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09/06/2022 | FRANCE | N°20/12392

France | France, Cour d'appel d'Aix-en-Provence, Chambre 1-7, 09 juin 2022, 20/12392


COUR D'APPEL D'AIX-EN-PROVENCE

Chambre 1-7



ARRÊT AU FOND

DU 09 JUIN 2022



N° 2022/ 258













Rôle N° RG 20/12392 - N° Portalis DBVB-V-B7E-BGUL5







[Y] [R]





C/



[C] [P] [X]

[G] [P] [X] EPOUSE [B]

[T] [P] [X]

[V] [P] [X]













Copie exécutoire délivrée

le :

à :

SCP BIANCOTTO ARNAUBEC,



SELARL STEMMER-BRICE-FOUR



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Décision déférée à la Cour :



Jugement du Juge des contentieux de la protection de Nice en date du 23 Octobre 2020 enregistré(e) au répertoire général sous le n° 11-17-0014.





APPELANT



Monsieur [Y] [R]

(bénéficie d'une aide juridictionnelle Totale numéro 2021-1977 du 30/04/...

COUR D'APPEL D'AIX-EN-PROVENCE

Chambre 1-7

ARRÊT AU FOND

DU 09 JUIN 2022

N° 2022/ 258

Rôle N° RG 20/12392 - N° Portalis DBVB-V-B7E-BGUL5

[Y] [R]

C/

[C] [P] [X]

[G] [P] [X] EPOUSE [B]

[T] [P] [X]

[V] [P] [X]

Copie exécutoire délivrée

le :

à :

SCP BIANCOTTO ARNAUBEC,

SELARL STEMMER-BRICE-FOUR

Décision déférée à la Cour :

Jugement du Juge des contentieux de la protection de Nice en date du 23 Octobre 2020 enregistré(e) au répertoire général sous le n° 11-17-0014.

APPELANT

Monsieur [Y] [R]

(bénéficie d'une aide juridictionnelle Totale numéro 2021-1977 du 30/04/2021 accordée par le bureau d'aide juridictionnelle de AIX-EN-PROVENCE)

né le 26 Avril 1966 à Venise (Italie), demeurant 21, rue Gubernatis - 06000 Nice

représenté par Me Olivier ARNAUBEC de la SCP BIANCOTTO ARNAUBEC, avocat au barreau de NICE

INTIMES

Monsieur [C] [P] [X]

né le 24 Juin 1951 à NEUILLY SUR SEINE (92200), demeurant 26, résidence La Grande Terre - 30128 GARONS

Madame [G] [P] [X] EPOUSE [B]

née le 26 Avril 1955 à NEUILLY SUR SEINE (92200), demeurant 80, rue de la Roquette - 75011 PARIS

Monsieur [T] [P] [X]

né le 25 Novembre 1952 à NEUILLY SUR SEINE (92200), demeurant 39, rue Lamoricière - 76600 LE HAVRE

Monsieur [V] [P] [X]

né le 09 Janvier 1959 à NIMES (30000), demeurant 1, rue de l'Ancienne Mairie - 30140 MASSILARGUES-ATTUECH

Tous représentés par Me Emmanuelle BRICE-TREHIN de la SELARL STEMMER-BRICE-FOUR, avocat au barreau de NICE

*-*-*-*-*

COMPOSITION DE LA COUR

L'affaire a été débattue le 06 Avril 2022 en audience publique devant la cour composée de :

Madame Carole DAUX-HARAND, Présidente de chambre

Madame Carole MENDOZA, Conseillère,

Madame Mireille CAURIER-LEHOT, Conseillère

qui en ont délibéré.

Greffier lors des débats : Mme Natacha BARBE.

Les parties ont été avisées que le prononcé de la décision aurait lieu par mise à disposition au greffe le 09 Juin 2022.

ARRÊT

Contradictoire,

Prononcé par mise à disposition au greffe le 09 Juin 2022,

Signé par Madame Carole DAUX-HARAND, Présidente de chambre et Mme Natacha BARBE, greffier auquel la minute de la décision a été remise par le magistrat signataire.

