COUR D'APPEL D'AIX-EN-PROVENCE
Chambre 1-2
ARRÊT
DU 02 JUIN 2022
N° 2022/ 440
Rôle N° RG 21/08925 - N° Portalis DBVB-V-B7F-BHUNN
[R] [S]
C/
[Z] [G]
[L] [G]
S.A. SADA ASSURANCES
Caisse CCSS
Copie exécutoire délivrée
le :
à :
Me Audrey CAMPANI
Me Eric ADAD
Me Pascal DELCROIX
Décision déférée à la Cour :
Ordonnance de référé rendue par le Président du Tribunal Judiciaire de NICE en date du 28 Janvier 2021 enregistrée au répertoire général sous le n° 19/02153.
APPELANTE
Madame [R] [S]
née le [Date naissance 3] 1985 à [Localité 7], demeurant [Adresse 10]
représentée par Me Audrey CAMPANI, avocat au barreau de NICE
INTIMES
Madame [Z] [G]
née le [Date naissance 5] 1978 à [Localité 9], demeurant [Adresse 11]
représentée par Me Eric ADAD, du cabinet TALLIANCE AVOCATS, avocat au barreau de NICE
Monsieur [L] [G]
Représenté par Madame [Z] [G], en sa qualité de représentant légal.
né le [Date naissance 1] 2009 à [Localité 9], demeurant [Adresse 11]
représenté par Me Eric ADAD, du cabinet TALLIANCE AVOCATS, avocat au barreau de NICE
S.A. SADA ASSURANCES
Prise en la personne de son représentant légal en exercice
dont le siège social est situé [Adresse 6]
représentée par Me Pascal DELCROIX de l'AARPI LOMBARD-SEMELAIGNE-DUPUY-DELCROIX, avocat au barreau de MARSEILLE
CAISSES SOCIALES DE MONACO,
Prise en la personne de son représentant légal en exercice
dont le siège social est situé [Adresse 2]
défaillante
*-*-*-*-*
COMPOSITION DE LA COUR
En application des dispositions des articles 805 et 907 du code de procédure civile, l'affaire a été débattue le 25 avril 2022, en audience publique, les avocats ne s'y étant pas opposés, devant Mme Angélique NETO, Présidente, chargée du rapport.
Ce magistrat a rendu compte des plaidoiries dans le délibéré de la Cour, composée de :
Mme Angélique NETO, Présidente
Mme Sylvie PEREZ, Conseillère
Mme Catherine OUVREL, Conseillère
Greffier lors des débats : Mme Julie DESHAYE.
Les parties ont été avisées que le prononcé de la décision aurait lieu par mise à disposition au greffe le 02 juin 2022.
ARRÊT
Réputé contradictoire,
Prononcé par mise à disposition au greffe le 02 juin 2022
Signé par Mme Angélique NETO, Présidente et Mme Julie DESHAYE, greffier auquel la minute de la décision a été remise par le magistrat signataire.
***
EXPOSÉ DU LITIGE
Alors même Mme [Z] [G] était accompagnée le 19 septembre 2019 de son fils mineur, [L] [G], né le [Date naissance 4] 2009, et de ses deux chiens, elle a été mordue au niveau de la cheville droite par des chiens.
Par acte d'huissier du 10 décembre 2019, Mme [G], agissant en son nom personnel et en tant que représentante légale de [L] [G], a fait assigner Mme [S] et les caisses sociales de Monaco devant le juge des référés du tribunal de grande instance de Nice aux fins de voir ordonner la mise en 'uvre d'une expertise médicale, d'obtenir une provision de 2 000 euros chacun à valoir sur l'indemnisation de leur préjudice corporel et moral ainsi que la somme de 1500 euros sur le fondement de l'article 700 du code de procédure civile.
La société anonyme (SA) SADA Assurances est intervenue volontairement à cette procédure.
