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06/09/2022 | FRANCE | N°19/08693

France | France, Cour d'appel d'Aix-en-Provence, Chambre 1-1, 06 septembre 2022, 19/08693


COUR D'APPEL D'AIX-EN-PROVENCE

Chambre 1-1



ARRÊT AU FOND

DU 06 SEPTEMBRE 2022



N°2022/272













Rôle N° RG 19/08693 - N° Portalis DBVB-V-B7D-BELBB







[R] [B]





C/



[P] [Z]





































Copie exécutoire délivrée le :

à :





Me Bruno BOUCHOUCHA



Me Alain DE

ANGELIS





Décision déférée à la Cour :



Jugement du Tribunal de Grande Instance de TARASCON en date du 21 Décembre 2018 enregistré au répertoire général sous le n° 16/01945.





APPELANT



Monsieur [R] [B]

né le 15 Mai 1960 à [Localité 4] (ÉRYTHRÉE), demeurant [Adresse 1]



représenté par Me Bruno BOUCHOUCHA de la SELARL BSB,...

COUR D'APPEL D'AIX-EN-PROVENCE

Chambre 1-1

ARRÊT AU FOND

DU 06 SEPTEMBRE 2022

N°2022/272

Rôle N° RG 19/08693 - N° Portalis DBVB-V-B7D-BELBB

[R] [B]

C/

[P] [Z]

Copie exécutoire délivrée le :

à :

Me Bruno BOUCHOUCHA

Me Alain DE ANGELIS

Décision déférée à la Cour :

Jugement du Tribunal de Grande Instance de TARASCON en date du 21 Décembre 2018 enregistré au répertoire général sous le n° 16/01945.

APPELANT

Monsieur [R] [B]

né le 15 Mai 1960 à [Localité 4] (ÉRYTHRÉE), demeurant [Adresse 1]

représenté par Me Bruno BOUCHOUCHA de la SELARL BSB, avocat au barreau de TARASCON

INTIME

Monsieur [P] [Z], demeurant [Adresse 2]

représenté par Me Alain DE ANGELIS de la SCP DE ANGELIS-SEMIDEI-VUILLQUEZ-HABART-MELKI-BARDON, avocat au barreau de MARSEILLE substituée par Me Benjamin GERARD, avocat au barreau de MARSEILLE

*-*-*-*-*

COMPOSITION DE LA COUR

En application des dispositions des articles 804 et 805 du code de procédure civile, l'affaire a été débattue le 07 Juin 2022 en audience publique, les avocats ne s'y étant pas opposés, devant Monsieur Olivier BRUE, Président, et Mme Danielle DEMONT, Conseiller.

Monsieur Olivier BRUE, Président, a fait un rapport oral à l'audience, avant les plaidoiries.

Ces magistrats ont rendu compte des plaidoiries dans le délibéré de la cour, composée de :

Monsieur Olivier BRUE, Président

Madame Anne DAMPFHOFFER, Conseiller

Mme Danielle DEMONT, Conseiller

Greffier lors des débats : Mme Agnès SOULIER.

Les parties ont été avisées que le prononcé de la décision aurait lieu par mise à disposition au greffe le 06 Septembre 2022.

ARRÊT

Contradictoire,

Prononcé par mise à disposition au greffe le 06 Septembre 2022.

Signé par Monsieur Olivier BRUE, Président et Mme Agnès SOULIER, greffier auquel la minute de la décision a été remise par le magistrat signataire.

FAITS, PROCÉDURE ET PRÉTENTIONS DES PARTIES :

Vu l'assignation du 15 novembre 2016, par laquelle M. [R] [B] a fait citer Me [P] [Z], devant le tribunal de grande instance de Tarascon.

Vu le jugement rendu le 21 décembre 20218, par cette juridiction, ayant débouté M. [R] [B] de ses demandes et l'ayant condamné à payer à Me [P] [Z] la somme de 500 €, en application de l'article 700 du code de procédure civile, ainsi qu'aux dépens.

Vu la déclaration d'appel du 28 mai 2019, par M. [R] [B].

Vu les conclusions transmises le 20 décembre 2019, par l'appelant.

Il fait valoir que l'avocat ayant été dessaisi du dossier le 16 juillet 2014, son action à son encontre a été intentée dans le délai de la prescription quinquennale.

M. [R] [B] considère que la prescription biennale en matière d'assurance a été interrompue par le courrier recommandé avec avis de réception adressé à la société Pacifica, par son courtier mandataire le 28 septembre 2010. Il estime que la jurisprudence citée par la société de courtage des barreaux, postérieure à l'expiration du délai de prescription n'est pas transposable, dès lors que l'absence de mention des causes d'interruption ne lui a pas causé grief.