***

EXPOSÉ DU LITIGE

Par acte sous seing privé du 24 mars 2005 à effet à la même date, Madame [U] [P] [X], aux droits de laquelle viennent Messieurs [C], [T] et [V] [P] [X] et Madame [G] [P] [X] épouse [B], a donné à bail d'habitation à Monsieur [Y] [R] un appartement situé 21 rue Gubernatis à Nice, moyennant un loyer mensuel de 315 euros majoré d'une provision mensuelles sur charges de 31 euros.

Le 28 octobre 2015, les bailleurs ont fait délivrer au locataire un congé pour vendre à effet au 23 mars 2017.

Par jugement du 18 décembre 2018, le juge d'instance de Nice a constaté que Monsieur [R] avait régulièrement exercé son droit de préemption au prix de 70.000 euros. Un appel a été relevé et la procédure est pendante devant la cour.

Par acte d'huissier du 24 mai 2017, Monsieur [R], qui s'est notamment plaint d'un trouble de jouissance, a fait assigner la hoirie [P] [X] aux fins de la voir condamner à lui verser la somme de 12.000 euros de dommages et intérêts ainsi que celle de 248 euros au titre des équipements qu'il a financés.

Par jugement du 18 décembre 2018, le tribunal a ordonné la réouverture des débats afin que soit produit le rapport effectué par les services de la ville de Nice.

Par jugement contradictoire du 23 octobre 2020, le juge des contentieux de la protection de Nice a statué de la manière suivante :

'DEBOUTE [Y] [R] de ses demandes ;

LE CONDAMNE sous astreinte de 70 euros par jour de retard a compter de la signification de la présente décision à permettre l'entreprise missionnée par le syndic de copropriété d'accéder aux lieux loués afin d'y exécuter les travaux commandés ;

LE CONDAMNE à payer à titre reconventionnel à [C], [T] et [V] [P] [X] ainsi que [G] [P] [X] épouse [B] la somme de 479,54 euros au titre des sommes dues ;

DEBOUTE [C], [T] et [V] [P] [X] ainsi que [G] [P] [X] épouse [B] de leur demande reconventionnelle en dommages et intérêts pour procédure abusive ;

CONDAMNE [Y] [R] à payer à [C], [T] et [V] [P] [X]

[X] ainsi que [G] [P] [X] épouse [B] la somme de 2.500 euros en application des dispositions de l'artic1e 700 du code de procédure civile ;

ORDONNE l'exécution provisoire ;

CONDAMNE [Y] [R] aux dépens'.

Le premier juge, qui s'est appuyé sur le rapport de la ville de Nice, a rejeté les demandes d'indemnisation formées par Monsieur [R] ; il a indiqué que les odeurs nauséabondes et les remontées d'eaux usées par les canalisations de la douche et du lavabo de la salle d'eau du logement trouvaient leur origine dans les parties communes si bien qu'en application de l'article 1725 du code civil, ils étaient exclusifs de la responsabilité des bailleurs. Il a noté que les bailleurs s'étaient par ailleurs heurtés au refus de Monsieur [R] de voir placer un caisson d'extraction dans le logement, ce qui aurait pu remédier à l'absence de ventilation dans la salle d'eau et la cuisine.

Il a estimé que les autres désordres évoqués par Monsieur [R] (reprise de l'auvent arraché à la suite d'intempéries d'octobre 2015 ; évacuations de la salle de bains; parlophone ; sonnette; fourniture de badge) avaient, soit fait l'objet d'une indemnisation au profit de ce dernier, soit relevaient des charges imputables au locataire.

Il a noté que l'affaissement progressif d'un mur relevait de la responsabilité du syndicat des copropriétaires.

Il a écarté toute indemnisation au titre du bruit généré par les travaux du tramway.

Il a souligné que les bailleurs justifiaient du remplacement des fenêtres de l'appartement, du changement du bac de douche et noté que Monsieur [R] avait empêché le remplacement d'un robinet d'eau.

Il a estimé que les bailleurs ne pouvaient être tenus pour responsables de la résiliation de l'assurance locative de leur locataire.

Il a condamné Monsieur [R] à laisser l'accès aux lieux loués.

Le 11 décembre 2020, Monsieur [R] a relevé appel en ce qu'il a été débouté de sa demande d'indemnisation et de sa demande au titre d'une indemnité fondée sur l'article 700 du code de procédure civile, en ce qu'il a été condamné sous astreinte à permettre l'accès aux lieux loués, en ce qu'il a été condamné aux dépens et à une indemnité au titre des frais irrépétibles.

