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28/07/2022 | FRANCE | N°18/05759

France | France, Cour d'appel d'Aix-en-Provence, Chambre 1-4, 28 juillet 2022, 18/05759


COUR D'APPEL D'AIX-EN-PROVENCE

Chambre 1-4



ARRÊT AU FOND

DU 28 JUILLET 2022



N°2022/ 110













Rôle N° RG 18/05759 - N° Portalis DBVB-V-B7C-BCG22







[J] [Z] [D]

[T] [D]

[P] [F] [D]





C/



Compagnie d'assurances SWISS LIFE























Copie exécutoire délivrée le :



à :

Me MANSUY

Me MANENT




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Décision déférée à la Cour :



Jugement du Tribunal de Grande Instance à compétence commerciale d'AIX-EN-PROVENCE en date du 13 Février 2018 enregistré(e) au répertoire général sous le n° 11/01242.





APPELANTS



Monsieur [J] [Z] [D]

né le [Date naissance 2] 1944 à [Localité 6], demeurant [Adresse 7]

...

COUR D'APPEL D'AIX-EN-PROVENCE

Chambre 1-4

ARRÊT AU FOND

DU 28 JUILLET 2022

N°2022/ 110

Rôle N° RG 18/05759 - N° Portalis DBVB-V-B7C-BCG22

[J] [Z] [D]

[T] [D]

[P] [F] [D]

C/

Compagnie d'assurances SWISS LIFE

Copie exécutoire délivrée le :

à :

Me MANSUY

Me MANENT

Décision déférée à la Cour :

Jugement du Tribunal de Grande Instance à compétence commerciale d'AIX-EN-PROVENCE en date du 13 Février 2018 enregistré(e) au répertoire général sous le n° 11/01242.

APPELANTS

Monsieur [J] [Z] [D]

né le [Date naissance 2] 1944 à [Localité 6], demeurant [Adresse 7]

représenté par Me Grégoire MANSUY de la SELARL MANSUY GREGOIRE, avocat au barreau D'AIX-EN-PROVENCE

Madame [T] [D]

née le [Date naissance 1] 1946 à [Localité 10], demeurant [Adresse 7]

représentée par Me Grégoire MANSUY de la SELARL MANSUY GREGOIRE, avocat au barreau D'AIX-EN-PROVENCE

Madame [X] [D]

née le [Date naissance 3] 1974 à [Localité 8], demeurant [Adresse 7]

représentée par Me Grégoire MANSUY de la SELARL MANSUY GREGOIRE, avocat au barreau D'AIX-EN-PROVENCE

INTIMEE

Compagnie d'assurances SWISS LIFE Assurances de biens, S.A. au capital de 135.000.000 €, demeurant [Adresse 4]

représentée par Me Muriel MANENT, avocat au barreau D'AIX-EN-PROVENCE

*-*-*-*-*

COMPOSITION DE LA COUR

En application des dispositions des articles 804 et 805 du code de procédure civile, l'affaire a été débattue le 29 Mars 2022 en audience publique, les avocats ne s'y étant pas opposés, devant Madame Rose-Marie PLAKSINE, Présidente de chambre, et Mme Sophie LEYDIER, Conseillère, chargée du rapport.

Mme Sophie LEYDIER, Conseillère, a fait un rapport oral à l'audience, avant les plaidoiries.

Ces magistrats ont rendu compte des plaidoiries dans le délibéré de la cour, composée de :

Madame de Rose-Marie PLAKSINE, Présidente de chambre

Mme Sophie LEYDIER, Conseillère

Mr Nicolas ERNST, vice-président placé

Greffier lors des débats : M. Frank GENIER.

Greffier lors du prononcé : Mme Nathalie BLIN-GUYON

Les parties ont été avisées que le prononcé de la décision aurait lieu par mise à disposition au greffe le 28 Juillet 2022..

ARRÊT

contradictoire,

Prononcée par mise à disposition au greffe le 28 Juillet 2022.

Signé par Madame Rose-Marie PLAKSINE, Présidente de chambre et Mme Nathalie BLIN-GUYON , greffier auquel la minute de la décision a été remise par le magistrat signataire.

