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29/07/2022 | FRANCE | N°18/08461

France | France, Cour d'appel d'Aix-en-Provence, Chambre 4-3, 29 juillet 2022, 18/08461


COUR D'APPEL D'AIX-EN-PROVENCE

Chambre 4-3



ARRÊT AU FOND



DU 29 JUILLET 2022



N° 2022/ 156



RG 18/08461

N° Portalis DBVB-V-B7C-BCOXN







[S] [M]





C/



[E] [K] épouse [D]

Association UNEDIC-AGS CGEA DE [Localité 4]

























Copie exécutoire délivrée le 29 juillet 2022 à :



-Me Olivier DONNEAUD, avocat au barreau de MARSEILLE



- Me Frédéric LACROIX, avocat au barreau d'AIX-EN-PROVENCE

V149



























Décision déférée à la Cour :



Jugement du Conseil de Prud'hommes - Formation paritaire de MARSEILLE en date du 07 Mai 2018 enregistré au répertoire général sous le n° F 14/03627.





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COUR D'APPEL D'AIX-EN-PROVENCE

Chambre 4-3

ARRÊT AU FOND

DU 29 JUILLET 2022

N° 2022/ 156

RG 18/08461

N° Portalis DBVB-V-B7C-BCOXN

[S] [M]

C/

[E] [K] épouse [D]

Association UNEDIC-AGS CGEA DE [Localité 4]

Copie exécutoire délivrée le 29 juillet 2022 à :

-Me Olivier DONNEAUD, avocat au barreau de MARSEILLE

- Me Frédéric LACROIX, avocat au barreau d'AIX-EN-PROVENCE

V149

Décision déférée à la Cour :

Jugement du Conseil de Prud'hommes - Formation paritaire de MARSEILLE en date du 07 Mai 2018 enregistré au répertoire général sous le n° F 14/03627.

APPELANT ET PARTIE INTERVENANTE

Maître [S] [M], Liquidateur judiciaire de la Société GT FORMATION, demeurant [Adresse 3]

Défaillant

INTIMEE

Madame [E] [K] épouse [D], demeurant [Adresse 2]

représentée par Me Olivier DONNEAUD, avocat au barreau de MARSEILLE

PARTIE INTERVENANTE

Association UNEDIC-AGS CGEA DE [Localité 4], demeurant [Adresse 1]

représentée par Me Frédéric LACROIX, avocat au barreau d'AIX-EN-PROVENCE

*-*-*-*-*

COMPOSITION DE LA COUR

En application des dispositions des articles 804 et 805 du code de procédure civile, l'affaire a été débattue le 24 Mai 2022, en audience publique, les avocats ne s'y étant pas opposés, devant Madame Estelle de

REVEL, Conseiller, chargée du rapport, qui a fait un rapport oral à l'audience, avant les plaidoiries.

Ce magistrat a rendu compte des plaidoiries dans le délibéré de la cour, composée de :

Madame Pascale MARTIN, Président de Chambre

Madame Ghislaine POIRINE, Conseiller faisant fonction de Président

Madame Estelle de REVEL, Conseiller

Greffier lors des débats : Madame Florence ALLEMANN-FAGNI.

Les parties ont été avisées que le prononcé de la décision aurait lieu par mise à disposition au greffe le 22 Juillet 2022, délibéré prorogé en raison de la survenance d'une difficulté dans la mise en oeuvre de la décision au 29 Juillet 2022.

ARRÊT

REPUTE CONTRADICTOIRE

Prononcé par mise à disposition au greffe le 29 Juillet 2022

Signé par Madame Estelle de REVEL, Conseiller et Madame Florence ALLEMANN-FAGNI, Greffier, auquel la minute de la décision a été remise par le magistrat signataire.

***

EXPOSE DU LITIGE

Le 29 août 2013, Mme [E] [K] épouse [D] a été embauchée par la société GT Formation en qualité de conseillère en formation par contrat à durée indéterminée.

Son salaire fixe brut était fixé à 2 000 euros. Il était également prévu des commissions calculées sur le chiffre d'affaire selon la grille suivante :

- 6% brut sur le chiffre d'affaires jusqu'à 350 000 euros

- 7,5 % sur le chiffre d'affaires excédant 350 000 euros

- 5 % brut sur le chiffre d'affaires signé sur les affaires transmises

Par avenant du 28 janvier 2014, l'objectif de chiffre d'affaires assigné à la salariée pour l'année 2014 était fixé à 280 000 euros, avec un objectif à fin mars 2014 de 15% de l'objectif annuel soit 42 000 euros, et avec un objectif à fin juin 2014 de 40% de l'objectif annuel, soit 112 000 euros facturés à fin juin 2014.

