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11/05/2022 | FRANCE | N°19/05917

France | France, Cour d'appel d'Aix-en-Provence, Chambre 1-8, 11 mai 2022, 19/05917


COUR D'APPEL D'AIX-EN-PROVENCE

Chambre 1-8



ARRÊT AU FOND

DU 11 MAI 2022



N° 2022/ 230







N° RG 19/05917



N° Portalis DBVB-V-B7D-BEDGH







[X] [C]



[V] [P] épouse [C]





C/



SA BNP PARIBAS PERSONAL FINANCE











































Copie exécutoire délivrée

le :

à :





Me Julie FEHLMANN



Me Laurence DE SANTI









Décision déférée à la Cour :



Jugement du Tribunal d'Instance de CANNES en date du 14 Février 2019 enregistrée au répertoire général sous le n° 11-18-947.





APPELANTS



Monsieur [X] [C]

né le 10 Mai 1942 à PERPIGNAN (66), demeurant 26 boulevard du Midi Louise Moreau 06150 C...

COUR D'APPEL D'AIX-EN-PROVENCE

Chambre 1-8

ARRÊT AU FOND

DU 11 MAI 2022

N° 2022/ 230

N° RG 19/05917

N° Portalis DBVB-V-B7D-BEDGH

[X] [C]

[V] [P] épouse [C]

C/

SA BNP PARIBAS PERSONAL FINANCE

Copie exécutoire délivrée

le :

à :

Me Julie FEHLMANN

Me Laurence DE SANTI

Décision déférée à la Cour :

Jugement du Tribunal d'Instance de CANNES en date du 14 Février 2019 enregistrée au répertoire général sous le n° 11-18-947.

APPELANTS

Monsieur [X] [C]

né le 10 Mai 1942 à PERPIGNAN (66), demeurant 26 boulevard du Midi Louise Moreau 06150 CANNES LA BOCCA

Madame [V] [P] épouse [C]

née le 08 Mai 1941 à SAINT CLOUD, demeurant 26 Boulevard du Midi Louise Moreau 06150 CANNES LA BOCCA

représentée par Me Julie FEHLMANN de la SELARL LEGIS-CONSEILS, avocat au barreau de GRASSE

INTIMEE

SA BNP PARIBAS PERSONAL FINANCE

Agissant poursuite et diligence de son représentant légal en exercice domicilié en cette qualité au siège sis 1 Boulevard Haussmann 75009 PARIS

représentée par Me Laurence DE SANTI de la SCP DRUJON D'ASTROS & ASSOCIES, avocat au barreau d'AIX-EN-PROVENCE, substituée par Me Manon CHAMPEAUX, avocat au barreau d'AIX EN PROVENCE

*-*-*-*-*

COMPOSITION DE LA COUR

En application des dispositions des articles 805 et 907 du code de procédure civile, l'affaire a été débattue le 15 Février 2022, en audience publique, les avocats ne s'y étant pas opposés, devant Monsieur Jean-Paul PATRIARCHE, Conseiller, chargé du rapport.

Ce magistrat a rendu compte des plaidoiries dans le délibéré de la Cour, composée de :

Monsieur Philippe COULANGE, Président

Madame Céline ROBIN-KARRER, Conseillère

Monsieur Jean-Paul PATRIARCHE, Conseiller

Greffier lors des débats : Mme Maria FREDON.

Les parties ont été avisées que le prononcé de la décision aurait lieu par mise à disposition au greffe le 11 Mai 2022.

ARRÊT

Contradictoire, prononcé par mise à disposition au greffe le 11 Mai 2022, signé par Monsieur Philippe COULANGE, Président et Madame Maria FREDON, greffière auquel la minute de la décision a été remise par le magistrat signataire.

***

EXPOSÉ DES FAITS ET DE LA PROCÉDURE ANTÉRIEURE

Suivant offre préalable acceptée sous seing privé le 17 novembre 2011, la BANQUE SYGMA a consenti aux époux [X] [C] et [V] [P] un prêt dit de regroupement de crédits d'un montant de 79.355 euros , remboursable en 144 mensualités suivant un taux d'intérêt nominal annuel de 8,46 %.

Le prêteur a entendu se prévaloir de la déchéance du terme par lettres recommandées du 20 novembre 2017 en raison de la défaillance des emprunteurs, le premier incident de paiement remontant au 5 février 2017.