Les consorts [P] [X] ont constitué avocat.

Par conclusions notifiées le 09 mars 2021 sur le RPVA auxquelles il convient de se référer, Monsieur [R] demande à la cour de statuer en ce sens :

'INFIRMER la décision en ses dispositions dont appel et statuant à nouveau :

CONDAMNER les intimés en leur qualité de coïndivisaires de l'appartement sis 21 rue Gubernatis à Nice à verser à Monsieur [R] la somme de 12.000,00 euros outre intérêts au taux légal à compter de l'exploit introductif d'instance,

CONDAMNER les intimés en leur qualité de coïndivisaires de l'appartement sis 21 rue Gubernatis à Nice à verser à Monsieur [R] au titre des équipements financés aux lieu et place du bailleur la somme de 248,00 Euros outre intérêts au taux légal à compter de l'exploit introductif d'instance,

CONDAMNER les requis en leur qualité de coïndivisaires de l'appartement sis 21 rue Gubernatis à Nice à verser à Monsieur [R] la somme de 1500 € sur le fondement de l'article 700 du Code de Procédure Civile.

CONDAMNER les requis en leur qualité de coïndivisaires de l'appartement sis 21 rue Gubernatis à Nice aux dépens de première instance et d'appel'.

Il reproche aux bailleurs un manquement à leur obligation de réparations et de décence.

Il conteste le caractère de tiers du syndicat des copropriétaires.

Il leur reproche une absence d'aération et de ventilation des pièces d'eau; il conteste avoir empêché la pose d'une telle installation.. Il souligne que le caisson de VMC, du fait de l'exécution provisoire du jugement déféré, a été installé dans son logement, ce qui est source de nuisances.

Il soutient justifier que l'absence de ventilation lui a créé un préjudice en raison d'un phénomène de condensation, décrit par un expert d'assurance.

Il déclare qu'en l'absence de VMC, la grille d'aération de la pièce principale lui a créé des nuisances (mauvaises odeurs; diffusion de poussière).

Il fait état d'autres désordres : survenance d'odeurs nauséabondes et refoulements intempestifs des équipements sanitaires, qui l'ont obligé à mettre en place des bouchons caoutchouc puis un aérateur.

Il relève qu'il existe une contre pente structurelle au niveau de l'évacuation des toilettes qui entraîne des refoulements intempestifs et un problème de pression d'eau.

Il se plaint de la disparition d'un auvent sur la fenêtre attenante à la cuisine après la survenance des intempéries du 03 octobre 2015. Il conteste avoir été indemnisé pour cette difficulté.

Il déclare subir un affaissement du sol de la salle de bains entraînant une pente anormale du bac de douche et un décollement progressif de la faïence sur le mur. Il évoque l'existence d'un affaissement progressif du mur ( cloison séparative intérieure et non partie commune) situé entre la cuisine et la salle de bains, ce qui entraîne un décollement de la faïence de la cuisine au niveau des plaques de cuisson.

Il fait état de menuiseries vétustes et non isolantes et de dysfonctionnement du parlophone et de la sonnette. Il se plaint des bruits de travaux du tramway. Il note que le robinet d'eau d'entrée a été soudé.

Pour l'ensemble de ces motifs constitutifs de troubles de jouissance et notamment en raison de l'existence d'un appartement humide avec moisissures, il sollicite des dommages et intérêts à hauteur de 50% de la valeur locative, soit 200 euros par mois sur cinq ans (de 2012 à 2017, date de la délivrance de l'assignation).

Il demande le remboursement des plaques de cuisson qu'il a changées, d'un radiateur qu'il a acheté et du badge Vigik qu'il a financé.

Il conteste être redevable d'un arriéré locatif et soutient que les bailleurs ne justifient pas les charges qu'ils sollicitent. Il conteste dès lors devoir la somme de 243,54 euros au titre d'un solde de charges.

