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22/07/2022 | FRANCE | N°18/17845

France | France, Cour d'appel d'Aix-en-Provence, Chambre 4-3, 22 juillet 2022, 18/17845


COUR D'APPEL D'AIX-EN-PROVENCE

Chambre 4-3



ARRÊT AU FOND



DU 22 JUILLET 2022



N°2022/ 154



RG 18/17845

N° Portalis DBVB-V-B7C-BDKIT







[S] [X]





C/



Société LABCATAL

Association CGEA ILE DE FRANCE OUEST

SELARL DE BOIS-[U]















Copie exécutoire délivrée

le 22 juillet 2022 à :



-Me Nathalie CAMPAGNOLO, avocat au barreau de MARSEILLE



- Me Alexandr

a BOISRAME, avocat au barreau d'AIX-EN-PROVENCE







- Me Sophie ROBERT, avocat au barreau de MARSEILLE



-Me François ARNOULD, avocat au barreau de MARSEILLE





Décision déférée à la Cour :



Jugement du Conseil de Prud'hommes - Formation de départage...

COUR D'APPEL D'AIX-EN-PROVENCE

Chambre 4-3

ARRÊT AU FOND

DU 22 JUILLET 2022

N°2022/ 154

RG 18/17845

N° Portalis DBVB-V-B7C-BDKIT

[S] [X]

C/

Société LABCATAL

Association CGEA ILE DE FRANCE OUEST

SELARL DE BOIS-[U]

Copie exécutoire délivrée

le 22 juillet 2022 à :

-Me Nathalie CAMPAGNOLO, avocat au barreau de MARSEILLE

- Me Alexandra BOISRAME, avocat au barreau d'AIX-EN-PROVENCE

- Me Sophie ROBERT, avocat au barreau de MARSEILLE

-Me François ARNOULD, avocat au barreau de MARSEILLE

Décision déférée à la Cour :

Jugement du Conseil de Prud'hommes - Formation de départage de MARSEILLE en date du 24 Octobre 2018 enregistré au répertoire général sous le n° 17/00141.

APPELANTE

Madame [S] [X], demeurant [Adresse 2]

représentée par Me Nathalie CAMPAGNOLO, avocat au barreau de MARSEILLE substituée par Me Anne-Sophie MARCELLINO, avocat au barreau de MARSEILLE

INTIMEES

Société LABCATAL, demeurant [Adresse 3]

représentée par Me Alexandra BOISRAME, avocat au barreau d'AIX-EN-PROVENCE

SELARL DE BOIS-[U] pris en la personne de Me [L] [U], « Mandataire liquidateur » de la société INFORMEX, demeurant [Adresse 4]

représentée par Me Sophie ROBERT, avocat au barreau de MARSEILLE substitué par Me Isabelle ROY-MAHIEU, avocat au barreau de PARIS

Association CGEA ILE DE FRANCE OUEST, demeurant [Adresse 1]

représentée par Me François ARNOULD, avocat au barreau de MARSEILLE substitué par Me Julie GRIMA, avocat au barreau de MARSEILLE

*-*-*-*-*

COMPOSITION DE LA COUR

En application des dispositions des articles 804 et 805 du code de procédure civile, l'affaire a été débattue le 03 Mai 2022 en audience publique, les avocats ne s'y étant pas opposés, devant Madame Pascale MARTIN, Président de Chambre, et Madame Estelle DE REVEL, Conseiller, chargées du rapport.

Madame Pascale MARTIN, Président de Chambre, a fait un rapport oral à l'audience, avant les plaidoiries.

Ces magistrats ont rendu compte des plaidoiries dans le délibéré de la cour, composée de :

Madame Pascale MARTIN, Président de Chambre

Madame Ghislaine POIRINE, Conseiller faisant fonction de Président

Madame Estelle DE REVEL, Conseiller

Greffier lors des débats : Madame Florence ALLEMANN-FAGNI.

Les parties ont été avisées que le prononcé de la décision aurait lieu par mise à disposition au greffe le 22 Juillet 2022.

ARRÊT

CONTRADICTOIRE

Prononcé par mise à disposition au greffe le 22 Juillet 2022.

Signé par Madame Pascale MARTIN, Président de Chambre et Madame Florence ALLEMANN-FAGNI, greffier auquel la minute de la décision a été remise par le magistrat signataire.

* * * * * * * * * *

EXPOSE DU LITIGE

La SA Informex a pour objet la promotion médicale auprès des médecins de ville.

La SA Labcatal exerce l'activité de laboratoire pharmaceutique, à savoir l'élaboration et la fabrication de produits pharmaceutiques.

Par convention du 1er octobre 1976, modifiée par plusieurs avenants, notamment le 1er octobre 2002 et reconduite le 2 janvier 2008, la société Informex a conclu avec la société Labcatal un contrat de prestation de services ayant pour objet l'exclusivité de la présentation auprès du corps médical, des produits pharmaceutiques élaborés et fabriqués par la société Labcatal, via des visiteurs médicaux.

Le 2 janvier 2007, un contrat d'assistance en matière d'encadrement, de fonctionnement administratif, de gestion administrative, comptable et paie a été signé entre les deux sociétés, modifié le 2 janvier 2015.

Mme [S] [Z] épouse [X] a été engagée en tant que visiteur médical, selon contrat de travail à durée indéterminée à temps plein à compter du 1er janvier 2006 par la SA Informex.

La relation entre les parties était régie par les dispositions de la convention collective de l'industrie pharmaceutique.

Selon avenant du 17 juin 2011, la société Informex et Mme [X] ont convenu d'une modification portant sur le secteur de prospection de la salariée.

Au cours des mois de février et mars 2016, l'agence nationale de sécurité du médicament et des produits de santé (ANSM) a procédé à une inspection d'établissement pharmaceutique de la société Labcatal au cours de laquelle elle a constaté des manquements relatifs à des dysfonctionnements observés dans les opérations de conditionnement pouvant engendrer un risque de contamination croisée pour les produits fabriqués.

Le 15 mars 2016, la société Labcatal a déposé plainte auprès des service de police pour des malveillances.

Le 16 mars 2016, l'ANSM a informé la société Labcatal qu'elle envisageait de lui enjoindre de prendre des mesures pour une mise en conformité de son établissement et, l'invitait, 'sans attendre la lettre préalable à injonction', à tirer les conséquences de ces constats pour les produits fabriqués et mis sur le marché pour prendre les mesures conservatoires appropriées.

Le 23 mars 2016, la société Labcatal a rompu provisoirement pour une durée de 6 mois le contrat de prestation la liant à la société Informex.

Le 27 avril 2016, l'ANSM a adressé à la société Labcatal une lettre préalable d'injonction.

Le 4 juillet 2016, l'ANSM a enjoint la société Labcatal de :

- finaliser dans un délai de 3 mois les qualifications de l'ensemble des équipements ,

- procéder dans un délai de 3 mois à la validation de l'ensemble des procédés de fabrication,

- évaluer dans un délai de 1 mois l'impact sur les produits fabriqués et mis sur le marché des résultats hors spécifications constatées pour les spécialités OLIGOSOL et de transmettre à l'ANSM les conclusions de ces évaluations ainsi que les décisions prises en conséquence.

Le 5 septembre 2016, la société Labcatal a notifié à la société Informex la rupture définitive de leurs relations.

Par lettre du 31 octobre 2016, la société Informex a, d'une part, informé Mme [X] de son projet de licenciement pour motif économique de tous ses salariés avec impossibilité de reclassement compte tenu de la cessation totale et définitive de son activité et lui a, d'autre part, proposé un contrat de sécurisation professionnelle.

La salariée ayant accepté ce dispositif, la relation de travail a pris fin le 24 novembre 2016.

Le 1er décembre 2016, la société Informex a cessé toute activité.

En cours d'instance, par jugement du 30 août 2017, le tribunal de commerce de Nanterre a prononcé la liquidation judiciaire de la société Informex et désigné la SELARL de Bois-[U], en qualité de liquidateur judiciaire.

***

Contestant son licenciement, Mme [X] a, le 3 janvier 2017, saisi la juridiction prud'homale de Marseille de demandes indemnitaires à l'encontre de la société Informex et de la société Labcatal invoquant la qualité de co-employeur de celle-ci.

