La jurisprudence francophone des Cours suprêmes


recherche avancée

13/05/2022 | FRANCE | N°18/12664

France | France, Cour d'appel d'Aix-en-Provence, Chambre 4-3, 13 mai 2022, 18/12664


COUR D'APPEL D'AIX-EN-PROVENCE

Chambre 4-3



ARRÊT AU FOND



DU 13 MAI 2022



N°2022/ 111





RG 18/12664

N° Portalis DBVB-V-B7C-BC3K6







SA CAISSE D'ALLOCATIONS FAMILIALES DES BOUCHES DU RHONE





C/



[N] [E]







Copie exécutoire délivrée

le 13 mai 2022 à :



- Me Pierre-yves IMPERATORE, avocat au barreau d'AIX-EN-

PROVENCE







- Me Jonathan LAUNE, avocat au barreau d'AIX

-EN-

PROVENCE





Décision déférée à la Cour :



Jugement du Conseil de Prud'hommes - Formation de départage de MARSEILLE en date du 05 Juillet 2018 enregistré au répertoire général sous le n° 16/02819.







APPELANTE



SA CAISSE D'ALLOCATI...

COUR D'APPEL D'AIX-EN-PROVENCE

Chambre 4-3

ARRÊT AU FOND

DU 13 MAI 2022

N°2022/ 111

RG 18/12664

N° Portalis DBVB-V-B7C-BC3K6

SA CAISSE D'ALLOCATIONS FAMILIALES DES BOUCHES DU RHONE

C/

[N] [E]

Copie exécutoire délivrée

le 13 mai 2022 à :

- Me Pierre-yves IMPERATORE, avocat au barreau d'AIX-EN-

PROVENCE

- Me Jonathan LAUNE, avocat au barreau d'AIX-EN-

PROVENCE

Décision déférée à la Cour :

Jugement du Conseil de Prud'hommes - Formation de départage de MARSEILLE en date du 05 Juillet 2018 enregistré au répertoire général sous le n° 16/02819.

APPELANTE

SA CAISSE D'ALLOCATIONS FAMILIALES DES BOUCHES DU RHONE, demeurant [Adresse 2]

représentée par Me Pierre-yves IMPERATORE de la SELARL LEXAVOUE BOULAN CHERFILS IMPERATORE, avocat au barreau d'AIX-EN-PROVENCE substituée par Me Rebecca VANDONI, avocat au barreau d'AIX-EN-PROVENCE

INTIMEE

Madame [N] [E], demeurant [Adresse 1]

représentée par Me Jonathan LAUNE, avocat au barreau d'AIX-EN-PROVENCE

*-*-*-*-*

COMPOSITION DE LA COUR

En application des dispositions des articles 804 et 805 du code de procédure civile, l'affaire a été débattue le 01 Mars 2022 en audience publique, les avocats ne s'y étant pas opposés, devant Madame Pascale MARTIN, Président de Chambre, et Madame Estelle DE REVEL, Conseiller, chargées du rapport.

Madame Pascale MARTIN, Président de Chambre, a fait un rapport oral à l'audience, avant les plaidoiries.

Ces magistrats ont rendu compte des plaidoiries dans le délibéré de la cour, composée de :

Madame Pascale MARTIN, Président de Chambre

Madame Ghislaine POIRINE, Conseiller faisant fonction de Président

Madame Estelle DE REVEL, Conseiller

Greffier lors des débats : Mme Nadège LAVIGNASSE.

Les parties ont été avisées que le prononcé de la décision aurait lieu par mise à disposition au greffe le 13 Mai 2022.

ARRÊT

CONTRADICTOIRE

Prononcé par mise à disposition au greffe le 13 Mai 2022.

Signé par Madame Pascale MARTIN, Président de Chambre et Madame Florence ALLEMANN-FAGNI, greffier auquel la minute de la décision a été remise par le magistrat signataire.

