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27/05/2022 | FRANCE | N°18/15369

France | France, Cour d'appel d'Aix-en-Provence, Chambre 4-3, 27 mai 2022, 18/15369


COUR D'APPEL D'AIX-EN-PROVENCE

Chambre 4-3



ARRÊT AU FOND



DU 27 MAI 2022



N° 2022/ 119



RG 18/15369

N° Portalis DBVB-V-B7C-BDDLZ







Organisme CAISSE PRIMAIRE D'ASSURANCE MALADIE DES BOUCHES DU RHONE





C/



[Z] [X] épouse [O]



















Copie exécutoire délivrée le 27 mai 2022 à :



- Me Emmanuel LAMBREY, avocat au barreau d'AIX-EN-PROVENCE







-Me

Christian MAILLARD, avocat au barreau de MARSEILLE

































Décision déférée à la Cour :



Jugement du Conseil de Prud'hommes - Formation paritaire de MARSEILLE en date du 05 Septembre 2018 enregistré au répertoire général sous le n° F 16/...

COUR D'APPEL D'AIX-EN-PROVENCE

Chambre 4-3

ARRÊT AU FOND

DU 27 MAI 2022

N° 2022/ 119

RG 18/15369

N° Portalis DBVB-V-B7C-BDDLZ

Organisme CAISSE PRIMAIRE D'ASSURANCE MALADIE DES BOUCHES DU RHONE

C/

[Z] [X] épouse [O]

Copie exécutoire délivrée le 27 mai 2022 à :

- Me Emmanuel LAMBREY, avocat au barreau d'AIX-EN-PROVENCE

-Me Christian MAILLARD, avocat au barreau de MARSEILLE

Décision déférée à la Cour :

Jugement du Conseil de Prud'hommes - Formation paritaire de MARSEILLE en date du 05 Septembre 2018 enregistré au répertoire général sous le n° F 16/02844.

APPELANTE

Organisme CAISSE PRIMAIRE D'ASSURANCE MALADIE DES BOUCHES DU RHONE, demeurant [Adresse 1]

comparante en la personne de Mme [S] [H], responsable du service des relations sociales et assistée de Me Emmanuel LAMBREY, avocat au barreau d'AIX-EN-PROVENCE substitué par Me Hortense GEBEL, avocat au barreau de PARIS

INTIMEE

Madame [Z] [X] épouse [O], demeurant [Adresse 2]

comparante en personne et représentée par Me Christian MAILLARD, avocat au barreau de MARSEILLE

*-*-*-*-*

COMPOSITION DE LA COUR

En application des dispositions des articles 804 et 805 du code de procédure civile, l'affaire a été débattue le 22 Mars 2022, en audience publique, les avocats ne s'y étant pas opposés, devant Madame Pascale MARTIN, Président de Chambre, chargée du rapport, qui a fait un rapport oral à l'audience, avant les plaidoiries.

Ce magistrat a rendu compte des plaidoiries dans le délibéré de la cour, composée de :

Madame Pascale MARTIN, Président de Chambre

Madame Ghislaine POIRINE, Conseiller faisant fonction de Président

Madame Estelle DE REVEL, Conseiller

Greffier lors des débats : Madame Florence ALLEMANN-FAGNI.

Les parties ont été avisées que le prononcé de la décision aurait lieu par mise à disposition au greffe le 27 Mai 2022.

ARRÊT

CONTRADICTOIRE

Prononcé par mise à disposition au greffe le 27 Mai 2022

Signé par Madame Pascale MARTIN, Président de Chambre et Madame Florence ALLEMANN-FAGNI, Greffier, auquel la minute de la décision a été remise par le magistrat signataire.

***

FAITS- PROCEDURE-PRETENTIONS DES PARTIES

Le 1er novembre 2011, par contrat à durée indéterminée, Mme [Z] [X] a été embauchée par la Caisse Primaire Centrale d'Assurance Maladie (CPCAM) des Bouches du Rhône en qualité de téléconseillère.

La convention collective applicable était celle des employés et cadres du régime général de la sécurité sociale.

Le 19 mai 2016, Mme [X] a été licenciée pour inaptitude et impossibilité de reclassement.