La convention collective nationale applicable était celle des organismes de formation.

Le contrat de travail de Mme [K] était assorti d'un contrat de professionnalisation prévoyant une formation aux métiers de la vente, d'une durée de 455 heures sur la période du 09 septembre 2013 au 1er août 2014.

Le 22 octobre 2014, la société GR Formation a notifié un avertissement à la salariée concernant le retard constaté de son chiffre d'affaire par rapport à son objectif.

Le 30 octobre 2014, Mme [K] a contesté cet avertissement.

Le 12 décembre 2014, la société a convoqué la salariée à un entretien préalable à son licenciement devant se tenir le 22 décembre 2014 avec une mise à pied conservatoire.

Le 16 décembre 2014, Mme [K] a saisi le conseil de prud'hommes de Marseille afin de solliciter la résiliation judiciaire de son contrat de travail.

Le 9 janvier 2015, la société GT Formation a licencié Mme [K] pour faute grave dans les termes suivants :

« (...) Nous avons décidé de vous licencier pour les motifs suivants :

GT Formation est une petite entreprise avec un petit nombre de salariés qui requiert donc une collaboration étroite entre tous.

1. Vous fonctionnez en autarcie. La porte de votre bureau est constamment fermée traduisant votre reluctance à tout contact.

Vous ne renseignez pas les affaires que vous signez dans le logiciel commun à l'entreprise prévu à cet effet, (Easy), sur lesquelles il n'y a ni adresse, ni historique d'actions commerciales ; parfois ni téléphone, ni mail alors que le client est « signé » et ce, malgré nos multiples relances en réunions commerciales et par mail (mails des 2/4, 5/5 et 13/10). (Ex de fiches : Mr [W] [U] ou Mme [R] [H] non remplies). De plus, vous refusez de répondre aux clients de votre collègue [Z] [Y], conseillère en formation comme vous, et qui est en vacances, alors qu'une conseillère en formation doit pouvoir remplacer une autre pendant ses congés.

Votre participation aux réunions commerciales hebdomadaires est inexistante ou négative comme lorsque vous avez critiqué le travail de Melle [T] de façon vexatoire et sans faire aucune proposition alors qu'elle présentait ce qu'elle avait créé lors d'une réunion commerciale.

De même, lorsque vous dites que vous n'avez rien à dire lorsqu'on vous demande de vous exprimer en réunion commerciale au même titre que n'importe quelle conseillère en formation pour amener de nouvelles idées ou partager des expériences ;

Ou encore lorsque vous vous en prenez à votre collègue [Z] [Y] en critiquant ses actions commerciales et en lui disant qu'elle est malhonnête.

2. Outre votre défaut de participation, vous avez volontairement positionné des RV à la même heure que cette réunion hebdomadaire de façon à vous exempter d'y assister (mail du 6/10/14).

3. Votre comportement n'a de cesse de diviser l'équipe en distillant des faux propos que vous prêtez à votre collègue [Z] [Y] envers une assistante [O]. Vous avez en effet dit à [O] que [Z] n'était pas contente de son travail. [Z] a dû s'expliquer auprès de [O] pour retrouver sa confiance. [O] s'est trouvée ainsi déstabilisée de telle sorte qu'elle a renoncé à passer à plein temps comme nous le lui proposions explicitement à cause de l'ambiance ainsi créée. Depuis votre mise à pied, elle a accepté ce plein temps.

4. Ne voulant pas assurer le suivi administratif de vos affaires, vous avez accaparé les services de notre assistante administrative, qui s'est retrouvée très peu disponible pour vos collègues.

A ce comportement négatif et malveillant à l'encontre de votre collègue [Z], conseillère en formation, vous avez ajouté une attitude délibérément hostile à ses clients présents dans nos locaux en ne les saluant pas. Ces mêmes clients nous ont demandés interloqués qui vous étiez '

5. De même, le stagiaire [I] [B] dont vous étiez la tutrice a très mal vécu votre manque d'intérêts pour son travail. Il a ressenti dans votre attitude un mépris qui s'est traduit par le fait que vous n'avez même pas assisté à son compte rendu oral de fin de stage un vendredi après-midi et que vous ne lui ayez même pas dit Au revoir à la fin de son stage.