Par ordonnance réputée contradictoire en date du 28 janvier 2021, rectifiée par ordonnance en date du 1er juillet 2021, le juge des référés du tribunal judiciaire de Nice a :
- ordonné la jonction de deux procédures ;
- reçu la société SADA Assurances en son intervention volontaire ;
- ordonné une expertise médicale de Mme [G] en désignant pour y procéder le docteur [I] [M] ;
- ordonné une expertise médicale de l'enfant [L] [G] en désignant pour y procéder le docteur [N] [A] ;
- déclaré l'ordonnance commune aux caisses sociales de Monaco (et non à la CPAM des Alpes Maritimes) ;
- condamné in solidum Mme [S] et la société SADA Assurances à payer à Mme [G], agissant pour elle-même et en tant que représentante légale de [L] [G], une indemnité provisionnelle de 2 000 euros chacun à valoir sur la réparation de leur préjudice patrimonial et extra patrimonial ;
- condamné in solidum ces dernières au paiement de la somme de 1 200 euros au titre de l'article 700 du code de procédure civile
- condamné in solidum ces dernières aux dépens de l'instance.
Une requête en omission de statuer a été déposée le 2 juillet 2021 visant à mentionner dans la liste des défendeurs Mme [C] [S].
Selon déclaration reçue au greffe le 15 juin 2021, Madame [S] a interjeté appel de cette décision en toutes ses dispositions sauf en ce qu'elle a ordonné la jonction de deux procédures, reçu la société SADA Assurances en son intervention volontaire et déclaré l'ordonnance commune aux caisses sociales de Monaco (et non à la CPAM des Alpes Maritimes).
Par dernières conclusions transmises le 29 juillet 2021, auxquelles il est renvoyé pour plus ample exposé des prétentions et moyens, Mme [R] [S] sollicite de la cour qu'elle :
- constate l'absence de motif légitime de la présente procédure à visée probatoire ;
- constate l'absence de fondement de la demande de provision ;
- réforme l'ordonnance entreprise et statuant à nouveau ;
- déboute Madame [G] de l'ensemble de ses demandes formées à son encontre ;
- la condamne à lui verser la somme de 3 000 euro au titre de l'article 700 du code de procédure civile ainsi qu'aux entiers dépens d'instance, en ce compris les frais de constat en date du 30.12.2019, avec distraction au profit de Me Audrey Campani, avocat aux offres de droit.
Elle expose que ce sont les deux chiens appartenant à Mme [G] qui, en voyant ses chiens qui se trouvaient à l'intérieur de sa propriété avec le portail électrique fermé, se sont emportés au point de forcer le portail et de le détériorer, à la suite de quoi Mme [G] s'est précipitée pour tenter de fermer le portail. Elle souligne que la preuve n'est aucunement rapportée de blessures qui auraient été causées par ses chiens. Par ailleurs, elle se prévaut d'un transfert de garde sur son chien comme n'étant pas présente sur les lieux au moment des faits et qu'il en est de même du chien de sa soeur qui était également absente ce jour-là. Elle indique que, faute d'éléments permettant de déterminer le gardien des chiens responsables, ainsi que l'origine des blessures alléguées par Mme [G], la demande d'expertise ne repose sur aucun motif légitime. Enfin, elle relève que les dispositions de l'article 145 du code de procédure civile ne permettent aucunement d'allouer des provisions.
Par dernières conclusions transmises le 29 juillet 2021, auxquelles il est renvoyé pour plus ample exposé des prétentions et moyens, Mme [G], agissant en son nom personnel et ès qualités, sollicite de la cour qu'elle :
- confirme en toutes ses dispositions l'ordonnance entreprise ;
- juge que les chiens de Mme [R] [S] et de Mme [C] [S] l'ont agressée ainsi que son fils et ses chiens ;
- ordonne la mise en oeuvre d'une expertise expertise sur sa personne et sur celle de son fils ;
- déboute MmeValérie [S], Mme [C] [S] et la société SADA Assurances de l'ensemble de leurs demandes ;
- condamne solidairement Mme [R] [S], Mme [C] [S] et la société SADA Assurances à leur verser la somme de 2 000 euros chacun à titre de provision sur l'indemnisation du préjudice corporel et moral.
