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27/05/2022 | FRANCE | N°21/14730

France | France, Cour d'appel d'Aix-en-Provence, Chambre 4-3, 27 mai 2022, 21/14730


COUR D'APPEL D'AIX-EN-PROVENCE

Chambre 4-3



ARRÊT AU FOND

-Assignation à jour fixe-



DU 27 MAI 2022



N° 2022/ 123





RG 21/14730

N° Portalis DBVB-V-B7F-BIHZ2







[K] [L]





C/



[E] [T]



Association CGEA AGS DE [Localité 4]



















Copie exécutoire délivrée le 27 mai 2022 à :



- Me François GOMBERT, avocat au barreau de MARSEILLE


>- Me François ARNOULD, avocat au barreau de MARSEILLE



- Me François ARNOULD, avocat au barreau de MARSEILLE



























Décision déférée à la Cour :



Jugement du Conseil de Prud'hommes - Formation paritaire de MARSEILLE en date du 01 Juillet 2021 enregistr...

COUR D'APPEL D'AIX-EN-PROVENCE

Chambre 4-3

ARRÊT AU FOND

-Assignation à jour fixe-

DU 27 MAI 2022

N° 2022/ 123

RG 21/14730

N° Portalis DBVB-V-B7F-BIHZ2

[K] [L]

C/

[E] [T]

Association CGEA AGS DE [Localité 4]

Copie exécutoire délivrée le 27 mai 2022 à :

- Me François GOMBERT, avocat au barreau de MARSEILLE

- Me François ARNOULD, avocat au barreau de MARSEILLE

- Me François ARNOULD, avocat au barreau de MARSEILLE

Décision déférée à la Cour :

Jugement du Conseil de Prud'hommes - Formation paritaire de MARSEILLE en date du 01 Juillet 2021 enregistré au répertoire général

APPELANT

Monsieur [K] [L], demeurant [Adresse 3]

représenté par Me François GOMBERT, avocat au barreau de MARSEILLE substitué par Me Manon CHILD, avocat au barreau de MARSEILLE

INTIMEE

Madame [E] [T], « Mandataire liquidateur » de la SASU « POLE ENERGY », demeurant [Adresse 2]

représentée par Me François ARNOULD, avocat au barreau de MARSEILLE substitué par Me Stéphanie BESSET-LE CESNE, avocat au barreau de MARSEILLE

PARTIE INTERVENANTE

Association CGEA AGS DE [Localité 4], demeurant [Adresse 1]

représentée par Me François ARNOULD, avocat au barreau de MARSEILLE substitué par Me Stéphanie BESSET-LE CESNE, avocat au barreau de MARSEILLE

*-*-*-*-*

COMPOSITION DE LA COUR

En application des dispositions des articles 804 et 805 du code de procédure civile, l'affaire a été débattue le 22 Mars 2022, en audience publique, les avocats ne s'y étant pas opposés, devant Madame Pascale MARTIN, Président de Chambre, chargée du rapport, qui a fait un rapport oral à l'audience, avant les plaidoiries.

Ce magistrat a rendu compte des plaidoiries dans le délibéré de la cour, composée de :

Madame Pascale MARTIN, Président de Chambre

Madame Ghislaine POIRINE, Conseiller faisant fonction de Président

Madame Estelle DE REVEL, Conseiller

Greffier lors des débats : Madame Florence ALLEMANN-FAGNI.

Les parties ont été avisées que le prononcé de la décision aurait lieu par mise à disposition au greffe le 27 Mai 2022.

ARRÊT

CONTRADICTOIRE

Prononcé par mise à disposition au greffe le 27 Mai 2022

Signé par Madame Pascale MARTIN, Président de Chambre et Madame Florence ALLEMANN-FAGNI, Greffier, auquel la minute de la décision a été remise par le magistrat signataire.

***

FAITS- PROCEDURE-PRETENTIONS DES PARTIES

Le 1er février 2018, M. [K] [L] a été embauché par la société Pôle Energy par contrat à durée indéterminée.

Par jugement du tribunal de commerce de Montpellier du 23 juillet 2018, la société a été liquidée et Me [E] [T] a été désignée en qualité de mandataire liquidateur.

Le 3 août 2018, M. [L] a été licencié pour motif économique.