Le 24 octobre 2018, le conseil de prud'hommes a statué ainsi qu'il suit:

'DIT n'y avoir lieu de constater une situation de co-emploi entre les sociétés Labcatal et Informex

DIT que le licenciement de Mme [X] repose sur une cause réelle et sérieuse

DIT que la société Informex reste redevable de créances au titre du temps de travail et de l'occupation du domicile de la salariée à des fins professionnelles

FIXE comme suit les créances de Mme [X] sur la liquidation judiciaire de la société Informex:

12 816,94€ au titre de 664,85 heures supplémentaires

1 281,69€ d'incidence congés payés

6 508,46€ au titre de l'indemnité de repos compensateur

650,84€ d'incidence congés payés

1 000€ de dommages-intérêts pour non respect de la durée maximale de travail quotidienne et hebdomadaire

1 200€ d'indemnité d'occupation du domicile privé à des fins professionnelles

1 500€ en application de l'article 700 du code de procédure civile

ENJOINT la SELARL de Bois [U], es qualité de mandataire liquidateur de la société Informex :

à remettre à la salariée un bulletin de salaire récapitulatif des sommes allouées, une attestation Pôle emploi, un certificat de travail et un solde de tout compte rectifiés conformément à la présente procédure

à régulariser la situation de la salariée auprès des organes sociaux

PRECISE que :

les condamnations concernant des créances de nature indemnitaire porteront intérêt au taux légal à compter de la présente décision

les condamnations concernant des créances de nature salariale porteront intérêt au taux légal à compter de la demande en justice

le jugement d'ouverture de la procédure collective le 10 août 2017 a arrêté le cours des intérêts légaux

DIT n'y avoir lieu à exécution provisoire des dispositions du présent jugement qui ne sont pas de plein droit exécutoires par provision

DIT que le CGEA devra garantir les sommes allouées, hormis celles allouées au titre de l'article 700 du code de procédure civile et les dépens, et ce dans la limite de ses plafonds de garantie et sous déduction des sommes qu'il aurait été appelé à avancer

REJETTE toute autre demande

DIT que les dépens de l'instance seront inscrits en frais privilégiés de la procédure collective'.

Le 12 novembre 2018, Mme [X] a interjeté appel du jugement.

PRÉTENTIONS DES PARTIES

Aux termes de ses dernières écritures, transmises par voie électronique le 23 avril 2022, Mme [X] demande à la cour de :

DIRE ET JUGER que les demandes incidentes sont irrecevables ;

REFORMER LA DÉCISION RENDUE PAR LE CONSEIL DE PRUD'HOMMES EN CE QU'IL A :

dit n'y avoir lieu de constater une situation de co-emploi entre les sociétés LABCATAL et INFORMEX ;

dit que le licenciement de Mme [X] repose sur une cause réelle et sérieuse ;

a fixé la créance de Mme [X] sur la liquidation de la société INFORMEX à la somme de 1000€ à titre de dommages et intérêts pour non-respect de la durée maximale de travail quotidienne et hebdomadaire ;

a précisé que les condamnations concernant des créances de nature indemnitaires porteront intérêts au taux légal à compter de la présente décision ;

rejeté les demandes suivantes :

DIRE ET JUGER que l'ancienneté de la salariée doit être fixée au 28/05/2002,

DIRE ET JUGER que le licenciement diligenté par la société INFORMEX est sans cause réelle et sérieuse

DIRE ET JUGER qu'il existe un lien de subordination entre la société LABCATAL et la salariée et à tout le moins une situation de co-emploi entre la société LABCATAL et INFORMEX et la salariée

DIRE ET JUGER que la rupture des relations contractuelles entre la salariée et la société LABCATAL s'analyse en un licenciement sans cause réelle et sérieuse,

CONDAMNER la société LABCATAL au paiement des sommes suivantes :

2580.55 € à titre de rappel de salaire sur prime d'ancienneté outre 258€ de congés payés afférents

10 326€ d'indemnité compensatrice de préavis outre 1 032€ de congés payés afférents;

50 000 € d'indemnité pour licenciement sans cause réelle et sérieuse ;

12 816.94€ à titre de rappel de salaire outre 1 281€ de congés payés afférents ;

20 652 € à titre d'indemnité forfaitaire pour travail dissimulé ;

7 159.30 € de dommages et intérêts pour dépassement du contingent annuel d'heures supplémentaires

5000€ à titre de dommages et intérêts pour dépassement de la durée légale du temps de travail ;

2400€ au titre de l'indemnité d'occupation ;

FIXER la créance au passif de la société INFORMEX aux sommes suivantes :

2580.55 € à titre de rappel de salaire sur prime d'ancienneté outre 258€ de congés payés afférents

10 326€ d'indemnité compensatrice de préavis outre 1 032€ de congés payés afférents ;

50 000 € d'indemnité pour licenciement sans cause réelle et sérieuse ;

20 652 € à titre d'indemnité forfaitaire pour travail dissimulé ;

5000€ à titre de dommages et intérêts pour dépassement de la durée légale du temps de travail ;

CONDAMNER la société INFORMEX et LABCATAL solidairement ;

DIRE ET JUGER que le point de départ des intérêts pour l'ensemble des condamnations est fixé à la date de la saisine de la juridiction de céans.

CONDAMNER les défendeurs au paiement de 2 000€ au titre de l'article 700 du code de procédure civile

CONFIRMER LE JUGEMENT RENDU PAR LE CONSEIL DE PRUD'HOMMES SUR LE RESTE A SAVOIR :

Dit que la société INFORMEX reste redevable des créances au titre du temps de travail et de l'occupation de domicile des fins professionnelles ;

fixe comme suit les créances de [S] [X] sur la liquidation judiciaire de la société INFORMEX :

12 816.94€ au titre de 664.85 heures supplémentaires

1281.69€ d'incidence congés payés

6 508.46€ au titre de l'indemnité de repos compensateur

650.84€ d'incidence congés payés

retient la condamnation de l'employeur à des dommages et intérêts pour non-respect de la durée maximale de travail quotidienne et hebdomadaire ainsi qu'une indemnité d'occupation du domicile privé à des fins personnelles

Fixer la créance à la somme de 1 500€ en application de l'article 700 du code de procédure civile,

A DEFAUT, à titre subsidiaire, et statuant à nouveau :

Sur l'ancienneté

DIRE ET JUGER que l'ancienneté de la salariée doit être fixée au 28/05/2002,

CONDAMNER la société LABCATAL au paiement de la somme de 2580.55 € à titre de rappel de salaire sur prime d'ancienneté outre 258€ de congés payés afférents ;

FIXER la créance au passif de la société INFORMEX à la somme de 2580.55 € à titre de rappel de salaire sur prime d'ancienneté outre 258€ de congés payés afférents ;

Sur la rupture du contrat de travail,

DIRE ET JUGER que le licenciement diligenté par la société INFORMEX est sans cause réelle et sérieuse;

DIRE ET JUGER qu'il existe un lien de subordination entre la société LABCATAL et la salariée et à tout le moins une situation de co-emploi entre la société LABCATAL et INFORMEX et en conséquence,

DIRE ET JUGER que la rupture des relations contractuelles entre la salariée et la société LABCATAL s'analyse également en un licenciement sans cause réelle et sérieuse,

CONDAMNER la société LABCATAL aux mêmes condamnations que la société INFORMEX au titre du double lien de subordination ;

CONDAMNER la société INFORMEX et LABCATAL solidairement en cas de situation de co emploi ;

En conséquence,

CONDAMNER la société LABCATAL au paiement des sommes suivantes :

10 326€ d'indemnité compensatrice de préavis outre 1 032€ de congés payés afférents

50 000 € d'indemnité pour licenciement sans cause réelle et sérieuse ;

FIXER la créance au passif de la société INFORMEX aux sommes suivantes :

10 326€ d'indemnité compensatrice de préavis outre 1 032€ de congés payés afférents

50 000 € d'indemnité pour licenciement sans cause réelle et sérieuse ;

Sur le temps de travail,

DIRE ET JUGER que les heures supplémentaires n'ont pas été rémunérées ;

DIRE ET JUGER que la salariée a dépassé les durées légales du temps de travail sans contrepartie

En conséquence,

CONDAMNER la société LABCATAL au paiement de :

