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28/06/2022 | FRANCE | N°19/08047

France | France, Cour d'appel d'Aix-en-Provence, Chambre 1-1, 28 juin 2022, 19/08047


COUR D'APPEL D'AIX-EN-PROVENCE

Chambre 1-1



ARRÊT AU FOND

DU 28 JUIN 2022

D.D. / A.S.

N° 2022/254













Rôle N° RG 19/08047 - N° Portalis DBVB-V-B7D-BEJDN







SCI FLORETTE





C/



[E] [U]

[P] [U]





















Copie exécutoire délivrée

le :

à :



Me Jean-Marc SZEPETOWSKI



Me Thimothée JOLY





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Décision déférée à la Cour :



Jugement du Tribunal de Grande Instance de NICE en date du 06 Mai 2019 enregistré (e) au répertoire général sous le n° 17/00814.





APPELANTE



SCI FLORETTE, prise en la personne de son représentant légal

demeurant [Adresse 2]

représentée par Me Jean-Marc SZEPETOWSKI, avocat...

COUR D'APPEL D'AIX-EN-PROVENCE

Chambre 1-1

ARRÊT AU FOND

DU 28 JUIN 2022

D.D. / A.S.

N° 2022/254

Rôle N° RG 19/08047 - N° Portalis DBVB-V-B7D-BEJDN

SCI FLORETTE

C/

[E] [U]

[P] [U]

Copie exécutoire délivrée

le :

à :

Me Jean-Marc SZEPETOWSKI

Me Thimothée JOLY

Décision déférée à la Cour :

Jugement du Tribunal de Grande Instance de NICE en date du 06 Mai 2019 enregistré (e) au répertoire général sous le n° 17/00814.

APPELANTE

SCI FLORETTE, prise en la personne de son représentant légal

demeurant [Adresse 2]

représentée par Me Jean-Marc SZEPETOWSKI, avocat au barreau de NICE

INTIMES

Monsieur [E] [J] [Z] [U],

demeurant [Adresse 5]

représenté par Me Thimothée JOLY, avocat au barreau d'AIX-EN-PROVENCE substitué par Me Amandine WEBER, avocat au barreau d'AIX-EN-PROVENCE, assisté par Me Olivier TAFANELLI, avocat au barreau de NICE

Madame [P] [Y] épouse [U],

demeurant [Adresse 5]

représentée par Me Thimothée JOLY, avocat au barreau d'AIX-EN-PROVENCE substitué par Me Amandine WEBER, avocat au barreau d'AIX-EN-PROVENCE, assisté par Me Olivier TAFANELLI, avocat au barreau de NICE

*-*-*-*-*

COMPOSITION DE LA COUR

L'affaire a été débattue le 24 Mai 2022 en audience publique. Conformément à l'article 804 du code de procédure civile, Mme Danielle DEMONT, Conseiller, a fait un rapport oral de l'affaire à l'audience avant les plaidoiries.

La Cour était composée de :

Monsieur Olivier BRUE, Président

Mme Danielle DEMONT, Conseiller

Mme Sophie LEYDIER, Conseillère

qui en ont délibéré.

Greffier lors des débats : Mme Agnès SOULIER.

Les parties ont été avisées que le prononcé de la décision aurait lieu par mise à disposition au greffe le 28 Juin 2022.

ARRÊT

Contradictoire,

Prononcé par mise à disposition au greffe le 28 Juin 2022,

Signé par Monsieur Olivier BRUE, Président et Mme Colette SONNERY, greffier auquel la minute de la décision a été remise par le magistrat signataire.

***

EXPOSE DU LITIGE

Par acte authentique en date du 30 janvier 2009, la SCI Florette a vendu en l'état futur

d'achèvement à M. [E] [U] et à Mme [P] [Y] épouse [U], un appartement de trois pièces d'une surface de 55 m² situé à [Localité 6], dans l'ensemble immobilier « Impérial Plaza » les lots n° [Cadastre 3] et n°[Cadastre 1], sis [Adresse 5], au prix de 237 500 €.

L'acte contient une clause dite « anti-spéculative », prévoyant d'une part, d'interdire pour l'acquéreur de procéder à la revente du bien avant l'expiration d'un délai de 10 ans, étant précisé que dans l'hypothèse inverse, celui-ci serait redevable d'un supplément de prix ( 1 000 € par mètre carré habitable), et d'autre part, l'obligation d'affecter le bien « à son usage personnel de résidence principale », en s'interdisant « toute location pendant ladite durée de 10 ans. »

Ayant été informé que les époux [U] n'habitaient pas personnellement le bien acquis et qu'ils procédaient à la location de celui-ci, la SCI Florette a assigné M. [E] [U] et Mme [P] [Y] épouse [U] en paiement du complément de prix.

