hôtel du midi, 3A hôtels). J'ai le regret de vous informer qu'aucun de ces hôtels ne recherche de personnel'.

Pour justifier que la société Bahia fait partie d'un groupe Adonis, et aurait dû élargir ses recherches à l'ensemble des sociétés de ce groupe, la salariée produit :

- une délégation de pouvoir donnée par M. [D], gérant de la société Bahia, à M. [S], 'directeur d'exploitation du groupe', pour représenter la société Bahia dans l'entretien de rupture conventionnelle daté de juillet 2016,

- un document manuscrit de projet de rupture conventionnelle daté du 20 juillet 2016 signé par [K] [S], ainsi qu'un mail de celui-ci, directeur d'exploitation Adonis, à propos de ce projet,

- le guide pratique de l'automobiliste, Petit Futé 2014 indiquant à propos de l'hôtel Montgrand, 'ce petit hôtel du groupe Adonis (qui possède aussi l'hôtel du Palais, tout proche)',

- une capture d'écran internet réalisée le 10 janvier 2022 sur la page des Hôtels Fédérés mentionnant : 13 hôtels dans 'la chaîne des hôtels Adonis', l'hôtel Montgrand dans la chaîne des hôtels Les Collectionneurs, 3 hôtels pour le groupe hôtelier [D],

- une capture d'écran de la liste des hôtels partenaires Upcadhoc réalisée le 10 janvier 2022 indiquant Enseigne Groupe Hôtelier [D] renvoyant à une liste d'une vingtaine d'hôtels Adonis,

- une capture d'écran réalisée le 10 janvier 2022 du site Hôtels 75, site de réservation d'hôtels à Paris faisant apparaître notamment l'hôtel Montgrand et l'hôtel du Palais.

La cour observe qu'au delà d'un dirigeant commun, les éléments et pièces produits par chacune des parties ne permettent pas de mettre en avant l'existence de liens capitalistiques et financiers entre la société Bahia et le groupe Adonis.

Le fait que le nom et le logo du groupe Adonis soient mentionnés dans la signature informatique de la responsable comptable de la société Bahia à côté du groupe [D] comme suit

'Groupe hôtelier [D],

la chaîne volontaire au service de l'hôtelier

Adonis Hôtels et Résidences

Vos hôtels de charme et résidences de tourisme à taille humaine en France'

ne suffit pas plus à démontrer de lien de telle nature entre le groupe [D] et Adonis.

L'appelante indique que le groupe hôtelier [D] ne fait que commercialiser des hôtels indépendants et fédérer des établissements adhérents indépendants.

Pour autant, c'est une réalité qu'elle a procédé à des recherches de reclassement au sein de sociétés du groupe Adonis, sans indiquer, ni soutenir qu'il se soit agi de recherches de reclassement externes. Elle évoque elle-même un groupe, non seulement dans ses conclusions mais aussi dans ses courriers de recherches de reclassement.

Il y a en conséquence lieu de considérer que l'entreprise faisait partie d'un groupe, pris dans sa définition large, antérieure à l'ordonnance du 22 septembre 2017.

La société Bahia soutient avoir identifié dans ce groupe les entreprises dont l'activité (hôtels), l'organisation ou le lieu d'exploitation ([Localité 7], [Localité 4] et [Localité 5]) permettaient d'effectuer la permutation de tout ou partie du personnel et en avoir relevé trois auprès desquelles elle a effectué des demandes de reclassement de Mme [P].

La cour relève que les pièces 13 et 14 produites par la salariée concernant les hôtels exploités par Adonis datent de janvier 2022 et ne peuvent servir à établir la réalité du groupe à la date du licenciement (2 septembre 2016).

Pour autant, la cour retient qu'en ne produisant pas de pièce sur la consistance et la réalité du groupe Adonis et du groupe [D] à cette date, l'employeur ne met pas le juge en mesure de vérifier qu'il s'est livré à une recherche loyale et sérieuse de postes disponibles dans le groupe correspondant aux critères de permutabilité susvisés.