12 816.94€ à titre de rappel de salaire outre 1 281€ de congés payés afférents ;

20 652 € à titre d'indemnité forfaitaire pour travail dissimulé ;

7 159.30 € de dommages et intérêts pour dépassement du contingent annuel d'heures supplémentaires

5000€ à titre de dommages et intérêts pour dépassement de la durée légale du temps de travail ;

FIXER la créance au passif de la société INFORMEX aux sommes suivantes :

12 816.94€ à titre de rappel de salaire outre 1 281€ de congés payés afférents ;

20 652 € à titre d'indemnité forfaitaire pour travail dissimulé ;

7159.30 € de dommages et intérêts pour dépassement du contingent annuel d'heures supplémentaires

5000€ à titre de dommages et intérêts pour dépassement de la durée légale du temps de travail ;

Sur l'indemnité d'occupation du domicile privé à des fins professionnelles :

DIRE ET JUGER qu'il existe une immixtion dans la vie privée de la salariée ;

En conséquence,

CONDAMNER la société LABCATAL au paiement de la somme de 2400€ à titre de dommages et intérêts au titre de l'indemnité d'occupation ;

FIXER la créance de la société INFORMEX à la somme de 2400€ à titre de dommages et intérêts au titre de l'indemnité d'occupation ;

En tout état de cause,

DEBOUTER la société LABCATAL, la société INFORMEX représentée par le liquidateur judiciaire et le CGEA de ses demandes ;

DIRE ET JUGER que les condamnations mises à la charge de la société INFORMEX seront prises en charge par le fond de garantie ;

DIRE ET JUGER que le point de départ des intérêts pour l'ensemble des condamnations est fixé à la date de la saisine de la juridiction de céans.

CONDAMNER chaque défendeur au paiement de 2 000€ au titre de l'article 700 du code de procédure civile ainsi qu'aux entiers dépens

Aux termes de ses dernières écritures, transmises par voie électronique le 6 avril 2022, la société Labcatal demande à la cour de :

'A TITRE PRINCIPAL

Confirmer le jugement entrepris dans toutes ses dispositions en ce qu'il a débouté Madame [S] [X] de toute ses demandes à l'encontre de la Société LABCATAL ;

Dire qu'il n'a existé aucune situation de coempIoi entre les Sociétés INFORMEX et LABCATAL;

Dire qu'il n'a existé aucun lien de subordination entre la Société LABCATAL et Madame [S] [X].

A TITRE SUBSIDIAIRE :

Dire que le licenciement de Madame [S] [X] repose sur une cause réelle et sérieuse et confirmer le jugement entrepris ;

Dire que le reclassement de Madame [S] [X] s'est avéré impossible et confirmer le jugement entrepris ;

Dire que l'ancienneté de Madame [S] [X] est fixée au 1er janvier 2006 et confirmer le jugement entrepris ;

Constater l'absence de travail dissimulé s'agissant de Madame [S] [X] et confirmer le jugement entrepris ;

A TITRE SUBSIDIAIRE EGALEMENT :

Débouter Madame [S] [X] de ses demandes relatives aux rappels de salaire, au dépassement du contingent annuel d'heures supplémentaires, au dépassement de la durée légale du temps de travail et réformer le jugement entrepris ;

Débouter Madame [S] [X] de sa demande d'indemnité au titre de l'occupation de son logement et réformer le jugement entrepris ;

En TOUT ETAT DE CAUSE et en conséquence de :

Déclarer Madame [S] [X] irrecevable ;

Débouter Madame [S] [X] de l'intégralité de ses demandes ;

Condamner Madame [S] [X] à verser à la Société LABCATAL la somme de 2.000 € au titre de l'article 700 du code de procédure civile ;

Condamner Madame [S] [X] aux entiers dépens'.

Aux termes de ses dernières conclusions, transmises par voie électronique le 29 mars 2022, la SELARL de Bois-[U], es qualité de liquidateur judiciaire de la société Informex, demande à la cour de :

'RECEVOIR Maître [L] [U] dans l'intégralité de ses demandes, fins et conclusions et notamment en son appel incident,

CONFIRMER le jugement en ce qu'il a jugé le licenciement fondé sur une cause réelle et sérieuse de licenciement,

CONFIRMER le jugement en ce qu'il a jugé l'absence de co-emploi et de lien de subordination avec la société LABCATAL,

L'INFIRMER pour le surplus en toutes ses dispositions,

DEBOUTER Madame [S] [X] de l'intégralité de ses demandes, fins et conclusions,

RENDRE l'arrêt à intervenir opposable à l'AGS CGEA'.

Aux termes de ses dernières conclusions, transmises par voie électronique le 25 avril 2022, les AGS CGEA d'Ile de France Ouest demandent à la cour de :

'Réformer la décision attaquée en ce qu'elle a fait droit à la demande d'heures supplémentaires et de congés y afférents, à la demande au titre du repos compensateur et les congés y afférents, à la demande de dommages et intérêts pour non respect de la durée maximale de travail quotidienne et hebdomadaire et a l'indemnité d'occupation du domicile privé à des fins professionnelles.

Le confirmer en ce qu'il a rejeté la demande au titre du co-emploi et de condamnation solidaire.

A titre subsidiaire, si le co-emploi est reconnu, dire et juger hors de cause le CGEA sur le fondement du principe de subsidiarité.

En tout état, Débouter Madame [X] [S] de l'ensemble de ses demandes comme étant infondées et injustifiées.

Diminuer le montant des sommes réclamées à titre de dommages et intérêts en l'état des pièces produites.

Dire et juger que si une quelconque somme était allouée au titre de l'indemnité d'occupation, le montant alloué sera déclarée inopposable à l'AGS CGEA.

Débouter Madame [X] [S] de l'ensemble de ses demandes formulées à l'encontre du CGEA en qualité de gestionnaire de l'AGS pour la demande relative à la condamnation aux frais d'huissier en application de l'article L.143-11-1 du Code du Travail.

Débouter Madame [X] [S] de l'ensemble de ses demandes formulées à l'encontre du CGEA pour la demande relative à la condamnation sous astreinte.

Déclarer inopposable à l'AGS ' CGEA la demande formulée par Madame [X] [S] au titre de l'article 700 du CPC

Dire et juger que le jugement d'ouverture de la procédure collective a entraîné l'arrêt des intérêts légaux et conventionnels en vertu de l'article L.622-28 du Code de Commerce.

En tout état constater et fixer en deniers ou quittances les créances de Madame [X] [S] selon les dispositions de articles L 3253 -6 à L 3253-21 et D 3253 -1 à D 3253-6 du Code du Travail.

Dire et juger que l'AGS ne devra procéder à l'avance des créances visées à l'article L3253-8 et suivants du Code du Travail que dans les termes et conditions résultant des dispositions des articles L 3253-19 et L 3253-17 du Code du Travail, limitées au plafond de garantie applicable, en vertu des articles L 3253-17 et D 3253-5 du Code du Travail, et payable sur présentation d'un relevé de créance par le mandataire judiciaire, et sur justification par celui-ci de l'absence de fonds disponibles entre ses mains pour procéder à leur paiement en vertu de l'article L 3253-20 du Code du Travail.'

Pour l'exposé plus détaillé des prétentions et moyens des parties, il sera renvoyé, conformément à l'article 455 du code de procédure civile, aux conclusions des parties.

MOTIFS DE LA DÉCISION

A titre liminaire, la cour rappelle qu'en application des dispositions de l'article 954 du code de procédure civile « la cour ne statue que sur les prétentions énoncées au dispositif » et que les 'dire et juger' et les 'constater' ne sont pas des prétentions en ce que ces demandes ne confèrent pas de droit à la partie qui les requiert hormis les cas prévus par la loi ; en conséquence, la cour ne statuera pas sur celles-ci, qui ne sont en réalité que le rappel des moyens invoqués .

Sur la procédure

La cour constate que Mme [X] ne fait valoir aucun moyen de droit ni de fait à l'appui de sa demande d'irrecevabilité des demandes incidentes, au demeurant non soumise au conseiller de la mise en état.

Il convient par conséquent de rejeter la fin de non recevoir .

Sur le co-emploi

Mme [X] demande à la cour d'infirmer le jugement en ce qu'il n'a pas retenu l'existence d'une situation de co-emploi entre les sociétés Informex et Labcatal.

