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09/09/2022 | FRANCE | N°18/12113

France | France, Cour d'appel d'Aix-en-Provence, Chambre 4-3, 09 septembre 2022, 18/12113


COUR D'APPEL D'AIX-EN-PROVENCE

Chambre 4-3



ARRÊT AU FOND



DU 09 SEPTEMBRE 2022



N°2022/173



RG 18/12113

N° Portalis DBVB-V-B7C-BCZWW







Organisme URSSAF PACA





C/



[P] [B]



















Copie exécutoire délivrée

le 9 Septembre 2022 à :



- Me Velen SOOBEN, avocat au barreau de MARSEILLE



- Me Mickael BENAVI, avocat au barreau de MARSEILLE



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Décision déférée à la Cour :



Jugement du Conseil de Prud'hommes - Formation paritaire de MARSEILLE en date du 27 Juin 2018 enregistré au répertoire général sous le n° F 16/02149.







APPELANTE



Organisme URSSAF PACA, demeurant [Adresse 1]



représentée par M...

COUR D'APPEL D'AIX-EN-PROVENCE

Chambre 4-3

ARRÊT AU FOND

DU 09 SEPTEMBRE 2022

N°2022/173

RG 18/12113

N° Portalis DBVB-V-B7C-BCZWW

Organisme URSSAF PACA

C/

[P] [B]

Copie exécutoire délivrée

le 9 Septembre 2022 à :

- Me Velen SOOBEN, avocat au barreau de MARSEILLE

- Me Mickael BENAVI, avocat au barreau de MARSEILLE

Décision déférée à la Cour :

Jugement du Conseil de Prud'hommes - Formation paritaire de MARSEILLE en date du 27 Juin 2018 enregistré au répertoire général sous le n° F 16/02149.

APPELANTE

Organisme URSSAF PACA, demeurant [Adresse 1]

représentée par Me Velen SOOBEN de la SELARL PIOS AVOCATS, avocat au barreau de MARSEILLE

INTIME

Monsieur [P] [B], demeurant [Adresse 3]

représenté par Me Mickael BENAVI, avocat au barreau de MARSEILLE substitué par Me Pierre MICHOTTE, avocat au barreau de MARSEILLE

*-*-*-*-*

COMPOSITION DE LA COUR

En application des dispositions des articles 804 et 805 du code de procédure civile, l'affaire a été débattue le 07 Juin 2022 en audience publique, les avocats ne s'y étant pas opposés, devant Madame Pascale MARTIN, Président de Chambre, et Madame Estelle DE REVEL, Conseiller, chargées du rapport.

Madame Pascale MARTIN, Président de Chambre, a fait un rapport oral à l'audience, avant les plaidoiries.

Ces magistrats ont rendu compte des plaidoiries dans le délibéré de la cour, composée de :

Madame Pascale MARTIN, Président de Chambre

Madame Ghislaine POIRINE, Conseiller faisant fonction de Président

Madame Estelle DE REVEL, Conseiller

Greffier lors des débats : Madame Florence ALLEMANN-FAGNI.

Les parties ont été avisées que le prononcé de la décision aurait lieu par mise à disposition au greffe le 09 Septembre 2022.

ARRÊT

CONTRADICTOIRE

Prononcé par mise à disposition au greffe le 09 Septembre 2022.

Signé par Madame Pascale MARTIN, Président de Chambre et Madame Florence ALLEMANN-FAGNI, greffier auquel la minute de la décision a été remise par le magistrat signataire.

* * * * * * * * * *

FAITS- PROCEDURE-PRETENTIONS DES PARTIES

Le 1er novembre 1976, M. [P] [B] est entré au service de l'URSSAF des Alpes-Maritimes par contrat à durée indéterminée à temps complet.

Le 25 mars 2013, dans le cadre d'une nouvelle organisation et de la création de l'URSSAF PACA, M. [B] a été informé que son emploi serait désormais intitulé « Vérificateur spécialisé ».

Le 16 septembre 2013, le salarié a accepté un poste de vérificateur de l'agent comptable.

Par lettre recommandée du 1er novembre 2015, M. [B] sollicitait auprès de l'URSSAF la régularisation du versement d'une prime de mobilité fonctionnelle.

En réponse, le 17 novembre 2015, l'URSSAF indiquait ne pas pouvoir accéder à sa demande en lui rappelant les conditions d'application d'attribution de la prime fixée par le protocole d'accord national du 30 décembre 2013.

Le 26 août 2016, le salarié a saisi le conseil de prud'hommes de Marseille d'une demande de rappel de prime de mobilité fonctionnelle.