- les condamne à lui verser la somme de 3 000 euros au titre des dispositions de l'article 700 du code de procédure civile, outre les entiers dépens.
Elle expose qu'alors qu'elle était en train de se promener avec son fils et ses deux chiens tenus en laisse, les deux chiens de Mme [R] [S], qui se trouvaient derrière le portail de la propriété de cette dernière, ont réussi à passer leurs gueules en dehors du portail et à attraper l'un de ses deux chiens. Elle déclare, qu'en se précipitant pour aller fermer le portail qui était entrouvert, elle s'est fait mordre à la cheville et au doigt. Elle indique que le frère de Mme [S], alerté par les cris et aboiements, a immédiatement fait rentrer les chiens dans la propriété de sa soeur. Elle indique que Mme [R] [S] l'a accompagnée chez elle et qu'elle s'est rendue aux urgences le jour même. Elle précise que son fils, qui a assisté à la scène, a eu un suivi psychologique. Elle relève que sa chienne a souffert de morsures et de plaies profondes. Elle expose que les chiens de Mmes [S] ont été examinés par un vétérinaire à trois reprises, et pour la première fois le lendemain des faits, à la suite de quoi Mme [R] [S] lui a remis des documents de mise sous surveillanc vétérinaire d'un animal ayant mordu ou griffé, de sorte qu'il ne fait aucun doute que les chiens de Mmes [S] sont bien impliqués dans les faits survenus le 19 septembre 2019. Elle relève également que les chiens de Mmes [S] ont attaqué trois poneys appartenant à M. [F], à la suite de quoi ce dernier portera plainte le 26 novembre 2019. Elle considère qu'il n'appartient pas au juge des référés de se prononcer sur le transfert de garde allégué par Mme [S].
Par dernières conclusions transmises le 30 juillet 2021, auxquelles il est renvoyé pour plus ample exposé des prétentions et moyens, la société SADA Assurances sollicite de la cour qu'elle :
- réforme en toutes ses dispositions l'ordonnance entreprise ;
- statuant à nouveau ;
- déboute Madame [G], agissant en son nom personnel et ès qualités, de l'ensemble de ses demandes ;
- la condamne à lui payer à Sada Assurances la somme de 3 000 euros au titre de l'article 700 du code de procédure civile ;
la condamne aux entiers dépens.
Elle expose s'associer aux observations formées par Mme [S]. Elle indique que Mme [G] livre une version qui n'a rien à voir avec celle des témoins, qu'elle ne démontre pas avoir été blessée par les chiens se trouvant sur la propriété de Mme [S], qu'elle ne précise pas lequel de ces chiens l'aurait attaqué, sachant que l'un des chiens appartient à la soeur de Mme [S], et que Mme [S] n'était pas présente lors des faits. Elle insiste sur l'absence de motif légitime à voir ordonner l'expertise et l'existence de contestations sérieuses portant sur les provisions sollicitées.
Régulièrement intimée par la signification de la déclaration d'appel le 2 juillet 2021 et des conclusions de l'appelante les 22 juillet et 29 août 2021, les caisses sociales de Monaco n'ont pas constitué avocat.
L'instruction de l'affaire a été close par ordonnance en date du 6 avril 2022.
MOTIFS DE LA DECISION
A titre liminaire, il importe de rappeler que les décisions de donner acte et de constat sont dépourvues de caractère juridictionnel et ne sont pas susceptibles de conférer un droit à la partie qui l'a requis et obtenu, raison pour laquelle la cour n'a pas à répondre aux demandes formées à ce titre par les parties.
En outre, le dispositif de l'arrêt doit être limité aux strictes prétentions formées par les parties, étant rappelé qu'il n'a pas vocation à contenir les moyens développés par les parties, peu important que ceux-ci figurent dans le dispositif de leurs conclusions.