* * *

FAITS- PROCEDURE-PRETENTIONS DES PARTIES

En 1984, Mme [N] [E] a été embauchée par la Caisse d'Allocations Familiales (dite CAF) du Havre.

En février 1988, Mme [E] a été mutée au sein de la CAF des Bouches du Rhône ou CAF13 en qualité d'assistante sociale.

Le 4 septembre 2003, la salariée a été affectée sur un poste de médiatrice familiale.

Au dernier état de la relation contractuelle, Mme [E] occupait les fonctions de médiatrice familiale expert, statut cadre, niveau 6, coefficient 315 et son salaire moyen brut mensuel s'établissait à 3 064,56 euros.

Le 1er juin 2015, la CAF 13 présentait un projet de désengagement de l'activité de médiation familiale en gestion directe, imposé par la caisse nationale à compter du 1er janvier 2016.

A la suite de plusieurs entretiens, Mme [E] refusait notamment par lettres des 20 novembre et 17 décembre 2015, les propositions de poste.

Après avoir été convoquée à un entretien préalable au licenciement selon lettre remise en mains propres le 15 janvier 2016 pour le 26 janvier 2016, Mme [E] a été licenciée par lettre recommandée du 29 janvier 2016, dans les termes suivants :

« (...)Je vous informe, qu'après réflexion, j'ai pris la décision de vous licencier pour le motif suivant :

La Cog 2013/2017 a opéré un changement structurel des budgets d'Action Sociale : l'augmentation des fonds nationaux préexistants s'accompagne de la création de fonds d'accompagnement spécifiques (finançant des prestations de service et des aides financières individuelles), ayant pour corollaire la baisse des dotations locales (finançant notamment l'investissement, les subventions de fonctionnement, les frais de personnel et les autres frais de fonctionnement), diminuant par conséquent les marges de man'uvre locales.

Parallèlement, la Caisse Nationale a prévu la restitution de postes dans les 'uvres sociales. Une réflexion a donc dû s'engager sur la restitution d'effectif.

L'option a été prise d'un désengagement de la CAF 13 dans la mise en 'uvre de l'activité de médiation familiale, à compter du 1er janvier 2016, la médiation familiale ne s'inscrivant pas dans les actions du c'ur de métier portées par les 'uvres sociales des CAF.

L'objectif est ainsi de rouvrir, à terme, des marges de man'uvre locales, afin de financer des actions à nos partenaires d'Action sociales.

A partir de 2016, la CAF 13 financera désormais des associations conventionnées et non plus des actions directes de médiation familiale.

Le projet de désengagement de la CAF 13 de la gestion directe de la médiation familiale - ainsi que le projet d'accompagnement RH de cette équipe de travail, dans ce cadre ' ont été présentés au CHSCT et au CE du mois de juin 2015.

Dès lors, l'organisme s'est efforcé de rechercher un poste disponible similaire, présentant des caractéristiques équivalentes au poste de Médiatrice.

La Direction a pris l'initiative de vous recevoir, dès le mois de juin 2015, afin de vous informer et de vous accompagner dans ces démarches.

Plusieurs tentatives de réaffectation sont intervenues en interne, ainsi qu'au niveau institutionnel, les Caisses d'Allocations familiales ayant un service de médiation familiale en gestion directe ayant été interrogées par notre organisme, sur une possibilité de mutation inter-organismes.

Trois propositions précises de postes de réaffectation vous ont été notifiées :

- Par courrier du 18 décembre 2015: Conseiller technique structures agréées (poste de niveau 6).

- Par courrier du 15 octobre 2015 : Conseiller en service social (poste de niveau 5B soumis à la cotisation retraite des Cadres).

- Par courrier du 20 novembre 2015: travailleur social (poste de niveau 5B, non soumis à la cotisation retraite des Cadres).

Ces trois propositions internes ont été assorties d'une offre de maintien de la rémunération brute, majoré de points de compétence liés au changement d'emploi en fin de carrière.

Elles ont été maintenues jusqu'au 28 décembre 2015, veille de la disparition de l'activité de médiation familiale en gestion directe à la CAF 13, fixée le 1er janvier 2016.