Le 22 décembre 2016, Mme [X] a saisi le conseil de prud'hommes de Marseille aux fins de voir requalifier son contrat de travail à temps partiel en contrat à temps complet, et pour contester son licenciement.

Le 5 septembre 2018, le conseil de prud'hommes a rendu son jugement en ces termes :

Requalifie le contrat de travail à temps plein de Madame [Z] [X] sur la période de mai 2014 à mai 2016 ;

Fixe le salaire mensuel moyen de Mme [X] à la somme brute de 2 851,54€

Par suite,

Condamne la CPCAM des Bouches du Rhône à verser à Mme [X] les sommes suivantes :

- 6 671,36 € brut à titre de rappel de salaire sur la base d'un temps plein sur la période du 1er mai 2014 au 19 mai 2016

- 2 761,81 € brut à titre de rappel sur l'indemnité compensatrice de congés payés

Dit et juge le licenciement pour inaptitude et impossibilité de reclassement notifié le 19 mai 2016 à Mme [X] doit s'analyser en un licenciement sans cause réelle et sérieuse

En conséquence,

Condamne la CPCAM des Bouches du Rhône à verser à Mme [X] la somme de 17 109,20 € à titre de dommages et intérêts pour licenciement sans cause réelle et sérieuse

Condamne la CPCAM des Bouches du Rhône à verser à Mme [X] la somme de 1 000€ au titre de l'article 700 du Code de procédure civile

Ordonne l'exécution provisoire du présent jugement dans son intégralité (article 515 du CPC)

Ordonne à la CPCAM des Bouches du Rhône de remettre à Mme [X] une attestation pôle emploi conforme à la présente décision

Dit n'y avoir lieu à assortir cette remise de document d'une astreinte

Dit qu'à défaut de règlement spontané de condamnations prononcées par la présente décision et qu'en cas d'exécution par voie extrajudiciaire, les sommes retenues par huissier instrumentaire en application des dispositions de l'article 10 du décret du 8 mars 2001, portant modification du décret du 12 décembre 1996, devront être supportées par la CPCAM des Bouches du Rhône, en sus de l'indemnité mise à leur charge sur le fondement des dispositions de l'article 700 du CPC

Rejette la demande indemnitaire à titre de dommages et intérêts pour résistance abusive

Déboute Mme [X] du surplus de ses demandes

Déboute la CPCAM des Bouches du Rhône de sa demande reconventionnelle fondée sur l'article 700 du CPC

Condamne la CPCAM des Bouches du Rhône aux entiers dépens.

Le 27 septembre 2018, le conseil de l'employeur a interjeté appel du jugement.

Aux termes de ses dernières écritures, transmises par voie électronique le 3 mars 2022, la CPCAM des Bouches du Rhône demande à la cour de :

«DECLARER IRRECEVABLES :

- La demande formulée tendant à la condamnation de la CPCAM au versement de 10.000 € nets au titre de la violation du secret professionnel, d'une liberté individuelle et utilisation de données personnelles ;

- La demande formulée tendant à la condamnation de la CPCAM au versement de 8.285,43 € au titre de l'indemnité compensatrice de préavis (majoration due au handicap) et 828,54 € au titre de congés payés afférents ;

Quoi qu'il en soit :

D'INFIRMER le jugement du Conseil de prud'hommes de Marseille en date du 5 septembre 2018 en ce qu'il a dit le licenciement de Madame [X] comme étant dénué de cause réelle et sérieuse ;

Et statuant à nouveau :

DEBOUTER Madame [X] de l'ensemble de ses demandes ;

CONDAMNER Madame [X] au paiement de la somme de 4.000 € au titre de l'article 700 du Code de procédure civile ainsi qu'aux entiers dépens.»

Aux termes de ses dernières conclusions transmises par voie électronique le 3 mars 2022, Mme [X] épouse [O] demande à la cour de :

«Constater que la CPCAM n'a pas exécuté le jugement en ce que l'attestation POLE EMPLOI

n' a pas été remise.