Le 27 juin 2018, le conseil de prud'hommes a rendu son jugement en ces termes :

Dit et juge que l'URSSAF PACA n'a pas respecté l'accord du 30 décembre 2013.

Dit et juge qu'il existe bien une inégalité de traitement concernant M. [B].

Dit que le salaire moyen de M. [B] s'élève à la somme de 2 587,64€ brut.

Par suite,

Condamne l'URSSAF PACA à verser à M. [B] les sommes suivantes :

2 542,63€ au titre du rappel de la prime de mobilité fonctionnelle

254,20€ de congés payés afférents au rappel de la prime de mobililité fonctionnelle

5 000€ à titre de dommages et intérêts pour différence de traitement.

Précise que les créances de nature salariale produiront intérêt au taux légal à compter de la demande en justice.

Ordonne l'exécution provisoire du présent jugement dans son intégralité.

Dit qu'à défaut de réglement spontané de condamnations prononcées par la présente décision et qu'en cas d'exécution par voie extrajudiciaire, les sommes retenues par huissier instrumentaire en application des dispositions de l'article 10 du décret du 8 mars 2001, portant modification du décret du 12 décembre 1996, devront être supportées par l'URSSAF PACA, en sus de l'indemnité mise à leur charge sur le fondement des dispositions de l'article 700 du code de procédure civile.

Condamne l'URSSAF PACA au paiement de la somme de 1 500€ sur le fondement de l'article 700 du code de procédure civile, distrait au profit de MB AVOCATS.

Déboute M. [B] du surplus de ses demandes.

Déboute l'URSSAF PACA de sa demande reconventionnelle.

Condamne l'URSSAF PACA aux entiers dépens.

Le 18 juillet 2018, le conseil de l'URSSAF PACA a interjeté appel du jugement.

Aux termes de ses dernières conclusions, transmises par voie électronique le 18 octobre 2018, l'URSSAF PACA demande à la cour de :

«REFORMER en tous points le jugement rendu le 27 juin 2018 par le Conseil de Prud'hommes de Marseille

En conséquence,

DIRE ET JUGER que le protocole d'accord du 30 décembre 2013 a pris effet au 1er juin et que celui-ci n'est pas applicable à la situation de Monsieur [P] [B] compte tenu de l'acceptation de l'emploi de Vérificateur Spécialisé le 16 septembre 2013 ;

Si par extraordinaire, le protocole d'accord du 30 décembre 2013 était considéré comme applicable à la situation de Monsieur [P] [B] ;

DIRE ET JUGER qu'il n'existe pas d'évolution importante de la nature del'activité de Monsieur [P] [B] et que les conditions cumulatives d'attribution de la prime de mobilité fonctionnelle ne sont pas réunies en l'espèce ;

DIRE ET JUGER qu'il n'existe pas d'inégalité de traitement entre Monsieur [B] et Madame [V] [H] salariée avec laquelle le demandeur se compare ;

En conséquence,

DEBOUTER Monsieur [P] [B] de sa demande de rappel de prime de mobilité fonctionnelle ;

DEBOUTER Monsieur [P] [B] de sa demande d'indemnisation du chef d'inégalité de traitement

DEBOUTER Monsieur [P] [B] de l'ensemble de ses demandes, fins et conclusions

Subsidiairement, si par extraordinaire, la Cour entrait en voie de condamnation

RAMENER le montant de la prime de mobilité fonctionnelle sur la base du salaire brut normal de l'emploi précédemment occupé par le salarié ;

Reconventionnellement,

CONDAMNER Monsieur [P] [B] à payer à l'URSSAF PACA lasomme de 2.500,00€ en application de l'article 700 du Code de procédure civile ainsi qu'aux entiers dépens de l'instance.»

Aux termes de ses dernières conclusions transmises par voie électronique le 22 mai 2019, M. [B] demande à la cour de :

«CONFIRMER le jugement déféré

Et, statuant à nouveau, de :

CONSTATER la violation de l'accord du 30 décembre 2013

CONSTATER l'absence de versement de la prime de mobilité fonctionnelle

Et par conséquent :

CONDAMNER L'URSSAF PACA aux sommes suivantes :

2 542,63€ au titre du rappel de la prime de mobilité fonctionnelle

254,20€ de congés payés y afférents

5 000€ de dommages et intérêts au titre de la différence de traitement

2 500€ au titre de l'article 700 du CPC

DIRE ET JUGER que le montant des condamnations portera intérêts de droit à compter du jour de l'introduction de la demande en justice avec capitalisation des intérêts

CONDAMNER l'employeur aux dépens

DIRE ET JUGER que la moyenne des salaires s'élève à la somme totale de 2 587,64€.»

