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12/05/2022 | FRANCE | N°21/04789

France | France, Cour d'appel d'Aix-en-Provence, Chambre 3-2, 12 mai 2022, 21/04789


COUR D'APPEL D'AIX-EN-PROVENCE

Chambre 3-2



ARRÊT AU FOND

DU 12 MAI 2022



N° 2022/310













Rôle N° RG 21/04789 - N° Portalis DBVB-V-B7F-BHGVK







[R], [D] [H]

S.A.R.L. LE BELVEDERE





C/



[Y] [S]





















Copie exécutoire délivrée

le :

à :



- Me Gaëtan DI MARINO



- Me François GOMBERT




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Décision déférée à la Cour :



Jugement du Tribunal de Commerce d'AIX EN PROVENCE en date du 23 Mars 2021 enregistré au répertoire général sous le n° 2021000171.





APPELANTES



Madame [R], [D] [H]

née le [Date naissance 1] 1968 à [Localité 4], de nationalité française, demeurant Residence [Adre...

COUR D'APPEL D'AIX-EN-PROVENCE

Chambre 3-2

ARRÊT AU FOND

DU 12 MAI 2022

N° 2022/310

Rôle N° RG 21/04789 - N° Portalis DBVB-V-B7F-BHGVK

[R], [D] [H]

S.A.R.L. LE BELVEDERE

C/

[Y] [S]

Copie exécutoire délivrée

le :

à :

- Me Gaëtan DI MARINO

- Me François GOMBERT

Décision déférée à la Cour :

Jugement du Tribunal de Commerce d'AIX EN PROVENCE en date du 23 Mars 2021 enregistré au répertoire général sous le n° 2021000171.

APPELANTES

Madame [R], [D] [H]

née le [Date naissance 1] 1968 à [Localité 4], de nationalité française, demeurant Residence [Adresse 5]

Représentée par Me Gaëtan DI MARINO de l'ASSOCIATION DI MARINO GAETAN HELENE, avocat au barreau d'AIX-EN-PROVENCE

S.A.R.L. LE BELVEDERE

dont le siège social est sis [Adresse 2], prise en la personne de son représentant légal es qualité audit siège

Représentée par Me Gaëtan DI MARINO de l'ASSOCIATION DI MARINO GAETAN HELENE, avocat au barreau d'AIX-EN-PROVENCE

INTIME

Maître [Y] [S],

agissant ès qualités de liquidateur judiciaire de la SARL LE BELVEDERE

Demeurant [Adresse 3]

Représenté par Me François GOMBERT, avocat au barreau de MARSEILLE

*-*-*-*-*

COMPOSITION DE LA COUR

L'affaire a été débattue le 23 Février 2022 en audience publique. Conformément à l'article 804 du code de procédure civile, Madame Agnès VADROT, Conseiller a fait un rapport oral de l'affaire à l'audience avant les plaidoiries.

La Cour était composée de :

Madame Michèle LIS-SCHAAL, Président de chambre

Madame Muriel VASSAIL, Conseiller

Madame Agnès VADROT, Conseiller

qui en ont délibéré.

Greffier lors des débats : Madame Chantal DESSI.

Les parties ont été avisées que le prononcé de la décision aurait lieu par mise à disposition au greffe le 12 Mai 2022.

MINISTERE PUBLIC :

Auquel l'affaire a été régulièrement communiquée.

ARRÊT

Contradictoire,

Prononcé par mise à disposition au greffe le 12 Mai 2022,

Signé par Madame Michèle LIS-SCHAAL, Président de chambre et Madame Chantal DESSI, greffier auquel la minute de la décision a été remise par le magistrat signataire.

***

FAITS, PROCEDURE, PRETENTIONS ET MOYENS DES PARTIES

Par jugement en date du 8 octobre 2019, le tribunal de commerce d'Aix en Provence a ouvert à l'encontre de la SARL LE BELVEDERE une procédure de liquidation judiciaire et a prononcé la résolution du plan de sauvegarde dont elle bénéficiait depuis le 10 mars 2015.

Par jugement en date du 23 mars 2021 le tribunal de commerce a, à la demande de Maître [S], es qualité de liquidateur judiciaire de la SARL LE BELVEDERE, constaté l'existence de relations financières anormales caractérisant une confusion des patrimoines entre la SARL LE BELVEDERE et Madame [H], gérante et associée majoritaire de la société ainsi que bailleur des locaux qu'elle occupe pour exercer son activité d'hôtellerie et de restauration. Il a conséquemment prononcé l'extension de procédure de liquidation de la SARL BELVEDERE à Madame [R] [H].