Ce comportement a des répercussions sur votre travail. J'ai du vous recevoir deux fois en entretien et vous sanctionner d'un avertissement pour vous rappeler de vous impliquer d'avantage afin d'atteindre votre objectif commercial.

6. Cet objectif ne sera pas atteint malgré la réduction consentie par la direction 280 K€ au lieu de 300 K€, comme l'est celui de votre collègue [Z]. Rappelons pour mémoire que votre collègue [Z] atteint un CA de 524 K€, et que votre collègue de [Localité 5] atteint un CA de 344 K€.

7. Nous avons constaté de plus, que vous étiez systématiquement absente le vendredi après-midi en positionnant ou non un RV en début d'après midi et ne revenant pas par la suite, alors qu'à peine un rendez vous par mois est mentionné le vendredi après midi dans le compte rendu de visites sur notre logiciel Easy.

Or vous êtes soumis à un horaire de 151h65 par mois, ce qui implique votre présence.

8. De même, vous n'appliquez pas la stratégie de l'entreprise en refusant de développer l'activité envers les demandeurs d'emploi, secteur crucial pour le développement de GT Formation. Vous avez même déclaré « ça ne m'intéresse pas ». De fait, pour développer cette activité, [Z] a dû créer des programmes de formation pour ce public. Vous avez indiqué que vous alliez en créer un sur la création d'entreprise en réunion commerciale mais nous ne l'avons jamais vu et vous ne l'avez jamais diffusé auprès de l'équipe, alors que [Z] en a créé au moins 6, programmes que vous avez fini quand même par utiliser pour vos propres demandeurs d'emploi : mais le résultat est là : vous avez signé 14 demandeurs d'emploi, alors que [Z] en a signé 154.

9. Vous avez de plus refusé de faire une communication commune auprès des clients générant ainsi un double travail de nos assistants en leu demandant de ne pas partager vos actions commerciales avec votre collègue [Z]. [O] a donc dû créer des Emailings complètement différents pour vous car vous ne souhaitiez pas avoir un Emailing commun pour l'ensemble des clients. Vous avez accusé votre collègue de vous « voler » des contacts, ce qui s'est avéré faux. En revanche nous nous sommes rendu compte que vous aviez détourné des contacts de votre collègue à votre profit. Vous l'avez enregistré sous un nom différent de façon à ce que ce ne soit pas visible dans votre base client.

10. Enfin, nous avons appris que vous aviez tenté de débaucher notre assistante [O]. Vous lui avez en effet proposé de passer un entretien avec votre mari en vue de travailler pour lui. [O] a refusé mais a été déstabilisée par cette tentative et s'en est émue auprès de [Z].

Cette attitude est déloyale et scandaleuse.

Tout cela est totalement inacceptable et justifie le licenciement pour faute grave que nous prononçons à votre encontre. »

Le 7 mai 2018, le conseil de prud'hommes a rendu son jugement en ces termes :

REJETTE la demande de résiliation judiciaire de Mme [K]

DIT que le licenciement de Mme [K] est dépourvu de cause réelle et sérieuse

CONDAMNE la SARL GT Formation à verser à Mme [K] les sommes suivantes :

2 477,22€ au titre du solde des commissions 2014

247,77€ au titre des congés payés afférents

170€ au titre des congés payés afférents

5665,00€ au titre de l'indemnité de préavis

566€ au titre des congés payés afférents

754€ au titre de l'indemnité légale de licenciement

8 500,00€ au titre des dommages et intérêts pour licenciement abusif

1 000,00€ au titre de l'article 700 du code de procédure civile

REJETTE toute autre demande

DIT que la moyenne des trois derniers mois de salaire s'élève à la somme de 2 832,50€

DEBOUTE la partie défenderesse de sa demande reconventionnelle

CONDAMNE la partie défenderesse aux entiers dépens.

Le 18 mai 2018, la société GT Formation a interjeté appel du jugement.

Le 14 février 2019, la société a été placée en liquidation judiciaire par jugement du tribunal de commerce de Marseille et Me [M], devenu la SAS Les mandataires, a été désigné en qualité de liquidateur judiciaire.

Par acte du 19 janvier 2021, Mme [K] a assigné en intervention forcée le liquidateur (remise à personne habilitée) et le CGEA de [Localité 4] et leur a signifié ses conclusions et pièces.