Sur les demandes formées à l'encontre de Mme [C] [S]
Mme [C] [S], qui n'a pas interjeté appel à l'encontre de l'ordonnance entreprise, n'a pas été régulièrement intimée à la procédure ni par l'appelante, Mme [R] [S], ni par les intimés, et en particulier Mme [G], agissant en son nom personnel et ès qualités, par suite d'un appel incident.
Dans ces conditions, aucune demande ne peut être formée à l'encontre de Mme [C] [S] à hauteur d'appel.
Sur la demande d'expertise judiciaire
Aux termes de l'article 145 du code de procédure civile, s'il existe un motif légitime de conserver ou d'établir avant tout procès la preuve des faits dont pourrait dépendre la solution du litige, les mesures d'instruction légalement admissibles peuvent être ordonnées à la demande de tout intéressé, sur requête ou en référé.
Pour que le motif de l'action soit légitime, il faut et il suffit que la mesure soit pertinente et qu'elle ait pour but d'établir une preuve dont la production est susceptible d'influer sur la solution d'un litige futur ayant un objet et un fondement précis et non manifestement voué à l'échec.
Dès lors, le demandeur à la mesure doit justifier d'une action en justice future, sans avoir à établir l'existence d'une urgence. Il suffit qu'il justifie de la potentialité d'une action pouvant être conduite sur la base d'un fondement juridique suffisamment déterminé et dont la solution peut dépendre de la mesure d'instruction sollicitée, à condition que cette mesure soit possible. Il ne lui est pas demandé de faire connaître ses intentions procédurales futures. Il lui faut uniquement établir la pertinence de sa demande en démontrant que les faits invoqués doivent pouvoir l'être dans un litige éventuel susceptible de l'opposer au défendeur, étant rappelé qu'au stade d'un référé probatoire, il n'a pas à les établir de manière certaine.
Il existe un motif légitime dès lors qu'il n'est pas démontré que la mesure sollicitée serait manifestement insusceptible d'être utile lors d'un litige ou que l'action au fond n'apparaît manifestement pas vouée à l'échec.
En l'espèce, il n'est pas contesté que Mme [G] a été mordue au niveau de sa cheville droite par un chien le 19 septembre 2019 alors qu'elle passait, accompagnée de son fils et de ses deux chiens, devant le portail électrique de la propriété de Mme [R] [S] dans laquelle se trouvaient deux autres chiens, l'un appartenant à cette dernière et l'autre à sa soeur, Mme [C] [S], ainsi que leur frère, M. [S].
C'est ainsi que le certificat médical initial établi le 19 septembre 2019 constate une double plaie de la cheville droite avec impotence à la suite d'une morsure de chien ainsi qu'une morsure au niveau du 3ème doigt de la main gauche.
Le certificat médical dressé par le service des urgence de [Localité 8] le même jour indique que Mme [G] présente un oedème au niveau de la cheville droite, une impotence fonctionnelle totale de la cheville droite, une plaie d'un centimètre au niveau de la malléole interne et de la malléole externe ainsi qu'une plaie superficielle au niveau du majeur gauche côté face palmaire et de l'annulaire gauche tout en fixant l'incapacité temporaire totale à 15 jours sauf complications.
S'il n'est pas contesté que ces blessures sont compatibles avec des morsures de chiens, les parties discutent l'imputabilité de ces dernières.
En effet, alors même Mme [G] affirme avoir été mordue par les chiens se trouvant sur la propriété de Mme [S], cette dernière soutient qu'elle a été mordue par l'un de ses chiens.