Exposé du litige:

Monsieur [J] [D], son épouse [T] [D] et Mademoiselle [X] [D] (les consorts [D]) sont propriétaires d'un domaine d'une surface de 10 hectares composé de bâtiments anciens et de bâtiments nouveaux à usage d'habitation et commercial (restaurant) situés au domaine de [Adresse 9], assuré auprès de la société Swiss Life suivant contrat n°1/034/2625.

Durant le premier semestre de l'année 2002, les consorts [D] ont constaté l'apparition de fissures, tant dans le bâtiment ancien que dans les extensions.

Par arrêté du 11 janvier 2005, l'état de catastrophe naturelle a été reconnu sur la commune d'[Localité 5], en raison des mouvements de terrain différentiels consécutifs à la sécheresse et à la réhydratation des sols de janvier à juin 2002.

Par LRAR du 9 février 2005, les consorts [D] ont déclaré le sinistre auprès de leur assureur, lequel a mandaté le cabinet Eurea aux fins d'expertise amiable.

Suite au dépôt du rapport du cabinet Eurea du 18 mars 2005, l'assureur a informé Monsieur [J] [D] qu'il classait sans suite le dossier dans la mesure où l'expert avait conclu que les dommages ne relevaient pas de la sécheresse de 2002.

Suite aux contestations élevées par Monsieur [J] [D], l'assureur a fait procéder à de nouvelles investigations (études de sols, pose de témoins....).

Les consorts [D] ont ensuite obtenu, par ordonnance de référé du 31 mars 2009, une expertise judiciaire, confiée à Monsieur [G] [A], lequel a clôturé son rapport le 28 février 2010.

Par acte du 9 février 2011, les consorts [D] ont assigné la compagnie d'assurances Swiss Life afin que, par avant dire droit, un nouvel expert soit désigné pour effectuer une contre expertise et qu'il soit sursis à statuer dans l'attente du dépôt de son rapport.

Par jugement contradictoire et avant dire droit du 19 juin 2012, le tribunal de grande instance d'Aix-en-Provence a ordonné une nouvelle expertise confiée à Monsieur [N].

Après plusieurs changement d'experts, Madame [L], expert dernièrement désignée par ordonnance du 29 mai 2013, a déposé son rapport 'en l'état' le 7 octobre 2015.

Par jugement contradictoire du 13 février 2018, le tribunal de grande instance d'Aix-en-Provence a:

- débouté Monsieur [J] [D], son épouse [T] [D] et Mademoiselle [X] [D] de l'ensemble de leurs demandes,

- condamné Monsieur [J] [D], son épouse [T] [D] et Mademoiselle [X] [D] à payer à la compagnie d'assurances Swiss Life la somme de 4 000 euros en application de l'article 700 du code de procédure civile,

- condamné Monsieur [J] [D], son épouse [T] [D] et Mademoiselle [X] [D] aux entiers dépens, dont distraction au profit de la SCP Monier Manant, avocat.

Par déclaration enregistrée au greffe le 30 mars 2018, les consorts [D] ont interjeté appel de cette décision en ce qu'elle a:

- débouté Monsieur [J] [D], son épouse [T] [D] et Mademoiselle [X] [D] de l'ensemble de leurs demandes, notamment au titre de celles-ci:

* Constater l'absence préalable de désordres à la sécheresse de 2002 et la révélation simultanée des désordres à l'occasion de celle-ci, désordres dont les causes seraient multiples, et affectent des bâtiments d'âges et de conception divers,

* juger que les désordres sont en lien direct et déterminant avec la sécheresse de 2002 déclarée à l'état de catastrophe naturelle par arrêté du 11 janvier 2005 paru au Journal Officiel du 1er février 2005,

* juger que la réparation de ces désordres commande une stabilisation des sols par un confortement en sous-'uvre de la bâtisse, avec reprise du bâtiment sur micro pieux,

* condamner la société Swiss Life, au titre de la garantie catastrophe naturelle, à la réparation de la totalité des dommages subis,