Pour l'exposé plus détaillé des prétentions et moyens des parties, il sera renvoyé, conformément à l'article 455 du code de procédure civile, aux conclusions des parties.

MOTIFS DE L'ARRÊT

A titre liminaire, la cour rappelle qu'en application des dispositions de l'article 954 du code de procédure civile , elle ne statue que sur les prétentions énoncées au dispositif et que les «dire et juger» et les «constater» ainsi que les «donner acte» ne sont pas des prétentions en ce que ces demandes ne confèrent pas de droit à la partie qui les requiert hormis les cas prévus par la loi; en conséquence, la cour ne statuera pas sur celles-ci, qui ne sont en réalité que le rappel des moyens invoqués.

Sur la prime de mobilité fonctionnelle

L'URSSAF expose deux arguments principaux :

1- le protocole d'accord du 30 décembre 2013 n'est pas applicable en raison de sa date d'entrée en vigueur, laquelle est conditionnée par l'agrément ministériel, conformément aux articles L.123-1 et L.123-2 du code de la sécurité sociale, ; or, l'agrément a été reçu le 27 mai 2014 ce qui confère au protocole une prise d'effet au 1er juin 2014.

Elle indique que l'appréciation de l'évolution de l'activité du salarié se faisant après la prise d'effet du protocole soit après le 1er juin 2014, M. [B] occupait avant comme après,le même poste de vérificateur spécialisé qu'il avait accepté le 16 septembre 2013.

2- les conditions d'attribution de la prime de mobilité fonctionnelle ne sont pas réunies, les tâches accomplies par le salarié étant identiques avant et après la régionalisation de l'URSSAF, sans changement d'emploi générique ou de famille professionnelle.

M. [B] soutient que :

- le protocole d'accord du 30 décembre 2013 prévoyait une entrée en vigueur au 1er janvier 2014

sans que l'agrément ministériel n'en soit une condition suspensive,

- son emploi a été modifié dans le cadre de la future création de l'URSSAF PACA,

- il exerçait auparavant les fonctions d' « Expert racine » .

En application des articles L.123-1 et 2 du code de la sécurité sociale, l'accord collectif concerné comme tout dispositif conventionnel applicable aux personnels des organismes de sécurité sociale n'est devenue applicable qu'après avoir reçu l'agrément de l'autorité compétente de l'Etat.

En conséquence, les dispositions du protocole du 30 décembre 2013 n'étaient applicables qu'à compter du 1er juin 2014 et c'est donc à juste titre que le conseil de prud'hommes a considéré la demande de M. [B] recevable puisque formulée pour la première fois le 1er novembre 2015.

L'article 2 du protocole d'accord du 30 décembre 2013 relatif aux garanties conventionnelles apportées dans le cadre de l'évolution des réseaux précise que les situations visées sont les suivantes :

«- mise en commun entre plusieurs organismes d'une mission, d'une fonction ou d'une activité,

- réorganisation structurelle de plusieurs organismes pouvant conduire à la création d'une nouvelle entité juridique,

réalisées dans le cadre de l'évolution des réseaux décidée au plan national, et ayant pour conséquence une évolution importante de la nature de l'activité des personnels concernés, après la prise d'effet du présent protocole d'accord.»

L'article 3-4 de ce protocole modifié par avenant du 29 janvier 2014 prévoit que dans le cadre des situations visées à l'article 2, le salarié, employé ou cadre, qui accepte une mobilité fonctionnelle bénéficie d'une prime dont le montant correspond à :

- un demi-mois du salaire brut normal de l'emploi précédent en cas de changement d'emploi générique,

- un mois de son salaire brut normal de l'emploi précédent en cas de changement de famille professionnelle.

Cette prime est versée en une fois lors de sa prise de fonction.

La cour constate qu'au mois de mars 2013, l'employeur a fait notifier avec le bulletin de salaire du mois, un courrier à M. [B] lui précisant que le libellé de son emploi a été modifié passant de «gestionnaire maîtrise des risques» à «vérificateur spécialisé» mais cette modification résulte uniquement d'une nouvelle nomenclature régionale destinée à faciliter la gestion du logiciel de paie (fusion des bases GRH) , et n'a eu aucune incidence sur les fonctions et attributions de M. [B].

