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19/05/2022 | FRANCE | N°19/15395

France | France, Cour d'appel d'Aix-en-Provence, Chambre 1-7, 19 mai 2022, 19/15395


COUR D'APPEL D'AIX-EN-PROVENCE

Chambre 1-7



ARRÊT AU FOND

DU 19 MAI 2022



N° 2022/ 225













Rôle N° RG 19/15395 - N° Portalis DBVB-V-B7D-BE7BC







[J] [U]





C/



[I] [T]



























Copie exécutoire délivrée

le :

à :



Me Laurent LE GLAUNEC de la SCP MOEYAERT-LE GLAUNEC







Me Cindy

BRAYE

















Décision déférée à la Cour :



Jugement du Tribunal d'Instance de GRASSE en date du 30 Juillet 2019 enregistrée au répertoire général sous le n° 1118000724.







APPELANTE





Madame [J] [U]

née le 13 Décembre 1960 à BOURG (33000), demeurant 732 CHEMIN DES BASSES MOLIERES - 06530 FRANCE



...

COUR D'APPEL D'AIX-EN-PROVENCE

Chambre 1-7

ARRÊT AU FOND

DU 19 MAI 2022

N° 2022/ 225

Rôle N° RG 19/15395 - N° Portalis DBVB-V-B7D-BE7BC

[J] [U]

C/

[I] [T]

Copie exécutoire délivrée

le :

à :

Me Laurent LE GLAUNEC de la SCP MOEYAERT-LE GLAUNEC

Me Cindy BRAYE

Décision déférée à la Cour :

Jugement du Tribunal d'Instance de GRASSE en date du 30 Juillet 2019 enregistrée au répertoire général sous le n° 1118000724.

APPELANTE

Madame [J] [U]

née le 13 Décembre 1960 à BOURG (33000), demeurant 732 CHEMIN DES BASSES MOLIERES - 06530 FRANCE

représentée par Me Laurent LE GLAUNEC de la SCP MOEYAERT-LE GLAUNEC, avocat au barreau de DRAGUIGNAN

INTIME

Monsieur [I] [T]

né le 08 Janvier 1971 à CANNES (06400), demeurant 700 ROUTE DE BESSE - 83340 FLASSANS SUR ISSOLE

représenté par Me Cindy BRAYE, avocat au barreau de GRASSE

*-*-*-*-*

COMPOSITION DE LA COUR

En application des dispositions des articles 805 et 907 du code de procédure civile, l'affaire a été débattue le 09 Mars 2022, en audience publique, les avocats ne s'y étant pas opposés, devant Madame Carole DAUX-HARAND, Présidente de chambre, chargée du rapport.

Ce magistrat a rendu compte des plaidoiries dans le délibéré de la Cour, composée de :

Madame Carole DAUX-HARAND, Présidente de chambre,

Madame Carole MENDOZA, Conseillère

Madame Mireille CAURIER-LEHOT, Conseillère

Greffier lors des débats : Mme Natacha BARBE.

Les parties ont été avisées que le prononcé de la décision aurait lieu par mise à disposition au greffe le 19 Mai 2022.

ARRÊT

Contradictoire,

Prononcé par mise à disposition au greffe le 19 Mai 2022.

Signé par Madame Carole DAUX-HARAND, Présidente de chambre et Mme Natacha BARBE, greffier auquel la minute de la décision a été remise par le magistrat signataire.

***

EXPOSÉ DU LITIGE

Par acte sous seing privé en date du 30 mars 2016, [I] [T] a donné à bail à [J] [U] un appartement avec jardin situé 33 rue du Docteur Belletrud 06530 SPERACEDES moyennant un loyer mensuel de 500 €, en ce compris 10 euros au titre de provision pour la taxe d'enlèvement des ordures ménagères.

[J] [U] constatant des désordres nuisant à sa jouissance paisible des lieux et à un risque sécuritaire faisait dresser un procès-verbal de constat le 28 juin 2017 par Maître [D], huissier de justice et sollicitait à de nombreuses reprises son bailleur afin qu'il réalise des travaux de mise en conformité.

