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28/06/2022 | FRANCE | N°19/07835

France | France, Cour d'appel d'Aix-en-Provence, Chambre 1-1, 28 juin 2022, 19/07835


COUR D'APPEL D'AIX-EN-PROVENCE

Chambre 1-1



ARRÊT AU FOND

DU 28 JUIN 2022



N° 2022/238













Rôle N° RG 19/07835 - N° Portalis DBVB-V-B7D-BEIPC







DIRECTION GENERALE DES FINANCES PUBLIQUES





C/



[C] [P]

[D] [P]





















Copie exécutoire délivrée

le :

à :



Me Virginie ROSENFELD

Me Sandra JUSTON



r>




Décision déférée à la Cour :



Jugement du Tribunal de Grande Instance d'AIX EN PROVENCE en date du 02 Mai 2019 enregistré au répertoire général sous le n° 17/04514.





APPELANT



DIRECTION GÉNÉRALE DES FINANCES PUBLIQUES poursuites et diligences du Directeur Régional des Finances Publiques de...

COUR D'APPEL D'AIX-EN-PROVENCE

Chambre 1-1

ARRÊT AU FOND

DU 28 JUIN 2022

N° 2022/238

Rôle N° RG 19/07835 - N° Portalis DBVB-V-B7D-BEIPC

DIRECTION GENERALE DES FINANCES PUBLIQUES

C/

[C] [P]

[D] [P]

Copie exécutoire délivrée

le :

à :

Me Virginie ROSENFELD

Me Sandra JUSTON

Décision déférée à la Cour :

Jugement du Tribunal de Grande Instance d'AIX EN PROVENCE en date du 02 Mai 2019 enregistré au répertoire général sous le n° 17/04514.

APPELANT

DIRECTION GÉNÉRALE DES FINANCES PUBLIQUES poursuites et diligences du Directeur Régional des Finances Publiques de Provence-Alpes- Côte d'Azur et du département des Bouches du Rhône, qui élit domicile en ses bureaux, Immeuble de L'Atrium, Boulevard du Coq d'Argent, 13098 AIX EN PROVENCE CEDEX 02.

représenté par Me Virginie ROSENFELD de la SCP CABINET ROSENFELD & ASSOCIES, avocat au barreau de MARSEILLE

INTIMES

Madame Marine PAILLET

née le 25 Mars 1953 à AIX EN PROVENCE, demeurant 1173 Route de Martinat - 13590 MEYREUIL

représentée par Me Sandra JUSTON de la SCP BADIE SIMON-THIBAUD JUSTON, avocat au barreau D'AIX-EN-PROVENCE et Me Maud BONDIGUEL, avocat au barreau de RENNES

Monsieur [D] [P]

né le 26 Mai 1953 à LYON, demeurant 1173 Route de Martinat - 13590 MEYREUIL

représenté par Me Sandra JUSTON de la SCP BADIE SIMON-THIBAUD JUSTON, avocat au barreau D'AIX-EN-PROVENCE et Me Maud BONDIGUEL, avocat au barreau de RENNES

*-*-*-*-*

COMPOSITION DE LA COUR

L'affaire a été débattue le 16 Mai 2022 en audience publique devant la cour composée de :

Monsieur Olivier BRUE, Président

Madame Anne DAMPFHOFFER, Conseiller

Mme Danielle DEMONT, Conseiller

qui en ont délibéré.

Greffier lors des débats : Mme Colette SONNERY.

Les parties ont été avisées que le prononcé de la décision aurait lieu par mise à disposition au greffe le 28 Juin 2022.

ARRÊT

contradictoire,

Prononcé par mise à disposition au greffe le 28 Juin 2022,

Signé par Monsieur Olivier BRUE, Président et Mme Colette SONNERY, greffier auquel la minute de la décision a été remise par le magistrat signataire.

***

EXPOSE DU LITIGE

M. [D] [P] et Mme [C] [P] (ci-après : le contribuable), assujettis à l'impôt de solidarité sur la fortune (ISF), afin de bénéficier d'une réduction d'impôt conformément à l'article 885-0 V bis du code général des impôts, ont joint à leur déclaration d'impôts pour l'année 2010 l'attestation de la société Finarea Helios (pour l'année 2010) certifiant qu'ils avaient avait investi le 14 juin 2010 dans le capital de cette société, se présentant comme société holding animatrice de groupe.

Considérant qu'elle n'avait pas cette qualité, de sorte que les époux [P] ne pouvaient pas prétendre à l'avantage en cause, l'administration fiscale leur a adressé une proposition de rectification le 3 décembre 2012,

Les impositions correspondantes ont été mises en recouvrement le 24 octobre 2013 par avis de mise en recouvrement n° 13 10 00232.

Par réclamations du 17 février 2014, 22 juillet 2014, 4 décembre 2014 et 24 décembre 2015 rejeté le 28 février 2017, le contribuable a contesté le bien-fondé de ces impositions.

Par exploit du 28 avril 2017 M. [D] [P] et Mme [C] [P] ont assigné la direction départementale des finances publiques de Provence Alpes Côte d'Azur et du département des Bouches-du-Rhône afin d'obtenir la décharge des rappels d'ISF pour l'année 2010 d'un montant de 12'822 € en droits et 1539 € en intérêts de retard, soit 14 361 € au total.

Par jugement en date du 2 mai 2019 le tribunal de grande instance d'Aix-en-Provence a :

' dit n'y avoir lieu d'ordonner la communication des rescrits généraux ;

' constaté l'irrégularité de la procédure suivie contre M. [D] [P] et Mme [C] [P] , prononcé la nullité de la procédure fiscale et les a déchargés des rehaussements prononcés ;

' et condamné la direction générale des finances publiques à verser à M. [D] [P] et à Mme [C] [P] une indemnité d'un montant de 4 000 €, au titre de l'article 700 du code de procédure civile ainsi qu'aux dépens.

