COUR D'APPEL D'AIX-EN-PROVENCE
Chambre 4-2
ARRÊT AU FOND
DU 24 JUIN 2022
N° 2022/
Rôle N° RG 19/01443 - N° Portalis DBVB-V-B7D-BDVXW
SASU ISS PROPRETE
C/
[G] [D]
Syndicat CGT DES ENTREPRISES DE PROPRETE DE BOUCHES DU RHON E
Copie exécutoire délivrée
le : 24 Juin 2022
à :
Me Emilie MILLION-ROUSSEAU, avocat au barreau de MARSEILLE
Me Roger VIGNAUD, avocat au barreau de MARSEILLE
Décision déférée à la Cour :
Jugement du Conseil de Prud'hommes - Formation paritaire de MARTIGUES en date du 21 Décembre 2018 enregistré(e) au répertoire général sous le n° F 17/00804.
APPELANTE
SASU ISS PROPRETE, demeurant [Adresse 5]
représentée par Me Emilie MILLION-ROUSSEAU de la SELARL RACINE, avocat au barreau de MARSEILLE
INTIMEES
Madame [G] [D], demeurant [Adresse 2]
représentée par Me Roger VIGNAUD, avocat au barreau de MARSEILLE
Syndicat CGT DES ENTREPRISES DE PROPRETE DE BOUCHES DU RHON E, demeurant [Adresse 1]
représentée par Me Roger VIGNAUD, avocat au barreau de MARSEILLE
*-*-*-*-*
COMPOSITION DE LA COUR
En application des dispositions des articles 804 et 805 du code de procédure civile, l'affaire a été débattue le 02 Mai 2022, en audience publique, les avocats ne s'y étant pas opposés, devant Madame Véronique SOULIER, Présidente de chambre suppléante, chargé du rapport, qui a fait un rapport oral à l'audience, avant les plaidoiries.
Ce magistrat a rendu compte des plaidoiries dans le délibéré de la cour, composée de :
Madame Florence TREGUIER, Présidente de chambre
Madame Marie-Noëlle ABBA, Présidente de chambre suppléante
Madame Véronique SOULIER, Présidente de chambre suppléante
Greffier lors des débats : Mme Cyrielle GOUNAUD.
Les parties ont été avisées que le prononcé de la décision aurait lieu par mise à disposition au greffe le 24 Juin 2022.
ARRÊT
Contradictoire,
Prononcé par mise à disposition au greffe le 24 Juin 2022
Signé par Madame Florence TREGUIER, Présidente de chambre et Mme Cyrielle GOUNAUD, Greffier, auquel la minute de la décision a été remise par le magistrat signataire.
***
La société ISS Facility Services anciennement dénommée ISS Propreté est une filiale française d'un groupe international déployant ses activités dans six domaines de services (Facility Management, Propreté, Hygiène et Présention, Logistique et Production).
Elle emploie 25.000 salariés et applique la convention collective des entreprises de propreté et services associés du 26 juillet 2011.
A compter du 1er février 2013, la société ISS Facility Services est devenue le nouvel adjudicataire du marché de propreté d'ArcelorMittal à [Localité 3].
Elle a engagé Madame [G] [D] en qualité d'agent de service- AS1A du 01/10/2015 au 29/05/2017, celle-ci étant chargée d'assurer l'entretien courant des locaux de la société Arcelor Mittal moyennant une rémunération mensuelle brute de 1.495,47 €.
Se prévalant d'une rupture d'égalité de traitement, Madame [D] a saisi la juridiction prud'homale le 20 octobre 2017 de plusieurs demandes aux fins d'obtenir le paiement de rappels de salaire au titre d'un 13ème mois, d'une indemnité de trajet et d'une indemnité de panier, le syndicat CGT des entreprises des Bouches du Rhône intervenant à ses côtés.