Elle fait valoir en ce sens que la société Labcatal avait un pouvoir de contrôle, de direction et de sanction à l'égard de tous les salariés de la société Informex, ce qui se traduisait par un double lien de subordination et un contrat de travail avec Labcatal.

Subsidiairement, elle soutient que la situation de co-emploi avec la société Labcatal ressort de l'immixtion de celle-ci dans la gestion de la société Informex, ayant créé une confusion d'intérêts, d'activités et de direction, y compris en l'absence de groupe de sociétés.

Le liquidateur de la société Informex, approuve le jugement ayant écarté l'existence d'un lien de subordination entre Mme [X] et la société Labcatal et la notion de co-emploi.

Il soutient l'absence :

- de groupe au sens du droit du travail,

- d'immixtion permanente de la société Labcatal dans la société Informex,

- d'éléments sérieux établissant une subordination de la salariée à la société Labcatal, au delà des liens issus du caractère particulier et réglementé dans lequel était exercée l'activité, et des conventions d'assistance liant les deux sociétés, nonobstant lesquelles la direction a toujours assuré ses prérogatives d'employeur et fait respecter le lien de subordination existant entre les salariés.

Le CGEA conclut à l'absence de co-emploi dès lors que les deux sociétés ne font pas partie d'un même groupe même si elles peuvent avoir des intérêts communs et que l'existence d'un groupe n'a pas été retenu par l'administration.

Il soutient encore qu'aucune pièce ne permet de considérer que la société Labcatal se serait immiscée dans la gestion de la société Informex qui avait toujours été le seul employeur exerçant les prérogatives attachées à cette qualité.

La société Labcatal demande également la confirmation du jugement entrepris, soutenant pour l'essentiel qu'il n'existait pas de co-emploi en raison d'une absence de groupe, d'une absence de confusion d'intérêts, d'activités et de direction au sein d'un groupe et que, subsidiairement, il n'y avait eu aucune immixtion anormale de sa part dans la société Informex.

Elle fait également valoir qu'il ne peut y avoir de co-emploi fondé sur l'existence d'un lien de subordination en l'absence de contrôle, de direction et de sanction de sa part sur Madame [X] laquelle agissait sous le seul contrôle de la société Informex qui était toujours restée son seul employeur.

***

La situation de co-emploi peut résulter de l'existence d'un lien de subordination du salarié avec l'entreprise co-employeur, cette subordination se caractérisant, par l'exercice des pouvoirs de direction et disciplinaire reconnus à l'employeur.

Hors l'existence d'un lien de subordination, une société faisant partie d'un groupe ne peut être qualifiée de co-employeur du personnel employé par une autre que s'il existe, au-delà de la nécessaire coordination des actions économiques entre les sociétés appartenant à un même groupe et de l'état de domination économique que cette appartenance peut engendrer, une immixtion permanente de cette société dans la gestion économique et sociale de la société employeur, conduisant à la perte totale d'autonomie d'action de cette dernière.

Sans pour autant constituer un groupe, certaines sociétés, constituées en entités juridiquement distinctes pour des raisons liées à la réglementation de leurs activités, font preuve de confusion d'intérêts, de gestion et de fonctionnement identiques à celles qui peuvent exister dans les groupes.

En l'espèce, la cour relève, au vu des pièces produites par l'ensemble des parties, que la société Informex qui assurait l'activité réglementée de promotion médicale par le biais de ses visiteurs médicaux, dont Mme [X], et la société Labcatal exerçant l'activité réglementée de fabrication de produits pharmaceutiques, ont eu une communauté d'intérêts économiques dans la mesure où leurs activités étaient complémentaires.

Elles ont conclu un contrat de prestation de service en 1976 et plusieurs avenants selon lesquels la société Informex s'engageait à assurer la promotion des produits fabriqués par la société Labcatal qui lui fournissait en contrepartie une assistance technique, administrative, comptable et sociale. Il était stipulé qu'elles demeuraient cependant des partenaires commerciaux et professionnels indépendants.

Il n'est pas contesté que, même si le président directeur général de la société Informex était aussi directeur général de Labcatal et qu'elles avaient des associés communs et des intérêts étroitement liés, les deux sociétés étaient indépendantes l'une de l'autre et ne constituaient pas un groupe au sens des articles L.2331-1 et suivants du code du travail et des dispositions spécifiques du code de commerce.

En l'absence de groupe, il convient de rechercher si le co-emploi peut prospérer sur l'existence d'un lien de subordination entre M. [X] et la société Labcatal, au delà de son lien de subordination avec la société Informex.

Au soutien de sa démonstration, Mme [X] produit notamment:

- les entretiens d'évaluation annuelle 2008, 2009, 2011, 2012, 2013, 2014 menés par M. [E], et M. [B] (pièces 32 a, b, c) contenant notamment des demandes d'augmentation de sa rémunération,

- un mail de M. [D], directeur des ventes, à entête Labcatal et Informex, aux visiteurs et délégués médicaux à propos de leurs notes ('validées, à réviser, à réviser et reprendre'),

- un mail de M. [D], adressé aux délégués médicaux, en qualité de Directeur vente et marketing Labcatal, du 21 avril 2010 intitulé 'Respect des consignes administratives' faisant notamment référence aux modalités de prise de congés,

- un mail de M. [D] du 1er juin 2016, à propos de l'acquisition des congés payés pendant la période d'activité partielle,

- un mail de M. [D] du 27 mai 2011 intitulé 'Directives', sur l'urgence de la mauvaise situation des ventes, mettant en place des mesures et directives dans le cadre de l'optimisation de la qualité promotionnelle qui 'seront mesurées, évaluées et sanctionnées en positif ou négatif',

- un mail de M. [D] du 4 janvier 2016 sur la simplification des aspects relatifs au contrôle et à l'évaluation managériale,

- un mail de M. [D] intitulé Politique commerciale et directive 2009 'je vous demande d'être le plus rigoureux possible dans la transmission de vos données, informations, questions...'

- la transmission des notes de frais à remplir par M. [Y], adresse Labcatal (pièces 86, 89),

- un mail de M. [B] du 14 octobre 2015 (adresse mail Labcatal) à l'ensemble des salariés Informex et en copie à certains salariés Labcatal à propos des envois de justificatifs de frais et des enveloppes à envoyer à l'adresse Labcatal,

- un mail de M. [B] du 11 juin 2015 adressé à plusieurs salariés de Informex, dont Mme [X], de rappel à l'ordre à propos des notes de frais,

- un mails de M. [D] à propos de la politique de prospection et des primes exceptionnelles annuelles: 'il est à noter que le suivi de cette politique de prospection sera transmis mensuellement ou trimestriellement, donnera lieu à appréciation lors des évaluations annuelles, constituera l'unique base d'attribution de primes exceptionnelles annuelles, budgetées sur le reliquat de primes de résultat,

- un mail de M. [Y] (directeur des ventes Labcatal) à Mme [E] sur le classement des primes pour le 2e trimestre 2015, validées par M. [F] (Président Informex et directeur général Labcatal) et le courrier envoyé à chaque délégué médical,

- le bilan de l' 'activité terrain' de Mme [X] (pièce 31) établi par Labcatal,

- mail du 16 octobre 2015 sur la validation des jours ARTT de Mme [X].

Pour justifier de ses interventions directes ou par l'intermédiaire de ses salariés, la société Labcatal s'appuie d'une part sur la réglementation, notamment la Charte de la visite médicale signée en 2004, révisée en 2014 pour devenir la charte de l'information par démarchage ou prospection visant à la promotion des médicaments, qui prévoit qu'elle contrôle la visite médicale effectués par les visiteurs médicaux et d'autre part, sur la convention d'assistance selon laquelle elle déléguait ses salariés auprès de Informex.

La cour relève cependant que les interventions de la société Labcatal étaient permanentes et continues et pas cantonnées à une simple assistance telle que prévue par la convention d'assistance en matière d'encadrement, de fonctionnement administratif, de gestion administrative et comptable et de paie. Cette convention précise que les missions confiées à Labcatal consistent essentiellement en du conseil, avis et recommandations et que c'est à Informex qu'il appartient de prendre, sous sa responsabilité, les décisions ou mesures nécessaires à l'objectif poursuivi. Labcatal fournit à titre temporaire et transitoire une assistance en matière de gestion administrative de l'équipe de visiteurs médicaux.