Par acte du 4 juillet 2018, la société BNP PARIBAS PERSONAL FINANCE, venant aux droits de la BANQUE SYGMA par l'effet d'une opération de fusion absorption, a fait assigner les époux [C] à comparaître devant le tribunal d'instance de Cannes pour les entendre condamner à lui payer le solde du prêt.

Les défendeurs, comparant en personne, ont reconnu le principe de leur dette tout en discutant le montant des sommes réclamées, et sollicité l'octroi de délais de paiement.

Par jugement rendu le 14 février 2019, le tribunal a :

- condamné les époux [C] à payer à la banque la somme de 56.370,84 euros augmentée des intérêts au taux contractuel à compter du 20 novembre 2017, après avoir réduit à un euro le montant de la clause pénale,

- accordé aux débiteurs la faculté de se libérer en 24 mensualités,

- condamné les défendeurs aux dépens,

- et ordonné l'exécution provisoire de sa décision.

Les époux [C], qui ont reçu signification de ce jugement le 11 mars 2019, en ont relevé appel par déclaration adressée le 10 avril 2019 au greffe de la cour.

MOYENS ET PRÉTENTIONS DES PARTIES

Aux termes de leurs conclusions récapitulatives notifiées le 3 janvier 2020, les époux [X] [C] et [V] [P] font valoir que la banque a manqué à son obligation de conseil et de mise en garde en leur accordant un crédit qui représentait un taux d'endettement de 37 % et les engageait au delà de leur quatre-vingtième anniversaire.

Ils ajoutent que le prêteur a également manqué de leur délivrer les informations pré-contractuelles prévues par les articles L 312-12 et suivants du code de la consommation, et omis de vérifier leur solvabilité en application de l'article L 312-16 du même code.

Ils demandent à la cour :

- d'infirmer le jugement entrepris,

- à titre principal, de prononcer la nullité du contrat de crédit et de condamner la banque à leur payer une somme de 5.000 euros à titre de dommages-intérêts en réparation de la perte de chance de ne pas contracter,

- à titre subsidiaire, de prononcer la déchéance du prêteur du droit aux intérêts contractuels en application de l'article L 341-1 du code de la consommation, de réduire le montant de la clause pénale à un euro, et de leur accorder des délais de paiement sur 24 mois,

- et en tout état de cause de condamner l'intimée aux entiers dépens, ainsi qu'au paiement d'une somme de 5.000 euros en application de l'article 700 du code de procédure civile.

Par conclusions en réplique notifiées le 12 mars 2020, la société BNP PARIBAS PERSONAL FINANCE soutient pour sa part :

- que les prétentions des appelants sont doublement irrecevables, en premier lieu en raison de l'expiration du délai quinquennal de prescription ayant couru à compter de la date de la conclusion du contrat, et en second lieu en vertu de l'article 564 du code de procédure civile prohibant les demandes nouvelles en cause d'appel,

- que la demande d'annulation du contrat ne repose sur aucun fondement juridique,

- qu'elle a pleinement respecté ses obligations contractuelles, et qu'elle n'a pas aggravé l'endettement des emprunteurs, dès lors que le prêt avait pour objet un regroupement de crédits antérieurs et permettait de réduire la charge de remboursement mensuelle,

- et qu'enfin les débiteurs ne démontrent pas qu'ils seraient en mesure de respecter un échéancier de paiement.

Elle demande à cour :

- de débouter les appelants de l'intégralité de leurs prétentions,

- de confirmer le jugement entrepris, sauf en ce qu'il a réduit le montant de la clause pénale,

- de condamner à ce titre les époux [C] à lui verser en sus la somme de 4.041,82 euros,

- et de les condamner en outre aux entiers dépens, ainsi qu'au paiement d'une somme de 1.500 euros en application de l'article 700 du code de procédure civile.

DISCUSSION

Sur la fin de non recevoir tirée de l'article 564 du code de procédure civile :

En vertu de ce texte, les parties ne peuvent soumettre à la cour de nouvelles prétentions, si ce n'est pour opposer compensation, faire écarter les prétentions adverses ou faire juger les questions nées de l'intervention d'un tiers, ou de la survenance ou de la révélation d'un fait.

Le moyen tiré de la nullité d'un acte sur lequel est fondée une demande en paiement constitue une défense au fond qui peut être proposée en tout état de cause.