Par conclusions notifiées le 07 juin 2021 sur le RPVA auxquelles il convient de se référer, les consorts [P] [X] demandent à la cour de statuer en ce sens :

'Confirmer le jugement du 23 octobre 2020 en l'ensemble de ses dispositions,

Juger que l'appel est limité aux seuls chefs expressément critiqué dans la déclaration d'appel et que Monsieur [R] ne peut étendre par voie de conclusions son appel à la condamnation au versement de la somme de 479,54€ aujourd'hui définitive,

Condamner Monsieur [R] au paiement de la somme de 5.000€ pour appel abusif, Le condamner au paiement de la somme de 4.000€ sur le fondement de l'article 700 du code de procédure civile ainsi qu'aux entiers dépens de première instance et d'appel' .

Ils soutiennent que l'action intentée par leur locataire a pour seul objectif d'obtenir un prix de vente plus bas pour le logement qu'il souhaite acquérir. Ils relèvent d'ailleurs qu'il ne sollicite aucun travaux.

Ils relèvent que Monsieur [R] s'est plaint d'un problème de ventilation et d'aération uniquement en juillet 2016 et qu'ils ont pris en charge cette difficulté très rapidement. Ils soutiennent que ce dernier a fait obstacle aux travaux qui n'ont été effectué que tardivement, à la suite de l'exécution du jugement de première instance. Ils ajoutent que Monsieur [R] ne démontre pas le préjudice qu'il aurait subi en raison de l'absence de ventilation.

Ils notent qu'il ne démontre aucune difficulté liée à la grille d'aération de la pièce principale.

Ils soulignent que la survenance d'odeurs nauséabondes et de refoulements intempestifs trouvent leur origine dans les parties communes. Ils font valoir que le syndic, qu'ils ont averti, a fait intervenir une société à plusieurs reprises. En tout état de cause, ils estiment que la cause provient d'un tiers et que leur responsabilité ne peut être engagée en application de l'article 1725 du code civil. Ils soutiennent avoir toujours été réactifs aux doléances de leur locataire.

Ils relèvent que bon nombre de doléances de Monsieur [R] ne relève pas de leur responsabilité ou n'est pas démontré (contre pente structurelle au niveau de l'évacuation des toilettes; problèmes de pression d'eau; dysfonctionnement du parlophone et de la sonnette; affaissement progressif du mur; bruit des travaux du tramway).

Ils soutiennent n'avoir pas à indemniser le changement des plaques de cuisson et le remplacement du convecteur ; ils indiquent qu'il n'était pas démontré que ces éléments ne fonctionnaient pas et qu'ils n'ont pas été mis en demeure de les remplacer.

Ils s'étonnent que Monsieur [R] n'ait pas commandé le badge VIGIK auprès du syndic ni qu'il ne leur ait fait aucune demande préalable.

Ils affirment qu'il a été indemnisé à la suite de la dégradation de l'auvent et qu'à tout le moins, il ne démontre pas ne l'avoir pas été, alors qu'il avait fait une déclaration de sinistre auprès de son assureur.

Ils relèvent avoir procédé au changement des fenêtres dès qu'ils ont été avisés d'une difficulté à ce sujet. Ils notent que Monsieur [R] ne démontre avoir subi un préjudice de jouissance.

Ils soutiennent avoir réparé la défectuosité du robinet d'eau.

Ils expliquent que leur locataire a retardé les travaux de remise en état de la salle d'eau commandés dès le mois d'octobre 2016.

De façon plus générale, ils déclarent que leur locataire ne s'est jamais plaint de la moindre difficulté avant l'année 2016. Ils notent avoir toujours répondu à ses doléances. Ils estiment abusive la procédure d'appel.

Ils soutiennent que Monsieur [R] ne peut contester l'arriéré locatif dont il n'a pas fait appel dans sa déclaration d'appel.

MOTIVATION

Sur la révocation de l'ordonnance de clôture et sur les pièces 26 et 27 produites par les consorts [P] [X]

L'ordonnance de clôture ne peut être révoquée que s'il se révèle une cause grave depuis qu'elle a été rendue en application de l'article 803 du code de procédure civile.

L'ordonnance de clôture a été prononcée le 23 mars 2022.

Le 21 mars 2022, l'appelant a versé au débat une pièce consistant en un tableau de désordres qu'il estime avoir subi dans le logement loué avec les solutions qui, selon lui, y ont été apportées.