Par jugement du 21 décembre 2018, le conseil de prud'hommes de Martigues a :
- dit que Madame [D] est bien fondée en son action,
- dit qu'elle a subi une inégalité de traitement,
En conséquence,
- condamné la société ISS Propreté, prise en la personne de son représentant légal en exercice à lui payer à les sommes de :
- 2.691,17 € à titre de rappel du 13ème mois,
- 3.529,44 € à titre de rappel de prime de panier,
- 3.362,26 € à titre de rappel de prime de trajet,
- 500 € au titre de l'article 700 du code de procédure civile,
- débouté Madame [D] de sa demande d'exécution provisoire en application des dispositions de l'article 515 du code de procédure civile,
- débouté Madame [D] du surplus de ses demandes,
- débouté le syndicat CGT de sa demande au titre de l'article 700 du code de procédure civile,
- débouté la société ISS Propreté de sa demande au titre de l'article 700 du code de procédure civile,
- condamné la société ISS Propreté aux entiers dépens.
La SASU ISS Propreté a relevé appel de ce jugement par déclaration adressée au greffe par voie électronique en date du 23 janvier 2019.
Aux termes de ses conclusions d'appelante transmises par voie électronique le 17 juin 2021 auxquelles il convient de se reporter pour l'exposé détaillé des moyens soutenus, la société ISS Facility Services a demandé à la cour :
- d'infirmer le jugement entrepris en ce qu'il a :
- dit que Madame [D] est bien fondée en son action,
- dit qu'elle a subi une inégalité de traitement,
- condamné la société ISS Propreté, prise en la personne de son représentant légal en exercice à payer à Madame [D] les sommes de :
- 2.691,17 € à titre de rappel du 13ème mois,
- 3.529,44 € à titre de rappel de prime de panier,
- 3.362,26 € à titre de rappel de prime de trajet,
- 500 € au titre de l'article 700 du code de procédure civile,
- débouté la société de sa demande au titre de l'article 700 du code de procédure civile,
- condamné la société aux dépens,
Et statuant à nouveau, de:
- dire que Madame [D] ne subit aucune inégalité de traitement justifiant l'octroi de dommages-intérêts,
- dire que Madame [D] et le Syndicat CGT Bouches du Rhône ne justifient pas du quantum de leurs demandes,
- débouter Madame [D] de sa demande au titre du 13ème mois,
- débouter Madame [D] de sa demande au titre de la prime de panier,
- débouter Madame [D] de sa demande au titre de la prime de trajet,
- condamner Madame [D] à verser à la Société la somme de 2.000 € sur le fondement de l'article 700 du code de procédure civile,
- condamner Madame [D] aux entiers dépens.
Aux termes de leurs conclusions d'intimées et d'appelantes incidentes transmises par voie électronique le 15 novembre 2021 auxquelles il convient de se reporter pour l'exposé détaillé des moyens soutenus, Madame [D] ainsi que le Syndicat CGT des Entreprises de Propreté des Bouches du Rhône ont demandé à la cour de :
- confirmer le jugement déféré en ce qu'il a accordé des rappels de prime de 13ème mois, panier et de trajet mais le réformant en ce qui concerne les sommes allouées,
Statuant sur l'actualisation de ces primes,
I - condamner la société ISS Facility Services à payer à Madame [D]:
- 3.432,50 € de rappel de prime de 13ème mois
- 4.842,24 € de rappel de prime de panier
- 3.883,24 € de rappel de prime trajet
- 1.000 € au titre de l'article 700 du code de procédure civile,
II - Sur l'intervention du Syndicat CGT du Nettoyage des Bouches du Rhône
- dire recevable l'intervention du syndicat CGT des Entreprises de Propreté des Bouches du Rhône aux côtés de la salarié de la société ISS Facility Services ,
- condamner la société ISS Facility Services à payer au syndicat CGT des Entreprises de Propreté des Bouches du Rhône la somme de 200 € en réparation du préjudice subi par l'intérêt collectif de la profession qu'ils représentent,
- condamner la société ISS Facility Services à payer au syndicat CGT des Entreprises de Propreté des Bouches du Rhône la somme de 50 € au titre de l'article 700 du code de procédure civile et aux entiers dépens,
En tout état de cause :
- débouter la société ISS Facility Services de l'ensemble de ses demandes,
- condamner la société ISS Facility Services à payer les intérêts de droit à compter de la demande en justice avec capitalisation (article 1153-1 et 1154-1 du code civil) pour les créances de nature salariale et à compter de la décision pour les créances indemnitaires.