Le 13 mai 2019, la direction générale des finances publiques a relevé appel de cette décision.

Par dernières conclusions du 18 janvier 2022, elle demande à la cour :

' de confirmer le jugement entrepris en ce qu'il a débouté le contribuable de sa demande de confirmation des rescrits ;

' de réformer ledit jugement pour le surplus ;

' de confirmer la décision administrative de rejet du 28 février 2017 ;

' de rejeter toutes les demandes reconventionnelles ;

' de condamner le contribuable à lui verser la somme de 3 000 € au titre de l'article 700 du code de procédure civile outre les dépens avec distraction.

Par conclusions du 29 décembre 2021, M. [D] [P] et Mme [C] [P] demandent à la cour :

' de confirmer le jugement entrepris en toutes ses dispositions ;

' en tout état de cause, de dire que la procédure de fiscale préalable à la présente procédure contentieuse est entachée d'irrégularités qui entraînent son annulation ; en conséquence de dire nulle cette procédure fiscale ;

' de dire que la décision de renoncement et de mise en recouvrement prise à l'encontre du contribuable n'est pas fondée et de confirmer en conséquence la décharge des rehaussements;

' le cas échéant d'ordonner la communication par la direction générale des finances publiques sous astreinte provisoire pendant un délai de deux mois de 1000 € par jour de retard des rescrits Truffle et Partech dans leurs version originale ou expurgée des éléments prétendument confidentiels ;

' en cas de difficulté d'interprétation du droit de l'Union européenne, de poser à la Cour de justice de l'Union européenne trois questions préjudicielles ;

' et de condamner l'État à lui payer la somme de 10'000 € au titre de l'article 700 du code de procédure civile outre les dépens.

La cour renvoie aux écritures précitées pour l'exposé exhaustif des prétentions et moyens des parties.

Motifs

Sur la communication des rescrits

M. [D] [P] et Mme [C] [P] soutiennent que les deux décisions de rescrit délivrées par l'administration fiscale aux sociétés concurrentes Truffle et Partech illustreraient l'état du droit applicable à'tous les contribuables, et par conséquent qu'elles devraient être communiquées par l'administration fiscale.

Ils invoquent les dispositons de l'article L 143 du livre des procédures fiscales qui permet la communication en justice des documents d'ordre fiscal de nature à permettre au juge d'apprécier en toute connaissance de cause l'existence et l'étendue du préjudice subi par les personnes concernées.

Ils ajoutent que l'article L 80 A du livre des procédures fiscales dispose qu'il ne sera procédé à aucun rehaussement d'impositions antérieures, si la cause du rehaussement poursuivi par l'administration est un différend sur l'interprétation par le redevable de bonne foi du texte fiscal et qu'il est démontré que l'interprétation sur laquelle est fondée la première décision a été, à l'époque, formellement admise par l'administration ; que, lorsque le redevable a appliqué un texte fiscal selon l'interprétation que l'administration avait fait connaître par ses instructions ou circulaires publiées , et qu'elle n'avait pas rapportée à la date des opérations en cause, celle-ci ne peut poursuivre aucun rehaussement en soutenant une interprétation différente ; que sont également opposables à l'administration, dans les mêmes conditions, les instructions ou circulaires publiées relatives au recouvrement de l'impôt ou aux pénalités fiscales ; que l'article L 80 B du Livre des procédures fiscales précise que la garantie prévue au premier alinéa de l'article L 80 A est applicable lorsque l'administration a formellement pris position sur l'appréciation d'une situation de fait au regard d'un texte fiscal; qu'elle se prononce dans un délai de trois mois lorsqu'elle est saisie d'une demande écrite, précise et complète par le redevable de bonne foi.

Mais l'administration fiscale a ainsi développé, afin de renforcer la sécurité juridique des contribuables, un processus de « rescrit» qui correspond à un mécanisme, à la discrétion du contribuable, lui permettant d'obtenir un diagnostic, une opinion juridique, un avis sur sa situation au regard d'un texte fiscal.

S'agissant d'une réponse à la saisine écrite du contribuable qui attend une prise de position formelle sur sa situation au regard d'un texte fiscal, le rescrit comprend nécessairement une appréciation de la situation de ce contribuable ; il s'agit, toutefois, d'une analyse opérée in concreto, laquelle ne peut pas être transposée à la situation d'autres contribuables, étant précisé que les rescrits ne font, par nature, pas l'objet d'une publication et n'excluent pas le contrôle de l'administration fiscale.

M. [D] [P] et Mme [C] [P] affirment que leur situation serait strictement identique à celle des souscripteurs de parts des sociétés Partech et Truffle, alors que leurs situations fiscales ne sont pas identiques ; notamment, la circonstance que ces sociétés aient ou non joué un rôle concret de holding animatrices n'est pas transposable à la société Finarea.

La validation du montage juridique pour les groupes Partech et Truffle est inopérante, puisqu'une prise de position individuelle par le biais du rescrit n'est pas opposable à l'administration fiscale en l'espèce.

La demande de production des rescrits Partech et Truffle qui n'est pas utile à la solution du litige, a donc été justement rejetée par le premier juge.

