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27/06/2022 | FRANCE | N°22/00201

France | France, Cour d'appel d'Aix-en-Provence, Chambre 1-11 référés, 27 juin 2022, 22/00201


COUR D'APPEL D'AIX-EN-PROVENCE

Chambre 1-11 référés





ORDONNANCE DE REFERE

du 27 Juin 2022



N° 2022/ 337





Rôle N° RG 22/00201 - N° Portalis DBVB-V-B7G-BJEYD







[N] [I]





C/



PROCUREURE GENERALE

S.C.P. BR ASSOCIES





























Copie exécutoire délivrée





le :





à :



- Me Olivier AVRAMO<

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- Me Matthieu JOUSSET



- MADAME LA PROCUREURE GENERALE





Prononcée à la suite d'une assignation en référé en date du 21 Mars 2022.





DEMANDEUR



Monsieur [N] [I], demeurant [Adresse 1]



représenté par Me Olivier AVRAMO, avocat au barreau de TOULON





DEFENDEURS



MADAME LA PROCUREURE GENERALE, deme...

COUR D'APPEL D'AIX-EN-PROVENCE

Chambre 1-11 référés

ORDONNANCE DE REFERE

du 27 Juin 2022

N° 2022/ 337

Rôle N° RG 22/00201 - N° Portalis DBVB-V-B7G-BJEYD

[N] [I]

C/

PROCUREURE GENERALE

S.C.P. BR ASSOCIES

Copie exécutoire délivrée

le :

à :

- Me Olivier AVRAMO

- Me Matthieu JOUSSET

- MADAME LA PROCUREURE GENERALE

Prononcée à la suite d'une assignation en référé en date du 21 Mars 2022.

DEMANDEUR

Monsieur [N] [I], demeurant [Adresse 1]

représenté par Me Olivier AVRAMO, avocat au barreau de TOULON

DEFENDEURS

MADAME LA PROCUREURE GENERALE, demeurant [Adresse 2]

non présente, ayant pris des observations écrites

S.C.P. BR ASSOCIES domicilié en qualité de liquidateur judiciaire de la société MASSIALIA audit siège social, demeurant [Adresse 3]

représentée par Me Matthieu JOUSSET de la SELARL JOUSSET AVOCATS, avocat au barreau d'AIX-EN-PROVENCE substitué par Me Joris RAFFY de la SELARL JOUSSET AVOCATS, avocat au barreau D'AIX-EN-PROVENCE

* * * *

DÉBATS ET DÉLIBÉRÉ

L'affaire a été débattue le 23 Mai 2022 en audience publique devant

Véronique NOCLAIN, Président,

déléguée par ordonnance du premier président.

En application des articles 957 et 965 du code de procédure civile

Greffier lors des débats : Manon BOURDARIAS.

Les parties ont été avisées que le prononcé de la décision aurait lieu par mise à disposition au greffe le 27 Juin 2022.

ORDONNANCE

Réputée contradictoire,

Prononcée par mise à disposition au greffe le 27 Juin 2022.

Signée par Véronique NOCLAIN, Président et Manon BOURDARIAS, greffier auquel la minute de la décision a été remise par le magistrat signataire.

***

La SARL unipersonnelle Massilia Etanchéité dont le gérant a été monsieur [N] [I], unique associé, exerçait une activité de couverture acier, étanchéité toiture, terrasses et toiture acier.

Le 18 septembre 2018, la société Massilia Etanchéité a fait l'objet d'une mise en liquidation judiciaire et la SCP BR Associés a été désignée en qualité de liquidateur judiciaire.

Par exploit du 21 octobre 2020, la SCP BR Associés agissant en qualité de liquidateur judiciaire a fait assigner monsieur [N] [I] devant le tribunal de commerce d'Aix-en-Provence aux fins de condamnation à payer la somme de 1 186 606,96 euros au titre de l'insuffisance d'actif de la liquidation dont il porte la responsabilité et condamnation à une mesure de faillite personnelle pour une durée de 10 ans au visa des articles L.653-1 à L.653-11 du code de commerce ou interdiction de gérer, administrer ou contrôler directement ou indirectement une entreprise ou une personne morale.