Réformer le jugement entrepris en ce qu'il a validé le licenciement

Considérer que les propositions de reclassement sont contraires à l'avis médical d'inaptitude

au poste comportant des restrictions de reclassement

Que le licenciement est, de ce seul fait, sans cause réelle et sérieuse,

Considérer que Mme [X] est reconnue travailleur handicapé et atteinte de 2 maladies chroniques

Dire et juger que la CPCAM a pris en considération la situation personnelle avant le licenciement (acte médicaux) rendant le licenciement nul par la violation de la liberté fondamentale

Qu'elle a ensuite tenté de se justifier par des faits postérieurs au licenciement (déménagement) rendant ainsi le licenciement sans cause réelle et sérieuse.

Dire et juger que la CPCAM ne prouve pas l'impossibilité de reclassement

Qu'elle s'est refusée à proposer un poste de télétravail selon la préconisation du médecin du travail

Accueillir la demande d'indemnisation complémentaire au tire de la violation de libertés fondamentales

Dire et juger que la CPCAM employeur a utilisé des données personnelles à des fins non autorisées

Qu'elle a violé le secret professionnel auquel elle est tenue en qualité de gestionnaire des prestations sociales

Qu'elle a violé le principe de la liberté de choix du domicile

Juger qu'il s'agit aussi d'une discrimination

Que par ce procédé elle a utilisé des prétextes pour ne pas appliquer les préconisations du médecin du travail

Dire et juger que la CPCAM a pris en considération ce qui précède pour justifier le refus de reclassement

Dire et juger que la CPCAM n'a pas recherché des possibilités de reclassement dans « l'institution » dans son ensemble

Que le licenciement prononcé est nul pour violation des libertés fondamentales, pour discrimination, ou est sans cause réelle et sérieuse

Dire et juger que la CPCAM est redevable du reliquat d'indemnité de préavis en égard à la situation de travailleur handicapé de Mme [X].

En conséquence, condamner la CPCAM des Bouches du Rhône au paiement des sommes suivantes :

- 10.000 € nets au titre de violation du secret professionnel, d'une liberté fondamentale, et utilisation de données personnelles.

- 40.000 € nets au titre de licenciement sans cause réelle et sérieuse.

- 8.285,43 € au titre d'indemnité compensatrice de préavis (majoration due au handicap) et à 828,54 € au titre de congés payés y afférent.

- 4.000 € nets au titre de l'article 700 du CPC.

La condamner à la délivrance de l'attestation Pôle Emploi sous astreinte de 150 € par jour de

retard, la Cour se réservant le droit de liquider ladite astreinte

La condamner aux dépens

Prononcer la capitalisation des intérêts

Dire que dans l'hypothèse où, à défaut de règlement spontané des condamnations prononcées

dans le jugement à intervenir, l'exécution forcée devra être réalisée par l'intermédiaire d'un huissier, le montant des sommes retenues par l'huissier devra être supporté par le débiteur en sus de l'application de l'article 700 du CPC.

Pour l'exposé plus détaillé des prétentions et moyens des parties, il sera renvoyé, conformément à l'article 455 du code de procédure civile, aux conclusions des parties.

MOTIFS DE L'ARRÊT

A titre liminaire, la cour rappelle qu'en application des dispositions de l'article 954 du code de procédure civile , elle ne statue que sur les prétentions énoncées au dispositif et que les «dire et juger» et les «constater» ainsi que les «donner acte» ne sont pas des prétentions en ce que ces demandes ne confèrent pas de droit à la partie qui les requiert hormis les cas prévus par la loi; en conséquence, la cour ne statuera pas sur celles-ci, qui ne sont en réalité que le rappel des moyens invoqués.

Il résulte des conclusions sus-visées et notamment celles de l'appelante, que celle-ci ne remet pas en cause les dispositions du jugement relatives à la requalification du contrat de travail à temps plein et ses conséquences, et est donc sur ce point réputée s'en approprier les motifs.

Sur l'impossibilité de reclassement

L'employeur indique qu'il a tout mis en oeuvre pour parvenir au reclassement de Mme [X], en tenant compte des préconisations de la médecine du travail lui ayant permis de proposer trois postes de reclassement très proches de son domicile, qu'elle a tous refusés.