Sur la regularité de la procédure et la communication des documents utilisés pour fonder le redressement

Les époux [P] font valoir au soutien de leur demande d'irrégularité de la procédure suivie par l'administration fiscale :

' que les services fiscaux, de manière déloyale, ne les ont pas clairement informés en mentionnant dans la proposition de rectification les éléments qu'elle avait recueillis auprès de tiers fondant le redressement (documents juridiques retraçant la vie de de la holding, bilan de l'exercice clos le 30 juin 2010, pacte d'associés, contrat d'animation'), et en lui communicant l'entier dossier constitué s'agissant de la holding animatrice, et qu'ils n'ont pas répondu aux observations présentées par le contribuable à l'appui de sa contestation des redressements ;

' qu'après avoir procédé au contrôle du signataire d'une attestation - et sans avoir remis en cause, à ce stade, le caractère exact de cette attestation -, l'administration fiscale utilise les éléments d'information obtenus lors de ce contrôle de l'attestant pour redresser le contribuable destinataire de l'attestation, alors que l'administration fiscale doit communiquer loyalement son entier dossier de contrôle de l'attestant au bénéficiaire de l'attestation ; que seul ce versement permet au contribuable redressé de comprendre pourquoi les éléments qui n'ont pas été considérés comme étant de nature à remettre en cause l'attestation dans le cadre du premier contrôle peuvent avoir une portée diamétralement inverse dans le cadre du second contrôle ; qu'au cas présent, seul le versement au dossier de leur contrôle du dossier constitué lors de la vérification de la holding Finaréa leur aurait permis de comprendre ce qui avait pu conduire l'administration fiscale locale à porter une appréciation si différente, sur la même question de la qualité de 'holding animatrice", de celle retenue par la direction spécialisée de contrôle ; qu'en présence d'une communication de documents issus de la vérification de la holding, et non de l'entier dossier de documents constitué à l'occasion de ladite vérification, l'administration fiscale a opéré une circulation imparfaite de l'information, au mépris des articles L. 57, L. 76 et L. 76 B du Livre des procédures fiscales, ensemble le principe de loyauté et d'égalité des armes;

' que l'administration fiscale, quand elle procède à un contrôle, doit communiquer au contribuable qui le lui demande, l'intégralité des pièces issues de tiers, dont elle tire les informations ou analyses fondant sa proposition de rectification.

Les époux [P] ajoutent que certaines informations ou éléments d'analyse retenus par l'administration fiscale à l'appui de la proposition de rectification ne résultaient d'aucun des documents parcimonieusement communiqués, ni même de documents identifiables pour les contribuables, manquant encore au principe de loyauté, alors que doivent être communiqués au contribuable qui en fait la demande, avant la mise en paiement de l'impôt objet de la proposition de rectification, les éléments d'information accessibles auprès d'un greffe ou d'un organisme de diffusion d'informations.

Mais selon l'article L. 57 du livre des procédures fiscales, « L'administration adresse au contribuable une proposition de rectification qui doit être motivée de manière à lui permettre de formuler ses observations ou de faire connaître son acceptation » ; et que l'article R. 57-1 du même livre dispose que « La proposition de rectification prévue par l'article L. 57 fait connaître au contribuable la nature et les motifs de la rectification

envisagée ( ... ) ».

Aux termes de l'article L 76 B du livre des procédures fiscales : « L'administration est tenue d'informer le contribuable de la teneur et de l'origine des renseignements et documents obtenus de tiers sur lesquels elle s'est fondée pour établir l'imposition faisant l'objet de la proposition prévue au premier alinéa de l'article L. 57 ou de la notification prévue à l'article 76. Elle communique avant la mise en recouvrement une copie du document ci-dessus mentionné au contribuable qui en fait la demande. ». Cet article n'impose donc d'informer le contribuable que des renseignements et documents sur lesquels l'administration se fonde pour établir un redressement, de sorte qu'elle n'avait pas à communiquer l'entier dossier de la vérification de comptabilité de la société Finarea.

Selon l'article L. 76 du livre des procédures fiscales, « Les bases ou éléments servant au calcul des impositions d'office et leurs modalités de détermination sont portées à la connaissance du contribuable trente jours au moins avant la mise en recouvrement des impositions. Cette notification est interruptive de prescription. Lorsque le contribuable est taxé d'office en application de l'article L. 69, à l'issue d'un examen contradictoire de sa situation fiscale personnelle, la commission des impôts directs et des taxes sur le chiffre d'affaires peut être saisie dans les conditions prévues à l'article L. 59. ».

Ainsi, pour être régulière au regard des dispositions précitées, une proposition de rectification doit comporter la désignation de l'impôt concerné, l'année d'imposition et la base d'imposition, et énoncer les motifs sur lesquels l'administration entend se fonder pour justifier les rectifications envisagées, de manière à permettre au contribuable de formuler ses observations de façon entièrement utile.

Elle doit informer le contribuable sur la teneur et l'origine des renseignements et documents obtenus auprès de tiers sur lequel elle s'appuie pour motiver de rectification, et communiquer au contribuable qui en fait la demande, avant la mise en recouvrement des impositions, les documents qu'elle a invoqués.

Les obligations résultant de l'article 76 B du livre des procédures fiscales ne couvrent pas l'intégralité des documents dont peuvent disposer les services de l'administration fiscale.

Elle vise uniquement les documents sur lesquels l'administration se fonde pour établir un redressement. L'administration n'est donc tenue de cette obligation d'information et de communication qu'en ce qui concerne les renseignements qu'elle a effectivement utilisés pour procéder au redressement ; ces renseignements et documents sont ceux recueillis auprès de tiers ayant fait l'objet de procédures fiscales telles qu'un procédure de saisie, une vérification de comptabilité ou un droit de communication.

En l'espèce, la proposition de rectification est ainsi motivée :

« A l'occasion de la vérification de la comptabilité de la société Finarea Helios , il a été constaté les faits suivants.

La société Finarea Helios a été constituée le 21 mai 2010.