Or, dès lors que Mme [G] entend agir à l'encontre de Mme [S] sur le fondement des dispositions de l'article 1243 du code civil, qui énonce que le propriétaire d'un animal, ou celui qui s'en sert, pendant qu'il est à son usage, est responsable du dommage que l'animal a causé, soit que l'animal fût sous sa garde, soit qu'il fût égaré ou échappé, cette éventuelle action au fond ne sera pas vouée manifestement à l'échec s'il est établi que les blessures de Mme [G] peuvent, avec l'évidence requise en référé, avoir été causées par les chiens se trouvant dans la propriété de Mme [S].
Il n'est pas contesté que, lorsque les faits sont survenus le 19 septembre 2019, les chiens appartenant à Mme [G] se trouvaient à l'extérieur de la propriété de Mme [S] tandis que les deux autres chiens se trouvaient à l'intérieur derrière un portail électrique.
Mme [G] affirme toutefois que les chiens se trouvant derrière le portail électrique ont réussi à passer leurs gueules en dehors de celui-ci, qui était entrouvert, à attaquer sa chienne Belle et à la mordre au niveau de la cheville et du doigt alors qu'elle tentait de fermer le portail.
Elle verse aux débats un certificat médical dressé le 20 septembre 2019, soit le lendemain des faits, par un vétérinaire attestant que sa chienne Belle présente des morsures profondes sur la face côté droit et une plaie d'environ 3 centimètres de large, profonde d'un centimère, dans la babine face intérieure suite à des morsures.
Il est donc manifeste que la chienne de Mme [G] a également été blessée le jour des faits par des morsures de chien.
De plus, afin d'établir qu'elle-même et sa chiennes ont été mordues par les chiens se trouvant à l'interieur de la propriété de Mme [S], Mme [G] relève que cette dernière a mis sous surveillance vétérinaire ses chiens.
C'est ainsi qu'après trois examens pratiqués les 20 septembre, 26 septembre et 3 octobre 2019, le vétérinaire confirmera que les chiens présentent les apparences de la bonne santé et ne présentent aucun symptôme de rage.
Si le fait pour Mme [S] d'avoir procédé au suivi sanitaire de ces chiens ne vaut pas reconnaissance par cette dernière de dommages causés par ces derniers, il n'en demeure pas moins que ce suivi permet de ne pas exclure, avec l'évidence requise en référé, le fait que Mme [G] et sa chienne ont parfaitement pu être mordues par les chiens se trouvant à l'intérieur de la propriété de Mme [S].
Il reste que Mme [S] insiste sur le comportement agressif des chiens de Mme [G] en affirmant que ces derniers ont abîmé son portail électrique en voulant s'attaquer à ses chiens.
Afin d'étayer ses allégations, Mme [R] [S] verse aux débats une attestation dressée par Mme [J], M. [O] et M. [B], sans toutefois que la photocopie de la pièce d'identité de ce dernier ne soit annexée à l'atttestation, lesquels cetifient avoir été témoins des faits survenus le 19 septembre 2019 au domicile de Mme [S] vers 18h30. Ils indiquent, qu'alors qu'ils s'étaient organisés pour aller cueillir des champignons en voiture et qu'ils passaient devant le domicile de Mme [S], ils ont vu une femme, son fils, qui était sur son vélo, et leurs deux chiens au niveau du portail. Ils déclarent avoir vu ces deux chiens se jeter violemment sur le portail, lequel, sous l'impulsion et l'agressivité de ces chiens, s'est entrebaillé. Ils exposent avoir vu la femme se précipiter sur le portail tentant de le refermer, faisant observer que le portail était au niveau de sa hauteur décallé. Ils exposent s'être de nouveau rendus au niveau de la propriété de Mme [S] le 24 septembre 2019, avoir parlé de l'évènement du 19 septembre 2019 et avoir décidé d'apporter leur témoignage.
S'il résulte de cette attestation que les chiens de Mme [G], en passant devant le portail, se seraient montrés agressifs, il convient de relever que les témoins, qui ne font aucunement état de la présence des chiens de Mme [S] se trouvant à l'intérieur de la propriété, n'apportent aucun éclairage sur la manière dont ces chiens auraient agi en voyant les chiens de Mme [G] se jeter violemment sur le portail, pas plus qu'ils ne se prononcent sur les morsures infligées à Mme [G] et à sa chienne Belle.