Le 2 octobre 2018, Me [T] précisait à M. [L] que compte tenu de l'existence d'une totale confusion entre les sociétés Pôle energy et Francenergy, l'AGS avait été amenée à exercer son droit de contestation sur les demandes d'avances qu'elle avait réalisées.

Invoquant notamment l'absence de paiement de ses salaires à compter du mois de mai 2018, le salarié a saisi le conseil de prud'hommes de Marseille par acte du 30 juin 2020.

Sur demande du liquidateur, par décision avant dire droit du 1er juillet 2021, la juridiction prud'homale a ordonné le sursis à statuer dans l'attente de la décision de la juridiction pénale, dit qu'il appartiendra à la partie la plus diligente de communiquer au conseil de prud'hommes la copie de la décision pénale et a réservé les dépens.

Sur ordonnance de référé du 18 octobre 2021, M. [L] a été autorisé à interjeter appel, l'affaire étant fixée selon la procédure accélérée au fond à l'audience du 22 mars 2022.

Aux termes de ses dernières écritures, transmises par voie électronique le 4 mars 2022, M. [L] demande à la cour de :

Infirmer la décision rendue le 1er juillet 2021, par le conseil de prud'hommes de Marseille, en ce qu'elle a ordonné le sursis à statuer,

Evoquer l'affaire au fond et statuer au fond

Fixer au passif de la société Pôle Energy les sommes suivantes :

salaire de mai : 2 500,00€

salaire de juin : 2 500,00€

salaire de juillet : 2 500,00€

salaire de août : 2 500,00€

une somme égale à trois mois de salaire au titre de l'indemnité compensatrice de préavis, soit 7 500,00€, outre 750,00€ de congés payés y afférent ou subsidiairement un mois de salaire soit la somme de 2 500,00€, outre 250,00€ de congés payés y afférent

une somme de 1 458,00€ au titre de l'indemnité de licenciement

Constater la résistance manifestement abusive du CGEA AGS et de Maître [T] dans le cadre de cette procédure

Fixer au passif de la société Pôle Energy une somme de 10 000,00€ de dommages et intérêts au regard de l'exécution fautive dont a été victime M. [L] qui n'a pas été réglé de ses salaires depuis plusieurs années maintenant

Fixer au passif de la société Pôle Energy une somme de 3 000,00€ au titre de l'article 700 du code de procédure civile

- Dire ces sommes opposables au CGEA AGS

- Statuer ce que de droit en ce qui concerne les dépens

Aux termes de ses dernières conclusions transmises par voie électronique le 24 janvier 2022, Me [T] ès qualités demande à la cour de :

DEBOUTER Monsieur [L] de ses demandes formulées à l'encontre de la société POLE ENERGY.

A titre subsidiaire,

DECLARER prescrite et irrecevable la créance sollicitée au titre de l'indemnité de préavis

DECLARER prescrite et irrecevable la demande au titre de l'indemnité de licenciement.

DECLARER irrecevable la demande nouvelle de Monsieur [L] de dommages et intérêts pour exécution fautive du contrat de travail.

En tout état,

DEBOUTER Monsieur [L] de toutes ses demandes, fins et conclusions.

En tout état rejeter les demandes infondées et injustifiées et ramener à de plus juste proportions les indemnités susceptibles d'être allouées au salarié.

Débouter Monsieur [K] [L] de toute demande de condamnation sous astreinte ou au paiement d'une indemnité au titre de l'article 700 du code de procédure civile, aux dépens, et en tout état déclarer le montant des sommes allouées inopposables à l'AGS CGEA.

En tout état constater et fixer en deniers ou quittances les créances de Monsieur [K] [L] selon les dispositions de articles L 3253 -6 à L 3253-21 et D3253 -1 à D 3253-6 du Code du Travail.

Dire et juger que l'AGS ne devra procéder à l'avance des créances visées à l'article L3253-8 et suivants du Code du Travail que dans les termes et conditions résultant des dispositions des articles L 3253-19 et L 3253-17 du Code du Travail, limitées au plafond de garantie applicable, en vertu des articles L 3253-17 et D 3253-5 du Code du Travail, plafonds qui inclus les cotisations et contributions sociales et salariales d'origine légale, ou d'origine conventionnelle imposée par la loi, ainsi que la retenue à la source prévue à l'article 204 A du code général des impôts.