Insatisfaite des travaux de réfection réalisés par ce dernier eu égard à l'état d'insalubrité du logement, Maître [D] procédait le 31 mai 2018 à la dénonce de procès-verbal de constat avec sommation d'avoir à réaliser sans délai les travaux nécessaires à la cessation des désordres entraînant un préjudice pour [J] [U].

Le 23 août 2018, [I] [T] faisait délivrer à sa locataire un congé avec offre de vente pour une fin de bail fixée au 29 mars 2019.

Le conseil de [J] [U] adressait par lettre recommandée avec accusé de réception du 6 novembre 2018 une mise en demure à [I] [T] d'avoir à effectuer les travaux.

Suivant exploit d'huissier en date du 19 novembre 2018, [J] [U] assignait devant le tribunal d'instance de Grasse [I] [T] aux fins de :

* constater l'état d'insalubrité du logement donné à bail,

* constater que [I] [T] a été mis en demeure le 6 novembre 2018 d'avoir à réaliser les travaux de remise en état du logement sans y donner suite.

* dire et juger qu'elle a subi un trouble de jouissance paisible de son logement compte tenu des désordres et de l'insalubrité.

* l'autoriser à suspendre le paiement du prix des loyers dus mensuellement à compter de la mise en demeure du 6 novembre 2018 et ce jusqu'à la réalisation des travaux.

* faire injonction à [I] [T] d'avoir à communiquer les 6 dernières quittances de loyer sous astreinte de 100 € par jour de retard à compter du jour du prononcé de la décision à intervenir.

* condamner [I] [T] à lui payer la somme de 5.000 € au titre de son trouble de jouissance paisible du logement en ce compris les travaux de réparation de la salle de bain restés à sa charge.

* condamner [I] [T] à lui payer la somme de 3.000 € au titre de son préjudice moral.

*condamner [I] [T] à lui verser une somme de 1.500 € sur le fondement des dispositions de l'article 700 du code de procédure civile ainsi qu'au règlement des entiers frais et dépens de l'instance et ce, sous le bénéfice de l'exécution provisoire.

À l'audience du 21 mai 2019, [J] [U] maintenait ses demandes et à titre subsidiaire demandait au tribunal d'ordonner la compensation des sommes dues par [I] [T] au titre du trouble de jouissance et celles dues par elle pour les factures impayées.

[I] [T] concluait au débouté de l'ensemble des demandes de [J] [U] et demandait au tribunal de dire et juger qu'il avait valablement donné congé pour vendre à effet du 29 mars 2019, de lui donner acte de l'acquiescement de [J] [U] sur la résiliation du bail pour ce motif et de son départ acté par la remise des clés au bailleur le 3 avril 2019.

Il demandait également au tribunal de dire et juger qu'elle était occupant sans droit ni titre depuis le 30 octobre 2018, suite au commandement de payer visant la clause résolutoire demeuré infructueux selon exploit de huissier du 30 août 2018 et de condamner [J] [U] à lui verser la somme de 3.060,34 € dont 2.012,75 € au titre des impayés locatifs déduction faite du dépôt de garantie d'un montant de 500 € , 984,34 € au titre des factures d'eau et 63,25 € au titre de la régularisation des taxes d'enlèvement des ordures ménagères.

Enfin il sollicitait la condamnation de son ancienne locataire à lui payer la somme de 2.000 € au titre des dispositions de l'article 700 du code de procédure civile outre les entiers dépens de l'instance.

Par jugement contradictoire en date du 30 juillet 2019, le tribunal d'instance de Grasse a, sous le bénéfice de l'exécution provisoire,

* dit que [I] [T] a valablement donné congé pour vendre à effet du 29 mars 2019,

* donné acte de l'acquiescement de [J] [U] sur la résiliation du bail pour ce motif et de son départ acté par la remise des clés au bailleur le 3 avril 2019.