La clôture de l'instruction a été ordonnée le 20 avril 2022.
SUR CE
Sur la recevabilité de l'intervention du syndicat CGT du nettoyage des Bouches du Rhône:
Le jugement prud'homal critiqué a uniquement indiqué dans son dispositif qu'il déboutait le Syndicat CGT de sa demande d'article 700 du code de procédure civile en omettant de préciser qu'il déclarait irrecevable l'intervention du Syndicat CGT du Nettoyage des Bouches du Rhône alors qu'il avait pourtant précisé dans ses motifs que 'force est de constater que le Syndicat CGT du Nettoyage des Bouches du Rhône ne justifie pas de son action', la cour devant ainsi réparer cette omission.
Le Syndicat CGT des Entreprises de Propreté des Bouches du Rhône demande à la cour de déclarer recevable son intervention en faisant valoir qu'il intervient par application des dispositions de l'article L.2132-3 du code du travail au soutien de salariées victimes d'une inégalité de traitement et de discrimination de la part de l'employeur constituant une atteinte à l'intérêt collectif de la profession et qu'il justifie de sa qualité à agir en versant aux débats les statuts du syndicat, le justificatif du dépôt en mairie de ces documents, le pouvoir de la commission exécutive mandatant le secrétaire du syndicat Monsieur [X] à agir en justice aux côtés de Madame [D].
La société Facility Services ayant omis de reprendre dans le dispositif de ses conclusions sa demande tendant à voir déclarer irrecevable l'intervention volontaire du Syndicat CGT des Entreprises de Propreté des Bouches du Rhône, la cour n'examinera pas les moyens qu'elle développe dans ses motifs.
Si, selon l'article 117 du code de procédure civile, le défaut de pouvoir spécial du représentant d'une partie dans une procédure sans représentation obligatoire constitue une irrégularité de fond affectant la validité des actes de procédure, il résulte de l'article 121 du même code que la nullité ne sera pas prononcée si sa cause a disparu au moment où le juge statue sans qu'il y ait lieu de distinguer selon que cette régularisation intervient en première instance ou devant la cour d'appel.
Il résulte de l'examen des pièces versées aux débats par le Syndicat CGT des Entreprises de Propreté des Bouches du Rhône que ce dernier produit :
- en pièce C, ses statuts adoptés lors de l'assemblée générale du 25 janvier 2017 dont l'article 14 stipule que le secrétaire général, Monsieur [A] [X], selon le compte-rendu de cette même assemblée générale, a mandat pour représenter le syndicat auprès des instances judiciaires,
- en pièce D, le récépissé de dépôt des statuts en Mairie daté du 31 mars 2017,
- en pièce E, un pouvoir donné par le syndicat CGT des Entreprises de propreté et services associés des Bouches du Rhône à Monsieur [X] afin d'intervenir aux côtés de Mesdames [D], [F] et [T] dans la procédure engagée contre la société ISS devant la cour d'appel, document daté du 19 avril 2022.
Cependant, l'examen de la procédure d'appel dont il convient de rappeler qu'il s'agit d'une procédure avec représentation obligatoire permet de constater que le syndicat CGT des Entreprises de Propreté des Bouches du Rhône ne justifie pas avoir régulièrement communiqué à l'appelante par voie électronique cette dernière pièce, signée la veille de la clôture de l'instruction dans une instance engagée depuis le 20 octobre 2017, les deux seules communications de pièces réalisées par l'intimée l'ayant été les 15/07/2019 et 15/11/2021.