Elle ne peut non plus invoquer la charte, ni le document de procédure des gestion pour justifier le fonctionnement qu'elle avait auprès des salariés de la société Informex et de Mme [X].

En effet, certes la charte prévoit un contrôle de l'activité du délégué médical par le pharmacien responsable qui est en charge de la qualité scientifique et économique des supports utilisés en s'assurant que le délégué médical est correctement formé, et que sont élaborées et appliquées au sein de l'entreprise prestataire les procédures relatives à l'information. C'est cependant l'entreprise prestataire qui met en oeuvre notamment la formation initiale et la formation continue des visiteurs médicaux et leur évaluation annuelle.

Par ailleurs, le référentiel qui prévoit les procédures selon lesquelles est assuré l'encadrement de la visite médicale et des délégués médicaux édicte également que c'est l'entreprise prestataire de visite médicale qui s'assure des connaissances et des compétences de ses délégués médicaux. Si elle permet les vérifications nécessaires par l'entreprise pharmaceutique, c'est elle qui s'assure que ses délégués médicaux disposent des moyens et informations nécessaires à la réalisation de leur mission.

Ce faisant, la cour retient que sous couvert de ces contrats et de ces réglementations, la société Labcatal avait la possibilité de donner directement à Mme [X] des ordres ou des directives relatifs à l'exercice de son travail et qu'elle était en capacité d'en contrôler l'exécution ou d'en sanctionner les manquements.

Elle procédait aux entretiens d'évaluation annuelle qui ne peuvent être regardés comme s'inscrivant seulement dans le cadre du respect de la charte de la visite médicale et du référentiel de certification de la visite médicale (exigence 1et 4). Elle notait Mme [X], elle procédait au contrôle du suivi par celle-ci des procédures initiées par la société Labcatal, elle gérait le contrôle du temps de travail, les congés, les modalités de ceux-ci, les Artt, les frais professionnels, les demandes d'augmentation salariale, les primes.

Ce sont tous les aspects de l'exécution de l'activité salariée de Mme [X] qui étaient assurés par la société Labcatal.

Il y avait des interventions permanentes et continues de la société Labcatal, directement ou par ses propres salariés agissant en cette qualité auprès des salariés de la société Informex et particulièrement de Mme [X].

La société Labcatal a dans les faits et avec la société Informex placé Mme [X] dans un lien de subordination juridique en lui donnant des instructions, en surveillant leur bonne exécution et en ayant le pouvoir, le cas échéant, de la sanctionner, ce pouvoir de sanction disciplinaire découlant de son pouvoir d'évaluer la qualité du travail de Mme [X] et de la noter.

Il a par conséquence existé un double lien de subordination juridique, s'agissant d'une part de celui résultant du contrat de travail avec la société Informex et d'autre part, de celui résultant des conditions dans lesquelles la société Labcatal a donné des ordres à Mme [X], en a assuré le contrôle et, le cas échéant a détenu le pouvoir de sanctionner tout manquement.

Il convient par conséquent d'infirmer le jugement entrepris et de retenir une situation de co-emploi.

Sur l'exécution du contrat de travail

1) Sur les heures supplémentaires

Le liquidateur demande à la cour d'infirmer le jugement ayant retenu l'existence d'heures supplémentaires au motif que le travail réalisé par Mme [X] était régi par un accord d'entreprise selon un forfait jours sans décompte horaire ; subsidiairement, il indique le temps de travail correspondait à un nombre de visite par jour (5,22) qui était contrôlé par Informex et que la salariée ne démontre pas avoir dépassé le nombre de visites.

Le CGEA conclut à l'absence de démonstration par la salariée de l'exécution d'heures supplémentaires.

Dans le même sens, la société Labcatal soutient qu'en application des dispositions conventionnelles spécifiques régissant l'activité de délégué médical, les heures de travail effectuées étaient calculées en nombre de visites lesquelles étaient saisies par Mme [X] puis rigoureusement contrôlées par la société Informex. Elle ajoute que Mme [X] a été rémunérée pour l'ensemble de ses participations à des soirées avec des médecins.

A titre préliminaire, en application de l'article 954 du code de procédure civile, la cour n'a pas à statuer sur l'irrecevabilité soulevée par Mme [X] à l'encontre du liquidateur dont il n'est fait état que dans la partie discussion de ses conclusions, à l'exclusion du dispositif.

En matière de litige relatif à la durée du travail, toutes les heures accomplies au-delà de 35 heures hebdomadaires sont des heures supplémentaires sauf application d'un régime d'équivalence mis en place par voie de convention ou d'accord de branche étendu ou, à défaut, par décret.

Pour le calcul des heures supplémentaires, seules sont prises en compte les heures de travail effectif au sens de l'article L.3121-1 du code du travail qui le définit comme étant le temps pendant lequel le salarié est à la disposition de l'employeur et de conforme à ses directives sans pouvoir vaquer à ses occupations personnelles.

La rémunération forfaitaire s'entend d'une rémunération convenue entre les parties au contrat de travail soit pour un nombre d'heures supplémentaires, soit pour une durée de travail supérieure à la durée légale; la seule fixation d'une rémunération forfaitaire sans que soit déterminé le nombre d'heures supplémentaires inclus dans cette rémunération ne permet pas de caractériser une convention de forfait.

Aux termes de l'article L. 3121-39 du code du travail dans sa version applicable à l'espèce, la conclusion de conventions individuelles de forfait, en heures ou en jours, sur l'année doit être prévue par un accord collectif d'entreprise ou d'établissement ou, à défaut, par une convention ou un accord de branche qui détermine les catégories de salariés susceptibles de conclure une convention individuelle de forfait, ainsi que la durée annuelle du travail à partir de laquelle le forfait est établi et qui fixe les caractéristiques principales de ces conventions.

Il résulte des articles L.3171-2 à L.3171-4 du code du travail qu'en cas de litige relatif à l'existence ou au nombre d'heures de travail accomplies, il appartient au salarié de présenter à l'appui de sa demande, des éléments suffisamment précis quant aux heures non rémunérées qu'il prétend avoir accompli afin de permettre à l'employeur, qui assure le contrôle des heures de travail effectuées, d'y répondre utilement en produisant ses propres éléments. Le juge forme sa conviction en tenant compte de l'ensemble de ces éléments au regard des exigences rappelées aux dispositions légales et réglementaires précitées. Après analyse des pièces produites par l'une et l'autre des parties, dans l'hypothèse où il retient l'existence d'heures supplémentaires, le juge évalue souverainement, sans être tenu de préciser le détail de son calcul, l'importance de celles-ci et fixe les créances salariales s'y rapportant.

En l'espèce, Mme [X] produit aux débats :

- le décompte de ses heures de travail sur la période de novembre 2013 au mois de mai 2016 (avec pause de 30 minutes pour le déjeuner),

- le calcul de la majoration des heures supplémentaires (25% et 50%)

- la copie de ses agendas 2013 à 2016 mentionnant ses rendez-vous chez les médecins visités et ayant servi à réaliser le décompte de ses heures de travail

- un récapitulatif du temps de travail par année,

- les bilans mensuels de frais.

Elle explique qu'étant travailleuse itinérante, les temps de trajet pour se rendre aux rendez-vous sont du travail effectif qui doivent être pris en compte, de même que les temps d'attente chez les médecins. Elle produit en ce sens deux attestations de délégués médicaux sur les difficultés organisationnelles.

Elle indique qu'au delà des visites clients, elle devait effectuer un travail administratif (saisie des rendez-vous, frais,...) d'une durée moyenne quotidienne de 30 minutes de travail effectif.

Elle ajoute qu'elle organisait et participait à des soirées avec les médecins et qu'il s'agissait également de temps de travail effectif qu'il convient de prendre en compte au delà des primes forfaitaires.

Elle considère que le décompte de son temps de travail doit être fait en heures et non en nombre de visites comme soutenu et qu'en tout état de cause, même en se référant au nombre de visites, elle affirme avoir effectué des heures supplémentaires qui n'ont pas été payées.

Elle conteste l'application d'un forfait en jours.

Les éléments produits par la salariée sont suffisamment précis pour que la société Informex prise en la personne de son liquidateur et la société Labcatal puissent répondre et fournir leurs propres éléments.