Par ailleurs, afin d'établir que son portail a été dégradé le jour des faits par les chiens de Mme [G], Mme [S] produit un devis en date du 27 septembre 2019 portant sur des travaux à réaliser au niveau du portail (réglage de butée, fourniture et remplacement de deux demi-lunes céramiques, fourniture et remplacement d'un ensemble moteur) ainsi qu'un procès-verbal de constat dressé le 30 décembre 2019 montrant les lieux, et en particulier le portail se trouvant à l'entrée de la propriété en retrait par rapport à la route goudronnée.
Or, ces éléments n'établissent aucunement que le portail fonctionnait normalement le jour des faits, pas plus qu'il a été degradé par les chiens de Mme [G] et/ou par cette dernière.
Il en de même des deux récépissés de dépôt de plainte en date du 21 septembre 2019 pour des faits de dégradation ou de détérioration d'un bien appartenant à autrui et de violation de domicile, qui émanent de par Mme [R] [S] elle-même, étant relevé que les plaintes ne sont pas produites.
Le fait pour Mme [K] [V] et Mme [P] [D] d'attester que le portail électrique était toujours fermé et n'avoir constaté aucun dysfonctionnement lors de l'ouverture et de la fermeture de ce dernier, à chacune de leurs visites en août et septembre 2019, et en particulier le 9 septembre 2019, ne permet aucunement d'établir que, tel était nécessairement le cas, au moment des faits.
En revanche, ces éléments révèlent, à l'évidence, que le portail électrique de Mme [S] n'était pas totalement fermé au moment où Mme [G] a tenté de le refermer, ce qui tend à corroborer les déclarations de cette dernière selon lesquelles les chiens se trouvant à l'intérieur de la propriété ont réussi à passer leurs gueules en dehors du portail et à la mordre ainsi que sa chienne Belle.
Il s'ensuit, qu'en l'état de blessures causées à Mme [G] et sa chienne Belle compatibles avec des morsures de chien et au fait que les pièces versées aux débats ne permettent pas d'exclure, à l'évidence, l'imputabilité de ces morsures aux chiens se trouvant à l'intérieur de la propriété de Mme [S], l'action en responsabilité qu'entend exercer Mme [G] à l'encontre de Mme [S], propriétaire d'au moins l'un des deux chiens se trouvant sur sa propriété, sur le fondement del'article 1243 du code civil n'est pas manifestement vouée à l'échec.
Le fait pour Mme [S] de se prévaloir de moyens de nature à s'exonérer de sa responsabilité tirés notamment de la propriété des chiens, de leur garde et de la faute de la victime, lesquels relèvent de l'appréciation de la juridiction du fond, n'enlève rien à la pertinence de la demande d'expertise médicale sollicitée par Mme [G] sur le fondement de l'article 145 du code de procédure civile.
En effet, dès lors que les élémens médicaux versés aux débats caractérisent un préjudice corporel consécutif aux faits du 19 septembre 2019, et à tout le moins des souffrances endurées, seule une expertise médicale pourra permettre, dans le cas où le juge du fond retiendrait la responsabilité de Mme [S], une indemnisation poste par poste selon la nature des préjudices subis et la date de consolidation après un examen par l'expert de la victime et des pièces médicales qui lui seront soumises.
Il en de même de l'enfant, [L] [G], dont il n'est pas contesté qu'il a assisté à toute la scène et pour lequel il est attesté de deux séances de psychologie suivant une facture en date du 26 octobre 2019.
Les expertises médicales étant nécessaires à la solution du litige portant sur l'éventuelle indemnisation du préjudice corporel de Mme [G] et de son fils, Mme [G], agissant en son nom personnel et ès qualités, justifie d'un motif légitime à les voir ordonner.