Dès lors, faute d'avoir régulièrement communiqué à l'appelante le pouvoir spécial indispensable à la régularisation en cause d'appel de l'intervention du Syndicat CGT des Entreprises de Propreté, il convient, après avoir complété le dispositif du jugement entrepris, de confirmer les dispositions de celui-ci ayant déclaré cette intervention irrecevable et ayant débouté celui-ci de sa demande fondée sur les dispositions de l'article 700 du code de procédure civile.
Sur l'inégalité de traitement :
En application du principe «à travail égal, salaire égal», les salariés placés dans une situation identique et effectuant un travail de valeur égale doivent être rémunérés de manière identique, l'égalité de rémunération concernant le salaire proprement dit mais aussi tous les avantages annexes ou accessoires liés à l'appartenance à l'entreprise.
Les différences de traitement créées par des accords négociés et signés par des organisations syndicales sont présumées justifiées et il appartient à celui qui les conteste de démontrer qu'elles sont étrangères à toutes considérations de nature professionnelle
Si l'employeur peut accorder unilatéralement des avantages particuliers à certains salariés, c'est à la condition que tous les salariés de l'entreprise placés dans une situation identique puissent bénéficier de l'avantage ainsi accordé et que les règles déterminant l'octroi de cet avantage soient préalablement définies et contrôlables.
Il appartient à celui qui invoque une inégalité de traitement de démontrer au préalable qu'il exerce des fonctions identiques ou similaires à celles du salarié auquel il se compare.
Si ces éléments sont rapportés, il incombe alors à l'employeur d'établir que les différences de traitement reposent sur des raisons objectives dont le juge peut contrôler la réalité et la pertinence étant précisé que la seule différence de catégorie professionnelle ne saurait en elle-même justifier pour l'attribution d'un avantage une différence de traitement entre les salariés placés dans une situation identique au regard dudit avantage.
Sur le 13ème mois :
La société Facility Services soutient:
- que Madame [D], qui invoque une inégalité de traitement, ne démontre pas se trouver dans une situation identique à celle des salariées auxquels elle se compare se bornant à alléguer d'une différence de traitement injustifiée en se comparant à 'une certaine catégorie de salariés dont les cadres, agents de maîtrise, employés administratifs et agents d'exécution' alors qu'il ressort d'une jurisprudence constante que les salariés cadres et non-cadres ne sont pas placés dans une situation identique au regard d'une prime de treizième mois en raison des responsabilités plus importantes conférées à ces derniers ressortant des fiches de poste qu'elle verse aux débats, les cadres et agent de maîtrise ayant des fonctions d'encadrement ainsi que des attributions commerciales, les employés administratifs exerçant des travaux de secrétariat, de comptabilité, de gestion du personnel et devant justifier lors de leur embauche être titulaire d'un niveau bac +2 ou d'une expérience professionnelle adéquate non visées dans les fiches relatives aux agents de service;
- qu'en outre, le principe d'égalité de traitement ne concerne pas les modalités de la rémunération alors qu'en l'espèce, le 13ème mois intitué au profit de certains salariés constitue uniquement une modalité de réglement en treize mois du salaire annuel de base et non comme allégué 'une prime' de 13ème mois versée en sus de leur rémunération annuelle de base de sorte que la salariée doit être déboutée de sa demande de rappel de salaire au titre du 13ème mois.
Madame [D] répond :
- que pour des raisons économiques l'employeur a distingué deux catégories de salariés, le personnel de structure d'une part composé des employés administratifs, agents de maîtrise et cadres travaillant dans les locaux de l'entreprise auquel il a attribué sans critères définis préalablement (appartenance à une catégorie particulière, responsabilités diverses) une prime de 13ème mois, et le personnel de site d'autre part, regroupant les agents de service y compris très qualifiés travaillant hors de l'entreprise dans les locaux de clients qui n'y ont pas eu droit;
- qu'en tant qu'agent de service de niveau 1 (AS1) elle entend se comparer uniquement à des employés administratives affectées au siège de la direction régionale dont les bulletins de paie ont été produits par l'employeur:
- Madame [Y], employée administrative niveau 1 (EA1), service paie,
- Madame [P], assistante de recouvrement, employée administrative niveau 1 (EA1),
Mme [O], employée administrative à temps partiel,
lesquelles exerçent un travail de valeur égale, l'examen comparé de ces deux fonctions dans la classification conventionnelle mettant en évidence un niveau requis ainsi que des caractéristiques générales de la fonction identiques, les deux premières salariées exécutant des travaux et tâches simples et répétitives à partir de consignes précises, l'employeur, qui n'a pas produit de fiche de poste correspondant aux fonctions exercées par les employées administratives n'ayant pas justifié l'attribution distincte de cet avantage à une seule de ces deux catégories de salarié.