Toutes ces tentatives de réaffectation ont été systématiquement accompagnées par la Direction, qui vous a reçue lors de réunions collectives ou individuelles, organisées par elle-même ou à votre demande sans restriction.

Par courrier daté du 24 décembre 2015, reçu par la Caisse d'Allocations familiale des Bouches du Rhône à la date butoir du 28 décembre 2015, vous avez indiqué refuser ces trois propositions.

Vous avez également été, vainement, mise en contact avec la CAF 44, qui souhaitait élargir son équipe, avec un poste de médiatrice familiale supplémentaire, au niveau 5B, dans le cadre d'une mutation conventionnelle.

Ainsi, malgré nos efforts, aucune réaffectation n'a pu intervenir sur un autre poste de travail, alors que l'activité de médiation en gestion directe a pris fin le 1er janvier 2016 et que votre poste, de ce fait, a été supprimé, dans le cadre du changement structurel des budgets d'action sociale.

En conséquence, j'ai pris la décision de vous notifier, par la présente, la rupture de votre contrat de travail.

Votre préavis d'une durée de six mois prendra effet à première présentation de ce courrier. Nous vous informons que nous vous dispensons de l'effectuer, il vous sera, néanmoins, payé.(...) »

Le 16 décembre 2016, Mme [E] a saisi le conseil de prud'hommes de Marseille afin de contester la rupture de son contrat de travail.

Le 5 juillet 2018, le conseil de prud'hommes, en sa formation de départage, rendait son jugement en ces termes :

Dit que le licenciement de Mme [E] par la CAF13 est dépourvu de cause réelle et sérieuse ;

Condamne la CAF13 à verser à Mme [E] la somme de 75 800,00€ à titre de dommages et intérêts pour licenciement dépourvu de cause réelle et sérieuse;

Déboute Mme [E] de sa demande de dommages et intérêts pour licenciement vexatoire ;

Condamne d'office la CAF13 à rembourser à pole emploi les indemnités de chômage perçues par Mme [E] dans la limite des six premiers mois indemnisés ;

Condamne la CAF13 à verser à Mme [E] la somme de 1 500,00€ au titre de l'article 700 du code de procédure civile ;

Condamne la CAF13 aux entiers dépens de la procédure ;

Dit n'y avoir lieu à exécution provisoire de la présente décision, excepté les dispositions qui sont de plein droit exécutoire en application de l'article R.1454-28 du code du travail ;

Déboute les parties de leurs demandes plus amples ou contraires.

Le 26 juillet 2018, le conseil de la CAF des Bouches du Rhône interjetait appel de la décision.

Aux termes de ses dernières écritures, transmises par voie électronique le 24 novembre 2021, la CAF des Bouches du Rhône demande à la cour d'infirmer le jugement du conseil de prud'hommes de Marseille en ce qu'il a jugé le licenciement fondé sur une cause réelle et sérieuse, et l'a condamnée à verser à Madame [E] 75.800 € de dommages et intérêts pour licenciement sans cause réelle et sérieuse, à payer 1.500 € au titre de l'article 700 du code de procédure civile et à rembourser les allocations chômage à Pôle Emploi, dans la limite des 6 premiers mois .

Elle demande la confirmation du jugement en ce qu'il a débouté Mme [E] de l'ensemble de ses autres demandes.