PRÉTENTIONS DES PARTIES

Aux termes de ses dernières conclusions, transmises par voie électronique le 19 janvier 2021, Mme [K] demande à la cour de :

A TITRE PRINCIPAL :

REFORMER le jugement du Conseil de Prud'hommes de Marseille en ce qu'il a débouté Mme [K] de sa demande de résiliation judiciaire du contrat de travail.

SUBSIDIAIREMENT :

CONFIRMER le jugement du Conseil de Prud'hommes en ce qu'il a dit que le licenciement de Mme [K] est dépourvu de cause réelle et sérieuse.

EN TOUT ETAT DE CAUSE :

CONFIRMER le jugement du Conseil de Prud'hommes en ce qu'il a alloué à Mme [K] les sommes suivantes :

2 477,22 € au titre du solde des commissions 2014 et 247,77 € au titre des congés payés afférents

1 000 € au titre des frais irrépétibles de 1ère instance.

LE CONFIRMER également en ce qu'il a débouté la société GT FORMATION de sa demande reconventionnelle.

REFORMER le jugement du Conseil de Prud'hommes en ce qu'il a évalué les indemnités de rupture et le préjudice de Mme [K] aux sommes suivantes :

1 700 € au titre du salaire durant la mise à pied conservatoire, outre 170 € au titre des congés payés afférents

5 665 € au titre de l'indemnité compensatrice de préavis et 566 € au titre des congés payés afférents

754 € au titre de l'indemnité légale de licenciement

8 500 € à titre de dommages et intérêts pour licenciement sans cause réelle et sérieuse

LE REFORMER également en ce qu'il débouté Mme [K] de sa demande de commissions au titre de l'année 2015 et de sa demande de solde d'indemnité compensatrice de congés payés.

ET STATUANT A NOUVEAU sur les chefs réformés :

FIXER la créance de Mme [K] au passif de la liquidation judiciaire de la société GT FORMATION aux sommes suivantes :

2 477,22 euros au titre du solde des commissions 2014

247,77 au titre des congés payés afférents

1 000 euros au titre des frais irrépétibles de 1ère instance

1 259,40 € au titre des commissions de l'année 2015

125,94 € au titre des congés payés afférents

1 023,69 € au titre du solde de l'indemnité compensatrice de congés payés

2 461,57 € au titre des salaires durant la période de mise à pied conservatoire

246,16 € au titre des congés payés afférents

6 764,38 € au titre de l'indemnité compensatrice de préavis

676,44 € au titre des congés payés afférents

901,92 € au titre de l'indemnité légale de licenciement

17 000 € à titre de dommages et intérêts pour licenciement abusif

3 000 euros au titre des frais irrépétibles d'appel.

DECLARER la décision opposable de plein droit au CGEA

STATUER ce que de droit sur les dépens.

Aux termes de ses dernières conclusions, transmises par voie électronique le 7 avril 2021, les AGS-CGEA demandent à la cour de :

CONFIRMER le jugement en ce qu'il débouté Mme [G] [K] ép. [D] la demande de résiliation judiciaire du contrat de travail ;

RÉFORMER le jugement du 07/05/2018 du conseil des prud'hommes de MARSEILLE dès lors que l'appelante principale justifie des faits ayant présidé à la notification d'un licenciement pour faute grave;

DÉBOUTER Mme [G] [K] ép. [D] de ses demandes ;

Subsidiairement,

CONFIRMER le jugement du 07/05/2018 ;

DÉBOUTER Mme [G] [K] ép. [D] des fins de son appel incident ;

CONSTATER et fixer les créances de Mme [G] [K] ép. [D] en fonction des justificatifs produits ;

FIXER en tant que de besoin l'indemnité compensatrice de préavis, l'indemnité compensatrice de congés payés et l'indemnité de licenciement

DIRE ET JUGER que les dommages et intérêts ne pourront s'apprécier en l'absence de cause réelle et sérieuse de licenciement, que dans le cadre des articles L. 1235-2, ou L. 1235-3 ou L. 1235-5 du Code du travail ;

DÉBOUTER la salariée de toute demande de garantie sur la totalité de ses créances, dès lors qu'en application de l'article L. 3253-17 du code du travail, la garantie AGS est limitée, toutes sommes et créances avancées confondues, à un ou des montants déterminés par décret (art. l'article D. 3253-5 du Code du travail), en référence au plafond mensuel retenu pour le calcul des contributions du régime d'assurance chômage, et inclut les cotisations et contributions sociales et salariales d'origine légale, ou d'origine conventionnelle imposées par la loi ;