La lecture des contrats de travail et bulletins de paie de Madame [Y] et de Madame [P] (pièce n°8), employées administrative classification EA1, auxquelles Madame [D] se compare utilement, permet d'une part, au regard des compétence, autonomie, responsabilité et technicité de leurs fonctions respectives détaillées dans la classification des employés administratives niveau 1 et agents de service niveau 1 (pièce n°49) de conclure que celles-ci exercent un travail de valeur égale et d'autre part, de constater que contrairement aux allégations de la société ISS Facility Services, leur rémunération n'est pas calculée sur 13 mois mais qu'elles 'bénéficient également d'un 13ème mois avec le salaire de décembre et calculé au prorata de leur temps de présence' s'agissant ainsi non d'une modalité de paiement mais d'une prime venant compléter le salaire de base.
Par ailleurs, la société ISS Facility ne conteste pas n'avoir versé la prime litigieuse qu'aux seuls cadres, agents de maîtrise et employés administratifs ce qui résulte tant du procès-verbal de réunion du comité d'entreprise du 27 août 2013, le Président ayant alors indiqué qu'il s'agissait là 'd'une décision du groupe' que du procès-verbal des délégués du personnel du 26 février 2004.
Alors que la salariée a prouvé qu'elle exerçait un travail de valeur égale à celui exécuté par les employés administratives de niveau 1 bénéficiaires de la prime litigieuse et que la société ISS Facility n'a nullement justifié la disparité de traitement résultant de l'attribution de cette prime à toutes les catégories de salariés sauf les agents de service travaillant sur des sites extérieurs, ne démontrant pas que celle-ci reposait sur des raisons objectives et pertinentes telles que l'exigence à l'embauche d'un diplôme, un niveau de responsabilité et/ou d'autonomie plus important, n'ayant pas versé aux débats en pièce n°8 la ou les fiches de poste correspondant aux fonctions exercées par les employées administratives ni aucun autre élément permettant à la cour de comparer concrètement les fonctions exercées, il convient de constater que Madame [D] s'est trouvée au regard de l'avantage considéré dans la même situation que celles des salariées auxquelles elle se comparaît, de sorte qu'à l'instar des premiers juges dont les dispositions seront confirmées, la cour constate que le versement d'un 13ème mois s'est fait en méconnaissance du principe d'égalité de traitement et que la salariée est fondée à réclamer le rappel de salaire sollicité dont le montant n'est pas critiqué par l'appelante à titre subsidiaire, le jugement entrepris étant réformé uniquement sur le montant alloué.
Sur les demandes de rappel de salaire au titre de la prime panier et de la prime de trajet :
La société ISS Facility Services fait valoir :
- au sujet de la prime panier : que la disparité de situation alléguée est justifiée dans la mesure où cette dernière perçue par Madame [H], à laquelle la salariée se compare, résulte de l'application de l'article 7 la convention collective des entreprises de propreté et notamment des conséquences du transfert conventionnel du contrat de travail de celle-ci réalisé le 1er juin 2010 et vise à compenser une charge spécifique liée aux conditions de travail particulières de cette dernière sur le site du Commissariat à l'Energie Atomique de Cadarache en raison de l'isolement géographique de ce site la contraignant à prendre ses repas sur son lieu de travail,
- au sujet de la prime de trajet : que la disparité de situation alléguée est également justifiée, celle-ci correspondant à un avantage individuel acquis visant là encore à compenser une charge spécifique liée aux conditions de travail particulières de Madame [H] résultant de l'isolement géographique du site de 1.625 ha au confluent du [Localité 7] et de la Durance, les communes les plus proches se situant respectivement à 3,3 km et 8,1 km, la contraignant à utiliser son véhicule personnel alors que Madame [D] n'apporte aucun élément démontrant qu'elle serait également contrainte d'utiliser son véhicule personnel alors que son lieu de travail, [Localité 3], n'est pas isolé.