Le tribunal de commerce a retenu que le caractère récurrent des impayés de loyers, l'absence de tentative de recouvrement en amont de la procédure et de la déclaration de la créance, l'absence d'actif mobilier figurant au bilan pourtant financé par les prêts consentis à la SARL LE BELVEDERE démontraient des relations financières anormales entre la société LE BELVEDERE et Madame [H] caractérisant une confusion des patrimoines.

Par déclaration en date du 1er avril 2021, Madame [R] [H] et la SARL LE BELVEDERE ont interjeté appel de cette décision.

Par conclusions notifiées par le RPVA en date du 28 juin 2021, auxquelles il est fait référence pour plus ample exposé des motifs, Madame [H] et la SARL LE BELVEDERE demandent à la cour de :

REFORMER le jugement rendu le 23 mars 2021 par le tribunal de commerce d'Aix en Provence en toutes ses dispositions

REJETER l'application de l'article L621-2 al.2 du code du commerce

REJETER la demande d'extension de la procédure de liquidation judiciaire de la SARL LE BELVEDERE à Madame [R] [H]

REFORMER en conséquence le jugement dont appel en ce qu'il a ordonné l'accomplissement de toutes les formalités prévues par la loi en matière d'extension de procédure de liquidation judiciaire

DECLARER que les dépens ne seront ni à la charge de Madame [R] [H] ni à la charge de la société BELEVEDERE

Les appelants exposent:

-que le 14 mars 1989, a été créée entre Monsieur [H], Madame [O] [I] épouse [H] et Madame [R] [H] une SCI dénommée LA PINEDE;

-que sur le terrain acquis par la SCI, les associés ont construit un immeuble lequel a été exploité par une SARL HOTEL RESTAURANT LES TERRASSES clôturée pour insuffisance d'actif;

-que le 13 juillet 2004, a été immatriculée au registre du commerce d'Aix en Provence une SARL dénommée le BELVEDERE ayant pour objet d'exploiter le fonds de commerce d'hôtellerie ' restauration dont la gestion a été confiée à Madame [R] [H];

-que suite au décès des deux autres associés, Madame [R] [H] s'est trouvée en possession de l'intégralité des parts de la SCI LA PINEDE

-que le 5 mai 2010, en vue de transformer l'hôtel en logements, la SARL LE BELVEDERE a souscrit auprès du CREDIT MUTUEL un premier emprunt de 900 000€ puis, le 29 juin 2011, un second emprunt de 210 000€, les deux prêts étant garantis par un nantissement sur le fonds de commerce ainsi que par la caution hypothécaire de la dirigeante, Madame [R] [H];

-que l'existence d'importantes malfaçons a entraîné des difficultés pour louer les logements, situation qui a conduit à l'ouverture d'une procédure collective, la société ayant finalement été placée en liquidation judiciaire par jugement en date du 8 octobre 2019

-que le 20 décembre 2020, Madame [H] a signé avec le CREDIT MUTUEL un protocole d'accord prévoyant l'arrêt de la procédure de saisie immobilière afin de permettre la vente de gré à gré de l'immeuble et le remboursement de l'intégralité de la créance de la banque;

-que le 22 mars 2021, le juge de l'exécution près le tribunal judiciaire d'Aix en Provence a rendu une décision aux termes de laquelle il a pris acte de ce que la CAISSE DE CREDIT MUTUEL D'AIX EN PROVENCE se désistait de son instance en saisie immobilière engagée à l'encontre de Madame [R] [H] au motif que les parties s'étaient rapprochées en cours d'instance et qu'un protocole transactionnel avait été conclu;

-que cependant par exploit d'huissier en date du 4 janvier 2021, Maître [S] a saisi le tribunal de commerce d'une demande d'extension de la procédure de liquidation judiciaire à laquelle il a fait droit.

Les appelants contestent tout d'abord le montant du passif retenu par le tribunal de commerce soit la somme de 1 698 207,82€. Ils soutiennent que celui-ci est de 1 170 216,55€ dont 1 151 413,66€ au titre de la créance du CREDIT MUTUEL, les 18 802,99€ restant étant constitués d'autres créances. Ils font valoir qu'au moment où Maître [S] a engagé la procédure, soit le 4 janvier 2021, il était informé de la signature du compromis de vente concernant l'immeuble, laquelle cession permettait de régler l'ensemble des créances.