Au moyen des fonds apportés par ses différents associés, dont vous faites partie, la société Finarea Helios n'avait pris aucune participation dans une ou des sociétés opérationnelles au 31 décembre 2010, date de clôture de son premier exercice social.

(') Lors du versement de votre souscription au capital en 2010, date d'appréciation des conditions pour bénéficier de la réduction d'ISF prévue à l'article 885-0 bis du code général des impôts, cette dernière ne détenait aucune participation dans des sociétés et par conséquent ne pouvait pas avoir le caractère de holding animatrice en application de la jurisprudence SALA précitée (') »

La proposition de rectification dans le cadre du contrôle sur pièces de la déclaration d'ISF des époux [P] a été établie par les services fiscaux à partir d'éléments matériels recueillis à l'occasion de la vérification de comptabilité de la société Finarea et du GIE Finarea Services.

Si la proposition de rectification n'évoque aucun document précis sur lequel serait fondée l'imposition réclamée au contribuable, pour l'établir, l'administration a indiqué dans sa proposition de rectification qu'elle s'est basée sur le constat de ce que la société Finarea Helios n'avait procédé à aucune prise de participation à la date de la souscription des époux [P] le 14 juin 2010.

En l'absence totale de prise de participation de la société Finarea Helios au 31 décembre 2010 constatée à l'occasion de la vérification de sa comptabilité, l'administration fiscale ne pouvait pas communiquer des documents relatifs au rôle de holding animatrice revendiqué par cette société dès lors que celle-ci n'avait procédé à aucun ré-investissement dans une société opérationnelle des fonds qu'elle avait reçus des souscripteurs.

Elle n'avait pas davantage à énumérer des éléments 'à décharge' non retenus dans son analyse pour effectuer son rappel.

Par sa réponse à la proposition de rectification, le contribuable démontre qu'il a parfaitement compris les motifs du rappel en lui écrivant qu'« En substance le service reproche à la société Finarea : de ne pas avoir eu de participation moment de la souscription et de ne pas remplir les caractéristiques d'une holding animatrice lorsqu'elle a investi les souscriptions reçues dans le capital de ses filiales ». Le contribuable a opposé à l'administration, pour justifier du caractère animateur de la société Finarea Helios, les comptes-rendus des conseils de direction, l'existence de reporting, les conventions que le contribuable a qualifiées de coercitives, les postes au conseil de direction, les gérants des participations, etc. Tous éléments qu'il détenait et qui lui avait été communiqués en qualité d'actionnaire ou d'associé.

L'administration souligne donc exactement que par sa réponse détaillée en 12 pages, techniquement étayée, à la proposition de rectification, le mandataire du contribuable montre qu'un dialogue contradictoire s'était régulièrement engagé avec l'administration.

L'administration a ensuite répondu point par point aux observations du contribuable, sans ajouter d'éléments nouveaux dont elle aurait tiré quelque conséquence juridique nouvelle pour le contribuable.

Le contribuable a donc bénéficié de l'ensemble des garanties attachées la procédure de contrôle dont il a fait l'objet.

Il s'ensuit le rejet de ces moyens d'irrégularité soulevés par les époux [P].

Sur le moyen tiré de l'absence de redressement de la holding, de la déloyauté, et de la

contradiction au détriment d'autrui

Les époux [P] invoquent une prise de position de l'administration sur la qualité de holding animatrice de Finarea Helios, sur le fondement de l'article L. 80 B, et également sous l'angle de l'obligation de loyauté et de l'interdiction de se contredire au détriment d'autrui.

Ils font valoir qu'à la suite de la vérification de comptabilité de chaque holding Finarea, l'inspecteur en charge du contrôle a indiqué au représentant de cette société que la procédure de vérification de sa comptabilité était achevée et qu'elle se concluait par un avis de non redressement du 11 octobre 2012 dans le dossier Finarea Helios, sans appliquer l'amende prévue à l'article 1740 A du code général des impôts.

Les époux [P] en déduisent que le contrôle a conduit à la validation totale de la qualification de holding animatrice active de la société Finarea Helios, dès lors que :

- l'administration a validé le caractère déductible de toutes les charges exposées par la holding Finarea pour effectuer ses missions d'animation, cependant que seules sont déductibles du résultat les charges exposées pour la réalisation de l'objet social,

- à l'issue du contrôle, l'administration a invité la holding Finarea à présenter au Trésor public une demande de remboursement du crédit de TVA accumulé du fait du paiement des charges liées au démarrage et à la réalisation de l'activité d'animation, cependant que cela n'aurait pu être possible si la holding ne s'était pas impliquée dans la gestion de sa filiale mais s'était bornée à exercer les prérogatives de tout actionnaire,

- l'administration savait que chaque holding Finarea avait émis tous les ans à destination de ses actionnaires, des attestations indiquant qu'elle était une holding animatrice et ne lui a pas infligé la sanction à laquelle s'expose l'émetteur d'attestations inexactes.

Aux termes de l'article L. 80 B du Livre des procédures fiscales, il ne peut être procédé à aucun rehaussement lorsque l'administration fiscale a formellement pris position sur l'appréciation d'une situation de fait au regard d'un texte fiscal, et cet article n'impose pas que cette prise de position soit antérieure au fait générateur de l'impôt.

Par ailleurs, il est de principe que nul ne peut se contredire au détriment d'autrui, mais il ne s'agit pas d'une interdiction générale en procédure civile, la circonstance que les parties se contredisent au détriment d'autrui n'emportant pas nécessairement fin de non-recevoir.

Spécialement en matière de contentieux fiscal, les obligations des contribuables résultent des textes législatifs et réglementaires, à l'application desquels l'administration ne peut pas renoncer.