Par jugement contradictoire du 4 mars 2022, le tribunal de commerce d'Aix-en-Provence a :

-dit que monsieur [N] [I] est responsable de l'insuffisance d'actif de la liquidation judiciaire de la société Massilia Etanchéité ;

-condamné monsieur [N] [I] à payer à la SCP BR Associés, ès qualités de liquidateur judiciaire, la somme de 500 000 euros avec intérêts au taux légal à compter du jugement au titre de sa participation au comblement de l'insuffisance d'actif de la société Massilia Etanchéité ;

-fixé au 31 mars 2023 au plus tard la date du règlement de cette somme ;

-prononcé à l'encontre de monsieur [N] [I] une mesure de faillite personnelle d'une durée de 10 ans ;

-ordonné l'exécution provisoire du jugement en application de l'article L.653-11 du code de commerce ;

-dit que les dépens seront frais privilégiés de la procédure collective.

Par acte du 11 mars 2022, monsieur [N] [I] a interjeté appel du jugement sus-dit.

Par acte d'huissier du 21 mars 2022 reçu et enregistré le 29 mars 2022, l'appelant a assigné la SCP BR Associés ès qualités de liquidateur et madame la procureure générale devant le premier président de la cour d'appel d'Aix-en-Provence au visa des dispositions des articles 514-3 du code de procédure civile et L.653-11 et R.661-1 du code de commerce aux fins d'arrêt de l'exécution provisoire de la décision déférée et dire que les dépens seront joints à la procédure au fond.

Le demandeur a soutenu lors de l'audience du 23 mai 2022 ses dernières écritures n° 2, notifiées le 19 mai 2022 aux autres parties. Il a confirmé ses prétentions initiales.

La SCP BR Associés ès qualités , par écritures signifiées le 29 mars 2022 et soutenues à l'audience, a sollicité le rejet des demandes de monsieur [N] [I] et la condamnation de ce dernier à lui verser une indemnité de 1000 euros au titre des frais irrépétibles et aux dépens en ordonnant l'emploi des dépens en frais privilégiés de la procédure collective.

Madame la procureure générale, par avis du 25 avril 2022 notifié aux autres parties, a sollicité le rejet de la demande d'arrêt de l'exécution provisoire au motif de l'absence de moyens sérieux au soutien de l'appel, le tribunal de commerce d'Aix-en-Provence ayant fait une juste application de l'article R.661-1 du code de commerce en ordonnant l'exécution provisoire de sa décision, le rapport du juge-commissaire ayant été établi le 5 novembre 2021 et le tribunal ayant statué en ayant eu connaissance de ce rapport et , sur le fond, les fautes de gestion de monsieur [N] [I] étant caractérisées, des infractions pénales ayant même été commises = abus de bien social, banqueroute et ce, en lien avec l'insuffisance d'actif constatée.

Il sera renvoyé aux écritures des parties pour un exposé complet des moyens exposés par les parties.

MOTIFS DE LA DECISION

Aux termes de l'article R.661-1 du code de commerce, par dérogation aux dispositions de l'article 514-3 du code de procédure civile, le premier président de la cour d'appel, ne peut, en référé, arrêter l'exécution provisoire des décisions mentionnées aux deux premiers aliénas du présent article, notamment s'agissant des décisions de liquidation judiciaire, que lorsque les moyens à l'appui de l'appel paraissent sérieux.

Le demandeur affirme disposer des moyens paraîssant sérieux suivants à l'appui de son appel :

- le jugement doit être réformé, le tribunal de commerce d'Aix-en-Provence, ayant au visa de l'article L.653-11 du code de commerce, assorti son jugement, et non la seule condamnation à la faillite personnelle, de l'exécution provisoire alors qu'elle est interdite par la loi ;