La cour observe d'abord que les stipulations contractuelles ne permettent pas de caractériser une convention de forfait, aucune clause du contrat de travail n'étant en ce sens.

Selon l'avenant n°2 relatif aux visiteurs médicaux de la convention collective de l'industrie pharmaceutique, leur temps de travail n'est pas décompté en heures mais en nombre de visites soit 123 visites mensuelles pour un temps de travail mensuel de 169 heures.

L'accord d'entreprise du 13 mai 2002 sur la réduction du temps de travail dans la société Informex a fixé les nouvelles modalités d'organisation du travail pour réduire la durée du travail effectif des salariés de 39 heures (222 jours ouvrés dans l'année soit un temps de travail annuel de 1732 heures) à 35 heures hebdomadaires. Il a fixé le nombre minimal annuel de visites des médecins à 1070 pour 205 jours travaillés par an soit une moyenne journalière de 5,22 visites équivalant à 113 visites de médecins pour un mois théorique de 21,66 jours sur une base de 169 heures. Il a exclu du temps de travail effectif les temps de pause, les temps de repas, de congés individuel de formation, les éventuelles périodes d'astreinte en dehors de l'entreprise pendant lesquelles le salarié peut disposer librement de son temps.

Selon cet accord, la réduction du temps de travail est obtenue par une diminution du nombre de jours travaillés. Il est prévu que la durée hebdomadaire de travail reste fixée à 39 heures, du lundi au vendredi, qu'il est accordé 22 jours de repos ATTT, que le nombre annuel de jours de travail est abaissé à 205 et que la durée annuelle du travail est fixée à 1 599 heures, que les éventuelles heures supplémentaires, au delà de l'horaire hebdomadaire moyen, ne peut être effectuées qu'à la demande expresse de la hiérarchie et que le recours aux heures supplémentaires doit rester exceptionnel.

Par conséquent, au vu de la convention collective et de l'accord d'entreprise, le temps de travail de Mme [X] était défini par le nombre de visites mensuelles réalisées fixées à 113 visites; c'est ce nombre qui servait de base à la détermination du seuil de déclenchement des heures supplémentaires.

La cour relève, après analyse des pièces susvisées, qu'il en ressort un dépassement régulier du nombre moyen de visites médicales.

Ainsi, par exemple, la salariée a effectué 35 visites du 1er au 5 juin 2015, 30 visites du 15 au 19 juin 2015, 34 visites du 25 au 29 avril 2016, 27 visites du 4 au 8 avril 2016, 28 visites du 14 au 18 décembre 2016, 31 visites du 16 au 20 février 2015.

Ni le liquidateur, ni la société Labcatal ne produisent de pièces permettant de connaître le nombre exact de visites médicales réalisées par la salariée en vertu de leur pouvoir de contrôle et de contredire les éléments produits.

Il en résulte que Mme [X] est fondée à réclamer le paiement des heures effectuées au delà du nombre moyen de visites mensuelles fixé à 113.

La cour relève encore que la salariée saisissait informatiquement le nombre de visites effectuées et réalisait un travail administratif qui s'ajoutait aux visites médicales.

Mme [X] effectuait de nombreux trajets entre les différents rendez-vous et avait l'obligation de travailler de manière itinérante, de sorte que les temps de trajets doivent être comptés comme du temps de travail.

La participation à des événements et soirées avec des médecins est également du temps effectif de travail et leur indemnisation forfaitaire à hauteur de 80 heures par soirée, sans élément produit par les sociétés employeurs pour justifier le contrôle des heures effectivement travaillées, ne permet pas de s'assurer que cette somme couvre le paiement des heures supplémentaires majorées.

Les heures supplémentaires ont été tacitement acceptées par les sociétés qui connaissaient la charge de travail de la salariée.

Par conséquent, au vu des éléments produits par chacune des parties, comme le conseil de prud'hommes, la cour a la conviction que la salariée a effectué des heures supplémentaires non rémunérées, dont le montant a été justement apprécié dans le jugement entrepris, lequel est confirmé de ce chef.

En l'état du co-emploi, les obligations de la société Informex doivent être étendues à la société Labcatal, de sorte que celle-ci est également tenue au paiement des heures supplémentaires et des congés payés afférents et par conséquent condamnée de ce chef.

2) Sur le travail dissimulé

La dissimulation d'emploi salarié prévue par l'article L. 8221-5 2°du code du travail n'est caractérisée que s'il est établi que l'employeur a, de manière intentionnelle, mentionné sur le bulletin de paie un nombre d'heures de travail inférieur à celui réellement effectué. Le caractère intentionnel ne peut pas se déduire de la seule absence de mention des heures supplémentaires sur les bulletins de paie.

En l'espèce, il ressort des éléments susvisés que l'employeur a fait une mauvaise application des règles légales et conventionnelles sur les heures supplémentaires, ce qui ne permet pas de caractériser une intention frauduleuse.

La demande est rejetée et le jugement confirmé de ce chef.

3) Sur l'indemnisation de l'absence de repos compensateur pour dépassement du contingent annuel des heures supplémentaires

L'article L. 3121-30 du code du travail, dans sa rédaction applicable au litige, dispose que les heures effectuées au delà du contingent annuel ouvrent droit à une contrepartie obligatoire sous forme de repos.

Le salarié qui n'a pas été en mesure, du fait de son employeur, de formuler une demande de repos compensateur a droit à l'indemnisation du préjudice subi. Celle-ci comporte à la fois le montant de l'indemnité de repos compensateur et le montant de l'indemnité de congés payés.

La cour relève, au vu des décomptes produits par Mme [X], non contredits par les éléments apportés par les sociétés intimés, que le contingent annuel des heures supplémentaires a été dépassé sans que la salariée n'ait pu bénéficier de repos compensateur.

Le salarié qui n'a pas été en mesure, du fait de son employeur, de formuler une demande de repos compensateur en temps utile, a droit à l'indemnisation du préjudice subi ; celle-ci comporte à la fois le montant de l'indemnité de repos compensateur et le montant de l'indemnité de congés payés afférents.

En conséquence, elle a droit à des dommages et intérêts d'un montant de 7 159,30 euros comprenant le montant de l'indemnité et les congés payés (6 508,46 euros + 650,84 euros), comme décidé par le premier juge, sans qu'il y ait lieu d'ajouter une autre somme.

La demande de la salariée d'une indemnisation autonome et supplémentaire pour indemniser le dépassement du contingent annuel doit être rejetée comme étant déjà indemnisée.

La société Labcatal, co-employeur, est condamnée au paiement de ces sommes.

4) Sur le non respect de la durée légale du temps de travail

La cour confirme la décision du conseil des prud'hommes ayant constaté, au vu des décomptes produits par la salariée, le dépassement de la durée maximale de temps de travail et ayant justement évalué les dommages et intérêts dus à 1 000 euros.

La société Labcatal est condamnée au paiement de cette somme.

5) Sur l'indemnité d'occupation du domicile

Mme [X] demande à la cour de dire que l'indemnité pour l'utilisation de son domicile personnel à des fins professionnelles s'élève à 2 400 euros (soit 100 euros par mois) et non de 1 200 euros comme jugé par le conseil des prud'hommes.

Les sociétés intimés sollicitent l'infirmation de la décision considérant qu'il n'a jamais été demandée à Mme [X] de travailler à son domicile.

Le CGEA demande l'infirmation de la décision.

Mme [X] effectuait un travail administratif de programmation de rendez-vous, de suivi et de compte rendu de son activité (saisie des visites, des note de frais...) au delà de son travail essentiel de visites médicales effectué de manière itinérante.

Il n'est pas contesté que son employeur lui avait remis du matériel informatique (ordinateur, imprimante, ensemble des documents à remettre à chaque médecin...) et qu'il lui était accordé une demie-journée trimestrielle pour ces tâches.

Son employeur ne lui fournissait en revanche pas de bureau pour ce travail.

Il en résulte que les besoins liés à l'activité professionnelle de la salariée et les conditions de travail de celle-ci, créées par l'employeur, rendaient nécessaire l'utilisation d'une partie de son domicile pour son activité professionnelle.