* condamner la société Swiss Life à leur payer une somme de 488 437 euros, franchise déduite au titre des travaux de reprise,

Vu l'exécution déloyale du contrat d'assurance et la résistance abusive de la compagnie, la condamner en outre à leur payer:

* une somme de 60 000 euros de dommages et intérêts pour réparation du

préjudice de jouissance subi, celui-ci à parfaire à la date de la décision à intervenir,

* une somme de 100 000 euros à titre de résistance particulièrement abusive,

- dire que ces sommes porteront intérêts au taux légal à compter de l'assignation en justice,

A titre subsidiaire, avant dire droit,

- désigner tel expert avec mission de chiffrer les travaux nécessaires au confortement de l'immeuble, à la reprise des désordres, ainsi que les différents chefs de préjudice subis,

- 'ordonner l'exécution provisoire du jugement à intervenir',

- condamner encore la société Swiss Life au paiement d'une somme de 35 000 euros au titre de l'article 700 du code de procédure pivile et les dépens de l'instance incluant les frais d'expertise,

- condamné Monsieur [J] [D], son épouse [T] [D] et Mademoiselle [X] [D] à payer à la compagnie d'assurances Swiss Life la somme de 4 000 euros en application de l'article 700 du code de procédure civile,

- condamné Monsieur [J] [D], son épouse [T] [D] et Mademoiselle [X] [D] aux entiers dépens, dont distraction au profit de la SCP Monier Manent, avocat.

~*~

Les parties ont exposé leur demande ainsi qu'il suit, étant rappelé qu'au visa de l'article 455 du code de procédure civile, l'arrêt doit exposer succinctement les prétentions respectives des parties et leurs moyens:

Les consorts [D] (conclusions du 30 novembre 2018) sollicitent au visa de l'article L 125-1 alinéa 3 du code des assurances:

- l'infirmation du jugement déféré,

Statuant à nouveau,

- que soit constatée l'absence préalable de désordres à la sécheresse de 2002 et la révélation simultanée des désordres à l'occasion de celle-ci, désordres dont les causes seraient multiples, et affectent des bâtiments d'âges et de conception divers,

- qu'il soit dit et jugé que les désordres sont en lien direct et déterminant avec la sécheresse de 2002 déclarée à l'état de catastrophe naturelle par arrêté du 11 janvier 2005 paru au Journal Officiel du 1er février 2005,

- qu'il soit jugé qu'il ne résulte d'aucun élément du dossier que des mesures quelconques, utiles à prévenir les dommages, auraient pu être prises,

- qu'il soit jugé que la réparation de ces désordres commande une stabilisation des sols par un confortement en sous-'uvre de la bâtisse, avec reprise du bâtiment sur micro pieux, ainsi qu'il résulte de l'avis initial du bureau d'étude Marsud (Pièces 4-10 et 4-11, Pièces adverses 23, 24) et du rapport du bureau d'étude PHT également mandaté par la société Swiss Life (Pièce n°4-17), ainsi que des devis régulièrement et contradictoirement communiqués par les concluants,

En conséquence,

- la condamnation de la société Swiss Life, au titre de la garantie catastrophe naturelle, à la réparation de la totalité des dommages subis,

- la condamnation de la société Swiss Life à payer aux consorts [D]:

* une somme de 488 437 euros franchise déduite au titre des travaux de reprise, * une somme de 70 000 euros de dommages et intérêts pour réparation du préjudice de jouissance subi, celui-ci à parfaire à la date de la décision à intervenir,

* une somme de 100 000 euros à titre de résistance particulièrement abusive,

ces sommes devant porter intérêts au taux légal à compter de l'assignation en justice,

A titre subsidiaire, avant dire droit,

* la désignation de tel expert avec mission de chiffrer les travaux nécessaires au confortement de l'immeuble, à la reprise des désordres, ainsi que les différents chefs de préjudice subis,

En toute hypothèse,

- le rejet de toutes les demandes, fins et conclusions de la société Swiss Life,

- la condamnation de la société Swiss Life au paiement d'une somme de 40 000 euros sur le fondement des dispositions de l'article 700 du code de procédure civile, outre les entiers dépens d'instance et d'appel incluant les frais des expertises judiciaires successivement ordonnées, distraits au profit du cabinet [R].