* constaté que le bail conclu entre les parties le 30 mars 2016 s'est trouvé résilié de l'effet de la remise des clés par la locataire le 3 avril 2019,

* dit que [J] [U] ne rapporte pas la preuve du caractère indécent du logement loué à compter du 6 novembre 2018,

* débouté [J] [U] de sa demande visant à l'autoriser à suspendre le paiement du prix des loyers dus mensuellement à compter de la mise en demeure du 6 novembre 2018 et ce jusqu'à la réalisation des travaux,

* débouté [J] [U] de ses demandes en réparation des préjudices matériels et moraux qu'elle estime avoir subis,

* condamné [J] [U] à payer à [I] [T] la somme de 3.060,34 € majorée des intérêts au taux légal à compter du 30 août 2018 à hauteur de 984,34 euros et à compter de la délivrance du présent jugement pour le surplus,

* rejeté toutes les autres demandes,

* condamné [J] [U] à payer à [I] [T] la somme de 500 € au titre des dispositions de l'article 700 du code de procédure civile outre les entiers dépens de l'instance en ce compris les coûts des commandements de payer des 12 avril 2018 et 30 août 2018.

Par déclaration en date du 4 octobre 2019, [J] [U] a interjeté appel de ladite décision en ce qu'elle a dit :

* dit que [J] [U] ne rapporte pas la preuve du caractère indécent du logement loué à compter du 6 novembre 2018,

* déboute [J] [U] de sa demande visant à l'autoriser à suspendre le paiement du prix des loyers dus mensuellement à compter de la mise en demeure du 6 novembre 2018 et ce jusqu'à la réalisation des travaux,

* déboute [J] [U] de ses demandes en réparation des préjudices matériels et moraux qu'elle estime avoir subis,

* condamne [J] [U] à payer à [I] [T] la somme de 3.060,34 € majorée des intérêts au taux légal à compter du 30 août 2018 à hauteur de 984,34 euros et à compter de la délivrance du présent jugement pour le surplus,

* rejette toutes les autres demandes,

* condamne [J] [U] à payer à [I] [T] la somme de 500 € au titre des dispositions de l'article 700 du code de procédure civile outre les entiers dépens de l'instance en ce compris les coûts des commandements de payer des 12 avril 2018 et 30 août 2018.

Dans ses dernières conclusions déposées et signifiées sur le RPVA le 26 novembre 2021, auxquelles il convient de se référer pour l'exposé de ses prétentions et de ses moyens, [J] [U] demande à la cour de :

* infirmer le jugement du tribunal d'instance de Grasse en date du 30 juillet 2019.

*constater qu'un arrêté de péril imminent était rendu le 28 mars 2019 par le maire de la commune de SPERACEDES.

* constater que [I] [T] était mis en demeure d'avoir à réaliser les travaux de remise en état du logement en date du 6 novembre 2018 sans y donner suite.

* débouter [I] [T] de l'ensemble de ses demandes.

- À titre principal.

* dire et juger qu'elle subissait un trouble de jouissance paisible de son logement compte tenu des désordres et de l'état de péril imminent de son logement.

* dire et juger qu'elle n'est redevable d'aucun impayé de charges, celles-ci étant inclues dans le montant du loyer.

* l'autoriser à suspendre le paiement du prix des loyers dus mensuellement à compter de la date de mise en demeure du 6 novembre 2018 de [I] [T] d'avoir à réaliser les travaux de mise en état du logement et ce jusqu'à sa sortie du logement à savoir le 27 février 2019.

* condamner [I] [T] à lui payer la somme de 3.000 € au titre de son trouble de jouissance paisible du logement en ce compris les travaux de réparation de la salle de bains restés à sa charge.

* condamner [I] [T] à lui payer la somme de 3.000 € au titre de son préjudice moral.

-À titre subsidiaire.

*ordonner judiciairement la compensation des sommes dues par [I] [T] au titre du trouble de jouissance et celles dues par elle pour les factures impayées.

- En tout état de cause.

* condamner [I] [T] à lui payer la somme de 3.000 € au titre des dispositions de l'article 700 du code de procédure civile ainsi qu'aux entiers dépens.

Au soutien de ses demandes, [J] [U] explique que son bailleur avait dissimulé la moisissure du logement sous une nouvelle couche de peinture laquelle moisissure n'est apparue que plusieurs mois après l'entrée dans les lieux.

Elle indique que la salle d'eau ne présentait pas de ventilation de sorte que la moisissure se formait au niveau du plafond et les portes de douche n'étaient plus fonctionnelles

Ne pouvant rester dans cette situation elle indiquait avoir fait appel à la société NTM RENOVATION laquelle lui avait facturé la somme de 1.320 €.

