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01/09/2022 | FRANCE | N°21/06149

France | France, Cour d'appel d'Aix-en-Provence, Chambre 1-2, 01 septembre 2022, 21/06149


COUR D'APPEL D'AIX-EN-PROVENCE

Chambre 1-2



ARRÊT

DU 01 SEPTEMBRE 2022



N° 2022/535













Rôle N° RG 21/06149 - N° Portalis DBVB-V-B7F-BHK7P







[W] [O] épouse veuve [L]

[Z] [O]

[G] [O]





C/



S.A.R.L. MARSEILLE LE BELVEDERE





















Copie exécutoire délivrée

le :

à :



Me Karine TOLLINCHI





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Décision déférée à la Cour :



Arrêt de cassation rendu par la Cour de Cassation, 1ère chambre, en date du 22 mai 2019 enregistré sous le n° 480 F-D suite à l'arrêt rendu par la 1ère chambre C de la Cour d'appel d'AIX EN PROVENCE le 14 décembre 2017 enregistré au répertoire général sous le n° 16/02844....

COUR D'APPEL D'AIX-EN-PROVENCE

Chambre 1-2

ARRÊT

DU 01 SEPTEMBRE 2022

N° 2022/535

Rôle N° RG 21/06149 - N° Portalis DBVB-V-B7F-BHK7P

[W] [O] épouse veuve [L]

[Z] [O]

[G] [O]

C/

S.A.R.L. MARSEILLE LE BELVEDERE

Copie exécutoire délivrée

le :

à :

Me Karine TOLLINCHI

Décision déférée à la Cour :

Arrêt de cassation rendu par la Cour de Cassation, 1ère chambre, en date du 22 mai 2019 enregistré sous le n° 480 F-D suite à l'arrêt rendu par la 1ère chambre C de la Cour d'appel d'AIX EN PROVENCE le 14 décembre 2017 enregistré au répertoire général sous le n° 16/02844.

APPELANTS

Madame [W] [O] veuve [L]

agissant en sa qualité d'héritière de Madame [B] [O], décédée.

née le 14 mai 1943 à [Localité 4] (06), demeurant [Adresse 5]

Monsieur [Z] [O]

agissant en sa qualité d'héritier de Madame [B] [O], décédée.

né le 02 août 1954 à [Localité 4] (06), demeurant [Adresse 2]

Madame [G] [O]

agissant en sa qualité d'héritière de Madame [B] [O], décédée.

née le 21 août 1949 à [Localité 4] (06), demeurant [Adresse 3]

représentés par Me Karine TOLLINCHI de la SCP TOLLINCHI PERRET VIGNERON, avocat au barreau D'AIX-EN-PROVENCE et assistés de Me Henri ROBERTY, avocat au barreau de GRASSE

INTIMEE

S.A.R.L. MARSEILLE LE BELVEDERE

prise en la personne de son représentant légal en exercice,

dont le siège social est situé [Adresse 1]

défaillante

*-*-*-*-*

COMPOSITION DE LA COUR

L'affaire a été débattue le 31 Mai 2022 en audience publique devant la cour composée de :

M. Gilles PACAUD, Président rapporteur

Mme Catherine OUVREL, Conseillère

Mme Angélique NETO, Conseillère

qui en ont délibéré.

Greffier lors des débats : Mme Julie DESHAYE.

Les parties ont été avisées que le prononcé de la décision aurait lieu par mise à disposition au greffe le 01 septembre 2022.

ARRÊT

Réputé contradictoire,

Prononcé par mise à disposition au greffe le 01 septembre 2022,

Signé par M. Gilles PACAUD, Président et Mme Julie DESHAYE, greffière auquel la minute de la décision a été remise par le magistrat signataire.

***

EXPOSÉ DU LITIGE

Madame [B] [O], placée sous la tutelle de sa soeur, Mme [G] [O], a, suivant contrat de séjour signé le 28 mai 2010, été admise dans une maison de retraite exploitée par la société à responsabilité limitée (SARL) Marseille Le Belvédère.