C'est donc à bon droit que le premier juge a considéré que l'employeur n'avait pas satisfait de façon loyale et sérieuse à son obligation de reclassement.

En conséquence, le jugement est confirmé en ce qu'il a dit le licenciement dépourvu de cause réelle et sérieuse sans qu'il soit besoin d'examiner les autres moyens.

Sur les conséquences financières

- sur les dommages et intérêts pour licenciement sans cause réelle et sérieuse

La cour rappelle en premier lieu que les dommages et intérêts judiciaires sont la contrepartie financière accordée au salarié quand la juridiction prud'homale constate que le licenciement est abusif ou dépourvu de cause réelle et sérieuse. Ils s'ajoutent aux indemnités de licenciement qui ont été versées dans le cadre du solde de tout compte.

Dès lors, il n'y a pas lieu d'infirmer le jugement pour avoir condamné la société au paiement d'une somme qualifiée de dommages et intérêts comme le soutient cette dernière.

En considération des éléments versés par Mme [P] sur son préjudice, de son ancienneté de 5 ans dans l'entreprise occupant moins de 11 salariés, du montant de son salaire moyen brut mensuel ( 1 972,66 euros) et de sa situation professionnelle après la rupture (attestation Pôle Emploi), la cour accorde à la salariée la somme de 10 000 euros.

- sur la demande de dommages et intérêts pour préjudice moral

Pour justifier sa demande de dommages et intérêts hauteur de 10 000 euros, Mme [P] indique avoir souffert de la rupture non justifiée de son contrat de travail.

Les dommages et intérêts versés au titre du licenciement sans cause réelle et sérieuse indemnisent le préjudice résultant de la perte abusive d'emploi dont le préjudice moral fait partie.

Faute pour la salariée d'établir un préjudice distinct, la demande doit en conséquence être rejetée et le jugement confirmé.

Sur le remboursement des indemnités à Pôle Emploi

En application de l'article L.1235-5 du code du travail, dans sa version applicable au litige, ne sont pas applicables au licenciement d'un salarié opéré dans une entreprise employant habituellement moins de 11 salariés, les dispositions relatives au remboursement des indemnités de chômage.

Au vu de l'effectif de la société Bahia, il convient par conséquent d'infirmer le jugement qui avait condamné celle-ci à ce titre.

Sur les autres demandes

Il y a lieu de confirmer le jugement sur les dispositions relatives aux intérêts au taux légal.

Les demandes faites au titre de l'article 700 du code de procédure civile en appel doivent être rejetées.

Les dépens de première instance et d'appel sont supportés par la société Bahia.

PAR CES MOTIFS

La Cour,

Statuant par arrêt contradictoire, par mise à disposition au greffe, les parties en ayant été préalablement avisées dans les conditions prévues à l'article 450 du code de procédure civile, en matière prud'homale,

Confirme le jugement entrepris sauf en ses dispositions relatives aux dommages et intérêts pour licenciement sans cause réelle et sérieuse et au remboursement des indemnités de chômage à Pôle Emploi,

Statuant à nouveau des chefs infirmés et Y ajoutant:

Condamne la société Bahia à verser à Mme [W] [P] la somme de 10 000 euros à titre de dommages et intérêts pour licenciement sans cause réelle et sérieuse,

Dit n'y avoir lieu à ordonner le remboursement des indemnités de chômage à Pôle Emploi

Rejette les autres demandes

Condamne la société Bahia aux dépens d'instance et d'appel.

LE GREFFIERPour Mme MARTIN empéchée,

Mme De REVEL en ayant délibéré


Synthèse
Tribunal : Cour d'appel d'Aix-en-Provence
Formation : Chambre 4-3
Numéro d'arrêt : 18/11701
Date de la décision : 16/09/2022

Origine de la décision
Date de l'import : 27/03/2024
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.appel;arret;2022-09-16;18.11701 ?
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