En second lieu, ils contestent le reproche adressé à Madame [H] de ne pas avoir tenté de recouvrer les loyers et charges de sa locataire en expliquant d'une part que l'action en recouvrement des loyers se serait heurtée au fait que la chose louée ne répondait pas aux termes du bail dans la mesure où les malfaçons empêchaient une exploitation normale des studios et d'autre part que cette action loin de servir les intérêts de la SARL LE BELVEDERE aurait contribué à aggraver son déficit.

En troisième lieu, les appelants font valoir que le reproche adressé à Madame [H] de ne pas avoir fait de déclaration de créances au titre des loyers et charges impayées n'est pas fondé dans la mesure où une telle déclaration aurait été jugée injustifiée dans la mesure où le propriétaire mettait à la disposition de sa locataire des locaux impropres à l'usage auxquels ils étaient destinés.

En quatrième lieu, les appelants contestent la mise en exergue de l'importance des prêts consentis et des travaux réalisés lesquels profiteraient à la seule Madame [H]. Ils expliquent qu'en l'état du caractère précipité de la vente à laquelle Madame [R] [H] s'est vue contrainte d'adhérer, la transaction s'est faite à un prix très largement inférieur (1 740 000€) à celui auquel l'immeuble avait été évalué par l'expert (2 650 000€). Ils en déduisent que ce n'est pas dans l'intérêt de Madame [H] que cette transaction a eu lieu mais bien dans celui de la SARL LE BELVEDERE.

Enfin, s'agissant de l'absence d'actif mobilier, il font observer que cela s'explique au regard des malfaçons ayant atteint l'immeuble avec moisissures et infiltrations rendant les quelques éléments mobiliers impropres à tout usage par un locataire éventuel.

Par conclusions notifiées par le RPVA en date du 28 juin 2021, Maître [Y] [S] es qualité de liquidateur judiciaire de la SARL LE BELVEDERE demande à la cour, au visa des articles L621-2, R621-8-1 et L641-1 du code de commerce, de:

CONFIRMER en toutes ses dispositions la décision rendue le 23 mars 2021 par le tribunal de commerce d'Aix en Provence

ORDONNER l'ouverture d'une procédure de liquidation judiciaire à l'encontre de Madame [R] [H] par extension de celle ouverte à l'encontre de la SARL LE BELVEDERE par jugement du 08.10.2019 en raison de la confusion des patrimoines.

DECLARER les dépens de la présente instance, frais privilégiés de la liquidation judiciaire.

Maître [S] rappelle que le montant du passif est de 1 698 207,82€ et se compose essentiellement de la créance bancaire déclarée pour un montant de 1 578 764,34€.

Il soutient qu'il existe en l'espèce un ensemble concordant d'indices caractérisant au sens de la jurisprudence de la cour de cassation l'existence de relations financières anormales entre la SARL LE BELEVEDERE et Madame [R] [H].

Il expose:

-que Madame [R] [H], gérante et associée majoritaire au sein de la SARL LE BELVEDERE est également bailleur des locaux sis [Adresse 2] exploités par la société LE BELEVEDERE.

-que le bail commercial conclu entre Madame [R] [H] et la SARL LE BELEVEDERE en date du 01/09/2011 stipulait un loyer mensuel de 750 HT, outre les charges, que la SARL LE BELVEDERE n'a, au vu des éléments comptables et bancaires transmis, jamais réglés et que Madame [H] n'a jamais tenté de recouvrer

-que Madame [H] n'a d'ailleurs pas déclaré sa créance au titre des loyers et charges impayés dans le cadre de la procédure de liquidation judiciaire

-que la SARL LE BELVEDERE a souscrit deux prêts de 900 000€ et 210 000€ dont l'objet était respectivement le financement de travaux de réhabilitation d'un hôtel en logements étudiants et le financement de travaux de rénovation d'un hôtel en résidence hôtelière; que ces travaux supportés en totalité par le preneur soit la société LE BELEVEDERE ont inévitablement profité à la propriétaire des murs en l'occurrence Madame [H]

-que par ailleurs le bilan ne fait apparaître aucun actif mobilier alors que la SARL LE BELEVEDERE proposait à la location des studios meublés dont la rénovation et l'aménagement ont été financés par lesdits prêts

Maître [S] fait valoir que ces différents faits et actes sont de nature à révéler les relations financières anormales entre la SARL LE BELVEDERE et Madame [R] [H] au détriment de la SARL LE BELEVEDERE et de ces créanciers et constituent des éléments incontestables de confusion des patrimoines.