Selon lui, à supposer que la théorie des gares principales puisse être appliquée, l'acte n'a jamais été enrôlé auprès du greffe du tribunal de grande instance d'Avignon.

Il souligne avoir souscrit dès l'origine la garantie vol, reprise dans le dernier avenant et avoir transmis à la société Pacifica les relevés d'information du GAN, son précédent assureur.

L'appelant indique sur le préjudice qu'il a exposé des honoraires en pure perte et a perdu une chance sérieuse d'être indemnisé à hauteur de la somme de 45.700 € par Pacifica, en application de son contrat d'assurance (valeur d'achat déduction faite d'une franchise de 500 €).

Vu les conclusions transmises le 30 octobre 2019, par Me [P] [Z].

Il soutient que la perte d'une action par prescription n'est pas en elle-même indemnisable et qu'il doit être démontré, que celle-ci avait des chances, raisonnables de prospérer favorablement.

L'intimé invoque un arrêt rendu le 18 avril 2013, par la deuxième chambre civile de la cour de cassation ayant jugé que l'assureur ne pouvait valablement opposer la prescription biennale à l'assuré que dans la mesure où le contrat précise les causes ordinaires d'interruption de la prescription et que tel n'étant pas le cas en l'espèce, où il convient d'appliquer la prescription de 5 ans qui expirait le 24 novembre 2014.

Me [P] [Z] observe qu'à cette date, il n'était plus en charge du dossier de M. [R] [B], pour l'avoir transmis à son confrère Me [X] le 16 janvier 2014 et qu'aucune faute ne peut lui être reprochée.

Il expose sur le préjudice allégué que M. [R] [B] a reconnu dans le cadre de l'enquête diligentée par la compagnie d'assurances avoir omis de déclarer plusieurs sinistres intervenus dans les trois années ayant précédé la souscription du contrat, et ne pas avoir transmis tous les relevés d'information du GAN, en vue d'obtenir un coefficient de cotisation de 0,5, ainsi qu'un avenant prévoyant la prise en charge de la décote quelques jours avant le sinistre.

L'intimé indique avoir facturé à son client des honoraires pour la rédaction de l'assignation et réclamé une provision, alors que M. [R] [B] l'a déssaisi au profit d'un autre conseil.

Vu l'ordonnance de clôture rendue le 10 mai 2022.

SUR CE

Le 24 novembre 2009, un incendie a endommagé le véhicule Mercédès E220, ainsi qu'une partie de l'habitation principale de M. [R] [B].

Le 19 mai 2010, la compagnie d'assurances Pacifica, à l'enseigne Crédit Agricole Assurances, a notifié par courrier recommandé avec accusé de réception à Monsieur [B], la nullité de son contrat d'assurance pour fausse déclaration intentionnelle lors de sa souscription des sinistres subis sur les trois années précédentes et son refus de prise en charge du sinistre.

M. [R] [B] expose avoir donné mandat à Me [P] [Z], aux fins d'engager une action en justice à l'encontre de la société Pacifica.

Il précise que l'huissier de justice chargé de délivrer l'assignation à l'établissement de cette société situé en [Localité 3] a refusé de recevoir l'acte, en indiquant qu'il devait être adressé au siège de la société à [Localité 5]. L'appelant ajoute ignorer si l'acte a été délivré, mais être certain qu'aucune assignation n'a été délivrée auprès du tribunal de Paris et qu'aucun enrôlement n' y est intervenu.

M. [R] [B] indique avoir appris par son nouveau conseil, désigné au début de l'année 2014 que l'action serait prescrite depuis le mois de septembre 2012.

Il indique que la société de courtage des barreaux, saisie à sa demande par le Bâtonnier de l'ordre des avocats d'[Localité 3] a rejeté sa réclamation, au motif qu'aucun manquement ne peut être reproché à Maître [Z], dans la mesure où, lors de son dessaisissement au profit de son nouveau conseil, la prescription n'était pas acquise car la prescription biennale classique en matière d'assurance ne lui était pas opposable.

Reprochant à son ancien conseil de ne pas avoir assigné l'assureur Pacifica à son agence d'[Localité 3] ou son siège parisien et de ne pas avoir enrôlé l'affaire dans le délai de la prescription biennale applicable en matière d'assurance, M. [R] [B] demande, sur le fondement des anciens articles 1147 et suivants du code civil, désormais codifiés sous les articles 1231 et suivants du code civil sa condamnation à lui payer la somme de 1.196 €, au titre des honoraires exposés et celle de 45.700 €, au titre de sa perte de chance d'être indemnisé par la société Pacifica.