Par acte d'huissier en date du 27 mai 2016, cette dernière a fait assigner Mme [B] [O], représentée par sa tutrice, devant le juge des référés du tribunal de grande instance de Marseille aux fins de l'entendre condamner à lui verser une somme provisionnelle de 102 785,05 euros correspondant à plusieurs impayés d'échéances échues sur la période du 1er juin 2010 au 31 mars 2016.

Par ordonnance en date du 16 novembre 2016, ce magistrat a :

- condamné Mme [B] [O], représentée par sa tutrice, Mme [G] [O], à payer à la SARL Marseille Le Belvédère une provision de 102 785,05 euros en deniers ou quittances en fonction des règlements effectués par le Conseil général des Alpes Maritimes ;

- dit qu'une copie de l'ordonnance serait transmise au juge des tutelles près le tribunal d'instance d'Antibes ;

- dit n'y avoir lieu de faire application de l'article 700 du code de procédure civile ;

- laissé les dépens à la charge de Mme [B] [O].

Par arrêt en date du 14 décembre 2017, la cour d'appel de céans a :

- confirmé l'ordonnance déférée ;

- dit qu'une copie de sa décision serait transmise au juge des tutelles près le tribunal d'Antibes ;

- condamné Mme [B] [O], représentée par sa tutrice, Mme [G] [O], à payer à la SARL Marseille Le Belvédère la somme de 1 500 euros sur le fondement de l'article 700 du code de procédure civile ;

- débouté Mme [B] [O], représentée par sa tutrice, Mme [G] [O], de ce chef de sa demande ;

- condamné Mme [B] [O], représentée par sa tutrice, Mme [G] [O], aux entiers dépens de l'instance d'appel, dont distraction au profit de la SELARL Ariane Benchetrit.

Par arrêt en date du 22 mai 2019, la Cour de cassation a :

- cassé et annulé, en toutes ses dispositions, l'arrêt rendu le 14 décembre 2017, entre les parties, par la cour d'appel d'Aix-en-Provence ;

- remis, en conséquence, la cause et les parties dans l'état où elles se trouvaient avant ledit arrêt ;

- pour être fait droit, les a renvoyés devant la cour d'appel d'Aix-en-Provence autrement composée ;

- condamné Mme [B] [O], représentée par sa tutrice, Mme [G] [O], aux dépens ;

- rejeté la demande fondée sur les dispositions de l'article 700 du code de procédure civile.

La haute juridiction a considéré qu'en retenant pour accueillir la demande, que l'examen global du décompte révèlait que de nombreux paiements, couvrant environ 26 mois, effectués du 1er novembre 2010 au 26 octobre 2015, avaient été déduits de la créance et que le point de départ de la prescription s'était trouvé reporté à l'année 2012, de sorte que la prescription n'était pas acquise, sans préciser les mensualités concernées par ces paiement et dans quelle proportion, la cour d'appel qui ne l'avait pas mise en mesure d'exercer son contrôle sur le raisonnement qu'elle avait adopté, a statué par des motifs impropres à caractériser l'existence d'une obligation non sérieusement contestable, privant ainsi sa décision de base légale.

Selon déclaration reçue au greffe le 23 avril 2021, M. [Z] [O], Mme [G] [O] et Mme [W] [O] veuve [L], héritiers de feue Mme [B] [O], ont saisi la cour d'appel d'Aix-en-Provence en sa qualité de cour de renvoi.

Par dernières conclusions transmises le 21 juin 2021, auxquelles il est renvoyé pour plus ample exposé des prétentions et moyens, ils demandent à la cour de :

- recevoir M. [Z] [O], Mme [G] [O] et Mme [W] [O] veuve [L] en leur intervention volontaire en leur qualité d'héritier de Madame [B] [O], décédée ;

- les déclarer recevables, ès qualités, en leur déclaration de saisine de la cour d'Aix en

Provence, désignée comme cour de renvoi, et en leur appel ;

- y faisant droit, réformer l'ordonnance déférée et statuant à nouveau :

' déclarer prescrite la créance de la SARL Marseille Le Belvédère ;

' déclarer, en tout état de cause, la SARL Marseille Le Belvédère irrecevable dans ses demandes en l'état des difficultés sérieuses qui relèvent de l'appréciation exclusive du juge du fond ;

' la débouter de toutes ses demandes ;

' la condamner au paiement de la somme de 4 000 euros sur le fondement des dispositions de l'article 700 du code de procédure civile ainsi qu'en tous les dépens, tant de première instance que d'appel.