Le 29 mars 2022, soit après l'ordonnance de clôture, les intimés ont produit au débat un ' tableau synoptique des doléances injustifiée de Monsieur [R]' qui reprend ainsi les plaintes de ce dernier et fait un commentaire sur chacune d'entre elle ainsi qu'un ensemble de factures pour démontrer les travaux effectués.

Afin de respecter le principe du contradictoire et de permettre aux intimés de synthétiser les réponses qu'ils estiment avoir apportées à leur locataire, il convient d'ordonner la révocation de l'ordonnance de clôture pour permettre que soient versés au débat leurs pièces 26 et 27.

Sur les demandes d'indemnisation formées par Monsieur [R]

Monsieur [R] liste de multiples difficultés qui justifieraient une indemnisation de ses bailleurs (absence d'aération et de ventilation dans la salle de bains, les wc et la cuisine; inefficacité et nocivité de la grille d'aération de la pièce principale; mise en place nécessaire de bouchons de caoutchouc sur les évacuations de la salle de bains ; contrepente structurelle au niveau de l'évacuation des toilettes et problèmes de pression d'eau ; absence d'auvent sur la fenêtre de la pièce attenante à la cuisine à la suite des intempéries du 03 octobre 2015; affaisssement du sol de la salle de bains entraînant une pente anormale du bac de douche; affaissement progressif du mur entre la cuisine et la salle de bains; menuiseries de la façade vétustes et non isolantes; bruits des travaux du tramway ; vétusté des plaques électriques de cuisson l'ayant conduit à les changer; vétusté du chauffage l'ayant conduit à le changer ; absence de badge VIGIK ; résiliation de l'assurance ; défectuosité du robinet d'arrivée d'eau).

Pour obtenir une indemnisation de son bailleur, Monsieur [R] doit justifier de la réalité des préjudices qu'il évoque et du lien entre les désordres qu'il dénonce et des manquements des bailleurs.

Selon l'article 6 de la loi du 06 juillet 1989, le bailleur est tenu de remettre au locataire un logement décent ne laissant pas apparaître de risques manifestes pouvant porter atteinte à la sécurité physique ou à la santé et doté des éléments le rendant conforme à l'usage d'habitation.

Il est également obligé de délivrer au locataire le logement en bon état d'usage et de réparation ainsi que les équipements mentionnés au contrat de location en bon état de fonctionnement, d'assurer au locataire la jouissance paisible du logement et, sans préjudice des dispositions de l'article 1721 du code civil, de le garantir des vices ou défauts de nature à y faire obstacle, d'entretenir les locaux en état de servir à l'usage prévu par le contrat et d'y faire toutes les réparations, autres que locatives, nécessaires au maintien en état et à l'entretien normal des locaux loués.

L'article 1725 du code civil énonce que le bailleur n'est pas tenu de garantir le preneur du trouble que des tiers apportent par voies de fait à sa jouissance, sans prétendre d'ailleurs aucun droit sur la chose louée ; sauf au preneur à les poursuivre en son nom personnel.

Monsieur [R] loue un appartement de deux pièces, d'environ 35 m² au 5 étage, composé d'un séjour, d'une chambre, d'une cuisine indépendante et d'une salle de bain avec WC.

L'état des lieux d'entrée 2005 (pièce 51) qualifie le logement 'en état d'usage' sur certains points.

Il y est mentionné :

- dans le hall d'entrée : boiseries et bois abîmé avec le mur du plafond abîmé par un dégât des eaux ;

- dans la cuisine : des fissures au mur, une niche au -dessus de la porte avec de la peinture écaillée ;

- dans le séjour : des tommettes cassées ;

- dans la chambre 1 : des tommettes cassées avec des éclats et un mauvais état des murs ;

- dans la salle de bains : les murs et le sol sont en état d'usage et il existe des fissures sur deux carreaux ;

L'ensemble des appareils et accessoires sanitaires sont qualifiés à l'état d'usage.

Pour le reste, il est mentionné que le logement est essentiellement en bon état.

Monsieur [R] (sa pièce 22 ) a envoyé au mandataire de ses bailleurs un courriel du 23 juillet 2012, intitulé 'proposition d'achat + travaux' aux termes duquel il indiquait faire parvenir sa proposition d'achat du bien au plus vite et demandait à ce que des dates soient prévues pour le remplacement des convecteurs électriques et des plaques de cuisson et pour la mise en place d'une ventilation mécanique dans la salle de bains. Il n'évoquait pas les éventuelles difficultés qu'il rencontrait dans le logement.