- les moyens de nullité= le jugement doit être annulé car le gérant de la société Massilia Etancheité n'a pas eu connaissance du rapport du juge-commissaire avant l'audience devant le tribunal de commerce ; cela lui a nécessairement porté grief; le seul document communiqué à ce titre en pièce n° 69 de la SCP BR Associés ne peut avoir valeur de rapport car il n'est pas une synthèse du dossier mais un document à charge par lequel le juge-commissaire émet une véritable demande en justice au sens de l'article 53 du code de procédure civile alors qu'il n'a pas qualité à agir en justice sur le fondement des articles L.651-3 et L.653-7 du code de commerce ; le juge-commissaire a en réalité, non déposé un rapport, mais effectué 'un préjugement' qui vicie la procédure contradictoire et prive monsieur [N] [I] des droits de la défense; l'action de la SCP BR Associés était donc affectée ab initio d'une nullité insusceptible de régularisation a posteriori; or, le tribunal de commerce n'a pas tiré les conséquences juridiques de cet écrit, qui n'est qu'un 'manifeste à charge' et non un 'rapport'; ce moyen, qui critique le contenu du 'rapport', n'est pas un moyen nouveau ainsi que soutenu à tort par madame la procureure générale; la SCP BR Associés précise que l'article R.662-12 du code de commerce n'exige pas de forme particulière pour le rapport du juge-commissaire et que le régime des nullités de fond ne peut s'appliquer en l'espèce ; or, le demandeur s'appuie sur d'autres dispositions impératives, à savoir, notamment l'article L.651-3 et l'article L.653-7 du code de commerce ainsi que l'article 6&1 de la CEDH ; le jugement déféré est bien vicié par un rapport irrégulier et il encourt de ce fait la nullité ;

-les moyens de réformation =le tribunal a commis une erreur manifeste d'appréciation en se contredisant dans les termes de ses condamnations; il n'a pas caractérisé le lien entre chacune des fautes retenues et l'aggravation du passif de la société Massilia Etanchéité ; la condamnation est donc' arbitraire'; s'agissant du cumul de condamnations, le tribunal met à la charge de monsieur [N] [I] une condamnation pécuniaire impossible à exécuter, même avec un délai de paiement accordé au 31 mars 2023 puisqu'elle interdit à monsieur [N] [I] de gérer toute société et de produire des richesses propres ; le jugement 'caractérise donc une contrariété de motifs et de dispositif'.

La SCP BR Associés développe dans ses écritures notifiées le 29 mars 2022 une réponse détaillée à tous les moyens d'appel exposés par le demandeur devant la cour et le premier président ; ne seront retenus dans le présent référé que sa réponse aux moyens soutenus par monsieur [N] [I] dans le présent référé.

En réplique, la SCP BR Associés ès qualités expose:

'sur l'exécution provisoire du jugement déféré : le tribunal de commerce peut librement en vertu de son pouvoir d'appréciation souverain ordonner l'exécution provisoire facultative de son jugement en application de l'article L.651-2 du code de commerce ; la loi n'interdit pas l'exécution facultative du jugement rendu en application de l'article L.651-2 du code de commerce; ce sujet ne sera au surplus pas débattu devant la cour d'appel et ne constitue donc pas un moyen sérieux d'annulation ou de réformation de la décision déférée ; la probabilité d'une annulation du jugement constitue au surplus un critère indifférent pour l'appréciation des conditions d'arrêt de l'exécution provisoire par l'effet dévolutif de l'appel ;

-le moyen de nullité tiré de l'absence d'établissement du rapport du juge-commissaire ou du défaut de conformité de ce rapport = aucune nullité n'est encourue à ce titre; une soi-disant irrégularité du rapport ne peut affecter rétroactivement la saisine, antérieure, du tribunal de commerce ; monsieur [N] [I] n'établit au surplus pas l'existence d'un grief causé par l'irrégularité supposée du rapport du juge-commissaire ; il a reçu en pièce n° 69 ce rapport, il a pu en discuter devant le tribunal de commerce, et le tribunal a statué contradictoirement 'sur rapport du juge-commissaire'; ce rapport est conforme à l'article R.662-12 alinéa 1er du code de commerce; aucune forme n'est imposée et le rapport peut être être écrit ou oral et consister en un simple avis, même succinct ; ce rapport est exigé en 1ère instance et non en appel; la probabilité d'une annulation du jugement constitue au surplus un critère indifférent pour l'appréciation des conditions d'arrêt de l'exécution provisoire par l'effet dévolutif de l'appel; monsieur [N] [I] n'a jamais demandé la nullité du rapport du juge-commissaire en 1ère instance ; ce rapport n'est pas une 'demande en justice' car le juge-commissaire n'est pas une partie à l'instance, ne fait que donner un avis consultatif, n'a saisi le tribunal d'aucune prétention et a précisé 'laisser le tribunal juger le nombre d'années' de faillite personnelle ou d'interdiction de gérer ;