Il s'ensuit que Mme [X] peut prétendre à une indemnité au titre de l'occupation de son domicile à des fins professionnelles, au moins pour partie, en faveur de la société Labacatal et de la société Informex.

Etant relevé que le téléphone était payé par l'employeur, et faute par la salariée de préciser son calcul à l'origine de sa demande, il convient de confirmer la décision ayant fixé à 1 200 euros le montant de l'indemnité d'occupation de son domicile à des fins professionnelles.

La société Labcatal est condamnée au paiement de cette somme.

6) Sur l'ancienneté

Soutenant avoir été initialement embauchée par la société AC Réseaux en mai 2002 qui était liée à la société Informex par un contrat de prestation de service, en qualité de délégué médical, Mme [X] reproche au premier juge d'avoir rejeté sa demande de rappel de salaire sur prime d'ancienneté.

Il ressort des pièces versées que le contrat entre la société Informex et AC Réseaux a été résilié en 2003 et que cette dernière a cessé son activité le 30 mars 2006. Mme [X] a démissionné de cette société avant d'être embauchée par la société Informex qui ne reprenait qu'une partie des salariés de la société AC Réseaux.

En conséquence, en l'état de la rupture telle qu'exposée, Mme [X] ne peut invoquer une ancienneté supérieure à celle résultant du contrat de janvier 2006.

La demande doit être rejetée et le jugement confirmé de ce chef.

Sur le licenciement

Mme [X] soutient que le licenciement dont elle a fait l'objet est sans cause réelle et sérieuse pour les motifs suivants:

- il n'est pas démontré que les contrats des salariés protégés aient été rompus;

- il n'est pas justifié que la procédure de licenciements collectifs ait été respectée faute de production des procès-verbaux des comptes rendus de réunion des délégués du personnel signés;

- le motif économique ne repose que sur les difficultés économiques rencontrées par la société Labcatal;

- l'arrêt de l'activité de la société Labcatal n'est que partiel et est la conséquence de ses propres négligences;

- la société Informex a agi avec une légèreté blâmable en acceptant la rupture du contrat qui la liait à la société Labcatal par celle-ci sans essayer de la dissuader ;

- la société Informex ne justifie d'aucune recherche sérieuse de reclassement.

- la société Labcatal n'a pas fait application des règles de licenciement lors de la rupture du contrat.

Le liquidateur de la société Informex indique que Mme [X] conteste le motif économique de son licenciement, sans toutefois remettre en cause sérieusement la cessation totale d'activité de son employeur.

Il soutient que celle-ci suivie d'une liquidation judiciaire donne au motif économique du licenciement un caractère réel et sérieux et qu'il n'est établi aucune fraude ou légèreté blâmable.

Il affirme qu'il a été procédé à une recherche de reclassement sérieuse, puisque même si une recherche de reclassement externe n'est pas obligatoire, une telle recherche a tout de même été effectuée auprès de la société Labcatal, sans succès.

Le CGEA fait valoir que la cessation d'activité constitue un motif économique légal justifiant le licenciement et que l'obligation de reclassement a été parfaitement respectée.

La société Labcatal souligne la réalité des difficultés économiques en l'état de la cessation d'activité de la société Informex qui correspond à un motif expressément visé par l'article L.1233-3 du code du travail, et de l'absence de groupe, ainsi que de l'impossibilité de reclassement de Mme [X], malgré les recherches effectuées. Concluant à l'absence de co-emploi, elle conteste toute condamnation à son encontre.

La situation de co-emploi fondée sur la reconnaissance de deux liens de subordination en dehors de tout groupe ayant été retenue par la cour, chaque employeur de Mme [X] était tenu de mettre en oeuvre et de respecter les règles de licenciement.

S'agissant de la société Informex :

La lettre de licenciement qui fixe les termes du litige est libellée comme suit :

« Nous envisageons de rompre votre contrat de travail pour le motif économique suivant: En raison de difficultés économiques graves, la société INFORMEX est contrainte de cesser complètement son activité sans qu'il ne soit possible de vous reclasser à ce jour.

En effet, la société INFORMEX est une Société Anonyme dont l'activité réglementée est la fourniture de prestations de promotion médicale de spécialités pharmaceutiques auprès des professionnels de santé (médecins et pharmaciens).

Le contexte de l'activité de visite médicale est spécifique : il s'agit d'une activité réglementée, dans le secteur de la santé publique où l'exclusivité a toute son importance.

Dans ce cadre, la société INFORMEX, qui est l'employeur de 33 Délégués Médicaux, dont vous faites partie, répartis sur le territoire national métropolitain, de 2 Responsables Régionaux, managers des Délégués Médicaux sur le terrain et de 3 employés administratifs chargés du suivi de l'activité des Délégués sur le terrain, fournit ses prestations de promotion médicale à la société LABCATAL, son client unique depuis les années 1970.

La SA LABCATAL rencontre, depuis le 2ème trimestre 2016, de graves difficultés dans son activité qui l'ont contrainte à une suspension totale de sa production et par voie de conséquence de sa commercialisation.

Privée de chiffre d'affaires depuis plus de 6 mois, elle est dans l'obligation économique de réduire drastiquement ses charges, dont celles liées à la promotion médicale, si elle veut revenir sur le marché quant elle sera en mesure de reprendre sa production. C'est ainsi qu'elle a d'abord suspendu le 23 mars 2016 pour une durée de 6 mois le contrat commercial qui la liait à son prestataire INFORMEX. Elle a ensuite été contrainte de le rompre quant elle a constaté que sa situation ne se restaurait pas conformément à ses prévisions et s'aggravait.

Pour faire face aux difficultés économiques engendrées par la situation, qu'elle considérait comme graves mais temporaires, et sauvegarder son activité et ses emplois sur le long terme, la SA INFORMEX a d'abord fait appel au dispositif d'activité partielle, qui lui a été accordé par la DIRECCTE, le 13 mai 2016, pour une durée maximale de 6 mois.

Cette solution alternative et temporaire s'est toutefois révélée insuffisante, puisque la SA LABCATAL, elle-même en situation de difficultés économiques persistante, du fait de la non reprise, à ce jour et pour une durée encore indéterminée, de ses activités industrielles et commerciales, n'a plus les moyens de recourir à la promotion médicale pour promouvoir ses spécialités auprès des professionnels de santé.

Le contexte économique difficile que traverse actuellement l'industrie pharmaceutique et plus particulièrement l'activité de promotion médicale, malmenée par les instances de la santé, explique que les recherches de clientèles nouvelles entreprises par la SA INFORMEX aient échoué et que ses actions de reclassement professionnel n'aboutissent pas.

Privée de ressources, la SA INFORMEX, se voit contrainte d'envisager le licenciement économique de l'ensemble de son personnel, du fait de la cessation complète et définitive de son activité.

Aucun reclassement n'a pu être trouvé à ce jour vous concernant.

Contrat de sécurisation professionnelle (...).»

L'existence d'un groupe n'étant pas établie en l'espèce, le périmètre d'appréciation de la cause économique du licenciement est donc exclusivement celui de la société Informex.

La cause économique invoquée dans la lettre de licenciement est la cessation de l'activité de la société Informex. Celle-ci a été effective au 1er décembre 2016. Il est constant que la cessation d'activité est une cause économique autonome, les causes de cette cessation étant sans effet, sauf faute ou légèreté blâmable de l'employeur.

Les simples erreurs de prévision ou de gestion ne peuvent caractériser la légèreté blâmable.

En l'espèce, il ne peut être reproché à la société Informex de n'avoir eu qu'un seul client pendant près de 40 ans, s'agissant d'un choix de gestion. Aucun élément ne permet par ailleurs de remettre en cause et de reprocher les graves difficultés qu'a rencontré la société Labcatal à partir du mois de mars 2016 suite à la contamination détectée, indépendamment de son origine accidentelle ou intentionnelle, ni les répercussions de celles-ci sur sa propre activité et sur celle de son partenaire, en raison d'une part des injonctions et mises en garde de l'ANSM et d'autre part de sa propre décision d'arrêter la production pour faire cesser les contaminations.