Elle conteste le fait que le jugement ait dit qu'elle avait refusé l'intervention de l'entreprise [O] qui devait procéder à la pose de la VMC dans la salle d'eau indiquant que si elle avait refusé c'est parce que cette entreprise avait une activité de fabrication d'autres meubles et industries connexes de l'ameublement et qu'elle était manifestement incapable de poser une VMC.

Elle reprochait également à [I] [T] d'avoir procédé à l'installation du système d'évacuation d'eau de la machine à laver à l'endroit de la baie vitrée du rez-de-chaussée de sorte qu'elle devait à chaque fois enjamber ce tuyau pour sortir.

Elle déclarait également avoir alarmé le bailleur que le sol menaçait de s'effondrer à tout moment ce qui avait amené le maire de la commune à établir un arrêté de péril imminent le 28 mars 2019. C'est dans ce cas d'extrême urgence qu'elle devait se reloger en date du 27 février 2019.

Si le jugement querellé retient que [I] [T] a mis fin aux désordres par l'intervention de prestataires postérieurement à la sortie du logement de [J] [U], il n'en demeure pas moins qu'un arrêté de péril imminent est intervenu alors même qu'elle occupait les lieux.

Elle souligne que le logement connaissait de nombreuses infiltrations, les murs étant particulièrement humides et que le tableau électrique n'était absolument pas conforme aux normes applicables.

C'est pourquoi le logement ne peut être caractérisé qu'insalubre mais également de non sécuritaire.

Elle soutient dès lors qu'en l'état de l'arrêté de péril imminent dudit logement, elle justifie d'un élément suffisamment grave pour ne plus s'acquitter du paiement du loyer au titre de l'exception de l'inexécution en cas de logement non décent.

Elle demande également que [I] [T] communique des quittances de loyer pour la période allant de janvier 2018 à octobre 2018 date à laquelle elle suspendait le paiement de ses loyers, ces quittances étant d'autant plus important pour la recherche d'un nouvel appartement.

Elle fait enfin valoir que ces nombreux désordres lui ont causé des problèmes de santé, se trouvant affaiblie moralement et physiquement, présentant des problèmes respiratoires à cause du taux d'humidité présent dans son logement, ajoutant que courant 2017 elle avait subi une asphyxie du fait de l'absence d'entretien de la cheminée située au sein du logement donné à bail.

Dans ses dernières conclusions déposées et signifiées sur le RPVA le 3 mars 2020 auxquelles il convient de se référer pour l'exposé de ses prétentions et de ses moyens, [I] [T] demande à la Cour de :

*confirmer le jugement dont appel en toutes ses dispositions et notamment

* condamner [J] [U] à payer à [I] [T] la somme de 3.060,34 € dont 2.012,75 euros au titre des loyers impayés et décduction faite du dépôt de garantie d'un montant de 500 euros , 984,34 euros au titre des factures d'eau et 63,25 euros au titre de la taxe denlèvement des ordures ménagères.

* dire et juger que [J] [U] ne rapporte pas la preuve du caractère indécent du logement loué

* débouter cette dernière de se demandes uindemnitaires infondées et injustifiées

- A titre incident,

* condamner [J] [U] à rembourser la somme de 143,49 euros au titre de sa consommatio d'eau entre mai 2018 et son départ en mars 2019.

* condamner [J] [U] à payer à [I] [T] la somme de 3.500 € au titre des dispositions de l'article 700 du code de procédure civile outre les entiers dépens de première instance et d'appel.

À l'appui de sa demande, [I] [U] explique qu'il a effectué la réparation d'une poutre de maintien du plancher en juillet 2017 et qu'il n'a pu procéder à la mise en place d'une nouvelle VMC dans la salle de bains , [J] [U] ayant refusé l'intervention de cette entreprise.

Il explique avoir été contraint en l'état d'impayés locatifs de faire délivrer un commandement de payer visant la clause résolutoire, cette dernière ne réglant plus non plus ses consommations d'eau et ce depuis son entrée dans les lieux n'hésitant pas au surplus à solliciter des quittances de loyer alors même qu'elle n'était pas à jour du paiement de ses dettes.