C'est ainsi que sous les garanties prévues pour le contribuable par les articles L. 80 A et L. 80 B du livre des procédures fiscales, qui permettent au contribuable, dans les conditions et limites qu'ils fixent, d'opposer à l'administration l'interprétation d'un texte fiscal qu'elle a formellement admise ou une prise de position formelle de sa part sur une situation de fait au regard du texte fiscal, la position ou le comportement de l'administration avant la procédure contentieuse, lors de l'instruction de la réclamation ou en cours d'instance devant le juge de l'impôt, quelles que soient leurs évolutions ou contradictions éventuelles, ne peuvent pas faire obstacle à l'application par le juge de l'impôt de la loi fiscale, dans le cadre des moyens soulevés par chacune des parties et de ceux qu'il est tenu de relever d'office.

En particulier s'agissant de l'absence de rehaussement à l'issue d'une vérification de comptabilité, la juridiction administrative retient justement de façon constante que le non redressement ne peut pas être regardé comme une prise de position formelle de l'administration fiscale sur l'appréciation d'une situation de fait.

En l'espèce l'objet exact du contrôle subi par chaque holding Finarea, qui s'est conclu sans rectification, ne ressort pas précisément des documents produits. La démonstration générale et imprécise faite par Les époux [P] au titre de l'impôt sur les sociétés et de la TVA ne convainc pas sur la prétendue validation de la qualification de holding animatrice. Il n'est pas établi que la notion de holding animatrice serait également la qualification déterminante utilisée pour la déductibilité des charges et pour le remboursement de crédit de TVA, ce que conteste expressément l'administration fiscale.

Dès lors que d'autres notions interviennent dans la faculté, pour une société, de déduire ses charges et dans le mécanisme de remboursement de crédit de TVA, il ne peut pas être déduit de l'absence de rectification que l'administration aurait reconnu la qualité de holding animatrice des sociétés Finarea.

L'absence d'amende infligée au titre de l'article 1740 A du code général des impôts ne permet pas de déduire une quelconque validation de la qualification de holding animatrice, et l'absence de tout redressement à l'issue de la vérification de comptabilité de la société Finarea, ne constitue, ni la reconnaissance de ce que cette société exerçait bien l'activité de holding animatrice, ni une prise de position, ni une interprétation relevant des articles L. 80 A et L. 80 B du livre des procédures fiscales, de nature à octroyer aux contribuables des garanties, de sorte qu'il ne peut être retenu que l'administration fiscale se serait contredite au détriment des contribuables.

En conséquence, le jugement déféré qui a fait droit à la demande de dégrèvement pour une irrégularité prétendue de la procédure suivie et déchargé les époux [P] du rehaussement litigieux, doit être infirmé.

Sur le moyen tiré des effets de la délivrance d'attestations et l'interprétation figurant dans les réponses ministérielles

Le contribuable soutient :

' qu'il a mis une partie de son épargne en risque pour, via une société holding rassemblant plusieurs 'business Angels' ici dénommée Finarea Helios, pour investir dans de petites entreprises et leur donner les moyens de réussir leur développement ;

' que le contribuable dispose d'attestations en bonne et due forme indiquant que la société dans laquelle il a investi présente la qualité de holding animatrice, de sorte que son investissement est effectivement éligible au dispositif ISF-PME prévu par les textes ;

' que l'administration fiscale sait très bien que chaque holding Finarea en cause est une authentique et véritable holding animatrice au sens des textes précités, puisqu'elle a contrôlé la société et qu'elle a intégralement validé que son activité est réelle et conforme à son objet social ; qu'en 2012 l'administration fiscale a vérifié la sincérité de l'objet social des holding Finarea et qu'elle a émis un avis de non redressement le 30 novembre 2012 ; que les pièces de la procédure font apparaître que les services fiscaux avaient envisagé l'application de l'amende de 25 % pour délivrance d'attestations erronées ayant permis au souscripteur de bénéficier des avantages fiscaux ISF-PME, sans finalement la mettre en 'uvre ; que dans ce cadre, toutes les holdings Finarea ont fait l'objet de vérifications de comptabilité ayant eu pour objet de vérifier, à la source, la réalité de l'activité d'animatrice de holding ; que quitus a été donné concernant l'important crédit de TVA accumulé depuis le début de l'activité de la holding animatrice Finarea ;

' que le contribuable est nécessairement surpris devant l'incohérence de la position de l'administration, alors qu'il avait la certitude d'avoir participé un schéma totalement conforme à l'esprit de la loi TEPA ; que l'attestation reçue de Finarea est opposable à l'administration ;

' que l'idée de reconnaître une valeur à l'attestation dont est destinataire le contribuable, pour n'accepter qu'elle soit écartée qu'en cas de preuve de son inexactitude et de la mauvaise foi du contribuable, procède d'une forme de droit naturel inhérent au principe régissant l'action de l'administration fiscale reconnu par la doctrine administrative issue des réponses ministérielles « Woerth» et « Patria » ;

' que les revirements de l'administration ont entraîné le redressement de plus de 1400 souscripteurs à ce fonds, entraînant des difficultés non seulement pour ce dernier, mais également en termes d'emploi pour toutes les entreprises financées par ce biais soit pour 42 PME sur les 52 financées ;

- et que la production d'une attestation est la seule condition imposée par l'article 299 septies de l'annexe III du code général des impôts, de sorte que l'administration ne pouvait pas contester l'application de la réduction ISF-PME sans remettre en cause l'attestation.