La société Swiss Life (conclusions du 3 sepotembre 2018) sollicite au visa des dispositions de l'article L 125-1 du code des assurances:

- que ces conclusions soient déclarées recevables et bien fondées,

Faisant valoir que les deux rapports d'expertise judiciaire excluent expressément l'épisode de sécheresse 2002 comme cause déterminante des désordres constatés sur la propriété des consorts [D],

- le rejet de toutes les demandes, fins et conclusions des consorts [D],

- la confirmation du jugement déféré en toutes ses dispositions,

A titre très subsidiaire, si par extraordinaire la cour réformait le jugement entrepris et retenait l'obligation de garantir de la compagnie d'assurances Swiss Life dans le cadre d'une catastrophe naturelle, elle fait valoir que l'épisode de sécheresse 2002 n'est qu'une cause partielle des désordres constatés sur la propriété des consorts [D] et sollicite en conséquence:

* qu'il soit jugé qu'elle ne sera tenue à garantie qu'à hauteur d'une somme de

11 520 euros hors taxes,

* la déduction de cette somme de la franchise contractuelle de 10 %,

* le rejet de la demande formée au titre de la réparation du préjudice de jouissance des consorts [D],

* le rejet de la nouvelle demande d'expertise avec mission de chiffrer les travaux nécessaires au confortement de l'immeuble, à la reprise des désordres ainsi que les divers préjudices subis,

En tout état de cause,

* le rejet des demandes au titre du préjudice de jouissance et de la résistance abusive,

* le rejet des demandes au titre des dispositions de l'article 700 du code de procédure civile et des dépens,

* la condamnation des consorts [D] à lui verser la somme de 4 000 euros en application des dispositions de l'article 700 du code de procédure civile en cause d'appel, outre leur condamnation aux entiers dépens ceux d'appel distraits au profit de la SCP Monier Manent avocat postulant sur son affirmation de droit.

La clôture de la procédure a été prononcée par ordonnance du conseiller de la mise en état du 1er mars 2022.

MOTIFS:

En application de l'article 9 du code de procédure civile : ' Il incombe à chaque partie de prouver conformément à la loi les faits nécessaires au succès de sa prétention.'

Et l'article 1315 du code civil, dans sa rédaction applicable au présent litige, énonce que: 'Celui qui réclame l'exécution d'une obligation doit la prouver.

Réciproquement, celui qui se prétend libéré doit justifier le paiement ou le fait qui a produit l'extinction de son obligation',

Il appartient donc à l'assuré de rapporter d'une part, la preuve du sinistre qu'il invoque, d'autre part, d'établir que les garanties du contrat souscrit par lui doivent être mobilisées, alors que c'est à l'assureur qui dénie sa garantie de prouver que le contrat ne peut recevoir application faute pour l'assuré de remplir les conditions contractuelles.

Sur la mobilisation de la garantie catastrophe naturelle

En vertu des alinéas 3 et 4 de l'article L125-1 du code des assurances:

« Sont considérés comme les effets des catastrophes naturelles les dommages matériels directs non assurables ayant eu pour cause déterminante l'intensité anormale d'un agent naturel, lorsque les mesures habituelles à prendre pour prévenir ces dommages n'ont pu empêcher leur survenance ou n'ont pu être prises.

L'état de catastrophe naturelle est constaté par arrêté interministériel qui détermine les zones et les périodes où se situe la catastrophe ainsi que la nature des dommages résultant de celle-ci couverts par la garantie visée au premier alinéa du présent article».

En l'espèce, la propriété des appelants est constituée de trois corps de bâtiments principaux:

1/ une partie ancienne, construite au début du 18ème siècle, en pierres, sans fondations, composée d'un RDC semi-enterré servant de cuisine pour environ 180 M2 et de trois étages servant d'appartements, pour environ 540 M2,

2/ une partie Ouest, construite en 1970, rattachée au bâtiment principal, composée de 2 salles de restauration, en simple RDC, d'une superficie de 120 M2 environ,

3/ une partie Sud, construite en 1989, rattachée au bâtiment principal et formant L avec la partie Ouest, composée d'une salle de restauration et d'un hall d'accueil d'une superficie de 120 M2 environ.