DÉBOUTER la salariée de toutes demande de paiement directement formulée contre l'AGS dès lors que l'obligation de l'UNEDIC-AGS CGEA DE [Localité 4] de faire l'avance de montant total des créancesdéfinies aux articles L. 3253-6 et suivants du Code du travail, compte tenu du plafond applicable (articles L.3253-17 et D. 3253-5), ne pourra s'exécuter que sur présentation d'un relevé de créances par le mandataire judiciaire, et sur justification par ce celui-ci de l'absence de fonds disponibles entre ses mains pour procéder à leur paiement en vertu de l'article L. 3253-19 du Code du travail ;

DÉBOUTER la salariée de toutes demandes au titre des frais irrépétibles visés à l'article 700 du CPC, des dépens, de l'astreinte, des cotisations patronales ou résultant d'une action en responsabilité, dès lors qu'elles n'entrent pas dans le cadre de la garantie de l'UNEDIC-AGS CGEA DE [Localité 4] ;

DÉBOUTER la salariée de toute demande accessoire au titre des intérêts dès lors que le jugement d'ouverture de la procédure collective opère arrêt des intérêts légaux et conventionnels (art. L. 622-28 C.COM) ;

DÉBOUTER Mme [G] [K] ép. [D] de toute demande contraire et le condamner aux dépens

La SAS Les Mandataires, es qualité de liquidateur de la société GT Formation, n'a pas constitué avocat et n'a pas conclu.

Pour l'exposé plus détaillé des prétentions et moyens des parties, il sera renvoyé, conformément à l'article 455 du code de procédure civile, aux conclusions des parties.

MOTIFS DE LA DÉCISION

A titre liminaire, la cour constate qu'en l'état de la liquidation judiciaire de la société GT Formation et en l'absence de constitution du liquidateur, aucune demande reconventionnelle n'a été faite par ce dernier, es qualité, de sorte que la cour n'a pas à statuer.

Sur l'exécution du contrat de travail

1) Sur les commissions de 2014

Mme [K] demande la confirmation du jugement de ce chef.

Le CGEA ne fait valoir aucun moyen à l'appui de sa demande d'infirmation et de rejet des demandes.

En l'état de la liquidation judiciaire de la société appelante et de l'absence de constitution du liquidateur, la cour se trouve dans l'ignorance des moyens d'appel.

N'étant tenue de répondre qu'à ce dont elle est régulièrement saisie et ne pouvant suppléer la carence de l'appelant à cet égard, elle doit confirmer le jugement sur ce point qui n'est atteint d'aucune irrégularité touchant l'ordre public et de nature à être soulevée d'office, sauf à fixer la créance au passif de la liquidation judiciaire de la société GT Formation.

2) Sur les commissions de 2015

Mme [K] demande l'infirmation du jugement, les juges ne s'étant pas prononcé sur sa demande de rappel de commission au titre de l'année 2015.

Elle soutient avoir négocié des formations en 2014 qui ont été encaissées à hauteur de 20 990 euros par la société en janvier 2015 et doivent donner lieu à une commission de 6%, soit 1 259,40 euros.

A l'appui de sa demande, elle produit un tableau du chiffre d'affaires 2015.

La cour relève cependant qu'en ne produisant qu'un document intitulé 'Tableau du chiffre d'affaire 2015" (pièce 26) sans justifier de l'origine et de l'authenticité de cette pièce et dont il ne ressort pas le chiffre d'affaire allégué, et en l'absence d'explication de la salariée, celle-ci échoue à démontrer qu'elle a droit à la somme réclamée.

La demande est rejetée.

3) Sur le solde des congés payés

Mme [K] soutient ne pas avoir perçu la totalité de ses congés payés faisant valoir qu'elle pouvait prétendre à la somme de 5 076,15 euros pour sa période d'activité du 29 août 2013 au 20 janvier 2015, que les 16 jours de congés effectivement pris lui ont été payés sur la base de son salaire fixe à hauteur de 1476,89 euros, de sorte qu'elle aurait dû percevoir la somme de 3 599,27 euros et non 2 575,58 euros. Elle réclame le solde.

A l'appui, elle produit ses bulletins de salaire et l'attestation destinée à Pôle Emploi dont il ressort une indemnité compensatrice de congés payés de 2 575,58 euros.

En l'état de ces seuls éléments, la cour relève que la demande chiffrée ne ressort pas des pièces produites, de sorte qu'il n'est pas démontré par la salariée qu'elle n'a pas été totalement payée de ses congés payés.