S'agissant de l'arrêté de péril imminent [I] [T] indique s'être immédiatement insurgé auprès du maire concernant les conclusions du garde champêtre alors même qu'il avait mandaté divers prestataires pour mettre fin aux désordres ,lesquels n'ont pu intervenir en raison du refus de sa locataire de leur faire exécuter les travaux.

Il ajoutait que l'arrêté de péril imminent a été levé alors même qu'aucune intervention n'a été effectuée sur le plancher qui semble t-il était le motif principal de cet arrêté.

Quant à la cheminée il rappelle qu'il appartient au locataire de la faire ramoner.

S'agissant de la demande d'indemnisation présentée par sa locataire au motif qu'un arrêté imminent de péril avait été pris, [I] [T] souligne que ce dernier repose sur des constatations d'un huissier de justice profane en bâtiment lesquelles sont antérieures à l'intervention réalisée sur les poutres à la demande du bailleur en juillet 2017 et sur l'avis d'un garde champêtre lequel a fait une série de constatations erronées.

******

L'ordonnance de clôture a été prononcée le 24 novembre 2021

L'affaire a été plaidée le 9 mars 2022 et mise en délibéré au 19 mai 2022

******

1°) Sur le caractère indécent du logement donné à bail

Attendu que l'article 6 de la loi du 6 juillet 1989 énonce que 'le bailleur est tenu de remettre au locataire un logement décent ne laissant pas apparaître de risques manifestes pouvant porter atteinte à la sécurité physique ou à la santé et doté des éléments le rendant conforme à l'usage d'habitation.'

Que les caractéristiques d'un logement décent sont définies par le décret n° 2002-120 du 30 janvier 2002 dont il ressort que celui-ci doit satisfaire aux conditions suivantes :

* assurer le clos et le couvert.

* être composé de matériaux de construction, de canalisations et de revêtements ne présentant pas de risques manifeste pour la santé et la sécurité physique des locataires.

* présenter des réseaux et branchements d'électricité et de gaz ainsi que des équipements de chauffage et de production d'eau chaude conforme aux normes de sécurité définie par les lois et règlements et être en bon état d'usage et de fonctionnement.

Que l'article 3 dudit décret prévoit que le logement comporte notamment les éléments d'équipement et de confort suivant :

* une installation permettant un chauffage normal muni des dispositifs d'alimentation en énergie et d'évacuation des produits de combustion et adaptée aux caractéristiques du logement, des dispositifs d'ouverture et de ventilation des logements permettant un renouvellement d'air adapté aux besoins d'une occupation normale du logement et au fonctionnement des équipements

Qu'aux termes dudit article visé ci dessus,

'Le bailleur est obligé :

a) De délivrer au locataire le logement en bon état d'usage et de réparation ainsi que les équipements mentionnés au contrat de location en bon état de fonctionnement ; toutefois, les parties peuvent convenir par une clause expresse des travaux que le locataire exécutera ou fera exécuter et des modalités de leur imputation sur le loyer ; cette clause prévoit la durée de cette imputation et, en cas de départ anticipé du locataire, les modalités de son dédommagement sur justification des dépenses effectuées ; une telle clause ne peut concerner que des logements répondant aux caractéristiques définies en application des premier et deuxième alinéas ;

b) D'assurer au locataire la jouissance paisible du logement et, sans préjudice des dispositions de l'article 1721 du code civil, de le garantir des vices ou défauts de nature à y faire obstacle hormis ceux qui, consignés dans l'état des lieux, auraient fait l'objet de la clause expresse mentionnée au a ci-dessus ;

c) D'entretenir les locaux en état de servir à l'usage prévu par le contrat et d'y faire toutes les réparations, autres que locatives, nécessaires au maintien en état et à l'entretien normal des locaux loués ;

d) De ne pas s'opposer aux aménagements réalisés par le locataire, dès lors que ceux-ci ne constituent pas une transformation de la chose louée.'

Attendu que [J] [U] soutient que l'appartement donné à bail par [I] [T] était insalubre, ce dernier ayant pris soin de masquer les désordres en procédant à un rafraîchissement des murs.

Qu'elle ajoute que ce dernier a été mis en demeure d'avoir à effectuer toutes réparations utiles au sein du logement donné à bail, en vain malgré les constatation réalisées par Maître [D] , huissier de justice le 28 juin 2017.