Après avoir exactement relevé:

- que si le professionel du bureau d'études Marsud mandaté par l'assureur avait précisé dans son compte-rendu du 30 janvier 2006 que 'les désordres (sur l'aggrandissement) semblent indiquer un certain enfoncement des fondations extérieures, les plus éloignées du bâtiment ancien... Une étude de sol a été établie par la société Phénix Hydro Technique. Il en ressort que le sol de fondation actuel est très sensible aux changements d'humidité et qu'il est susceptible d'un phénomène de retrait-gonflement, du type argiles gonflantes', il ne se prononçait pas sur la cause déterminante des fissures constatées affectant le bâtiment principal, pour lequel il précisait qu'il s'agissait de 'fissures non considérables, comme on en rencontre dans la plupart des bâtiments anciens, fissures apparues au cours du temps', ni sur celles affectant l'extension du RDC (pièce 4-10 des appelants),

- que dans son rapport du 28 février 2008, l'expert [A] indiquait avoir constaté la présence de nombreuses fissures dans les parties anciennes et récentes du bâtiment, 'pour certaines anciennes, et pour la plupart s'apparentant à des effets de dilatation de la structure, voire à des effets de flexions', puis se prononçant après les investigations effectuées sur les jauges installées en septembre 2006 et après les investigations géologiques réalisées par le bureau d'études Marsud que 's'il apparaît des fluctuations faibles pouvant être liées à des périodes de sécheresse, celles observées actuellement s'apparentent à des effets de dilatation sur une structure déjà fissurée',

- que s'agissant de la partie récente du bâtiment, l'expert [A] précisait notamment 'il apparait que l'influence déterminante des périodes de sécheresse et de réhydratation sur les mouvements des fondations et donc sur les désordres observés ne peut être retenue que partiellement et que d'autres causes structurelles ont eu également un rôle: dilatation/flexion',

- que s'agissant de la partie ancienne du bâtiment, l'expert [A] indiquait 'l'influence de la sécheresse ne peut non plus être retenue compte tenu d'une part, de la position des désordres dans la structure et de leur évolution semble-t-il très faible qui dénotent une pathologie de vieillissement, et, d'autre part, du fait de la très large protection périphérique apportée par les parties les plus récentes qui contre les influences atmosphériques extérieures; seul le coin Sud Est, et de manière limitée, peut avoir été influencé par le mouvement de refend Est de la salle 2 de l'extension',

- que l'expert [A], sans exclure le rôle de la sécheresse dans la présence des fissures constatées, n'avait pas considéré qu'elle avait eu un rôle déterminant puisqu'il avait conclu 'il ne peut être confirmé que tous ces désordres procèdent de mouvements de fondation dûs aux périodes de sécheresse' et 'qu'il a été considéré que l'influence partielle des périodes de sécheresse restait globalement modérée et n'intéressait que les extensions',

- que dans son jugement du 19 juin 2012, le tribunal d'Aix-en-Provence a donné une mission précise à l'expert [L] en lui demandant d'indiquer si les désordres ont pour cause la sécheresse de 2002, de fournir toute précision par rapport à l'arrêté du 11 janvier 2005, de donner au tribunal tous éléments techniques et de fait pour déterminer la part d'influence de la catastrophe naturelle sécheresse comme cause aggravante ou révélatrice, et en cas de pluralité de causes, d'indiquer la part incombant à chaque cause de manière précise,