La SARL Marseille Le Belvédère, régulièrement intimée à personne, n'a pas constitué avocat.

L'instruction de l'affaire a été close par ordonnance en date du 17 mai 2022.

MOTIFS DE LA DÉCISION

Les appelants sont intervenus volontairement aux débats pour reprendre l'instance interrompue par le décès de feu Mme [B] [O]. Leur intervention volontaire sera déclarée recevable par application des dispositions de l'article 554 du code de procédure civile.

Sur la demande de provision

Aux termes l'article 809 ancien du code de procédure civile, applicable à la présente espèce, dans les cas où l'existence de l'obligation n'est pas sérieusement contestable ... le président du tribunal judiciaire ou le juge du contentieux de la protection dans les limites de sa compétence ... peut accorder une provision au créancier ou ordonner l'exécution d'une obligation même s'il s'agit d'une obligation de faire.

L'absence de constestation sérieuse implique l'évidence de la solution qu'appelle le point contesté. Il appartient au demandeur d'établir l'existence de l'obligation qui fonde sa demande de provision tant en son principe qu'en son montant, laquelle n'a d'autre limite que le montant non sérieusement contestable de la créance alléguée.

Par application de l'article 2224 du code civil, les actions personnelles ou mobilières se prescrivent par cinq ans à compter du jour où le titulaire d'un droit a connu ou aurait dû connaître les faits lui permettant de l'exercer.

Le décompte des frais de séjour de Mme [B] [O], produit par la société Marseille Belvédère, couvre la période du 1er juin 2010 au 30 mars 2016.

Il n'est pas contesté que l'acte introductif de l'instance de référé a été délivré le 27 mai 2016. S'agissant du premier acte interruptif de prescription, toutes les créances antérieures au 27 mai 2011 étaient donc prescrites, de sorte que l'intimée ne pouvait les inclure au décompte soumis au premier juge. Il échet, dès lors, de retrancher de ce dernier, comme sérieusement contestable, la somme de 14 357,50 euros correspondant au solde débiteur arrêté au 1er mai 2011.

Contrairement aux allégations des appelants, ce n'était pas à l'établissement d'accueil de Mme [B] [O], de faire les démarches nécessaires à l'obtention de l'allocation personnalisée d'autonomie (APA) à laquelle avait droit cette majeure protégée mais à sa tutrice, à savoir Mme [G] [O]. Par ailleurs aucune pièce du dossier ne vient étayer les assertions de cette dernière selon lesquelles elle n'aurait eu de cesse de demander à la SARL Marseille Le Belvédère, professionnel en matière d'accueil de personnes âgées, de régulariser les demandes qui s'imposaient auprès du Conseil général des Alpes Maritimes. Aucune contestation sérieuse ne peut dès lors être articulée sur le terrain de l'absence de diligence de l'intimée dans la mise en oeuvre des droits de sa résidente.

Les appelants tirent argument d'une discordance entre les sommes indiquées sur les courriers de relance de la SARL Marseille Le Belvédère, des 27 janvier 2011 et 5 septembre 2012 et celles mentionnées aux dates correspondantes sur le décompte récapitulatif versé aux débats par l'intimée. Cependant, alors que les dettes mentionnées sur ces deux documents, à la première des deux dates précitées, sont prescrites et donc à déduire du décompte final, celle dont le règlement est sollicité dans la lettre du 5 septembre 2012 (soit 46 453,82 euros) correspond aux frais d'hébergement relatifs à la période de mars 2011 à août 2012 alors que, par définition, le décompte récapitulatif, arrêté à la somme de 54 435,26 euros au 1er août de la même année, intègre l'ensemble des impayés depuis l'arrivée de Mme [B] [O] dans l'établissement c'est à dire depuis le 1er juin 2010. Aucune contestation sérieuse ne peut dès lors être articulée sur le terrain de telles discordances.