-les moyens d'infirmation de la décision déférée = toutes les fautes de gestion commises par monsieur [N] [I] ont contribué à l'insuffisance d'actif ; le tribunal de commerce n'a pas à déterminer la part de l'insuffisance d'actif imputable à la faute de gestion et le seul fait que le dirigeant ait commis une faute, même si elle n'est à l'origine que d'une partie de l'insuffisance d'actif, peut être condamné à en payer l'intégralité en vertu du pouvoir souverain de la juridiction.

Le moyen soulevé au titre de l'exécution provisoire ne relevant que du premier président et non de la cour d'appel, il ne peut être considéré comme un 'moyen paraissant sérieux à l'appui de l'appel' au sens de l'article R.661-3 alinéa 1 du code de commerce ; il sera rappelé en tant que de besoin à ce titre qu'aucun texte n'interdit en l'espèce le tribunal de commerce d'assortir sa décision de l'exécution provisoire, seule l'exécution provisoire de droit étant interdite.

Le moyen soulevé au titre du rapport du juge-commissaire, qui serait un moyen de 'nullité' du jugement, ne paraît pas sérieux dans la mesure où aucun texte ne prévoit une cause de nullité au titre de la forme ou du contenu du rapport du juge-commissaire ; au surplus, si toutefois une nullité à ce titre était encourue, cela serait inopérant du fait de l'effet dévolutif de l'appel.

Le moyen d'infirmation du jugement soulevé au titre de la motivation même du jugement ne paraît pas sérieux, le tribunal ayant, contrairement à ce qu'affirme le demandeur, caractérisé en pages 11,12 et 13 un ensemble de fautes de gestion et ayant retenu une 'évidente confusion entre les intérêts de la personne morale et ses propres intérêts' qui ont 'clairement contribué à l'augmentation de l'insuffisance d'actif de la société'.

Enfin, il ne paraît pas sérieux de soutenir que le tribunal a commis 'une contrariété de motifs et de dispositif' en condamnant monsieur [N] [I] au comblement d'une partie du passif de sa société tout en lui interdisant de gérer toute société pendant 10 ans alors que le prononcé d'une sanction est en l'espèce en lien avec la gravité des fautes de gestion relevées et non en lien avec les capacités financières, supposées inexistantes, de monsieur [N] [I] ; le moyen soulevé ne paraît donc pas sérieux.

Ies moyens soutenus par monsieur [N] [I] à l'appui de son appel ne paraissent donc pas sérieux.

La demande d'arrêt de l'exécution provisoire de la décision déférée sera donc rejetée.

Il est équitable de condamner monsieur [N] [I] à payer à la SCP BR Associés ès qualités une indemnité de 1000 euros en application de l'article 700 du code de procédure civile.

Monsieur [N] [I], qui succombe, sera condamné aux dépens du référé.

PAR CES MOTIFS,

Statuant en référés, après débats en audience publique, par décision réputée contradictoire

-Ecartons la demande d'arrêt de l'exécution provisoire ;

-Condamnons monsieur [N] [I] à payer à la SCP BR Associés ès qualités une indemnité de 1000 euros en application de l'article 700 du code de procédure civile ;

- Condamnons monsieur [N] [I] aux dépens du référé.

Ainsi prononcé par la mise à disposition de la présente décision au greffe de la cour d'appel d'Aix-en-Provence le 27 juin 2022, date dont les parties comparantes ont été avisées à l'issue des débats.

LA GREFFIÈRE LA PRÉSIDENTE


Synthèse
Tribunal : Cour d'appel d'Aix-en-Provence
Formation : Chambre 1-11 référés
Numéro d'arrêt : 22/00201
Date de la décision : 27/06/2022

Origine de la décision
Date de l'import : 26/03/2024
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.appel;arret;2022-06-27;22.00201 ?
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