- qu'après analyse des différentes pièces qui lui ont été communiquées et suite à ses constatations, l'expert [L] conclut que 'l'origine des désordres réside dans la conception du bâtiment et dans son histoire polyphasée (...) les désordres n'ont pas pour cause des sécheresses en général ni la sécheresse de 2002 en particulier (...) La sécheresse de 2002 n'est pas une cause déterminante des désordres', et sans exclure totalement une part résiduelle de la sécheresse dans l'apparition des fissures, l'expert précise que 'la part de la sécheresse comme cause révélatrice apparaît comme très diluée; elle a pu être le facteur déclenchant de l'apparition des désordres qui auraient fini par se produire et a en cela une part d'influence minime (pièce 41 des appelants),

le premier juge a à juste titre estimé qu'il était parfaitement établi que la sécheresse de 2002 visée par l'arrêté du 11 janvier 2005 n'était pas la cause déterminante des dommages constatés par les consorts [D], de sorte que la garantie catastrophe naturelle n'était pas mobilisable, nonobstant le fait que les dommages soient apparus en 2002, et contrairement à l'analyse et à l'argumentation développées par Monsieur [J] [D].

A ces justes motifs que la cour adopte, il convient seulement d'ajouter:

- que la garantie catastrophe naturelle ne peut être mobilisée que lorsque l'ensemble des conditions prévues par l'article L 125-1 du code des assurances sont remplies, et qu'il incombe exclusivement à l'assuré de démontrer que les dommages matériels directs subis par ses bâtiments ont eu pour cause déterminante l'intensité anormale d'un agent naturel, en l'occurrence ici la sécheresse,

- que contrairement à ce que soutiennent les appelants, l'expert [L] ne s'est pas exclusivement focalisée sur l'existence d'autres causes liées à la construction de l'immeuble, mais elle a examiné les désordres et l'ensemble des pièces produites par les parties, recherché avec méthode les différentes causes pouvant les expliquer, répondu à tous les dires des parties (dont ceux particulièrement détaillés transmis par le conseil des consorts [D]), puis a formellement conclu que la sécheresse n'en était pas la cause déterminante, cette conclusion rejoignant celles formulées par l'expert [A] et les experts mandatés initialement par l'assureur,

- que le fait que les désordres se soient révélés à l'occasion de l'épisode de sécheresse de 2002 n'implique pas nécessairement que la sécheresse de 2002 a été déterminante au sens de l'article L125-1 du code des assurances susvisé, l'expert [L] ayant à cet égard relevé qu'elle avait pu être le facteur déclenchant de l'apparition de désordres qui auraient fini par se produire (page 36 du rapport),

- que l'assureur fait exactement valoir que l'absence de motivation sur l'origine commune de la révélation des désordres par le premier juge importe peu puisqu'il résulte des rapports d'expertise amiable et judiciaires que l'état de sécheresse de 2002 n'est pas la cause déterminante des désordres,

- que la nature du sol n'est pas déterminante en l'espèce puisqu'il résulte de la lecture des jauges posées sur les fissures que les épisodes de sécheresse ultérieurs n'ont entraîné aucune aggravation, ce qui conforte les conclusions des experts susvisés,

- que si l'expert [L] n'a pas pu préciser la part de chacune des causes à l'origine des désordres, il convient de souligner qu'elle n'a pas pu réaliser les investigations techniques plus poussées qu'elle estimait nécessaires pour répondre à ce chef de mission en l'absence de consignation complémentaire des consorts [D], étant par ailleurs observé que l'expert a noté à plusieurs reprises dans son rapport que Monsieur [D] s'était opposé à certaines vérifications qu'elle voulait faire lors des accédits tenus sur les lieux,

- qu'il ne peut être tiré aucune conséquence utile des trois rapports établis le 21 juillet 2016, le 06 janvier et le 10 juillet 2017 par le bureau Veritas (pièces 44, 56 et 62), à la demande de Monsieur [J] [D], sans aucune visite sur site et sur les seuls plans et documents transmis par Monsieur [D], hors le contradictoire des parties et après le dépôt du rapport d'expertise de Madame [L], dès lors que le bureau Véritas, contrôleur technique, a examiné les pièces qui lui ont été remises pour vérifier si les règles relatives à la construction des bâtiments étaient respectées mais n'a aucune compétence pour déterminer les causes du sinistre, qu'aucun élément émanant d'un expert en pathologie des bâtiments reconnu pour son expertise et allant dans le sens de la thèse soutenue par les appelants n'est produit, et qu'il résulte de l'ensemble des investigations entreprises depuis 2005 que l'apparition des fissures s'explique par une pluralité de causes et qu'en toute hypothèse, le caractère déterminant de la sécheresse n'a pu être établi,