La demande doit être rejetée et le jugement confirmé.

Sur la résiliation judiciaire

Mme [K] reproche au conseil des prud'hommes de ne pas avoir fait droit à sa demande principale de résiliation judiciaire soutenant que la société GT Formation avait gravement manqué à ses obligations en matière de formation, de rémunération de ses commissions et congés payés et en lui ayant infligé un avertissement non justifié, ce qui empêchait la poursuite du contrat de travail.

Le CGEA réplique que la procédure de licenciement a été introduite avant la demande de résiliation judiciaire et que les griefs invoqués n'étaient pas suffisamment graves pour n'avoir pas empêché la poursuite du contrat.

Le juge prononce la résiliation judiciaire du contrat de travail aux torts de l'employeur en cas de manquements suffisamment graves de ce dernier à ses obligations, de nature à empêcher la poursuite du contrat de travail.

Le juge saisi d'une demande de résiliation judiciaire suivie d'un licenciement du salarié, doit examiner prioritairement la demande de résiliation judiciaire avant de se prononcer sur le bien fondé du licenciement.

En l'espèce, l'action en résiliation judiciaire ayant été introduite le 16 décembre 2014, et Mme [K] ayant été licenciée le 9 janvier 2015, le moyen tiré de l'antériorité de la procédure de licenciement par rapport à la demande de résiliation judiciaire est par conséquent inopérant.

- Sur les manquements concernant la formation

La salariée soutient que contrairement à ce qui était prévu à son contrat de professionnalisation, elle n'a jamais reçu la formation indiquée. Elle affirme que son employeur lui a fait signer de fausses attestations de présence à ces formations qu'elle n'a pas pu refuser afin de garder son emploi et qu'il a imité la signature de la formatrice, Mme [L].

Elle produit aux débats:

- une impression d'écran du planning de formation,

- l'accord de prise en charge du contrat de professionnalisation à hauteur de 4 163 euros par l'organisme OPCALIA

- la convention de formation professionnelle entre l'organisme de formation Soft Formation et la société GT Formation

- l'attestation de Mme [T], salariée de la société GT Formation qui indique que la signature du contrat de professionnalisation lui a été imposée par GT Formation mais qu'elle n'a pas suivi la formation et qu'il lui a été expliqué que tous les salariés passaient par des dispositifs financiers similaires

- l'attestation de Mme [N], ancienne salariée selon laquelle 'la société GT Formation réalise des dossiers transformés autrement dit de faux dossiers dans le but d'obtenir des financements d'OPCA'

- le courrier de Mme [N] à la Direccte le 21 septembre 2015 à propos des agissements allégués

- l'attestation de Mme [V]

- le courrier du 26 mai 2014 du conseil du syndicat départemental FO, de Mme [J], de M. [A] et de M. [P] adressé au Procureur de la république de Marseille pour faux et usage de faux et détournements de fonds publics.

Il ressort du jugement que la société soutenait que la formation avait été dispensée en interne dans l'entreprise conformément à l'accord de prise en charge et à la convention.

La cour relève, après analyse de ces pièces et éléments du débat, qu'en l'état des seules attestations produites émanant de salariés ou anciens salariés de la société GT Formation et collègues de Mme [K], et qui ne concernent pas directement celle-ci, la réalité des formations diligentées à Mme [K] ne peut être remise en cause. La plainte est sans rapport avec la présente affaire et en tout état de cause, un simple courrier d'avocat renfermant une plainte ne saurait suffire à établir des faits de nature pénale en l'absence de tout élément sur leur réalité, et sur le devenir de celle-ci.

Le manquement n'est pas démontré.

- Sur l'avertissement

Mme [K] reproche à son employeur de lui avoir notifié un avertissement le 22 octobre 2014 'pour le retard constaté pour les trois trimestres échus de votre chiffre d'affaires par rapport à votre objectif'.

La salariée qui a contesté cette sanction n'en sollicite pas l'annulation mais soutient que le manquement de l'employeur vient du fait que l'avertissement était abusif et infligé de mauvaise foi dans le seul but de se débarrasser d'elle car elle refusait de participer à un système frauduleux(formation).

La cour relève qu'aux termes de l'avertissement, l'employeur s'est appuyé sur le contrat de travail et les clauses d'objectifs commerciaux chiffrés pour les rappeler à la salariée et lui reprocher de ne pas les avoir atteints à la fin de chaque période de référence. Mme [K] a pu contester ces éléments dans sa réponse du 30 octobre 2014 dans laquelle elle n'évoque d'ailleurs aucun abus.