Madame [D] soutient :
- qu'il a été découvert que tous les salariés de la société ISS Facility Services affectés sur le site de Cadarache appartenant à la même catégorie professionnelle quelle que soit leur qualification (AS, AQS, ATQS, CE) ont perçus une prime de panier et une prime de trajet;
- qu'elle ne se compare pas à Madame [H] mais à d'autres salariés ([I], [S], [N], [B], [W], [V], [M]), classés agents de service ou agents de service qualifiés relevant de la même catégorie professionnelle qu'elle et effectuant un travail de valeur égale et souligne que Mesdames [V] et [M] ayant été embauchées plusieurs années après la reprise du site du Commissariat à l'énergie Atomique n'ont donc pas bénéficié d'avantages individuels acquis, que ces primes leur ont été versées au titre d'un engagement unilatéral de l'employeur de sorte qu'au regard d'un avantage de nourriture, tous les salariés se trouvent dans la même situation,
- que l'éloignement géographique du CEA mis en exergue par la société ISS Facility pour justifier d'un traitement différencié n'est pas une preuve objective suffisante alors que certains des salariés du panel de comparaison résident à quelques kilomètres seulement de leur lieu de travail qu'ils peuvent rejoindre en voiture en 5 minutes, qu'une prime de panier ne leur est donc pas versée en raison d'une impossibilité de retourner déjeuner à leur domicile ce d'autant qu'il existe deux lieux de restauration collective au sein de l'enceinte du CEA de Cadarache ,
- que le fait que ce site nucléraire soit potentiellement dangereux ne justifie nullement l'attribution d'une prime de trajet forfaitaire et d'un montant identique pour l'ensemble du personnel quelle que soit la distance de leur domicile alors que des transports collectifs ont été mis par l'employeur à disposition de ses salariés.
L'article 7 de la convention collective des entreprises de propreté et services associés du 26 juillet 2011 applicable oblige le repreneur d'un marché de propreté à maintenir la rémunération mensuelle du salarié repris et notamment l'ensemble des éléments de salaire à périodicité fixe tels que les primes et avantages perçus par ce dernier préalablement au transfert de son contrat de travail, cette différence de traitement trouvant son origine dans l'application d'une disposition conventionnelle n'est pas étrangère à toute considération de nature professionnelle.
Cependant, Madame [D] verse aux débats les bulletins de paie de plusieurs salariées de la société ISS Facility affectés au site de Cadarache ([H], [I], [S], [N], [B], [W], [V], [M]) classés agents de service, agents qualifiés ou très qualifiés de service dont la lecture démontre qu'elles ont perçu chaque mois une prime de panier et une prime de trajet ou une indemnité de transport à l'inverse de Madame [D] non affectée sur ce site mais appartenant à la même catégorie professionnelle et effectuant un travail de valeur égale et que l'employeur ne peut valablement se prévaloir de l'application des dispositions conventionnelles au titre des avantages acquis alors que certaines de ces salariées, [U] [V] et [K] [M], ont été engagées à compter du 04/12/2013 et du 28/10/2014, soit à une période postérieure à l'attribution à la société Iss Facility Services du marché de nettoyage.