Attendu qu'il résulte des pièces produites aux débats que [I] [T] a donné à bail à [J] [U] le 30 mars 2016 un appartement avec jardin situé 33 rue du Docteur Belletrud 06530 SPERACEDES moyennant un loyer mensuel de 500 €, en ce compris 10 euros au titre de provision pour la taxe d'enlèvement des ordures ménagères.

Qu'un état des lieux d'entrée non daté , non signé par le locataire est également produit dont il résulte que les locaux étaient en bon état de réparations locatives.

Que d'ailleurs, [J] [U] ne prouve pas le contraire.

Attendu qu'il résulte du procès-verbal de constat de huissier établi le 28 juin 2017, soit plus d'un an après la prise de possession des lieux, les désordres suivants :

- le plancher inférieur dans le salon présente une flèche nettement visible de 3 cm, ce fléchissement faisant que le carrelage équipant le sol commence à se fissurer.

- la salle d'eau est dépourvue de toute ventilation de sorte que le plafond se trouve moisi.

- le tuyau PVC d'évacuation de la machine à laver vient entraver le passage au droit de la baie vitrée pour se vider dans le regard coulant dans le jardin.

- les poutres qui soutiennent le plancher supérieur présentent des signes d'infestation parasitaire manifeste.

- deux étais sont présents au soutien du plancher supérieur

- le joint sur la porte fenêtre de la cuisine est absent engendrant une inondation de l'ensemble de la cuisine en cas de fortes pluies

- pas d'antenne

- l'alimentation électrique de l'éclairage du plafond de la cuisine est alimentée par un câble souple.

- la poutre supérieure soutenant la charpente est également attaquée par les termites.

- la toiture de la cuisine n'est pas isolée.

Que [J] [U] verse également au débat différentes photos des désordres, la dénonciation de procés verbal de constat avec sommation d'avoir à réaliser sans délai les travaux nécessaires à la cessation des désordres entrainant un préjudice de jouissance, signifiée par voie d'huissier à [I] [T] le 31 mai 2018 ainsi que la lettre de mise en demeure adressée à son bailleur le 6 novembre 2018 par son conseil d'avoir à effectuer notamment les travaux suivants:

- l'arrivée d'eau de la machine à laver.

- la mise aux normes du compteur électrique.

- les infiltrations d'eau par la baie vitrée de la cuisine.

-l'affaissement du sol de la salle à manger lequel est actuellement soutenu par des étais métalliques

Qu'elle soutient que [I] [T] n'a procédé à aucun des travaux nécessaires et produit un arrêté municipal portant sur un arrêté de péril imminent du 26 mars 2019 résultant de l'état dangereux de l'appartement.

Attendu que [I] [T] soutient que le logement se trouvait en parfait état comme en atteste l'état des lieux d'entrée, indiquant avoir mandaté des entreprises afin d'effectuer les travaux nécessaires lesquelles ont rencontré beaucoup de difficultés pour les réaliser, [J] [U] refusant notamment que l'entreprise [O] intervienne pour la mise en place d'une VMC dans la salle d'eau et pour la mise en conformité du tableau électrique.

Que [L] [O] indique dans une attestation avoir réparé une poutre de maintien de plancher fin juillet 2017 mais n'avoir pu réaliser la mise en place de la ventilation de la salle de bains, [J] [U] ayant refusé qu'il intervienne.

Que [I] [T] produit également l'attestation de la SARL Centre Var électricité en date du 21 novembre 2018 dont le gérant [P] [S] affirme avoir été sollicité par [V] [T] pour effectuer l'installation d'une ventilation dans la douche et la mise en conformité du tableau électrique de la maison, travaux qu'il n'a pas pu réaliser, [J] [U] n'ayant pas répondu à ses nombreux messages.

Que par lettre du 13 février 2019, le conseil de [I] [T] faisait savoir au conseil de [J] [U] que son client réitérait sa volonté d'effectuer au plus tôt les travaux sur le compteur électrique et lui demandait de lui transmettre les coordonnées téléphoniques de sa cliente afin que le technicien puisse prendre rendez-vous auprès d'elle.