Il ajoute que les moyens soulevés par les appelants et qui sont identiques à ceux soutenus en devant le tribunal de commerce ne remettent pas en cause le caractère anormal des relations financières entre les parties.

Par avis en date 12 janvier 2022, le Ministère public a conclu à la confirmation en toutes ses dispositions du jugement querellé.

L'ordonnance de clôture a été rendue le 27 janvier 2022 et l'affaire plaidée à l'audience du 23 février 2022.

Le 28 février 2022, Maître GOMBERT, avocat de Maître [S] es qualité, a transmis par le RPVA une note en délibéré accompagné d'une pièce.

Le 2 mars 2022, par courrier transmis par le RPVA, Maître DI MARINO, avocat des appelants, a en a sollicité le rejet

MOTIFS DE LA DECISION

Sur la note en délibéré

Il résulte des dispositions de l'article 445 du code de procédure civile qu'après la clôture des débats les parties ne peuvent déposer aucune note à l'appui de leur observations si ce n'est en vue de répondre aux arguments développés par le ministère public ou à la demande du président dans les cas prévus aux articles 442 et 444; que l'espèce ne correspond à aucune des ces deux exceptions; que la note en délibéré déposée par l'intimé sera rejetée.

Sur le fond

Il résulte des dispositions combinées du second alinéa de l'article L621-2 et du I de l'article L641-1 du code de commerce que la liquidation judiciaire d'un débiteur peut être étendue à une ou plusieurs personnes en cas de confusion des patrimoines.

La confusion des patrimoines s'entend de l'imbrication inextricable des comptes et/ou de relations financières anormales notamment caractérisées par un mélange patrimonial et par un déséquilibre patrimonial significatif tendant à une absence de contrepartie.

Il a été en l'espèce retenu l'inaction de Madame [H] qui, en sa qualité de bailleur, n'a pas recouvré les loyers et charges de sa locataire ni déclaré de créance à ce titre ainsi que l'absence d'actif mobilier figurant au bilan.

Il n'est pas en l'espèce contesté que les logements construits dans les locaux de l'hôtel ont été, suite à des malfaçons, rendus impropres à la location.

Il convient par ailleurs de relever que l'immeuble a été vendu et que la créance du CREDIT MUTUEL a été intégralement soldée.

Dans ces conditions, il y a lieu de considérer que les éléments retenus qui sont justifiés par les circonstances, ne procèdent pas d'une volonté systématique et n'ont pas porté atteinte aux intérêts de la SARL LE BELEVEDERE, sont insuffisants à caractériser la confusion des patrimoines.

Il convient en conséquence d'infirmer en toutes ses dispositions le jugement du tribunal de commerce d'Aix en Provence du 23 mars 2021 ayant constaté la confusion des patrimoines entre la SARL LE BELVEDERE et Madame [H],et prononcé l'extension de la procédure de la liquidation judiciaire de de la SARL BELVEDERE à Madame [R] [H].

PAR CES MOTIFS

La Cour statuant publiquement, par arrêt contradictoire et mis à disposition au greffe

REJETTE la note en délibéré et la pièce annexée produites le 28 février 2022 par Maître GOMBERT, avocat de Maître [S] es qualité

INFIRME en toutes ses dispositions le jugement rendu par le tribunal de commerce d'AIX EN PROVENCE le 23 mars 2021

Statuant à nouveau

DEBOUTE Maître [S] es qualité de liquidateur judiciaire de la SARL LE BELVEDERE de sa demande

CONDAMNE Maître [S] es qualité de liquidateur judiciaire de la SARL LE BELVEDERE aux dépens.

LA GREFFIERE,LA PRESIDENTE,


Synthèse
Tribunal : Cour d'appel d'Aix-en-Provence
Formation : Chambre 3-2
Numéro d'arrêt : 21/04789
Date de la décision : 12/05/2022

Origine de la décision
Date de l'import : 26/03/2024
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.appel;arret;2022-05-12;21.04789 ?
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