- que les appelants ne peuvent sérieusement soutenir que le rapport de l'expert [A] a été définitivement écarté par le premier juge au terme de la décision du 19 juin 2012 devenue définitive (page 18 de leurs écritures), et en même temps se prévaloir des conclusions de cet expert selon lesquelles 'l'influence des périodes de sécheresse et de réhydratation sur les mouvements des fondations peut être retenue dans l'origine des désordres mais de manière partielle' (pages 5 à 7 de leurs écritures), étant au surplus observé qu'il ne peut être déduit de cette dernière affirmation que l'épisode de sécheresse de 2002 seul concerné par l'arrêté de catastrophe naturelle du 11 janvier 2005 constitue la cause déterminante des fissures litigieuses,

- que les appelants ne sont pas fondés à reprocher au premier juge d'avoir tranché le litige en considération des avis techniques des experts explicités ci-dessus, alors que seul des spécialistes de la construction peuvent fournir les éléments techniques permettant d'établir si l'épisode de sécheresse de 2002 visé par l'arrêté de catastrophe naturelle du 11 janvier 2005 constitue la cause déterminante des fissures litigieuses, étant rappelé qu'en l'espèce, les différents avis des techniciens qui se sont penchés sur ce dossier ne sont pas contradictoires mais se rejoignent, et qu'ils ne laissent aucun doute sur l'absence de preuve du caractère déterminant de la sécheresse du premier semestre 2002, en dépit des affirmations des appelants.

En conséquence, le jugement déféré doit être ici confirmé.

Sur les autres demandes

Après avoir exactement relevé que les consorts [D] succombaient en leur demande principale et que l'assureur avait pour de justes motifs refusé de mettre en oeuvre la garantie catastrophe naturelle, le premier juge a à juste titre:

- rejeté leur demande subsidiaire tendant à désigner un nouvel expert pour chiffrer les travaux de reprise,

- rejeté leurs demandes de dommages et intérêts pour préjudice de jouissance et pour résistance abusive.

Et, contrairement à ce que soutiennent les consorts [D], il n'est nullement démontré que l'assureur a exécuté de manière déloyale le contrat, ni qu'il se serait contredit dans son positionnement alors qu'il a toujours dénié sa garantie, qu'il a initié une première expertise amiable, puis a procédé à plusieurs investigations à la demande de son assuré, et qu'il s'est soumis aux différentes opérations d'expertises judiciaire sollicitées par les appelants.

En conséquence, le jugement déféré doit être ici confirmé.

Sur l'article 700 du code de procédure civile et les dépens

Le jugement déféré doit également être confirmé sur ce point.

Succombant, les consorts [D] supporteront les dépens d'appel et devront régler à la SA Swisslife une indemnité complémentaire de 2 000 euros au titre des frais irrépétibles engagés en appel.

PAR CES MOTIFS

LA COUR :

Statuant publiquement, par arrêt contradictoire, après en avoir délibéré conformément à la loi,

CONFIRME le jugement déféré,

et Y AJOUTANT,

CONDAMNE Monsieur [J] [D], Madame [T] [D] et Mademoiselle [X] [D] à payer à la la SA Swisslife une indemnité complémentaire de 2 000 euros au titre de l'article 700 du code de procédure civile,

CONDAMNE Monsieur [J] [D], Madame [T] [D] et Mademoiselle [X] [D] aux dépens d'appel et en ordonne la distraction.

LA GREFFIERELA PRESIDENTE


Synthèse
Tribunal : Cour d'appel d'Aix-en-Provence
Formation : Chambre 1-4
Numéro d'arrêt : 18/05759
Date de la décision : 28/07/2022

Origine de la décision
Date de l'import : 27/03/2024
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.appel;arret;2022-07-28;18.05759 ?
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