Par un courriel du 15 mars 2016, Monsieur [R] a indiqué au mandataire de ses bailleurs (sa pièce 17) qu'il souffrait de mauvaises odeurs dans son logement ainsi que 'de régurgitations intempestives' qui rendaient insupportables sa vie quotidienne dans l'appartement.

Ce n'est que le 20 juillet 2016, date de la première mise en demeure faite par son conseil qui listait dix difficultés, que Monsieur [R] exposait rencontrer des désordres pouvant se résumer ainsi :

- problèmes liés à la ventilation dans les pièces d'eau,

-problèmes de refoulement et d'odeurs intempestives dans la salle de bains qu'il liait à un problème de contrepente d'une canalisation et à un problème de canalisation des eaux usées de la copropriété,

- affaissement du sol de la salle de bains et du mur entre la cuisine et la salle de bains,

- absence d'un auvent,

- menuiseries vétustes,

- problèmes de pression d'eau,

- dysfonctionnement du parlophone et bruits sur une place proche de l'immeuble.

Le rapport d'inspection de la ville de Nice du 18 mai 2016 faisait état (pièce 28 de l'appelant) de la présence d'odeurs nauséabondes et de remontées d'eaux usées par les canalisations de la douche et du lavabo de la salle d'eau du logement ainsi que d'une absence de ventilations dans la salle d'eau et dans la cuisine. Ce rapport n'évoquait pas de problèmes d'humidité ou de moisissures. Il notait qu'une mise en demeureseraut adressée au gestionnaire du bien pour les problèmes de ventilation et au syndic de copropriété pour les nuisances olfactives.

Dans le mail envoyé le 04 juillet 2016 par Monsieur [R] aux représentants de la ville de Nice ( sa pièce 32), ce dernier n'évoque pas non plus de problèmes d'humidité ou de moisissures mais se plaint de nuisances olfactives.

Il n'est pas démontré que les nuisances olfactives seraient en lien avec le défaut de ventilation de la salle d'eau et de la cuisine. Aucune pièce ne permet d'établir le préjudice subi par Monsieur [R] à raison de cette absence de ventilation. Dès lors, ce dernier ne peut obtenir aucune indemnisation, en absence de démonstration de son préjudice. Pour rappel, les travaux de mise en place d'une ventilation mécanique ont été effectués en 2021.

Aucune pièce probante ne permet de démontrer l'existence des affaissements évoqués par Monsieur [R], ni les difficultés liées à la grille d'aération de la pièce principale.

Les photographies prduites au débat par Monsieur [R] sont inexploitables et ne permettent de démontrer ni l'étendue ni la cause des désordres dont se plaint Monsieur [R]. La lettre de l'expert mandaté par l'assureur de Monsieur [R] au mandataire des bailleurs (pièce 14 de l'appelant) qui indique avoir constaté le 08 décembre 2015 des dommages affectant la chambre de l'appartement de Monsieur [R] consécutif à des infiltrations au travers des châssis et dormants de la fenêtre du toit n'est pas suffisamment probante ni précise pour démontrer que les désordres subis par ce dernier (qui ne sont d'ailleurs pas décrits), seraient de la responsabilité du bailleur, en l'absence d'autre pièce. Aucune autre pièce ne vient confirmer un éventuel problème de vétusté des menuiseries extérieures qui aurait pour conséquence de laisser passer l'eau.

Les pièces du dossier permettent uniquement d'établir que Monsieur [R] a subi des problèmes d'odeurs et de remontées d'eaux usées provenant de désordres dans les parties communes.

Lorsqu'un désordre affecte la partie privative d'une location et qu'il trouve sa source dans les parties communes, le preneur peut choisir d'agir contre son bailleur qui lui doit la jouissance paisible du bien.