Dire et juger que les créances fixées, seront payables sur présentation d'un relevé de créance par le mandataire judiciaire en vertu de l'article L 3253-20 du Code du Travail.

Dire et juger que le jugement d'ouverture de la procédure collective a entraîné l'arrêt des intérêts légaux et conventionnels en vertu de l'article L.622-28 du Code de Commerce.

Dans ses dernières écritures notifiées par voie électronique le 24 janvier 2022, l'Unedic délégation AGS CGEA de [Localité 4] conclut aux mêmes fins.

Pour l'exposé plus détaillé des prétentions et moyens des parties, il sera renvoyé, conformément à l'article 455 du code de procédure civile, aux conclusions des parties.

MOTIFS DE L'ARRÊT

Sur la détermination de l'employeur

Me [T] ès qualités expose que :

- elle a découvert de nombreux éléments faisant penser que la société Pôle Energy constituait en réalité un rouage d'un montage juridique et financier illicite entre plusieurs sociétés,

- c'est dans ce contexte qu'une plainte a été déposée le 1er août 2018 devant le Procureur de Montpellier concernant l'existence fictive de la société Pôle Energy,

- c'est donc dans l'intérêt d'une bonne administration de la justice, qu'il était demandé de surseoir à statuer dans l'attende de la décision pénale.

Elle précise que :

- aucune comptabilité n'avait été tenue,

- la société ne disposait d'aucun moyen matériel, ni établissement,

- les locaux ainsi que le matériel étaient mis à disposition par la société Francenergy,

- la société Pôle Energy oeuvrait pour le compte de la société Francenergy qui exerçait un pouvoir hiérarchique sur le personnel,

- M. [L] ne produit aucun élément concernant l'existence d'un lien de subordination avec la société Pôle Energy.

M. [L] fait valoir qu'il n'est plus utile de savoir qui est son véritable employeur dans la mesure où les sociétés Pôle Energy et Francenergy sont toutes deux placées en procédure de liquidation judiciaire de sorte que les deux sociétés devront être couvertes par les AGS-CGEA.

Depuis l'ordonnance de référé du 18 octobre 2021, il n'est produit aucun élément de nature à établir l'existence d'une enquête pénale en cours sur les liens entre les deux sociétés visées dans le signalement fait par le mandataire liquidateur au procureur de Montpellier.

En conséquence, en l'état d'un contrat de travail et de bulletins de salaire délivrés outre un mail du 19 juin 2018 de M. [L] réclamant le paiement de son salaire, il existe au profit de ce dernier une présomption de salariat que les intimés ne parviennent pas à inverser, ne produisant pas d'autre document que la plainte d'août 2018.

Dès lors, il convient d'infirmer le jugement entrepris et d'examiner au fond les demandes du salarié.

Sur les demandes financières liées à la rupture du contrat de travail

A) Sur les rappels de salaire

Les sommes indiquées sur l'attestation employeur délivrée le 22 août 2018 par Me [T] ne sont pas conformes au contrat de travail et aux bulletins de salaire lesquels prévoient un revenu minimum garanti de 2 500 euros bruts, non cumulable avec des commissions.

A défaut de démonstration par l'employeur d'un règlement des salaires à compter du mois de mai jusqu'au licenciement, il convient de faire droit à la demande pour les mois de mai, juin, juillet soit la somme de 7 500 euros outre les trois jours d'août pour 250 euros, soit un total de 7 750 euros avec l'incidence congés payés à hauteur de 775 euros.

B) Sur les indemnités de rupture

Les intimés font valoir que tant la demande au titre de l'indemnité compensatrice de préavis que celle relative à l'indemnité de licenciement sont prescrites.

L'article L. 1233-67 du code du travail, issu de l'article 41 de la loi n 2011-893 du 28 juillet 2011 pour le développement de l'alternance et la sécurisation des parcours professionnels, dispose:'L'adhésion du salarié au contrat de sécurisation professionnelle emporte rupture du contrat de travail. Toute contestation portant sur la rupture du contrat de travail ou son motif se prescrit par douze mois à compter de l'adhésion au contrat de sécurisation professionnelle. Ce délai n'est opposable au salarié que s'il en a été fait mention dans la proposition de contrat de sécurisation professionnelle.'