En revanche la mise en cause de la responsabilité contractuelle du prêteur dans le cadre de l'octroi du crédit constitue une demande nouvelle en ce qu'elle ne tend pas uniquement à faire écarter les prétentions adverses, et vise non pas à opposer compensation avec une créance déjà née, mais à créer les conditions nécessaires à une compensation future.

Sur la fin de non recevoir tirée de la prescription :

La prescription extinctive des actions personnelles ou mobilières édictée par l'article 2224 du code civil ne peut être invoquée pour faire échec à une exception de nullité opposée à la demande principale.

Sur la validité du contrat de prêt :

C'est à bon droit que la banque fait valoir que l'exception de nullité du contrat ne repose sur aucun fondement juridique. En effet le seul grief articulé par les appelants repose sur un manquement du prêteur à ses obligations de conseil et de mise en garde, alors qu'une telle faute, à la supposer établie, ne peut entraîner la nullité de la convention.

Sur la déchéance du prêteur du droit aux intérêts contractuels :

Ce moyen est recevable en application des principes susvisés.

Il convient cependant de relever que les appelants invoquent les dispositions du code de la consommation dans leur rédaction issue de l'ordonnance n° 2016-301 du 14 mars 2016, alors qu'il doit être fait application des dispositions en vigueur à la date de la souscription du contrat litigieux, à savoir :

- les anciens articles L 311-6 et 311-7 relatifs à l'information pré-contractuelle de l'emprunteur,

- les anciens articles L 311-8 à 311-10-1 relatifs à l'évaluation de la solvabilité de celui-ci,

- et l'ancien article L 311-48 sanctionnant l'inobservation des dispositions qui précèdent par la déchéance du prêteur du droit aux intérêts conventionnels.

Or les pièces produites aux débats établissent que la banque a respecté les obligations découlant de ces textes :

- elle a consulté le fichier national des incidents de paiement à la date de la souscription du contrat, le résultat ayant été négatif pour chacun des deux époux,

- elle s'est assurée de la solvabilité de ses clients au moyen d'une fiche de dialogue recensant leurs revenus et leurs charges, à partir des informations fournies par les emprunteurs eux-mêmes,

- et elle leur a remis une fiche récapitulant les informations précontractuelles normalisées en matière de crédit à la consommation.

Il apparaît également que le contrat proposé était adapté aux besoins des époux [C], dès lors qu'il s'agissait d'un rachat de crédits qui, en contrepartie d'un allongement de la durée d'amortissement, leur permettait de réduire de plus de la moitié la charge de remboursement mensuelle.

Aucune déchéance du droit aux intérêts n'est donc encourue.

Sur la réduction de la clause pénale :

C'est par de justes motifs, que la cour adopte, que le premier juge a réduit à un euro le montant de la clause pénale stipulée au contrat en application de l'article 1152 (ancien) du code civil, en relevant que le prêt avait été consenti à un taux particulièrement rémunérateur pour la banque et n'avait fait l'objet d'aucun incident de paiement durant près de cinq années.

Sur la demande de délais de paiement

Aux termes du dispositif des dernières conclusions de la banque, la cour n'est pas saisie d'une demande de réformation du jugement en ce qu'il a accordé aux débiteurs des délais de paiement sur 24 mois, étant précisé que la décision est assortie de l'exécution provisoire et prévoit une clause de déchéance en cas de non respect de cet échéancier.

PAR CES MOTIFS

La cour, statuant par arrêt contradictoire,

Déclare irrecevable la demande des époux [C] visant à mettre en cause la responsabilité contractuelle du prêteur dans le cadre de l'octroi du crédit,

Déboute les époux [C] de leurs moyens de défense fondés sur la nullité du contrat et sur la déchéance du prêteur du droit aux intérêts contractuels,

Confirme en conséquence le jugement entrepris en toutes ses dispositions,

Y ajoutant, condamne les époux [C] aux dépens d'appel, ainsi qu'au paiement d'une somme de 1.500 euros au titre des frais irrépétibles exposés par l'intimée.

LA GREFFIERELE PRESIDENT


Synthèse
Tribunal : Cour d'appel d'Aix-en-Provence
Formation : Chambre 1-8
Numéro d'arrêt : 19/05917
Date de la décision : 11/05/2022

Origine de la décision
Date de l'import : 26/03/2024
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.appel;arret;2022-05-11;19.05917 ?
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