Attendu que [J] [U] ne conteste pas avoir refusé les interventions des entreprises missionnées par son bailleur estimant qu'elles n'étaient pas qualifiées pour exécuter les travaux de mise en conformité et de consolidation notamment s'agissant de l'entreprise [O], à ses yeux, incapable de poser une VMC, sans le démontrer.

Qu'il convient cependant de relever que [J] [U] a adopté ce comportement avec l'ensemble des entreprises missionnées par son bailleur et notamment la SARL Centre Var Electricité qui avait manifestement les qualifications requises pour travailler dans le domaine de l'électricité et la pose de la VMC.

Que dès lors il ne peut être reproché à [I] [T] de ne pas avoir entrepris les travaux destinés à mettre fin aux désordres relevés par le huissier de justice le 28 juin 2017 alors que ce dernier mandatait dés le mois de juillet 2017 des entreprises qui n'ont pu intervenir soit en raison de l'opposition de [J] [U], soit en raison de son silence.

Qu'au surplus force est de constater que [I] [T] a pu réaliser les travaux d'électricité une fois le départ des lieux de sa locataire le 3 avril 2019.

Qu'en effet le 17 mai 2019, le garde champêtre, chef principal, chef de poste police rurale intercommunale adressait un courrier à [I] [T] dans lequel il indiquait avoir constaté la présence de l'électricien pour la mise aux normes, pose de différentiel sur le tableau électrique indiquant que celui-ci leur avait confirmé qu'il n'y avait aucun problème sur l'installation, aucune trace d'arc ou brûlure étant présentes sur les protections, couvercles de fermeture ou autres.

Qu'il ressortait également du dossier technique immobilier réalisé le 20 mai 2019 par D&C que les locaux objets du constat ne présentaient pas un plancher ou un plafond menaçant de s'effondrer ou en tout ou partie effondré alors qu'il était mentionné dans l'arrêté de péril imminent que ' tout laisse à penser que le plancher est prêt à s'éffondrer' alors même que [I] [T] n'a fait aucune intervention sur le plancher depuis juillet 2017.

Que les locaux objets du constat ne présentaient pas des traces importantes de coulures de ruissellement ou d'écoulement d'eau sur plusieurs unités de diagnostic du même pièce.

Que les locaux objets du constat ne présentaient pas plusieurs unités de diagnostic du même pièce recouvertes de moisissures ou de nombreuses traces d'humidité.

Qu'ainsi le 17 juin 2019 l'arrêté de péril imminent qui reposait pour partie sur des constatations érronées, était levé en raison des travaux engagés de mise aux normes du tableau électrique avec différentiel, pose de VMC, des conclusions de D&C sur une partie de l'assainissement et l'affaissement d'une partie du sol.

Attendu qu'il résulte de ces éléments que [J] [U] énonce des désordres auxquels il n'a pas été possible de remédier pour certains d'entre eux dans la mesure où elle a refusé l'intervention de prestataires qu'elle jugeait non suffisamment qualifiés sans le démontrer.

Que par ailleurs les documents produits aux débats ne sont pas suffisamment précis pour conclure que ledit logement était insalubre à compter du mois de novembre 2018.

Qu'il convient dés lors de confirmer le jugement déféré sur ce point

2°) Sur les demandes de [J] [U]

Attendu que [J] [U] demande à la cour de condamner le bailleur dans la mesure où le logement loué était insalubre depuis novembre 2018 à lui payer la somme de 5000 € au titre de son préjudice de jouissance paisible du logement, en ce compris les travaux de réparation de la salle de bains restés à sa charge ainsi que celle de 3000 € au titre de son préjudice moral.

Qu'il y a lieu de débouter cette dernière de ses demandes ainsi que de celle visant l'autorisation de suspendre le paiement du prix des loyers dus mensuellement à compter du 6 novembre 2018 et ce jusqu'à la réalisation des travaux, les éléments versés par [J] [U] ne démontrant pas que le logement loué était inhabitable.

Qu'il y a lieu de confirmer le jugement déféré sur ce point

3°) Sur les demandes de [I] [T]

Attendu que [I] [T] demande à la cour de condamner [J] [U] à lui payer la somme de 3.060,34 € dont 2.012,75 euros au titre des loyers impayés et décduction faite du dépôt de garantie d'un montant de 500 euros , celle de 984,34 euros au titre des factures d'eau et celle de 63,25 euros au titre de la taxe denlèvement des ordures ménagères.