En l'espèce, l'appelant ne disconvient pas qu'il a signé le CSP le 22 août 2018, et n'invoque pas l'absence de mention du délai sur l'exemplaire remis, de sorte que son action pour réclamer les indemnités de rupture, engagée le 30 juin 2020 est tardive, étant précisé qu'en tout état de cause, il n'avait pas assez d'ancienneté pour prétendre à une indemnité de licenciement.

Sur la demande au titre de l'exécution fautive du contrat de travail

Les intimés, au visa de l'article 564 du code de procédure civile, concluent à l'irrecevabilité de cette demande nouvelle en cause d'appel et subsidiairement la considèrent partiellement prescrite.

L'appelant n'a pas répondu sur ces points.

La cour, ayant pris connaissance de la requête et des conclusions présentées devant le conseil de prud'hommes, relève qu'aucune demande à titre de dommages et intérêts n'a été formulée en première instance à ce titre, mais que celle-ci est recevable en vertu de l'article 566 du code de procédure civile.

La cour constate que M. [L] invoque les articles L.1222-1 & suivants du code du travail, mais il ne reproche pas à son employeur le non-paiement de salaires à compter de mai 2018, s'étant poursuivi jusqu'à la mise en liquidation judiciaire de la société en juillet 2018, de sorte que l'action engagée le 30 juin 2020, n'était pas prescrite.

En réalité il considère que tant le mandataire liquidateur que le CGEA-AGS ont fait preuve de résistance abusive, avec un retard de prise en charge et une perte de pouvoir d'achat.

Or, les organes de la procédure collective n'ont fait qu'user de leur droit de contestation propre, sans que leur résistance soit de nature abusive, compte tenu des circonstances plus que douteuses de l'embauche de très nombreux salariés quelques mois avant la cessation des paiements et l'appelant n'apporte à l'appui de sa demande à titre de dommages et intérêts, aucun document quant à son préjudice et en tout état de cause ne caractérise aucune faute en lien avec celui-ci.

Dès lors, la demande doit être rejetée.

Sur la garantie de l'Unedic délégation AGS CGEA

Compte tenu de la nature des sommes allouées, l'Unedic délégation AGS CGEA doit sa garantie dans les termes des articles L.3253-8 et suivants du code du travail.

Sur les frais et dépens

L'équité commande de faire application de l'article 700 du code de procédure civile, étant précisé que la somme allouée n'est pas opposable à l'Unedic délégation AGS CGEA .

La société en liquidation doit être condamnée aux dépens de première instance et d'appel.

PAR CES MOTIFS

La Cour,

Statuant par arrêt contradictoire, par mise à disposition au greffe, les parties en ayant été préalablement avisées dans les conditions prévues à l'article 450 du code de procédure civile, en matière prud'homale,

Infirme la décision entreprise,

Statuant à nouveau et Y ajoutant,

Déclare irecevables les demandes relatives à l'indemnité compensatrice de préavis et l'indemnité de licenciement,

Fixe la créance de M. [L] au passif de la liquidation judiciaire de la société Pole Energy représentée par Me [E] [T], mandataire liquidateur, aux sommes suivantes:

- 7 750 euros au titre des salaires de mai au 3 août 2018,

- 775 euros au titre des congés payés afférents,

Déclare l'UNEDIC délégation AGS CGEA de [Localité 4] tenue à garantie pour ces sommes dans les termes des articles L.3253-8 et suivants du code du travail, en l'absence de fonds disponibles,

Condamne la société Pole Energy représentée par Me [E] [T], mandataire liquidateur, à payer à M. [L] la somme de 1 000 euros sur le fondement de l'article 700 du code de procédure civile,

Déboute M. [L] du surplus de ses demandes,

Condamne la société Pole Energy représentée par Me [E] [T], mandataire liquidateur, aux dépens de première instance et d'appel.

LE GREFFIERLE PRESIDENT


Synthèse
Tribunal : Cour d'appel d'Aix-en-Provence
Formation : Chambre 4-3
Numéro d'arrêt : 21/14730
Date de la décision : 27/05/2022

Origine de la décision
Date de l'import : 26/03/2024
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.appel;arret;2022-05-27;21.14730 ?
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