Elle demande à la cour de :

DÉCLARER recevable et bien fondé l'appel de la Caisse d'allocation familiale des Bouches du Rhône ;

RECEVOIR la Caisse d'allocations familiales des Bouches-du-Rhône en ses écritures et de l'y déclarer bien fondée ;

DIRE ET JUGER que la rupture du contrat de travail à durée indéterminé de Madame [E] était parfaitement régulière et pourvue d'une cause réelle et sérieuse ;

DIRE ET JUGER que la rupture du contrat de Madame [E] n'était pas vexatoire, ni attentatoire à ses droits à retraite ;

DIRE ET JUGER que Madame [E] a été remplie de l'intégralité de ses droits ;

DIRE ET JUGER qu'il n'y pas lieu au remboursement des indemnités chômage à Pôle Emploi

En conséquence,

DÉBOUTER Madame [E] de l'ensemble de ses demandes, fins, écrits et prétentions ;

A TITRE RECONVENTIONNEL :

CONDAMNER Madame [E] à verser à la CAF la somme de 3.000,00 euros sur le fondement des dispositions de l'article 700 du Code de procédure civile ;

CONDAMNER Madame [E] aux entiers dépens de l'instance, ceux d'appel distraits au profit de Maître Pierre-Yves IMPERATORE, membre de la SELARL LEXAVOUE AIX-EN PROVENCE avocats aux offres de droit.

Aux termes de ses dernières conclusions, transmises par voie électronique le 28 avril 2020, l'intimée demande à la cour de :

Confirmer le jugement du conseil de prud'hommes en ce qu'il a dit et jugé que le licenciement ne repose sur aucune cause réelle et sérieuse,

Réformer le jugement du conseil de prud'hommes en ce qu'il a limité le montant des dommages & intérêts pour licenciement abusif à la somme de 75.800€,

Réformer le jugement du conseil de prud'hommes en ce qu'il a débouté Madame [E] de sa demande de dommages & intérêts pour préjudice distinct et licenciement vexatoire,

Statuant à nouveau sur le quantum des condamnations ;

CONDAMNER la Caisse d'allocations familiales des Bouches-du-Rhône à la somme de 120.000€ à titre de dommages et intérêts pour licenciement sans cause réelle et sérieuse,

CONDAMNER la Caisse d'allocations familiales des Bouches-du-Rhône à la somme de 20.000€ à titre de dommages et intérêts pour licenciement vexatoires & préjudice distinct,

CONDAMNER la Caisse d'allocations familiales des Bouches-du-Rhône à verser 3.000€ à Madame [E] au titre des frais irrépétibles sur le fondement de l'article 700 du Code de procédure civile,

CONDAMNER la Caisse d'allocations familiales des Bouches-du-Rhône aux entiers dépens,

Pour l'exposé plus détaillé des prétentions et moyens des parties, il sera renvoyé, conformément à l'article 455 du code de procédure civile, aux conclusions des parties.

MOTIFS DE L'ARRÊT

A titre liminaire, la cour rappelle qu'en application des dispositions de l'article 954 du code de procédure civile , elle ne statue que sur les prétentions énoncées au dispositif et que les «dire et juger» et les «constater» ainsi que les «donner acte» ne sont pas des prétentions en ce que ces demandes ne confèrent pas de droit à la partie qui les requiert hormis les cas prévus par la loi; en conséquence, la cour ne statuera pas sur celles-ci, qui ne sont en réalité que le rappel des moyens invoqués.

Sur le bien fondé du licenciement

L'appelante rappelle que la modification du contrat de travail proposée ne reposait pas sur un motif économique et ne l'obligeait pas à respecter le délai de réflexion de l'article L.1222-6 du code du travail.

Elle explique que le désengagement opéré par la CAF 13 était nécessaire à son bon fonctionnement mais ne constituait pas pour autant des difficultés économiques ou une réorganisation ayant pour but de sauvegarder la compétitivité et demande à la cour de dire - à l'instar du conseil de prud'hommes - que le licenciement de Mme [E] ne repose pas sur un motif économique.

Elle indique que Mme [E] a systématiquement opposé un refus aux propositions de réaffectation.

Elle précise que le motif réel et sérieux de proposer une modification du contrat de travail résultait du fait que l'activité à laquelle Mme [E] était rattachée était supprimée du fait de décisions prises au plan national et de la volonté de conserver la salariée au sein de la structure en lui faisant diverses propositions loyales et en toute bonne foi.

Elle ajoute avoir été au-delà de ses obligations en tentant un reclassement externe.