Attendu qu'il n'est pas contesté que [J] [U] n'a pas réglé les loyers des mois de novembre 2018, décembre 2018, janvier, février et mars 2019.

Que celle-ci ne peut en effet se prévaloir de l'exception d'inexécution auprès de la cour pour voir ses loyers suspendus.

Qu'il y a lieu par conséquent de la condamner au paiement de la somme de 2.512,75 € au titre des impayés locatifs des mois de novembre 2018, décembre 2018, janvier, février et mars 2019 ( 502,55 euros x 5) dont il devra être déduit le dépôt de garantie d'un montant de 500 €, [J] [U] restant devoir la somme de 2.012,75 €.

Qu'il y a lieu de confirmer le jugement querellé sur ce point.

Attendu qu'il résulte du contrat de bail qu'une provision de 10 € était appelée chaque mois soit 120 € par an alors que la taxe d'enlèvement des ordures ménagères s'éleve à 143 €.

Qu'ainsi [J] [U] reste devoir la somme de 17,25 € sur l'année 2016, ayant occupé les locaux pendant 9 mois, celle de 23 € sur l'année 2017, celle de 23 € sur 2018 soit un total de 63,25€.

Qu'il y a lieu de confirmer le jugement déféré sur ce point.

Attendu que la cour relève que [I] [T] ne verse qu'une facture d'eau en date du 6 novembre 2018 d'un montant de 143,49 euros.

Qu'il convient par conséquent d'infirmer le jugement déféré en ce qu'il a condamné [J] [U] au paiement de la somme de 984,34 euros et de condamner cette dernière au paiement de la somme de 143,49 euros.

4°) Sur les dépens et les dispositions de l'article 700 du code de procédure civile.

Attendu que l'article 696 alinéa 1 du code de procédure civile dispose que 'la partie perdante est condamnée aux dépens, à moins que le juge, par décision motivée, n'en mette la totalité ou une fraction à la charge d'une autre partie.'

Qu'en l'espèce, [J] [U] est la principale partie succombant.

Qu'il convient par conséquent de confirmer le jugement querellé sur ce point et de condamner [J] [U] aux entiers dépens de première instance et d'appel en ce compris les coûts des commandements de payer des 12 avril 2018 et 30 août 2018.

Attendu que l'article 700 du code de procédure civile prévoit que le tribunal condamne la partie tenue aux dépens à payer à l'autre partie la somme qu'il détermine , au titre des frais exposés et non compris dans les dépens en tenant compte de l'équité et de la situation économique des parties.

Qu'il y a lieu de confirmer le jugement querellé sur ce point et de condamner [J] [U] à payer à [I] [T] la somme de 1.800 euros au titre des dispositions de l'article 700 du code de procédure en cause d'appel

PAR CES MOTIFS

Statuant par arrêt contradictoire, rendu en dernier ressort et par mise à disposition au greffe

CONFIRME le jugement du tribunal d'instance de Grasse en date du 30 juillet 2019 en toutes ses dispositions sauf en ce qu'il a condamné [J] [U] à rembourser la somme de 984,34 euros au titre de sa consommation d'eau,

STATUANT A NOUVEAU,

CONDAMNE [J] [U] à rembourser la somme de 143,49 euros au titre de sa consommation d'eau entre mai 2018 et son départ en mars 2019.

Y AJOUTANT,

CONDAMNE [J] [U] à payer à [I] [T] la somme de 1.800 euros au titre des dispositions de l'article 700 du code de procédure en cause d'appel.

CONDAMNE [J] [U] aux entiers dépens de première instance et d'appel en ce compris les coûts des commandements de payer des 12 avril 2018 et 30 août 2018.

LA GREFFIÈRE, LA PRÉSIDENTE,


Synthèse
Tribunal : Cour d'appel d'Aix-en-Provence
Formation : Chambre 1-7
Numéro d'arrêt : 19/15395
Date de la décision : 19/05/2022

Origine de la décision
Date de l'import : 26/03/2024
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.appel;arret;2022-05-19;19.15395 ?
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