Il soutient que, s'agissant du télétravail, cette modalité d'organisation du travail ne pouvait être mise en 'uvre à l'époque des faits (la possibilité de recourir au télétravail a été ouverte au sein des organismes de sécurité sociale par le protocole d'accord national sur le travail à distance, signé le 4 mars 2014 à l'UCANSS et agréé le 3 juillet 2014).

Il explique que la mise en place du télétravail faisait alors l'objet d'une expérimentation et d'un cadrage national et qu'une présence minimum de 2 jours sur site était obligatoire.

Il indique néanmoins avoir examiné conformément à l'article 3.22 du protocole d'accord les conditions de faisabilité mais avoir constaté que cete organisation n'était pas ouverte sur la plate-forme de services au sein de laquelle la salariée travaillait alors et que Mme [X] ne remplissait pas le critère d'autonomie suffisante, pour pouvoir être en télétravail total.

La CPCAM critique le jugement rendu par le conseil de prud'hommes en ce qu'il a indiqué que le télétravail était un poste. Or, ce n'est pas un poste mais une forme d'organisation du travail de sorte qu'il est impératif et nécessaire que le poste en question puisse être organisé en télétravail.

Mme [X] fait valoir que les propositions de reclassement étaient non conformes à l'avis médical puisqu'elles nécessitaient un déplacement sur le lieu de travail, et reproche à la CPCAM de n'avoir pas recherché le reclassement sous forme de télétravail, rappelant d'une part que le «cadrage» n'est qu'une préconisation et d'autre part que cet accord prévoit expressément la possibilité de déroger au temps minimum de travail devant être effectué dans l'organisme.

Aux termes de l'article L.1226-2 du code du travail dans sa rédaction applicable à l'espèce, lorsque, à l'issue des périodes de suspension du contrat de travail consécutives à une maladie ou un accident non professionnel, le salarié est déclaré inapte par le médecin du travail à reprendre l'emploi qu'il occupait précédemment, l'employeur lui propose un autre emploi approprié à ses capacités. Cette proposition prend en compte les conclusions écrites du médecin du travail et les indications qu'il formule sur l'aptitude du salarié à exercer l'une des tâches existantes dans l'entreprise. L'emploi proposé est aussi comparable que possible à l'emploi précédemment occupé, au besoin par la mise en oeuvre de mesures telles que mutations, transformations de postes de travail ou aménagement du temps de travail.

Le second avis du médecin du travail est ainsi établi: « Procédure R. 4624-31 du code du travail. 2ème visite médicale. Etude de poste faite. Inapte au poste. Serait apte à un poste à temps partiel, sans contrainte de temps, sans contact avec le public, sans déplacement professionnel trajet aller-retour travail. Serait apte à un poste de télétravail à domicile ».

La prise en compte des mesures individuelles proposées par le médecin du travail s'impose à l'employeur en application de son obligation de sécurité de résultat en matière de protection de la santé et de la sécurité des salariés de l'entreprise.

Or, en l'espèce, si l'employeur a proposé des postes, il est constant que le reclassement envisagé comportait une présence sur site et il ne résulte pas des pièces déposées aux débats que l'employeur a exposé par écrit tant au salarié qu'au médecin du travail, les motifs qui s'opposaient à la mise en place des préconisations visées ci-dessus relatives au télétravail.

Au demeurant, il ne peut sérieusement arguer d'une impossibilité en se réfugiant derrière le fait que cette organisation au sein de la Caisse faisait l'objet d'une expérimentation, alors que d'une part, cette modalité existait depuis au moins l'année 2015 et d'autre part ne justifie aucunement comme il le prétend, avoir examiné le reclassement au regard de l'article 3.22 du protocole d'accord sur le travail à distance du 4 mars 2014, conçu en ces termes : «quand le télétravail est de nature à favoriser l'emploi de salariés en situation de handicap, ou quand il est préconisé par le la médecin du travail afin de permettre de maintenir un salarié en activité, l'employeur, en lien avec le CHSCT, examine les conditions dans lesquelles les règles applicables peuvent être aménagées. Cet examen peut, notamment le conduire à déroger au temps minimum devant être effectué dans l'organisme.»