Il y a donc lieu de confirmer l'ordonnance entreprise sur ce point.
Sur la demande de provisions
Par application de l'article 835 alinéa 2 du code de procédure civile, dans les cas où l'existence de l'obligation n'est pas sérieusement contestable, le président du tribunal judiciaire ou le juge du contentieux de la protection dans les limites de sa compétence peuvent toujours accorder une provision au créancier, ou ordonner l'exécution de l'obligation même s'il s'agit d'une obligation de faire.
Il appartient au demandeur d'établir l'existence de l'obligation qui fonde sa demande de provision tant en son principe qu'en son montant et la condamnation provisionnelle, que peut prononcer le juge des référés sans excéder ses pouvoirs, n'a d'autre limite que le montant non sérieusement contestable de la créance alléguée.
Une contestation sérieuse survient lorsque l'un des moyens de défense opposé aux prétentions du demandeur n'apparaît pas immédiatement vain et laisse subsister un doute sur le sens de la décision au fond qui pourrait éventuellement intervenir par la suite sur ce point si les parties entendaient saisir les juges du fond.
Enfin, c'est au moment où la cour statue qu'elle doit apprécier l'existence d'une contestation sérieuse, le litige n'étant pas figé par les positions initiale ou antérieures des parties dans l'articulation de ce moyen.
En l'espèce, Mme [G], agissant en son nom personnel et ès qualités, fonde sa demande de provision sur les dispositions de l'article 1243 du code civil, étant rappelé que la présomption de responsabilité instaurée par ce texte découle de la garde de l'animal.
Elle ne cède que devant la preuve d'un cas de force majeure, du fait d'un tiers ou de la faute de la victime si elle a contribué, en même temps que le fait de l'animal, au préjudice.
Mme [S] et la société SADA Assurances se prévalent se plusieurs contestations sérieuses tenant notamment à la propriété des chiens se trouvant chez Mme [S] au moment des faits, à leur garde et à la faute de la victime.
S'il résulte de ce qui précède qu'il n'est pas possible d'exclure le fait que les morsures infligées à Mme [G] ont été causées par les chiens se trouvant sur la propriété de Mme [S], il reste que Mme [G], qui n'allègue ni ne démontre n'avoir été modue que par l'un des deux chiens, se prévaut d'un dommage survenu à l'occasion de l'action commune de ces deux chiens.
Or, alors même qu'il est admis que la responsabilité survenue à l'occasion de l'action commune de deux ou plusieurs animaux incombe au propriétaire de chacun d'eux et qu'il n'est pas contesté que Mme [R] [S] n'est propriétaire que de l'un des deux chiens, l'autre appartenant à sa soeur, il résulte de ce qui précède que Mme [C] [S] n'a pas été régulièrement intimée à la procédure ni par l'appelante, Mme [R] [S], ni par les intimés, et en particulier Mme [G], agissant en son nom personnel et ès qualités, par suite d'un appel incident.
Dans ces conditions, le fait de déclarer Mme [S] seule responsable des dommages subis par Mme [G] et son fils se heurte à une contestation sérieuse.
En outre, la responsabilité de l'un des propriétaires voire des deux propriétaires pourrait ne pas être retenue par la juridiction du fond si la preuve est rapportée que l'un des deux chiens n'a pas participé à la réalisation du dommage ou que ces derniers se trouvaient sous la garde d'une autre personne.
Or, outre le fait que le chien de Mme [C] [S] se trouvait au domicile de Mme [R] [S], Mme [G] reconnaît, qu'au moment des faits, seul le frère de Mmes [S] était présent, de sorte que la question du transfert de la garde de l'animal de nature à décharger leurs propriétaires de la présomption de responsabilité se pose.
Dès lors qu'il n'appartient pas au juge de l'évidence de se prononcer sur la garde des chiens, la responsabilité de Mme [S] se heurte là encore à une contestation sérieuse.