Il reste que le décompte dont s'agit fait également état d'un solde débiteur de 100 679,01 euros au 1er janvier 2014 alors que le 29 janvier suivant la SARL Marseille Le Belvédère envoyait à Mme [G] [O] un courrier dont l'entame était ainsi libellée : Nous sommes au regret de constater que nos factures(dont vous trouverez une synthèse détaillée en pièce jointe), d'un montant total de 81 793,73 euros, concernant les frais de séjour de votre protégée, Mme [B] [O], ne sont pas soldés à ce jour.

Les appelants ne produisent pas le 'détail des factures' qui figurait en 'PJ' de cette lettre alors même que le décompte de l'intimée a été corrigé les 1er et 28 février 2014 par l'inscription au crédit de trois avoirs de 19 453,86 euros, 9 647,48 euros et 1 770,10 euros suite à des refacturation(s) ... au prix AS, soit un total nettement supérieur aux 18 885,28 euros correspondant à la différence entre les sommes précitées (100 679,01 - 81 793,73). Le constat de cette troisième discordance est donc insuffisante à nourrir une contestation sérieuse de l'ensemble du décompte et même de la somme de 100 679,01 euros figurant au débit de ce dernier à la date du 1er janvier 2014.

Ainsi, en considération de l'ensemble de ces éléments, la cour peut-elle fixer à la somme de 88 517,55 euros (102 875,05 - 14 357,50 euros) le montant non sérieusement contestable de la créance de la SARL Marseille le Belvédère. L'ordonnance entreprise sera donc infirmée de ce chef et les appelants, héritiers de feue Mme [B] [O], solidairement condamnés à verser cette somme à l'intimée, à titre de provision à valoir sur le règlement de sa créance.

Sur l'article 700 du code de procédure civile et les dépens

Il convient de confirmer l'ordonnance déférée en ce qu'elle a dit n'y avoir lieu à faire application de l'article 700 du code de procédure civile et laissé les dépens à la charge de Mme [B] [O].

Il ne paraît pas inéquitable de laisser à la charge des appelants, dont les prétentions n'ont été accueillies que partiellement, les frais non compris dans les dépens, qu'ils ont exposés en cause d'appel.

Pour les même raisons, M. [Z] [O], Mme [G] [O] et Mme [W] [O] veuve [L] supporteront la charge des dépens d'appel.

PAR CES MOTIFS

La cour,

Statuant sur renvoi de cassation,

Déclare recevable l'intervention volontaire de M. [Z] [O], Mme [G] [O] et Mme [W] [O] ;

Confirme l'ordonnance entreprise en ce qu'elle a :

- dit n'y avoir lieu à faire application de l'article 700 du code de procédure civile ;

- laissé les dépens à la charge de Mme [B] [O] ;

L'infirme pour le surplus ;

Statuant à nouveau et y ajoutant :

Condamne solidairement M. [Z] [O], Mme [G] [O] et Mme [W] [O] veuve [L] a verser à la SARL Marseille Le Belvédère la somme provisionnelle de 88 517,55 euros ;

Dit n'y avoir lieu à application de l'article 700 du code de procédure civile en cause d'appel ;

Condamne M. [Z] [O], Mme [G] [O] et Mme [W] [O] veuve [L] aux dépens d'appel.

La greffière Le président


Synthèse
Tribunal : Cour d'appel d'Aix-en-Provence
Formation : Chambre 1-2
Numéro d'arrêt : 21/06149
Date de la décision : 01/09/2022

Origine de la décision
Date de l'import : 27/03/2024
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.appel;arret;2022-09-01;21.06149 ?
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