En n'ayant opéré aucun dialogue avec la médecine du travail ni avec le CHSCT, afin de favoriser un aménagement de l'emploi de la salariée dans le cadre d'un travail à domicile, seul préconisé aux termes de l'avis relaté ci-dessus, pour tenir compte de la situation spécifique de Mme [X], et n'apportant en outre aucun élément probant quant à une impossibilité matérielle et à une absence d'autonomie de la salariée, la CPCAM des Bouches du Rhône ne justifie pas d'une recherche sérieuse de reclassement et de l'impossibilité de celui-ci.

Sur la nullité du licenciement

Cette prétention qui est nouvelle, figure au dispositif des écritures de Mme [X], et si elle n'est pas développée dans son argumentaire, apparaît être en lien avec des demandes également nouvelles relatives à la violation d'une liberté fondamentale et à la discrimination.

a) sur la recevabilité des demandes nouvelles

L'appelante oppose une fin de non recevoir à la demande visant à obtenir une indemnité au titre de violation du secret professionnel, d'une liberté individuelle et utilisation de données personnelles, formulée à hauteur de cour.

L'intimée fait valoir que les faits lui ont été révélés en cours de procédure, que ses demandes se rattachent par un lien suffisant à ses prétentions initiales et qu'enfin, la demande en nullité du licenciement tend aux mêmes fins que la demande première en licenciement sans cause réelle et sérieuse.

Dans la mesure où les faits invoqués ont été révélés dans le cadre des débats judiciaires devant le conseil de prud'hommes et servent de fondement à l'action en nullité du licenciement, laquelle comme la demande initiale, tend à obtenir l'indemnisation des conséquences d'un licenciement considéré comme injustifié, les demandes sont recevables en application des articles 565 & suivants du code de procédure civile.

b) sur la violation de principes fondamentaux

La salariée soutient qu'à plusieurs reprises dans ses conclusions l'employeur précise «Mme [X] se garde bien au demeurant de préciser au Conseil que dans le même temps, elle était en train de déménager pour les Caraïbes avec son mari» ou «la mise en place d'un télétravail total était donc exclue pour la CPCAM et l'était d'autant plus au cas d'espèce que Mme [X] allait être domiciliée de l'autre côté du globe», alors qu'elle n'a jamais fait état de ce changement auprès de son employeur et qu'elle a déménagé 5 mois après le licenciement.

Elle soutient que son employeur a recherché dans les fichiers des prestations des éléments extérieurs au travail et ainsi violé de façon manifeste le secret professionnel ainsi que le respect de sa vie privée, prenant en considération sa situation personnelle avant le licenciement .

La CPCAM indique n'avoir jamais conditionné sa démarche de recherches de postes de reclassement au déménagement potentiel de Mme [X] sur l'île de St Barthelemy ; elle précise que cette information a été portée à sa connaissance par un autre salarié et formulée seulement au stade des débats judiciaires.

La salariée ne démontre par aucun document que la décision de licenciement a été prise en considération d'un départ outre-mer et basée sur des informations recueillies de façon illicite, étant précisé que la lettre de licenciement laquelle relate les propositions de reclassement proches du domicile de la salariée à [Localité 3], est exempte de toute allusion à ce départ.

L'employeur démontre par sa pièce n°6 que la salariée a posté sur son compte face-book partagé avec d'anciens collègues, des photos les 30 octobre 2016 et 26 janvier 2017 la représentant en maillot de bain avec des commentaires «les îles te vont à ravir», de sorte qu'il justifie du fait que les informations sur le déménagement de la salariée - confirmées quant à la date par cette dernière - ont été portées à sa connaissance après la décision de licenciement et n'ont pas guidé celle-ci; le fait qu'il les utilise dans le cadre du débat judiciaire ne constitue pas la violation de droits fondamentaux, ce fait étant en tout état de cause inopérant.