Monsieur [R] a évoqué ce problème d'odeurs le 15 mars 2016. Ce désordre existait toujours le 18 mai 2016, comme en témoigne le rapport de la ville de Nice. Par courrier du 02 août 2016 (pièce 10 des intimés), le mandataire des bailleurs indiquait au conseil de Monsieur [R] que ces odeurs, dont il était le seul à se plaindre, relèveraient d'un problème de copropriété et que des dispositions avaient déjà été prises par le syndic. Après la mise en demeure du 20 juillet 2016 effectuée par son conseil qui n'évoque plus l'existence de ces difficultés (mais uniquement leur risque de survenance), Monsieur [R] ne s'est plus jamais plaint des problèmes d'odeurs ni de remontées d'eaux usées. Les lettres écrites par son conseil les 29 septembre 2016 et 25 novembre 2016 ne parlent plus de ces désordres.

Ainsi, Monsieur [R] ne démontre pas que ces désordres auraient duré plus que quatre mois. Ses bailleurs sont tenus de lui assurer la jouissance paisible du logement, ce qui n'a pas été le cas durant les mois de mars 2016 à juin 2016. Son préjudice lié à ces difficultés sera intégralement réparé par l'allocation d'une somme de 400 euros.

Par ailleurs, le conseil de Monsieur [R], dans un courrier au mandataire des bailleurs du 29 septembre 2016, a sollicité le remplacement des fenêtres, ce qui a été effectué le 10 novembre 2016. Monsieur [R] ne peut solliciter aucune indemnisation sur ce point, puisqu'il ne démontre pas qu'il aurait subi un préjudice lié à l'état des fenêtres et que les bailleurs, après avoir été mis en demeure de les changer, se sont conformés à cette demande, sans que Monsieur [R] ne démontre qu'ils auraient fait preuve de négligence.

De la même manière, par lettre du 29 septembre 2016, le conseil de Monsieur [R] a fait état de désordres dans la cabine de douche (décollement de la rangée du bas de la faïence). Les bailleurs justifient avoir mandaté une entreprise qui indique (pièce 20 des intimés), dans une attestation du 29 mai 2017, qu'il a été très difficile de planifier un rendez-vous pour commencer les travaux et impossible de les terminer en raison des reports de Monsieur [R]. L'artisan joint à son attestation un devis qui atteste, sans démonstration inverse de Monsieur [R], que la douche a été remise en état et qu'il reste à poser une cabine d'angle. Les bailleurs ont donc respecté leur obligation de réparation, après que leur locataire leur en a fait la demande. Monsieur [R], qui ne démontre aucune négligence de la part de ses bailleurs, ne peut solliciter une indemnisation sur ce point.

Monsieur [R] ne peut solliciter de son bailleur aucune indemnisation s'agissant des dysfonctionnements du parlophone (non démontrés), de l'absence de badge VIGIE (qu'il n'a pas revendiqué) et des nuisances sonores liées aux travaux pour le tramway qui sont le fait d'un tiers, en application de l'article 1725 du code civil.

Il ne démontre aucun préjudice en lien avec une éventuelle défectuosité d'un robinet d'arrivée d'eau et ne démontre pas qu'il existerait un problème de pression d'eau.

Le bailleurs ne contestent pas dans leur dernières écritures que l'auvent avait été financé par le bailleur de l'époque. Ils soutiennent que Monsieur [R] a été indemnisé par son assureur à la suite de la destruction de l'auvent lors d'intempéries du 03 octobre 2015, comme le démontre sa pièce 18. Cette pièce évoque uniquement les dommages consécutifs à un événement climatique du 03 octobre 2015. Monsieur [R] démontre (sa pièce 14) que l'assurance a pris en charge la remise en état du mur sous la fenêtre, à la suite d'un sinistre déclaré le 03 octobre 2015. Il n'est pas évoqué le coût du remplacement de l'auvent. Cependant, Monsieur [R] ne sollicite pas de ses bailleurs qu'ils procèdent à un tel remplacement, ni qu'ils le remboursent du coût du remplacement de cet auvent. Il évoque cette difficulté pour l'intégrer dans son calcul du préjudice qu'il aurait subi mais ne démontre pas le préjudice qu'il aurait subi en raison de l'absence de cet auvent. Sa demande d'indemnisation sur ce point sera donc rejetée.

Enfin, Monsieur [R] ne démontre pas que la volonté de son assureur de résilier son contrat serait en lien avec des manquements commis par les bailleurs. Il sera débouté de toute demande d'indemnisation sur ce point.