Par jugement en date du 6 mai 2019 le tribunal de grande instance de Nice a débouté la SCI Florette de toutes ses demandes, et l'a condamnée à payer à M. [E] [U] et à Mme [P] [Y] épouse [U] la somme de 2000 € de l'article 700 du code de procédure

outre les dépens.

Le 16 mai 2019 la SCI Florette a relevé appel de cette décision.

Par conclusions du 14 juin 2021, cette société demande à la cour, au visa des articles 1103 et suivants du code civil, de réformer le jugement entrepris en toutes ses dispositions, à titre principal, de condamner les époux [U] à lui payer la somme de 71'167 47 € avec intérêts au taux légal à compter de la demande, à titre subsidiaire, dans l'hypothèse où la cour refuserait de faire application de la clause pénale, de les condamner à lui payer la somme de 96'222,60 €, avec intérêts au taux légal à compter de la demande, et de les condamner à lui verser la somme de 6 000 €, au titre de l'article 700 du code de procédure civile, outre les dépens, avec distraction.

Par conclusions du 11 septembre 2019, M. [E] [U] et Mme [P] [Y] épouse [U] demandent à la cour de confirmer le jugement entrepris en toutes ses dispositions, de débouter l'appelante de toutes ses demandes, et de la condamner à leur payer la somme de 4 500€, au titre de l'article 700 du code de procédure civile, outre les dépens avec distraction.

La cour renvoie aux écritures précitées pour l'exposé exhaustif des prétentions et moyens des parties.

Motifs

Attendu que la SCI Florette fait valoir au soutien de son appel que la commune de [Localité 6], dans le cadre de la loi Solidarité et Renouvellement Urbain (SRU), loi de solidarité sociale en matière d'habitat visant à favoriser l'accession à la propriété d'actifs locaux, a imposé aux promoteurs de réserver une partie des logements qu'ils réalisaient sur le territoire communal acquis à des conditions favorables, à une condition de résidence personnelle et d'interdiction de location pendant 10 ans ; qu'apprenant que les époux [U] habitaient [Adresse 4] dans un autre appartement dont ils sont propriétaires, la société Florette a fait prendre des clichés par un cabinet agence Azur investigations, le 30 septembre 2016, du parlophone de cette adresse sur lequel figure le nom des époux [U] ; qu'ensuite, par ordonnance du président du tribunal de grande instance de Nice du 21 octobre 2016, elle a été autorisée à mandater un huissier de justice afin de se rendre au [Adresse 4] pour établir cette présence sur le parlophone de l'immeuble et sur les boîtes aux lettres du nom des époux [U], et pour se rendre [Adresse 5] dans l'immeuble acquis auprès de la SCI Florette, pour faire toutes constatations sur l'identité des personnes occupant l'appartement ainsi que sur les conditions de cette occupation ; que Me [M] s'est ainsi présenté au [Adresse 4] où il a rencontré la mère de M. [E] [U], Mme [Z] [U], laquelle lui a indiqué que son fils, sa femme et leurs enfants habitaient les lieux ; qu'il a dressé procès-verbal aux termes duquel celle-ci lui a déclaré : « Cet appartement sis [Adresse 4] constitue le domicile de M. [E] [U] et de Mme [P] [U] et de leurs enfants » ; que leur appartement à « l'Impérial Plaza, devenu trop petit pour la famille, est occupé provisoirement par un ami » ; que l'huissier s'est présenté ensuite à l'appartement de l'Impérial Plaza, où personne ne lui a ouvert ; qu'il en résulte que les époux [U] ont méconnu les obligations figurant dans l'acte d'acquisition ; et qu'ils n'ont pas respecté la contrepartie du prix dérogatoire dont ils avaient bénéficié, consistant dans l'occupation personnelle du bien à titre de résidence principale ;

Attendu que la SCI Florette prétend en conséquence au bénéfice de la clause pénale figurant à l'acte pour obtenir la condamnation des époux [U] à lui payer la somme de 1000 € indexée, le mètre carré habitable pour 55,62 m2, ce qui conduit à une indemnité à son profit de 71 167,47€ TTC, augmentée des intérêts au taux légal à compter de la demande ;

Que si, pour s'opposer au versement du complément de prix stipulé à l'acte de vente, les époux [U] répondent que la sanction financière d'un montant de 1000 € par mètre carré n'a été prévue que dans l'hypothèse d'une vente intervenant à l'intérieur du délai décennal et non d'une location, cette dernière eût-elle été prohibée, l'appelante estime pour sa part que la sanction contractuelle doit s'appliquer dès lors que l'une des prohibitions contractuelles n'a pas été respectée, puisqu'il existe deux interdictions à l'intérieur de la durée de 10 années

- celle de vendre,

- et celle de louer (de ne pas habiter personnellement) ;

*

Mais attendu que l'acte authentique stipule, en page 13 :