L'administration fiscale répond que l'opposabilité d'une réponse ministérielle ne peut être invoquée que dans l'hypothèse où elle s'applique à la situation en cause et que le contexte de la réponse ministérielle ne saurait être occulté pour justifier qu'elle viserait l'ensemble des attestations délivrées aux particuliers, y compris pour des dispositifs postérieurs qui n'étaient pas encore connus de l'auteur de la réponse ; que ces réponses ne pouvaient pas s'appliquer à la réduction d'ISF litigieuse, laquelle n'était pas en vigueur à la date de leur publication ; que la délivrance de l'attestation prévue par l'article 299 septies de l'annexe III du code général des impôts est un préalable à la réduction d'ISF, mais elle ne dispense pas de vérifier que les conditions de fond pour y prétendre sont bien réunies et n'est donc pas créatrice de droit.

*

Il convient en premier lieu d'examiner la portée de la doctrine administrative issue des réponses ministérielles « Woerth» et « Patria », sur son opposabilité à l'administration, s'agissant du dispositif de réduction ISF-PME prévu par l'article 885-0 V bis, ou son applicabilité à toute situation dans laquelle un contribuable produit une attestation sans qu'il soit établi qu'il avait connaissance de son caractère inexact, et sur la possibilité de remettre en cause l'éligibilité d'un investissement à ce dispositif sans remettre en cause l'attestation.

Les époux [P] se prévalent des attestations délivrées par Finarea Helios, et d'une lettre adressée le 30 novembre 2012 par la direction du contrôle fiscal d'Île-de-France à chaque holding Finarea, l'informant que la vérification de sa comptabilité pour les exercices 2010 et 2011 était achevée, et que ce contrôle ne donnerait lieu à aucune rectification.

Les attestations émanant du président de la société Fleuret associés conseil portent sur la réduction d'impôt sur la fortune pour investissement dans les PME, et visent les dispositions de l'article 885-0-V bis, issues de la loi n°2007-1223 du 21 août 2007, dite loi « TEPA».

Elles font mention de ce que que « la société dénommée Finaréa, dont l'objet est, à titre principal, la gestion et l'animation sous toutes formes et par tous moyens appropriés, de participations prises dans des sociétés éligibles au dispositif de la loi numéro 2007-1223 du 21 août 2007, dite loi TEPA, satisfait tant les conditions mentionnées à l'article 885-0-V bis du code général des impôts ( ...) et ses décrets d'application, que celles précisées par l'article 199 terdecies-0-A du code général des impôts ( .. .) et ses décrets d'application».

Les époux [P] soutiennent que cette attestation donne une apparence créatrice de droit, pour le contribuable qui serait opposable à l'administration ; et invoque à cet égard, des réponses ministérielles Patria et Woerth des 3 mai 2005 et 11 avril 2006 qui sont ainsi libellées :

« Tout organisme qui délivre irrégulièrement des certificats, reçus, états ou attestations permettant à un contribuable d'obtenir une déduction du revenu ou du bénéfice imposable, ou une réduction d'impôt, est passible d'une amende fiscale égale à 25 % des sommes indûment mentionnées sur ces documents, Le contribuable qui se prévaut de ce document n'encourt pour sa part aucune rectification, sauf si sa mauvaise foi ou l'existence de manoeuvres frauduleuses, comme par exemple la collusion avec la personne ou l'organisme ayant délivré l'attestation, est démontrée par l'administration. Dans ce seul cas, la réduction d impôt est remise en cause et la rectification assortie des pénalités prévues à I' article 1729 du code général des impôts».

Si les réponses ministérielles aux questions écrites des parlementaires, bien que publiées au journal officiel de la République française (JO), ne possèdent par elles-mêmes aucune valeur juridique mais une simple valeur indicative, et qu'elles ne lient pas l'administration et le juge, en matière fiscale, les réponses écrites des ministres aux questions posées par les parlementaires, publiées au JO constituent, comme soutenu par les contribuables, une source d'interprétation de la loi fiscale au sens de l'article L. 80 A du livre des procédures fiscales.

Toutefois, en vertu du principe d'interprétation littérale de la doctrine administrative, le juge de l'impôt s'interdit tout extension du champ d'application, toute application a contrario ou toute application par analogie d'une doctrine, dès lors qu'il s'agit d'une dérogation à la hiérarchie des normes.

La doctrine administrative ne peut donc être étendue à d'autres situations que celles qu'elle vise. Ainsi, une interprétation énoncée pour une catégorie d'impôt déterminée ne peut être invoquée dans un litige relatif à un autre impôt. De même, la situation de fait du contribuable doit correspondre précisément aux prévisions de l'interprétation qu'il invoque.

Les questions adressées par M. Patria ou M. Woerth appelaient l'attention du ministre de l'économie des finances et de l'industrie sur la façon dont sont traités par certains fonctionnaires des impôts des contribuables qui présentent, pour bénéficier de la déduction fiscale, des reçus fiscaux délivrés par des associations se déclarant ou organismes d'intérêt général. Ces fonctionnaires contestant la valeur de reçus fiscaux qui leur sont présentés et refusant de les prendre en compte, alors que le contribuable présente de bonne foi ces reçus qui lui ont été délivrés par les organismes auxquels il a fait des dons. La question était donc en cas de contestation de la validité de ces reçus de déterminer si c'était au contribuable d'en démontrer la validité ou aux organismes qui les ont délivrés.

Le texte visé par les réponses ministérielles est l'article 1768 quater du code général des impôts en vigueur du 22 avril 1998 au 1er janvier 2006, abrogé depuis, qui rendait passibles d'une amende fiscale égale à 25 % des sommes indûment mentionnées sur les documents des organismes qui les délivrent irrégulièrement.