Quelle que soit la pertinence des griefs et leur réalité, l'employeur n'a fait qu'user de son pouvoir disciplinaire. Le caractère abusif de la sanction n'est pas démontré au vu du contenu de celle-ci qui ne fait que rappeler à l'ordre la salariée sur les éléments chiffrés, de façon objective et mesurée.

Au demeurant, la lettre de licenciement n'est pas fondée sur une insuffisance professionnelle.

La mauvaise foi de l'employeur n'est pas plus caractérisée.

Un avertissement, serait-il injustifié, de par sa nature, ne saurait en tout état de cause constituer un manquement suffisamment grave de l'employeur pour empêcher la poursuite du contrat de travail.

Le manquement n'est pas démontré.

- Sur le non paiement des commissions et les congés payés

Aucun solde n'est dû s'agissant des indemnités de congés payés; en revanche, la cour a jugé qu'au titre de l'année 2014, la somme de 2 477,22 euros n'avait pas été payée par l'employeur.

Les clauses du contrat de travail relatives aux modalités de paiement des commissions stipulent qu'elles sont 'payables mensuellement et ne seront définitivement acquises qu'après l'encaissement de ce chiffre d'affaire. En cas de rupture du contrat de travail, seules les commissions sur le chiffre d'affaires réellement encaissées à cette date seront acquises'.

La salariée ne justifie pas avoir sollicité paiement des commissions; l'action en résiliation judiciaire a été faite le 16 décembre 2014, soit avant la fin de l'année.

La cour retient, au vu de ces éléments et du montant susvisé, que le manquement n'est pas suffisamment grave pour empêcher la poursuite du contrat de travail.

Il convient par conséquent de confirmer le jugement ayant rejeté la demande de résiliation judiciaire.

Sur le licenciement

Mme [K], appelante incidente, demande confirmation du jugement de ce chef.

Pour solliciter l'infirmation de la décision, le CGEA se borne à soutenir que la société justifie de faits qui fondent le licenciement. Aucune pièce n'est produite.

En l'état de la liquidation judiciaire de la société appelante et de l'absence de constitution du liquidateur, la cour se trouve dans l'ignorance des moyens d'appel.

N'étant tenue de répondre qu'à ce dont elle est régulièrement saisie et ne pouvant suppléer la carence de l'appelant à cet égard, et du CGEA, elle doit confirmer le jugement sur ce point qui n'est atteint d'aucune irrégularité touchant l'ordre public et de nature à être soulevé d'office.

Sur le rappel de salaire durant la mise à pied à titre conservatoire

La cour relève qu'aux termes du courrier l'ayant convoquée à un entretien préalable à son licenciement et tel que cela ressort de ses bulletins de salaire, Mme [K] a été mise à pied à titre conservatoire pour la période du 12 décembre 2014 au 20 janvier 2015.

Se basant sur un salaire mensuel moyen de 3 382,19 euros, la salariée demande l'infirmation du jugement sur le montant du rappel de salaire évalué pour la période de façon erronée à 1 700 euros au lieu de 2 461,57 euros.

La cour relève, au vu des bulletins de salaire des 13 derniers mois ayant précédé son licenciement ( novembre 2013-novembre 2014) que le salaire brut moyen est de 2 832,50 euros tel que retenu par la juridiction prud'homale et non celui évoqué par la salariée.

Il en résulte une juste évaluation du montant du rappel de salaire par les premiers juges qu'il convient de confirmer et de fixer au passif de la liquidation de la société, outre les congés payés afférents.

Sur les conséquences financières du licenciement

1) Sur l'indemnité compensatrice de préavis

La demande d'infirmation du jugement faite par Mme [K] étant fondée sur un salaire brut mensuel plus élevé que celui retenu par la cour et les premiers juges, il convient de confirmer le jugement sur l'évaluation faite au titre de l'indemnité compensatrice de préavis et sur les congés payés afférents.

2) Sur l'indemnité légale de licenciement

Selon l'article L.1234-9 du code du travail, dans sa version applicable au litige, le salarié licencié alors qu'il compte une année d'ancienneté ininterrompue au service du même employeur, a droit, sauf en cas de faute grave à une indemnité de licenciement.