De son côté, non seulement la société ISS Facility Services n'évoque que la seule situation de Madame [H] pour soutenir que celle-ci percevait une prime de panier et une prime de trajet au titre d'un avantage acquis mais elle ne justifie par aucun élément objectif et pertinent la différence de traitement entre Madame [D] et les autres salariées du panel de comparaison appartenant à la même entreprise mais à des établissements distincts alors qu'il est acquis que le versement de la prime de panier s'effectue de manière forfaitaire et identique au profit de tous les salariés du site de Cadarache, qu'ils résident ou non à proximité de leur lieu de travail, Madame [D] justifiant par la production de témoignages de l'existence de lieux de restauration collective au sein de l'enceinte et que, de même, le versement d'une prime de trajet forfaitaire et identique, est également réalisé sans condition de distance géographique, cet avantage n'étant donc pas versé en fonction de la distance séparant le domicile des salariés de leur lieu de travail, la salariée établissant que les salariés auxquels elle se comparent ont accès aux moyens de transport collectif gratuit du CEA.
Enfin, les éléments contractuels produits par l'employeur établissent que Madame [D], domiciliée à [Adresse 4] (13) était affectée sur le chantier Arcelor Mittal Méditerranée situé sur la zone industrielle de [Localité 3], qui est un lieu de travail tout aussi vaste et isolé que le site du CEA de Cadarache nécessitant l'usage de son véhicule personnel étant relevé que l'employeur n'établit par aucun élément qu'il subordonne le versement de la prime de trajet forfaitaire et fixe aux salariés du CEA de Cadarache à la justification d'un usage contraint de leur véhicule personnel alors que les pièces produites démontrent à l'inverse que cette prime leur est versée quelle que soit la distance séparant leur domicile de leur lieu de travail, ainsi l'exemple de Mesdames [B] et [Z] résidant à [Localité 6] soit à 2,8 kms du CEA, soit 5 mns en voiture.
En conséquence, c'est à juste titre que la juridiction prud'homale dont les dispositions sont confirmées a retenu que la Société ISS Facility Services ne justifiait d'aucune raison objective et pertinente permettant de légitimer la disparité de rémunération constatée et a fait droit aux demandes de la salariée de rappel de salaire sur primes de panier et de trajet.
Enfin, la société ISS Hability Services n'ayant ni produit en cause d'appel les tableaux de calcul évoqués dans le jugement entrepris ni critiqué à titre subsidiaire les montants des primes de panier et de trajet calculés par la salariée, il convient par réformation du jugement entrepris de la condamner à payer à la salariée les sommes figurant dans le dispositif du présent arrêt.
Sur les intérêts et leur capitalisation :
Les créances de nature salariale allouées porteront intérêts à compter de la date de réception par l'employeur de la convocation devant le bureau de conciliation du conseil de prud'hommes.
Les intérêts échus dus au moins pour une année entière seront capitalisés dans les conditions prévues par l'article 1343-2 du code civil.
Sur les frais irrépétibles et les dépens :
Les dispositions du jugement entrepris ayant condamné la société ISS Facility Services aux dépens et à payer à Madame [D] une somme de 500 € au titre de l'article 700 du code de procédure civile sont confirmées.
PAR CES MOTIFS:
La cour:
Statuant publiquement, contradictoirement et en dernier ressort:
Complétant le dispositif du jugement entrepris:
- déclare irrecevable l'intervention du Syndicat CGT des Entreprises de Propreté.
Confirme le jugement entrepris en toutes ses dispositions à l'exception des montants des sommes allouées à la salarié à titre de rappel de salaire sur 13ème mois, sur prime de panier et prime de trajet qui sont infirmées.
Statuant à nouveau et y ajoutant :
Condamne la société ISS Facility Services à payer à Madame [D] les sommes suivantes:
- 3.432,50 € de rappel de prime de 13ème mois
- 4.842,24 € de rappel de prime de panier
- 3.883,24 € de rappel de prime trajet
Rappelle que les créances de nature salariale allouées porteront intérêts à compter de la date de réception par l'employeur de la convocation devant le bureau de conciliation du conseil de prud'hommes.
Dit que les intérêts échus dus au moins pour une année entière seront capitalisés dans les conditions prévues par l'article 1343-2 du code civil.
Condamne la société ISS Facility Services aux dépens.
Le greffier Le président