« En conséquence de ce qui précède , et en contrepartie de l'avantage financier ainsi accordé à l'acquéreur aux présentes, répondant à un objectif d'intérêt général et constituant un motif sérieux et légitime,

les parties déclarent:

Que le prix de vente stipulé aux présentes tient compte de ce dispositif spécifique,

Et de convention expresse entre eux, il est convenu qu'en cas de cession du, objet des présentes, pour quelque cause que ce soit, dans les dix ans de la signature de l'acte authentique de vente, par l'acquéreur aux présentes lui même et/ou par ses ayants cause ou ayants droit, ce dernier sera alors redevable envers le vendeur aux présentes d'un complément de prix fixé forfaitairement à MILLE EUROS (1.000 €) HORS TAXES du mètre carré habitable présentement acquis (55,62 rn2), soit la somme de 55.620,00 euros hors taxes.

Cette somme sera automatiquement due le jour de la cession du bien présentement vendu par l'acquéreur aux présentes.

l'acquéreur aux présentes disposera alors d'un délai de QUINZE jours à compter de cette mutation, pour verser le complément de prix entre les mains du vendeur aux présent acte ou son représentant.

En outre, et afin que cette somme reste en rapport avec le coût de la vie, les parties conviennent de l'indexer sur l'indice du coüt de la construction publié l'Institut National des Statistiques et des Etudes Economiques, et de lui subir une fois par an, les mêmes variations d'augmentation ou de diminution.

(')

Enfin, l'acquéreur s'oblige expressément à affecter le bien à son usage de résidence principale et s'interdit toute location pendant une durée de 10 ans.

En outre les parties s'obligent dans cette hypothèse éventuelle, au paiement du complément de prix pour cession dans les 10 ans des présentes : (') en ce qui concerne l'acquéreur s'engage à verser outre ce complément de prix tous les frais et droits dûs et notamment la taxe de publicité foncière. (') » ;

Attendu que le complément de prix n'est dû qu'en cas de cession du bien, la clause anti spéculative étant destinée à empêcher des acquéreurs de réaliser une plus-value indue grâce à une vente anticipée du bien ; qu'en ce qui concerne la clause par laquelle les acquéreurs s'obligent en outre à utiliser le bien à titre de résidence principale et s'interdisent toute location pendant la durée de 10 ans, cette obligation n'est quant à elle assortie d'aucune sanction contractuelle spécifique ;

Attendu que les époux [U] acquéreurs étant demeurés propriétaires du bien, ils ne sont pas redevables du montant de la clause anti spéculative incluse dans le contrat ;

Attendu qu'à titre subsidiaire, la SCI Florette compare le prix moyen des cessions intervenues au profit des acquéreurs non bénéficiaires de la priorité communale n'ayant pas bénéficié de conditions d'acquisition préférentielles, qui s'est élevé à 6 000 € le m2, et observe que les époux [U] ont acquis au prix de 4 270 € par m2 habitable ; qu'il ont profité de la différence, en contrepartie des engagements non respectés, soit un différentiel de 1 730 € le m2 habitable et les 96 222,60 € (55,62 X 1 730 €) que la SCI Florette réclame aux époux [U], ayant été contrainte de céder le bien aux époux [U] à un prix largement

inférieur aux conditions du marché et aux conditions faites aux autres acquéreurs ;

Attendu cependant que la SCI Florette avait l'obligation de vendre l'appartement litigieux au prix minoré facilitant l'accession au logement, ce qui lui a été imposé par la commune de [Localité 6] ; qu'elle ne pouvait prétendre percevoir de quiconque le prix supérieur du marché ; qu'elle m'a donc subi aucun préjudice en lien de causalité avec le non-respect par les époux [U] de l'engagement contractuel qui était le leur de résider personnellement dans le bien qu'ils ont acquis ;

Attendu que faute d'avoir prévu une clause édictant une pénalité forfaitaire spécifique sanctionnant une telle inexécution contractuelle, le jugement qui a rejeté toutes les demandes indemnitaires de la SCI Florette doit donc être confirmé ;

PAR CES MOTIFS

La cour, statuant publiquement, contradictoirement et en dernier ressort,

Confirme le jugement déféré en toutes ses dispositions,

y ajoutant

Condamne la SCI Florette à payer à M. [E] [U] et Mme [P] [Y] épouse [U], ensemble, la somme de 1500 € au titre de l'article 700 du code procédure civile, ainsi qu'aux dépens, et dit que ceux-ci pourront être recouvrés conformément aux dispositions de l'article 699 du code de procédure civile.

LE PRESIDENTLE GREFFIER


Synthèse
Tribunal : Cour d'appel d'Aix-en-Provence
Formation : Chambre 1-1
Numéro d'arrêt : 19/08047
Date de la décision : 28/06/2022

Origine de la décision
Date de l'import : 26/03/2024
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.appel;arret;2022-06-28;19.08047 ?
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