L'évaluation du montant de l'indemnité est faite en tenant compte de l'ancienneté à l'expiration du contrat c'est à dire à l'expiration normale du préavis même s'il y a eu dispense de l'exécuter.

Selon l'article R.1234-2 du code du travail, dans sa version applicable au litige, l'indemnité légale de licenciement ne peut être inférieure à un cinquième de mois de salaire par année d'ancienneté.

Mme [K] réclame la somme de 901,92 euros par infirmation du jugement qui n'a retenu que 754 euros.

Au vu des éléments susvisés et du salaire brut moyen mensuel, et d'une ancienneté de 18 mois, le montant de l'indemnité s'élève à :

((2 832,50 X 1/5) X 1) + ((2 832,50 X 1/5) X 6/12 = 849,75 euros

Il y a lieu d'infirmer le jugement de ce chef et de fixer cette indemnité au passif de la liquidation de la société.

3) Sur les dommages et intérêts pour licenciement abusif

Selon l'article L. 1235-5 du code du travail, dans sa rédaction applicable au litige, le salarié ayant moins de deux ans d'ancienneté et le salarié appartenant à une entreprise de moins de onze salariés peut prétendre à la réparation du préjudice résultant de son licenciement abusif en fonction du préjudice subi.

Mme [K] qui demande l'infirmation du jugement fait valoir son ancienneté et sa situation professionnelle à l'issue de son contrat de travail expliquant avoir créé une société de formation sans toutefois percevoir de revenu et avoir dû bénéficier des allocations de Pôle Emploi.

Le CGEA sollicite une indemnisation du strict préjudice subi.

Ne justifiant pas de sa situation financière au moment de la rupture, ni de la durée pendant laquelle elle a perçu des indemnités de chômage, et au regard de son ancienneté (18 mois) et du montant de son salaire moyen, il convient de confirmer l'évaluation du préjudice justement faite par le conseil des prud'hommes et de fixer cette somme au passif de la liquidation judiciaire de la société.

Sur la garantie des AGS CGEA

Compte tenu de la nature des sommes allouées, l'UNEDIC délégation AGS CGEA de [Localité 4] doit sa garantie dans les termes des articles L.3253-8 et suivants du code du travail.

Sur les autres demandes

Le jugement d'ouverture de la procédure collective a entraîné l'arrêt des intérêts légaux et conventionnels.

Les demandes formées au titre de l'article 700 du code de procédure civile seront rejetées.

La société GT Formation, représentée par la SAS Les Mandataires, en qualité de liquidateurs, doit être condamnée aux dépens d'appel.

PAR CES MOTIFS

La Cour,

Statuant par arrêt contradictoire, par mise à disposition au greffe, les parties en ayant été préalablement avisées dans les conditions prévues à l'article 450 du code de procédure civile, en matière prud'homale,

Confirme le jugement entrepris SAUF s'agissant du montant légale de licenciement et à fixer les autres créances au passif de la société

Statuant à nouveau et Y ajoutant,

Fixe les créances de Mme [E] [K] épouse [D] au passif de la liquidation judiciaire de la société GT Formation aux sommes suivantes:

- 2 477,22 euros au titre des commissions de 2014,

- 247,77 euros à titre de congés payés afférents,

- 1 700 euros à titre de rappel de salaire pour la période de mise à pied à titre conservatoire,

- 170 euros à titre de congés payés afférents,

- 5 665 euros à titre d'indemnité compensatrice de préavis,

- 566 euros à titre de congés payés afférents,

- 849,75 euros au titre de l'indemnité légale de licenciement,

- 8 500 euros à titre de dommages et intérêts pour licenciement abusif,

Dit que le jugement d'ouverture de la procédure collective a entraîné l'arrêt des intérêts légaux et conventionnels,

Dit que l'UNEDIC délégation AGS CGEA de [Localité 4] doit sa garantie dans les termes des articles L.3253-8 et suivants du code du travail,

Rejette les autres demandes,

Condamne la société GT Formation, représentée par la SAS Les Mandataires, en qualité de liquidateurs, en qualité de liquidateurs, aux dépens d'appel.

LE GREFFIERPour Mme MARTIN empéchée,

Mme De REVEL en ayant délibéré


Synthèse
Tribunal : Cour d'appel d'Aix-en-Provence
Formation : Chambre 4-3
Numéro d'arrêt : 18/08461
Date de la décision : 29/07/2022

Origine de la décision
Date de l'import : 27/03/2024
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.appel;arret;2022-07-29;18.08461 ?
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