En conséquence, il convient de condamner Messieurs [C], [V] et [T] [P] [X] et Madame [G] [P] [X] à verser à Monsieur [R] la somme de 400 euros de dommages et intérêts, en réparation de son préjudice de jouissance lié aux odeurs et aux refoulements d'eaux usées. Le jugement déféré sera infirmé sur ce point.

Monsieur [R] sera débouté de sa demande tendant à voir condamner les indivisaires à lui verser la somme de 248 euros avec intérêts au taux légal à compter de l'acte introductif d'instance, au titre des équipements qu'il indique avoir financés aux lieu et place du bailleur. En effet, Monsieur [R] ne démontre pas que les équipements qu'il dit avoir financés auraient été défaillants et il n'a pas mis en demeure de façon formelle le bailleur de procéder à de tel remplacement. Le jugement déféré sera confirmé sur ce point.

Sur la condamnation de Monsieur [R] à un arriéré locatif

En vertu de l'article 562 du code de procédure civile, dans sa rédaction issue du décret n° 2017-891 du 6 mai 2017, l'appel défère à la cour la connaissance des chefs de jugement qu'il critique expressément et de ceux qui en dépendent, la dévolution ne s'opérant pour le tout que lorsque l'appel tend à l'annulation du jugement ou si l'objet du litige est indivisible.

En outre, seul l'acte d'appel opère la dévolution des chefs critiqués du jugement.

Monsieur [R] n'a pas saisi la cour de sa condamnation à verser aux consorts [P] [X] la somme de 479,54 euros. L'effet dévolutif n'a donc pas joué et le jugement est définitif sur ce point.

Sur la condamnation de Monsieur [R] à permettre l'accès au logement sous astreinte

Monsieur [R] avait relevé appel de ce chef de la décision déféré. Aux termes du dispositif de ses dernières conclusions, il ne discute plus ce point et les intimés sollicitent la confirmation du jugement. Dès lors, il convient de confirmer le jugement sur ce point.

Sur les dépens et l'article 700 du code de procédure civile

Monsieur [R] et les consorts [P] [X] sont en partie succombantes dans leurs demandes. Il convient en conséquence de faire masse des dépens de première instance et d'appel et de les partager par moitié entre les parties.

Pour des raisons tirées de l'équité, il n'y a pas lieu de faire application des dispositions tirées de l'article 700 du code de procédure civile.

Le jugement déféré qui a mis les dépens à la seule charge de Monsieur [R] et qui l'a condamné à verser aux consorts [P] [X] la somme de 2500 euros sera infirmé.

PAR CES MOTIFS,

La cour, statuant publiquement, par arrêt contradictoire, par mise à disposition au greffe

ORDONNE la révocation de l'ordonnance de clôture,

PRONONCE la clôture de l'affaire au 06 avril 2022,

DIT que les pièces 26 et 27 des consorts [P] [X] sont régulièrement produites au débats,

INFIRME le jugement déféré en ce qu'il a rejeté la demande de dommages et intérêts formée par Monsieur [Y] [R], en ce qu'il a condamné ce dernier aux entiers dépens et en ce qu'il l'a condamné à verser aux consorts [P] [X] la somme de 2500 euros sur le fondement de l'article 700 du code de procédure civile,

CONFIRME pour le surplus,

CONDAMNE Messieurs [C], [V] et [T] [P] [X] et Madame [G] [P] [X] à verser à Monsieur [Y] [R] la somme de 400 euros de dommages et intérêts, en réparation de son préjudice de jouissance lié aux odeurs et aux refoulements d'eaux usées,

REJETTE les demandes faites par les parties sur le fondement de l'article 700 du code de procédure civile au titre des frais irrépétibles de première instance et d'appel,

FAIT MASSE des dépens de première instance et d'appel et les partage par moitié entre les parties.

LA GREFFIÈRE, LA PRÉSIDENTE,


Synthèse
Tribunal : Cour d'appel d'Aix-en-Provence
Formation : Chambre 1-7
Numéro d'arrêt : 20/12392
Date de la décision : 09/06/2022

Origine de la décision
Date de l'import : 26/03/2024
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.appel;arret;2022-06-09;20.12392 ?
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