L'intimée considère le licenciement abusif à double titre : d'une part, ne reposant pas sur un motif économique alors que le motif est déclaré comme non inhérent à sa personne et d'autre part, motivé par le refus (légitime) de donner suite aux propositions de modification du contrat de travail.

Elle estime que la situation décrite correspond parfaitement à la définition des licenciements économiques, la CAF ayant face aux contraintes budgétaires décidé de procéder à la suppression de postes de travail, tout en proposant en amont des solutions de reclassement emportant d'importantes modifications du contrat de travail ; elle observe que la CAF n'a pas respecté la procédure.

Elle précise que les propositions de poste étaient assorties d'une période probatoire de trois mois

ce qui en cas d'échec, ne lui permettait pas de bénéficier de la moindre garantie ou de la moindre visibilité sur son avenir professionnel.

Il résulte de l'article L.1222-6 du code du travail que la procédure qu'il prévoit est applicable lorsque l'employeur envisage la modification d'un élément essentiel du contrat de travail pour l'un des motifs énoncés à l'article L. 1233-3 du code du travail .

Or, en l'espèce, comme l'a souligné le conseil de prud'hommes par des motifs pertinents que la cour adopte, il n'est pas allégué un motif économique mais une réorganisation ayant pour effet de mettre fin au service en gestion directe de la médiation familiale au profit d'une externalisation, ce qui entraînait la suppression de trois postes de médiatrices.

Dès lors, l'employeur n'avait pas à respecter la procédure prévue par l'article sus-visé.

La cour relève comme le conseil de prud'hommes qui en a fait un exposé exhaustif que si la CAF 13 a fait des propositions de réaffectation à Mme [E], celles-ci avaient toutes pour conséquence, soit un changement de métier, soit une rétrogradation au niveau 5 et l'employeur imposait dans tous les cas à la salariée un stage probatoire, sans démontrer que ce dernier était nécessaire, alors que la modification du contrat de travail relevait en l'espèce de la seule initiative de l'employeur.

Le seul refus par un salarié d'une modification de son contrat de travail ne constitue pas une cause réelle et sérieuse de licenciement.

La rupture résultant du refus par le salarié d'une modification de son contrat de travail, proposée par l'employeur pour un motif non inhérent à sa personne, constitue un licenciement pour motif économique.

Si la réorganisation de l'entreprise a été consacrée comme un motif autonome de licenciement , c'est à la condition toutefois qu'elle soit justifiée par des difficultés économiques ou par des mutations technologiques ou qu'elle soit indispensable à la sauvegarde de la compétitivité de l'entreprise ou du secteur d'activité du groupe auquel elle appartient .

Dès lors que le motif de la modification du contrat de travail refusée de façon légitime par la salariée résidait dans la volonté de l'employeur de réorganiser le service de l'entreprise et qu'il n'était pas allégué que cette réorganisation résultait de difficultés économiques ou de mutations technologiques ou qu'elle fût indispensable à la sauvegarde de la compétitivité de l'entreprise, le licenciement doit être déclaré sans cause réelle et sérieuse.

La décision doit en conséquence être confirmée.

Sur les conséquences financières du licenciement

a) La salariée critique la décision pour avoir limité son indemnisation en ne tenant pas compte de tous ses préjudices.

Elle indique qu'elle avait 28 ans d'ancienneté et 58 ans au moment de son licenciement; elle précise que son indemnisation auprès de Pôle Emploi aurait été supérieure en cas de licenciement économique et qu'elle aurait pu bénéficier d'un contrat de sécurisation professionnelle ; elle ajoute que le montant de sa retraite sera réduit également.

L'appelante considère que Mme [E] ne peut prétendre ni à 19,5 mois d'indemnité eu égard à sa mauvaise foi et au caractère indicatif du barême ni au cumul du mois d'indemnité supplémentaire au titre de l'âge et de la difficulté du retour à l'emploi, demandant à la cour de limiter l'indemnité à 6 mois de salaire et contestant les calculs de la salariée quant à une retraite minorée.