Dans ce contexte, la société Informex ayant vu le contrat de prestation de service suspendu provisoirement à partir du 23 mars 2016 puis définitivement résilié le 5 septembre suivant, a d'abord temporisé en obtenant le 13 mai 2016, l'autorisation de placer son établissement en activité partielle pour la période du 17 mai au 16 novembre 2016 pour 41 salariés. Il ne peut lui être reproché de ne pas avoir attendu plus longtemps une reprise de la production par Labcatal dans la mesure où elle ne pouvait laisser perdurer une situation financière s'aggravant, tel que cela ressort des documents comptables produits montrant une chute du chiffre d'affaires et des résultats d'exploitation ayant conduit à la cessation des paiements. Elle n'avait d'autre choix que la rupture de sa relation avec Labcatal. Aucun préavis contractuel n'était stipulé.

La transaction intervenue entre Labcatal et Informex homologuée par le juge commissaire portant sur le versement par la première d'une somme de 75 000 euros à la seconde au titre d'une indemnisation ne peut être regardée comme manifestant une faute de gestion de la part de la société Informex au vu de l'objet restreint de cette transaction portant sur l'absence de préavis et de la situation économique inéluctable de la société.

En l'absence de faute ou de légèreté blâmable, la cause économique du licenciement est donc acquise.

Aucune possibilité de reclassement interne n'était envisageable, du fait de la cessation d'activité.

Le liquidateur de la société Informex justifie d'une recherche de reclassement auprès de la société Labcatal, client de la société Informex, par courrier du 28 septembre 2016 avec une réponse le 3 octobre suivant puis par courrier du 6 octobre 2016. Seuls trois postes de pharmacien étaient disponibles, ce qui est confirmé par la production aux débats du registre d'entrée et de sortie du personnel. Or, Mme [X] n'ayant pas le diplôme de pharmacien, aucune proposition de reclassement ne pouvait lui être faite.

Sans y être contrainte, la société Informex a, en vain, étendu ses recherches de reclassement externe, à une société Phropharma le 6 avril 2016.

Il résulte des dispositions de la convention collective, article 2B de l'accord du 20 avril 2006 abrogeant et remplaçant l'accord du 1er décembre 1987, que la commission paritaire de l'emploi est tenue informée des licenciements pour raisons économiques intervenus dans la profession, portant sur au moins 10 salariés appartenant au même établissement dans une période de 30 jours et que dans ce cadre elle pourra examiner les conditions de mise en oeuvre des moyens d'aide au reclassement des salariés concernés. D'un commun accord entre la direction et le comité d'entreprise ou d'établissement, ou si le projet de licenciement pour raisons économiques porte sur au moins 10 salariés dans une même période de 30 jours, les difficultés éventuellement survenues au sujet de ce projet au sein du comité d'entreprise ou d'établissement seront examinées par cette commission et que 'à cette occasion, en vue de contribuer à la recherche d'une solution elle pourra prendre toutes dispositions pour faciliter une réunion des parties au niveau le plus utile et pourra solliciter la collaboration des représentants des administrations et organismes exerçant une mission dans le domaine de la formation, de l'emploi ou du placement. Il en résulte qu'elle n'intervient, dans le premier cas, qu'après que les licenciements soient intervenus, alors que l'obligation de reclassement de l'employeur naît au moment où le licenciement est envisagé, jusqu'à sa notification, ce en vue d'éviter le licenciement, de sorte que le défaut d'information à cette commission des licenciements intervenus ne caractérise pas de manquement de l'employeur à l'obligation de reclassement; dans le second cas, qu'elle peut exercer une mission en matière de reclassement, mais accessoirement et dans le cadre d'une saisine portant sur des difficultés dans le cadre du plan. Il résulte de l'examen de l'article 2B susvisé qu'il ne met pas à la charge de l'employeur une obligation de saisine préalable de la commission paritaire de l'emploi destinée à favoriser un reclassement à l'extérieur de l'entreprise dont la méconnaissance priverait le licenciement de cause réelle et sérieuse.

Contrairement à ce que soutient Mme [X], aucun manquement à l'obligation de reclassement n'est donc caractérisé, celle-ci ayant été mise en 'uvre de façon loyale et sérieuse.

En conséquence, le licenciement notifié par la société Informex à Mme [X] est justifié par une cause réelle et sérieuse, de sorte qu'elle doit être déboutée de l'ensemble de ses demandes de ce chef et le jugement confirmé.

S'agissant de la société Labcatal

Il ne peut être contesté que la société Labcatal n'a pas mis en oeuvre de procédure de licenciement à l'encontre de Mme [X], ni justifié d'aucun motif qu'il soit personnel ou économique pour rompre le contrat. Aucun travail n'a par ailleurs été fourni à la salariée postérieurement à la rupture notifiée par Informex.

Il en résulte un licenciement sans cause réelle et sérieuse.

Compte tenu de l'ancienneté de la salariée ( 11 ans) dans une entreprise comptant plus de 11 salariés, du salaire brut mensuel de Madame [X] fixé à 3 442,75 euros (au vu des douze derniers mois précédents sa mise au chômage partiel), de son âge (40 ans), de sa situation après la rupture (inscrite à Pôle Emploi), il convient d'évaluer à la somme de 33 500 euros le montant des dommages et intérêts pour licenciement sans cause réelle et sérieuse dus par la société Labcatal.

La salariée a également droit à une indemnité compensatrice de préavis d'une durée de trois mois en application de la convention collective, soit la somme de 10 326 euros, outre 1 032 euros au titre des congés payés afférents.

V. Sur les autres demandes

Les sommes au paiement desquelles la société Labcatal a été condamnée porteront intérêt au taux légal à compter de la demande en justice s'agissant des créances salariales et à compter de l'arrêt pour les créances indemnitaires.

La société Labcatal doit être condamnée à remettre à la salariée un bulletin de salaire récapitulatif des sommes allouées, une attestation Pôle emploi, un certificat de travail et un solde de tout compte rectifiés conformément à la présente procédure et à régulariser la situation de la salariée auprès des organes sociaux.

L'équité commande de condamner la société Labcatal à payer à Mme [X] la somme de 1 200 euros au titre de l'article 700 du code de procédure civile.

Les dépens resteront à la charge de la société Labcatal et de la société Informex, représentée par le liquidateur judiciaire.

PAR CES MOTIFS

La Cour,

Statuant par arrêt contradictoire, par mise à disposition au greffe, les parties en ayant été préalablement avisées dans les conditions prévues à l'article 450 du code de procédure civile, en matière prud'homale,

Rejette la fin de non recevoir soulevée,

Confirme le jugement entrepris SAUF en ses dispositions relatives:

- à la situation de co-emploi,

- au rejet des demandes à l'encontre de la société Labcatal,

Statuant à nouveau des chefs infirmés et Y ajoutant:

Dit qu'il existe un lien de subordination entre Mme [S] [X] et la société Labcatal et une situation de co-emploi,

Dit que le licenciement de Mme [X] est sans cause réelle et sérieuse à l'encontre de la société Labcatal,

Condamne la société Labcatal à payer à Mme [X] les sommes suivantes :

- 12 816,94 euros au titre des heures supplémentaires,

- 1 281,69 euros à titre de congés payés afférents,

- 7 159,30 euros au titre de l'indemnité pour dépassement du contingent annuel des heures supplémentaires,

- 1 000 euros à titre de dommages et intérêts pour non respect de la durée légale de travail,

- 1 200 euros au titre de l'indemnité d'occupation du domicile à des fins professionnelles,

- 10 326 euros au titre de l'indemnité compensatrice de préavis,

- 1 032 euros au titre des congés payés afférents,

- 33 500 euros à titre de dommages et intérêts pour licenciement sans cause réelle et sérieuse,

- 1 200 euros au titre de l'article 700 du code de procédure civile,

Dit que les sommes porteront intérêt au taux légal à compter de la demande en justice concernant les créances salariales et à compter de l'arrêt pour les créances indemnitaires,

Rejette les demandes de Mme [X] relatives à son ancienneté et au travail dissimulé,

Condamne in solidum la société Informex représentée par le liquidateur judiciaire et la société Labcatal aux dépens d'appel.

LE GREFFIER LE PRESIDENT


Synthèse
Tribunal : Cour d'appel d'Aix-en-Provence
Formation : Chambre 4-3
Numéro d'arrêt : 18/17845
Date de la décision : 22/07/2022

Origine de la décision
Date de l'import : 27/03/2024
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.appel;arret;2022-07-22;18.17845 ?
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