Le contribuable qui se prévaut de ce document n'encourt pour sa part aucun redressement sauf si sa mauvaise foi ou l'existence de man'uvres frauduleuses, comme par exemple la collusion avec la personne ou l'organisme ayant délivré l'attestation, est démontrée par l'administration. Dans ce seul cas la réduction d'impôt est remise en cause, et le redressement est assorti des pénalités prévues à l'article 1729 du code, ce qui résulte d'une note publiée au BOI le 9 octobre 1998 relative aux cas particuliers des attestations délivrées en vue d'obtenir les réductions d'impôts relatives aux dons en faveur des 'uvres d'intérêt général.

Si la rédaction en des termes généraux des réponses peut laisser penser que cette doctrine s'applique à tout type d'attestation, il convient observer que l'article 1768 quater du code général des impôts en vigueur du 22 avril 1998 au 1er janvier 2006, prenait place au chapitre II du livre II dudit code, consacré aux pénalités, en sous-section A intitulée « IMPÔTS DIRECTS ET TAXES ASSIMILÉES», alors que l'impôt de solidarité sur la fortune ne figure pas dans ce titre du code général des impôts.

Les réponses ministérielles invoquées par Mme [Z], même si elles sont donc formulées de manière générale, ont été apportées à des questions relatives à l'impôt sur le revenu, et spécialement aux déductions fiscales que permettent des dons aux associations.

La portée des attestations litigieuses établies pour un autre impôt, l'ISF, délivrées par une société au capital de laquelle le contribuable a souscrit, ne peut pas être comparée à celle des attestations délivrées par une association, à la suite de dons, dans le cadre de l'impôt sur le revenu.

Il en résulte que les réponses ministérielles aux questions de MM. Christian Patria et Eric Woerth, ne s'analysent pas comme une doctrine administrative applicable aux réductions d'impôt de solidarité sur la fortune.

L'administration fiscale appelante soutient donc exactement que l'article 885-0 V bis du code général des impôts, dans sa rédaction issue de la loi n° 2008-1443 du 30 décembre 2008, a institué le principe d'une réduction de l'impôt de solidarité sur la fortune à hauteur de 75 % de versements effectués dans le capital de sociétés éligibles aux conditions qu'il prévoit ; que lorsqu'un contribuable souscrit au capital d'une telle société, celle-ci lui délivre un état individuel, précisant, notamment, qu'elle satisfait aux conditions exigées par ce texte, qu'il peut joindre à sa déclaration d'ISF ou fournir dans les trois mois suivant la date limite de dépôt de sa déclaration ; et que si la remise de ce document est une formalité nécessaire à l'obtention de l'avantage en cause, elle ne suffit pas à démontrer que les conditions prévues à l'article 885-0-V bis seraient réunies et elle ne confère aucun droit au contribuable à bénéficier de la réduction d'impôt à laquelle il prétend, fût-il de bonne foi.

Aucune règle n'impose à l'administration d'établir, avant de procéder à la rectification de l'imposition du contribuable, que ce dernier aurait eu ou non connaissance du caractère erroné de ce document joint à sa déclaration.

Il ne s'agit pas 'd'une norme de droit naturel' inhérente aux principes régissant l'action de l'administration fiscale.

Sur la qualification de holding animatrice du groupe

Les intimés font valoir à titre subsidiaire :

' qu'ils ont bien souscrit au capital d'une société de groupe au sens de l'article 885- 0- V- 1.1 b) et f) du code général des impôts ; que la holding Finarea n'est pas une 'holding de gestion de valeurs mobilières' passive ; qu'elle n'était pas que potentiellement animatrice, mais actuellement animatrice, et ce dès le début de son activité, qui a consisté dès sa création à la levée de fonds et à la sélection des PME dans lesquelles elle prend des participations ; qu'il suffit que la société dans laquelle le contribuable investit soit « en phase d'amorçage, démarrage ou d'expansion », au sens des lignes directrices concernant les aides d'État visant à promouvoir les investissements en capital-investissement pour les PME, comme le précise la décision d'autorisation par la Commission européenne datée du 11 mars 2008 ;

' que les époux [P] ont souscrit au capital de la société Finarea Helios, qui remplit les conditions pour être qualifiée de holding animatrice en phase de démarrage en juin 2010, date de la souscription ; que la société est entrée au capital de la PME Loisirs Colors ;

' que le rehaussement subi est contraire au droit de l'Union européenne, comme au principe d'égalité devant la loi et devant les charges publiques, au regard du traitement différent dont bénéficient les sociétés Truffle et Partech, pourtant placées dans la même situation que toutes les holdings Finarea, ce qui constitue en outre une aide d'Etat contraire au droit de l'Union, la Commission européenne n'ayant validé ce dispositif de réduction d'ISF que dans un but économique, et seulement pour les sociétés qui en sont à leurs premières levées de fonds ;

' que chaque holding Finarea s'est dotée des moyens de réaliser son objet social en désignant les membres de son Comité d'investissement conformément à ses statuts composés de personnes clairement qualifiées ; que l'objet social de la société Finarea relatif à l'animation est sincère, comme en témoigne l'organisation qui a été mise en place afin d'analyser les dossiers des PME à accompagner ; qu'il a été parallèlement conçu et imposé aux PME-cibles sélectionnées un modèle de statuts-type, avec transformation de celles-ci en SAS et création d'un conseil de direction chargé de valider toutes les décisions stratégiques avec voix prépondérante pour la holding, un contrat d'animation relatant le détail des prestations qui seraient fournies, moyennant rémunération, aux PME cibles, et un pacte d'actionnaires ; que toutes les décisions stratégiques sont concernées, ne serait-ce qu'au travers de l'adoption du budget annuel et qu'il n'est pas possible pour le président de la PME concernée, quelle que soit sa quote-part du capital social, de décider d'une dépense sans l'aval de Finarea ; que comme il a été dit supra, l'administration, qui a spécifiquement envisagé l'application de l'amende de 25 % pour délivrance d'attestations permettant aux particuliers de bénéficier d'un avantage fiscal indu, n'a pas mis en 'uvre cette sanction à l'encontre de la holding ; que la position de l'administration résulte d'un revirement dans sa lecture des marqueurs de la holding animatrice qui ne peut pas avoir un effet rétroactif et conduire au redressement du souscripteur ; que contrairement à ce que soutient l'administration fiscale, il n'était pas nécessaire que la holding Finarea ait le contrôle des filiales, ni qu'elle conduise seule la politique du groupe, et il suffisait qu'elle y participe activement, que cette condition d'une capacité à influencer ses filiales est ce qui a permis au groupe Truffle d'obtenir la validation de la part de l'administration fiscale dans son rescrit ; que la Cour de cassation précise qu'il n'est pas exigé qu'une holding soit majoritaire au capital de ses filiales ; et qu'une question préjudicielle, adressée à la Cour de Justice de l'Union Européenne, pourrait permettre le cas échéant d'éclaircir toute difficulté.