Enfin, en insistant sur le comportement agressif des chiens de Mme [G] comme étant à l'origine de ses dommages, Mme [S] se prévaut d'une faute de la victime pour s'exonérer de sa responsabilité.
Etant donné que la présomption de responsabilité qui repose sur le gardien d'un animal peut céder devant la preuve d'une faute de la victime et qu'il appartiendra à la juridiction du fond de se prononcer sur les circonstances dans lesquelles les faits sont survenus, la responsabilité de Mme [S] se heurte, là encore, à une contestation sérieuse.
L'ensemble de ces éléments constituent autant de contestations sérieuses s'opposant à la demande de provisions sollicitée par Mme [G], tant en son nom personnel qu'ès qualités.
Dans ces conditions, l'ordonnance entreprise sera infirmée sur ce point.
Sur l'article 700 du code de procédure civile et les dépens
Dès lors qu'il a été fait droit à la demande d'expertises médicales sollicitée par Mme [G] mais pas à sa demande de provisions, Mme [S] et son assureur ne peuvent être considérées comme parties perdantes aux mesures d'expertise, de sorte que l'ordonnance entreprise sera infirmée en ce qu'elle les a condamnés aux dépens et à verser à Mme [G] la somme de 1 200 euros au titre de l'article 700 du code de procédure civile pour les frais exposés en première instance non compris dans les dépens.
Mme [G], agissant en son nom personnel et ès qualités, sera tenue aux entiers dépens de première instance et d'appel, avec distraction au profit de Me Audrey Campani, sur son affirmation de droit.
Il sera rappelé que les dépens ne peuvent inclure le coût d'un constat d'huissier de justice qui ne constituait pas un acte de la procédure mais un élément de preuve auquel la partie a choisi de recourir, de sorte que Mme [S] sera déboutée de sa demande de voir inclure dans les dépens les frais de constat en date du 30 décembre 2019.
En revanche, l'équité ne comande pas de faire application, en faveur de Mme [S] et de la société SADA Assurances, des dispositions de l'article 700 du code de procédure civile pour les frais exposés en première instance et en appel non compris dans les dépens.
Mme [G] sera, quant à elle, déboutée de sa demande formée sur le même fondement en tant que partie tenue aux dépens.
PAR CES MOTIFS
La cour,
Statuant dans les limites de l'appel,
Confirme l'ordonnance entreprise en ce qu'elle a :
- ordonné une expertise médicale de Mme [Z] [G] en désignant pour y procéder le docteur [I] [M] ;
- ordonné une expertise médicale de l'enfant [L] [G] en désignant pour y procéder le docteur [N] [A] ;
L'infirme pour le surplus ;
Statuant à nouveau et y ajoutant ;
Déboute Mme [Z] [G], agissant en son personnel et en tant que représentante légale de [L] [G], de ses demandes formées à l'encontre de Mme [C] [S] qui n'est pas intimée à la procédure ;
Déboute Mme [Z] [G], agissant en son nom personnel, de sa demande de provision à valoir sur la réparation de son préjudice corporel ;
Déboute Mme [Z] [G], agissant en qualité de représentante légale de [L] [G], de sa demande de provision valoir sur la réparation du préjudice corporel de son fils ;
Dit n'y avoir lieu à application des dispositions de l'article 700 du code de procédure civile en faveur de Mme [R] [S] et de la SA SADA Assurances pour les frais exposés en première instance et en appel non compris dans les dépens ;
Déboute Mme [Z] [G], agissant en son personnel et en tant que représentante légale de son fils, de sa demande formée sur le même fondement ;
Condamne Mme [Z] [G], agissant en son personnel et en tant que représentante légale de [L] [G], aux entiers dépens de la procédure de première instance et d'appel, avec distraction au profit de Me Audrey Campani sur son affirmation de droit ;
Déboute Mme [R] [S] de sa demande de voir inclure dans les dépens le coût du constat d'huissier en date du 30 décembre 2019.
La Greffière La Présidente