La convocation adressée au salarié pour le 29 mai 2013 mentionne : « dans le cadre de la préparation de la future organisation régionale et conformément au protocole d'accord national du 26 janvier 2010 portant sur l'évolution des réseaux, un entretien d'information et d'orientation est mis en place pour les salariés dont l'emploi est fortement impacté par les évolutions liées à la régionalisation».

Le livret de suivi est produit en pièce n°24 par l'URSSAF et précise, concernant la conséquence de l'organisation régionale sur l'activité actuelle du salarié que «l'expertise et le pilotage du traitement des anomalies de répartition seront effectués sur les sites de l'Urssaf de [Localité 4] et d'[Localité 2]» .

Il est à noter qu'au jour de l'entretien, M. [B] est mentionné comme faisant partie du service «vérification» et occupant l'emploi de «vérificateur spécialisé».

Il résulte de ce document que le salarié avait postulé au service «maîtrise des risques» mais sa candidature n'a pas été retenue et après avoir refusé l'activité de vérification , il a accepté la proposition d'emploi de «vérificateur de l'agent comptable» le 16 septembre 2013 pour une prise de fonction au 1er janvier 2014.

La cour observe que celle-ci est donc intervenue six mois avant l'application du protocole du 30 décembre 2013 et que les relations des parties étaient dès lors régies par le protocole du 26 janvier 2010, lequel ne prévoyait pas de prime à la mobilité fonctionnelle.

En outre, il ne résulte d'aucun document produit par M. [B] que celui-ci ait connu une évolution importante de la nature de son activité, celui-ci ne procédant à aucune description de ses fonctions, le document comparatif produit par l'employeur en pièce n°19, permettant seulement de dire qu'il avait perdu la qualification d'expert [M] soit l'habilitation spécifique sur outil informatique pour la répartition comptable.

En conséquence, la cour constatant que la prime de mobilité n'était pas instituée à la date de prise de fonctions du salarié et que ce dernier ne démontre ni un changement de famille professionnelle ni un changement d'emploi générique ou de métier, dit que M. [B] n'était pas éligible à la perception de la prime et infirme le jugement de ce chef.

Sur l'inégalité de traitement

L'URSSAF soutient que la salariée avec laquelle se compare l'intimé n'était pas placée dans une situation similaire : elle travaillait initialement pour le centre de formalités des entreprises (CFE) à [Localité 4] en qualité de gestionnaire spécialisé recouvrement. Suite à la fermeture du centre, l'employeur a été contraint de lui proposer un changement d'activité de sorte qu'elle est devenue gestionnaire spécialisée Information et Image dans le cadre de l'activité gestion des flux entrants.

M. [B] n'a pas développé cette demande.

C'est à tort que le conseil de prud'hommes a fait droit à la demande de M. [B] sur ce point puisqu'il est avéré que l'employeur a fait bénéficier Mme [H] de cette prime en juin 2015, donc à une date où le protocole d'accord du 30 décembre 2013 était entré en vigueur et suite à un changement d'activité induit par la fermeture du site.

En l'absence d'autre moyen soutenu par l'intimé, il n'est pas démontré que l'employeur a appliqué un traitement différent entre salariés s'agissant de l'indemnité de mobilité.

Dès lors, le jugement doit être infirmé également de ce chef.

Sur les frais et dépens

Le salarié succombant en cause d'appel doit s'acquitter des dépens de la procédure.

Le jugement doit être infirmé dans ses dispositions accessoires notamment relatives à l'article 700 du code de procédure civile mais l'équité commande de ne pas faire droit à la demande de l'appelante.

PAR CES MOTIFS

La Cour,

Statuant par arrêt contradictoire, par mise à disposition au greffe, les parties en ayant été préalablement avisées dans les conditions prévues à l'article 450 du code de procédure civile, en matière prud'homale,

Infirme le jugement déféré en toutes ses dispositions,

Statuant à nouveau et Y ajoutant,

Déboute M. [P] [B] de sa demande de rappel de prime de mobilité fonctionnelle et congés payés afférents, de sa demande de dommages et intérêts pour inégalité de traitement, et de celle relative aux intérêts,

Dit n'y avoir lieu à application de l'article 700 du code de procédure civile,

Condamne M. [B] aux dépens de première instance et d'appel.

LE GREFFIERLE PRESIDENT


Synthèse
Tribunal : Cour d'appel d'Aix-en-Provence
Formation : Chambre 4-3
Numéro d'arrêt : 18/12113
Date de la décision : 09/09/2022

Origine de la décision
Date de l'import : 27/03/2024
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.appel;arret;2022-09-09;18.12113 ?
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