*

La rectification établie par l'administration fiscale se fonde sur les articles 885-0 V bis I.-1 et 885 I ter 1-1 du code général des impôts, dans leur version applicable au litige, les époux [M] ayant sollicité le bénéfice de la réduction d'impôt et l'exonérations d'ISF, au titre de la souscription au capital de petites et moyennes entreprises, dont la doctrine administrative, invocable par les contribuables en vertu de l'article L 80 A du livre des procédures fiscales, a étendu le champ d'application aux 'holding animatrices'.

Il convient de rechercher si la société Finarea Ocean s'est dotée des moyens d'animer effectivement les entreprises dans lesquelles elles ont pris des participations et si elles les ont effectivement mis en oeuvre.

S'agissant d'un dispositif ouvrant droit à une réduction d'lSF, le caractère de « holding animatrice de groupe » doit étre apprécié au moment de la souscription par les contribuables au capital de la société, soit à la date des deux versements des 15 juin 2009 et 5 mai 2010 (885-0 V bis I.-1 : « Le redevable peut imputer sur l'impôt de solidarité sur la fortune 75 % des versements effectués au titre de souscription au capital initial ou aux augmentations de capital de sociétés (') ».

Mais l'administration répond exactement que le contribuable a procédé à son versement au profit de Finarea Helios le 14 juin 2010, alors que pour que les investissements au sein d'une holding dite 'interposée' soient éligibles à la réduction d'ISF, celle-ci doit détenir au moins 90 % de son actif brut comptable en titres de sociétés qui sont opérationnelles.

Le premier bilan de la société Finarea Helios clos le 31 décembre 2010 montre que son actif brut était très majoritairement composé de créances.

L'absence de chiffre d'affaires et l'importance des disponibilités et autres valeurs immobilières de placement caractérise une activité de gestion de patrimoine exclue des dispositions du b du 1-I de l'article 885-0- V bis du code général des impôts relatives à la réduction d'impôt de solidarité sur la fortune sollicitée, comme le relève justement l'administration fiscale.

Le contribuable qui a procédé à son versement le 14 juin 2010 n'invoque pas utilement une prise de participation, le pacte d'associés et la convention d'animation qui avait été réalisés par Finarea Epsilon, et non par Finarea Helios, dans la société Loisirs Colors. L'investissement dans cette PME n'a pu être opéré qu'en 2012, après l'absorption de Finarea Helios par Finarea Venture.

Finarea Helios n'avait donc pas, à la période des investissements réalisés par le contribuable, la fonction de « holding animatrice d'un groupe».

Le contribuable ne rapporte pas ainsi la preuve que la société Finarea Helios aurait assuré l'impulsion de la stratégie de PME et en aurait contrôlé effectivement la mise en 'uvre.

La validation de ce montage juridique pour d'autres groupes, en l'occurence Truffle et Partech est inopérante à cet égard, dès lors qu'une prise de position individuelle par le biais du rescrit n'est pas opposable à l'administration comme il a été rappelé supra.

Le rehaussement pratiqué par l'administration fiscale est régulier en la forme et fondé, les titres ne remplissant pas les conditions d'exonération ouvrant droit à la réduction de l'ISF pour M. [D] [P] et Mme [C] [P].

La demande de transmission de questions préjudicielles à la Cour de justice de l'Union européenne sera écartée, la solution du présent litige n'en dépendant pas.

PAR CES MOTIFS

La cour, statuant publiquement, contradictoirement et en dernier ressort,

Confirme le jugement déféré en ce qu'il a débouté M. [D] [P] et Mme [C] [P] de leur demande de communication des rescrits Truffle et Partech,

L'infirmant pour le surplus, statuant à nouveau et y ajoutant.

Rejette la demande de transmission de trois questions préjudicielles à la Cour de Justice de l'Union européenne,

Confirme la décision administrative de rejet du 28 février 2017,

Valide l'avis de mise en recouvrement du 24 octobre 2013 délivré par l'administration fiscale à M. [D] [P] et à Mme [C] [P],

Condamne in solidum M. [D] [P] et Mme [C] [P] à payer à la direction générale des finances publiques la somme de 3 000 € au titre de l'article 700 du code de procédure civile, ainsi qu'aux dépens, et dit que ceux-ci pourront être recouvrés conformément aux dispositions de l'article 699 du code de procédure civile.

LE GREFFIERLE PRÉSIDENT


Synthèse
Tribunal : Cour d'appel d'Aix-en-Provence
Formation : Chambre 1-1
Numéro d'arrêt : 19/07835
Date de la décision : 28/06/2022

Origine de la décision
Date de l'import : 26/03/2024
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.appel;arret;2022-06-28;19.07835 ?
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