L'article R112-1 du Code des assurances dispose dans sa version applicable à la date de la souscription du contrat que « les polices d'assurances (') doivent rappeler les dispositions du titre I et II du Livre 1er de la partie législative concernant (') la prescription des actions dérivant du contrat d'assurances ».

La cour de cassation exige que le contrat d'assurance précise les causes ordinaires d'interruption de la prescription, sous peine d'inopposabilité de la prescription biennale prévue par l'article L114-1 du code des assurances, ce, sans que soit exigée la preuve de l'existence d'un grief, dès lors qu'il ne s'agit pas d'une nullité.

Il apparaît, au vu de l'extrait des conditions générales du contrat de la société Pacifica que celles-ci évoquent en leur page 27, les causes ordinaires de la prescription, mais sans les énumérer, ainsi que les causes prévues par l'article L11-2 du code des assurances.

Dans ces conditions, la prescription biennale ne pouvait être opposée à l'assuré qui pouvait agir à l'encontre de l'assureur dans le délai de la prescription de 5 ans prévue par l'article 2224 du code civil.

Il n'est pas contesté que Me [P] [Z] a transmis son dossier à son confrère le 16 janvier 2014, alors que le délai de prescription n'a expiré que le 25 novembre 2014.

Aucune faute ne peut donc être reprochée pour défaut de mise en oeuvre d'une action judiciaire dans le délai de prescription.

Par ailleurs, le client d'un avocat ne peut engager la responsabilité de ce dernier qu'à charge pour lui de démontrer un préjudice certain et direct résultant du fait qu'il bénéficiait de chances raisonnables de voir prospérer son action.

Dans son courrier du 19 mai 2010 portant refus de prise en charge du sinistre, la société Pacifica :

- confirme à M. [R] [B] que « suite aux informations que nous avons obtenues sur vos antécédents d'assurances, il ressort que lors de la souscription du contrat, vous avez volontairement omis de déclarer les sinistres subis au cousr des trois années précédant la souscription de votre contrat chez Pacifica »

- lui rappelle que conformément à l'article L 113-8 du code des assurances, le contrat d'assurance est nul en cas de réticence ou de fausses déclaration intentionnelle de la part de l'assuré pour cette réticence de déclaration qui change l'objet du risque ou en diminue l'opinion par l'assureur, alors même que le risque omis ou dénaturé par l'assuré a été sans influence sur le sinistre.

Dans son attestation établie le 19 mars 2010, dans le cadre de l'enqu^te diligentée par la compagnie d'assurance, M. [R] [B] reconnaît avoir omis de déclarer à la société Pacifica un sinistre corporel responsable du 6 mai 2007, ainsi qu'un sinistre matériel non responsable survenu le 16 juillet 2007.

Il n'aurait ainsi pas pu bénéficier comme il l'affirme d'un coefficient de 0,5 sur son contrat d'assurance automobile avec de telles informations, ni obtenir la moindre indemnisation de la part de l'assureur, an regard du texte ci-dessus rappelé.

Dans ces conditions, le lien de causalité entre la faute, en l'espèce écartée et le préjudice allégué n'est pas établi.

Les demandes d'indemnisation au titre de la perte de chance sont, en conséquence, rejetées.

Dès lors qu'il est constant que Me [P] [Z] a étudié le dossier de M. [R] [B] et rédigé une assignation, il n'y a pas lieu de faire droit à la demande remboursement d'honoraires formée par ce dernier.

Le jugement est confirmé.

Il y a lieu de faire application de l'article 700 du code de procédure civile.

La partie perdante est condamnée aux dépens, conformément aux dispositions de l'article 696 du code de procédure civile.

PAR CES MOTIFS

La Cour, statuant publiquement, par arrêt contradictoire et en dernier ressort,

Confirme le jugement déféré en toutes ses dispositions,

Y ajoutant,

Condamne M. [R] [B] à payer à Me [P] [Z] , la somme de 2500 €, en application de l'article 700 du Code de procédure civile,

Condamne M. [R] [B] aux dépens d'appel qui seront recouvrés conformément aux dispositions de l'article 699 du code de procédure civile.

LE GREFFIERLE PRÉSIDENT


Synthèse
Tribunal : Cour d'appel d'Aix-en-Provence
Formation : Chambre 1-1
Numéro d'arrêt : 19/08693
Date de la décision : 06/09/2022

Origine de la décision
Date de l'import : 27/03/2024
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.appel;arret;2022-09-06;19.08693 ?
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