En allouant à Mme [E] la somme de 75 800 euros, en allant au-delà du barême indicatif, le conseil de prud'hommes a fait une juste appréciation de l'ensemble des préjudices subis par la salariée du fait de la rupture, y compris le préjudice moral, étant précisé que cette dernière a perçu en sus, la somme de 46 479 euros à titre d'indemnité conventionnelle de licenciement.

b) La salariée invoque le caractère nécessairement vexatoire du licenciement, indiquant que pendant des mois aucune information n'était donnée par la direction, exposant avoir saisi le CHSCT pour une enquête, arguant de pressions par la remise de convocations la veille pour le lendemain. Elle ajoute que le jour de la remise en mains propres de sa lettre de licenciement, il lui a été demandé de quitter les lieux dans un délai de deux heures.

La CAF 13 indique que la lettre recommandée de licenciement a été présentée par la poste au domicile de Mme [E] le mercredi 3 février et que le lundi 8 février 2016, elle n'avait toujours pas été retirée, de sorte que pour rendre effective la période de préavis dont la salariée avait été dispensée, elle a été contrainte de lui remettre en mains propres.

Elle ajoute que la salariée était informée depuis plusieurs mois de la suppression de son poste et que le licenciement n'est pas intervenu dans des conditions indignes, rappellant avoir notamment proposé un poste de même niveau assorti d'une augmentation conséquente de salaire.

La cour constate que dès le mois de juin 2015, les salariées ont été informées de la réorganisation envisagée et donc de la suppression des postes de médiatrices et la procédure de réaffectation par le biais d'entretiens et de propositions s'est déroulée au cours du dernier trimestre 2015, sans que Mme [E] fasse la preuve de pressions ou du résultat de la saisine du CHSCT.

Les conditions de remise de la lettre de licenciement ne peuvent être qualifiées de vexatoires, eu égard à l'exposé factuel fait par l'employeur, étant précisé que l'entretien préalable au licenciement avait eu lieu fin janvier 2016 et que le poste de Mme [E] étant supprimé, il ne pouvait que la dispenser de préavis, ce dernier lui ayant été payé.

En conséquence, c'est à juste titre que les premiers juges ont rejeté la demande d'indemnisation distincte sollicitée.

Sur les frais et dépens

L'appelante qui succombe doit s'acquitter des dépens, être déboutée de sa demande faite sur le fondement de l'article 700 du code de procédure civile et à ce titre payer à Mme [E] la somme de 2000 euros en sus de celle déjà allouée en première instance.

PAR CES MOTIFS

La Cour,

Statuant par arrêt réputé contradictoire, par mise à disposition au greffe, les parties en ayant été préalablement avisées dans les conditions prévues à l'article 450 du code de procédure civile, en matière prud'homale,

Confirme le jugement en toutes ses dispositions,

Y ajoutant,

Condamne la Caisse d'Allocations Familiales des Bouches du Rhône à payer à Mme [N] [E] la somme de 2 000 euros sur le fondement de l'article 700 du code de procédure civile,

Condamne la Caisse d'Allocations Familiales des Bouches du Rhône aux dépens d'appel.

LE GREFFIERLE PRESIDENT


Synthèse
Tribunal : Cour d'appel d'Aix-en-Provence
Formation : Chambre 4-3
Numéro d'arrêt : 18/12664
Date de la décision : 13/05/2022

Origine de la décision
Date de l'import : 26/03/2024
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.appel;arret;2022-05-13;18.12664 ?
Association des cours judiciaires suprmes francophones
Organisation internationale de la francophonie
Juricaf est un projet de l'AHJUCAF, l'association des Cours suprêmes judiciaires francophones. Il est soutenu par l'Organisation Internationale de la Francophonie. Juricaf est un projet de l'AHJUCAF, l'association des Cours suprêmes judiciaires francophones. Il est soutenu par l'Organisation Internationale de la Francophonie.
Logo iall 2012 website award