Dès lors, la salariée doit être déboutée de sa demande en nullité du licenciement et indemnitaire, basée sur ce fondement.

c) sur la discrimination

L'intimée se borne à rappeler dans ses écritures les dispositions de l'article L.1132-1 du code du travail et à dire qu'en prenant en considération son domicile et sa vie privée, la CPCAM a fait preuve de discrimination.

La salariée ne présente pas d'éléments de fait précis et concordants laissant supposer l'existence d'une discrimination directe ou indirecte, de sorte que sa demande en nullité du licenciement sur ce fondement doit par conséquent être rejetée également.

Sur les conséquences financières du licenciement

La cour confirme la décision en ce qu'elle a dit le licenciement sans cause réelle et sérieuse et doit dès lors ordonner d'office le paiement de la sanction prévue à l'article L.1235-4 du code du travail.

Concernant le préjudice subi, la salariée n'apporte devant la cour, aucun élément nouveau permettant de réformer la décision, laquelle en lui allouant la somme nette de 17 109,20 euros, a fait une juste appréciation de celui-ci.

La demande nouvelle en cause d'appel relative à l'indemnité compensatrice de préavis est recevable comme étant le complément des demandes formées en première instance.

Le fait générateur du licenciement sans cause réelle et sérieuse étant le manquement de l'employeur à son obligation de reclassement, la salariée est en droit de percevoir une indemnité de préavis laquelle doit être majorée en application de l'article L.5213-9 du code du travail, Mme [X] ayant été reconnue travailleur handicapé selon décision du 24 juillet 2013.

En conséquence, il convient de faire droit à la demande y compris concernant les congés payés afférents, laquelle est inférieure au montant tel que calculé sur la base du salaire retenu par les premiers juges.

Les intérêts sur ces sommes sont dûs à compter du 26 février 2019, date des premières conclusions où la demande a été formulée et la capitalisation en sera ordonnée.

Sur les autres demandes

L'absence de remise de l'attestation Pôle Emploi telle qu'invoquée mais non démontrée relève de l'exécution de la décision de première instance, et il est inutile d'en prévoir la délivrance à nouveau comme d'instaurer une astreinte.

La CPCAM qui succombe au principal doit s'acquitter des dépens d'appel, être déboutée de sa demande faite sur le fondement de l'article 700 du code de procédure civile et à ce titre payer en cause d'appel à Mme [X] la somme de 1 500 euros.

PAR CES MOTIFS

La Cour,

Statuant par arrêt contradictoire, par mise à disposition au greffe, les parties en ayant été préalablement avisées dans les conditions prévues à l'article 450 du code de procédure civile, en matière prud'homale,

Statuant dans les limites de l'appel principal et incident,

Confirme le jugement en toutes ses dispositions,

Y ajoutant,

Déclare recevables les demandes nouvelles de Mme [X],

Condamne la Caisse Primaire Centrale d'Assurance Maladie des Bouches du Rhône à payer à Mme [Z] [X] épouse [O], les sommes suivantes :

- 8 285,43 € au titre de l'indemnité compensatrice de préavis,

- 828,54 € au titre des congés payés y afférents

avec intérêts au taux légal à compter du 26/02/2019,

- 1 500 euros sur le fondement de l'article 700 du code de procédure civile,

Ordonne s'il y a lieu la capitalisation des intérêts à condition qu'ils soient dus au moins pour une année entière,

Déboute Mme [X] du surplus de ses demandes,

Ordonne le remboursement par la Caisse Primaire Centrale d'Assurance Maladie (CPCAM) des Bouches du Rhône à Pôle Emploi des indemnités de chômage versées à la salariée, dans la limite de 4 mois,

Dit qu'à cette fin, une copie certifiée conforme de la présente décision sera adressée à Pôle Emploi, par le greffe,

Condamne la Caisse Primaire Centrale d'Assurance Maladie (CPCAM) des Bouches du Rhône aux dépens d'appel.

LE GREFFIERLE PRESIDENT


Synthèse
Tribunal : Cour d'appel d'Aix-en-Provence
Formation : Chambre 4-3
Numéro d'arrêt : 18/15369
Date de la décision : 27/05/2022

Origine de la décision
Date de l'import : 26/03/2024
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.appel;arret;2022-05-27;18.15369 ?
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