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06/05/2022 | FRANCE | N°18/18829

France | France, Cour d'appel d'Aix-en-Provence, Chambre 4-3, 06 mai 2022, 18/18829


COUR D'APPEL D'AIX-EN-PROVENCE

Chambre 4-3



ARRÊT AU FOND



DU 06 MAI 2022



N° 2022/ 109



RG 18/18829

N° Portalis DBVB-V-B7C-BDNCD







[C] [B]





C/



Société ISS HYGIENE ET PREVENTION

























Copie exécutoire délivrée le 06 mai 2022 à :



-Me Steve DOUDET, avocat au barreau de MARSEILLE



- Me Marianne COLLIGNON-

TROCME, avocat au

barreau de MARSEILLE



























Décision déférée à la Cour :



Jugement du Conseil de Prud'hommes - Formation paritaire de MARSEILLE en date du 30 Octobre 2018 enregistré au répertoire général sous le n° 16/02846.





APPELANT



Monsieur [C] [B], demeurant [...

COUR D'APPEL D'AIX-EN-PROVENCE

Chambre 4-3

ARRÊT AU FOND

DU 06 MAI 2022

N° 2022/ 109

RG 18/18829

N° Portalis DBVB-V-B7C-BDNCD

[C] [B]

C/

Société ISS HYGIENE ET PREVENTION

Copie exécutoire délivrée le 06 mai 2022 à :

-Me Steve DOUDET, avocat au barreau de MARSEILLE

- Me Marianne COLLIGNON-

TROCME, avocat au barreau de MARSEILLE

Décision déférée à la Cour :

Jugement du Conseil de Prud'hommes - Formation paritaire de MARSEILLE en date du 30 Octobre 2018 enregistré au répertoire général sous le n° 16/02846.

APPELANT

Monsieur [C] [B], demeurant [Adresse 1]

représenté par Me Steve DOUDET, avocat au barreau de MARSEILLE

INTIMEE

SAS SAPIAN, venant aux droits de la SASU ISS HYGIENE ET PREVENTION, demeurant [Adresse 2]

représentée par Me Marianne COLLIGNON-TROCME, avocat au barreau de MARSEILLE

*-*-*-*-*

COMPOSITION DE LA COUR

En application des dispositions des articles 804 et 805 du code de procédure civile, l'affaire a été débattue le 29 Mars 2022, en audience publique, les avocats ne s'y étant pas opposés, devant Madame Estelle DE REVEL, Conseiller, chargée du rapport, qui a fait un rapport oral à l'audience, avant les plaidoiries.

Ce magistrat a rendu compte des plaidoiries dans le délibéré de la cour, composée de :

Madame Pascale MARTIN, Président de Chambre

Madame Ghislaine POIRINE, Conseiller faisant fonction de Président

Madame Estelle DE REVEL, Conseiller

Greffier lors des débats : Madame Florence ALLEMANN-FAGNI.

Les parties ont été avisées que le prononcé de la décision aurait lieu par mise à disposition au greffe le 06 Mai 2022.

ARRÊT

CONTRADICTOIRE,

Prononcé par mise à disposition au greffe le 06 Mai 2022

Signé par Madame Pascale MARTIN, Président de Chambre et Madame Florence ALLEMANN-FAGNI, Greffier, auquel la minute de la décision a été remise par le magistrat signataire.

***

EXPOSE DU LITIGE

M. [C] [B] a été engagé par la SAS Sapian, anciennement dénommée ISS Hygiène et Prévention, en qualité de chef d'équipe, par contrat à durée indéterminée du 1er juin 2012.

Le 10 juin 2016, la société a convoqué le salarié à un entretien préalable à un éventuel licenciement fixé au 20 juin suivant.

Le 6 juillet 2016, le salarié a de nouveau été convoqué à un entretien préalable à un éventuel licenciement fixé au18 juillet 2016.

Le 3 août 2016, il s'est vu notifier un licenciement pour cause réelle et sérieuse.

Contestant son licenciement, le salarié a saisi le conseil de prud'hommes de Marseille le 22 décembre 2016.

Par jugement du 30 octobre 2018, la juridiction prud'homale a rejeté l'ensemble de ses demandes et l'a condamné aux dépens.

Le 29 novembre 2018, le salarié a relevé appel de la décision.

Aux termes de ses dernières conclusions notifiées par voie électronique le 10 mars 2022, il demande à la cour de :

'Juger que le licenciement du 3 août 2016 ne repose pas sur une cause réelle et sérieuse de licenciement,

En conséquence,

'Infirmer le Jugement entrepris,

Puis, statuant à nouveau,

Condamner la SAS SAPIAN, anciennement dénommée SASU HYGIENE & PREVENTION à verser à Monsieur [B] les sommes suivantes :

Indemnité pour licenciement sans cause réelle et sérieuse: 45 000 €

Rappel de jours RTT depuis 2014 : 4 699, 74 €

Congés payés incidents : 469, 97 €

Indemnité sur le fondement de l'article 700 du Code de procédure civile : 2 500 €

Entiers dépens

Intérêt au taux légal

Capitalisation des intérêts'.

Aux termes de ses dernières conclusions notifiées par voie électronique le 24 mai 2019, la SASU ISS Hygiène et prévention demande à la cour de :

- CONFIRMER le jugement entrepris en ce qu'il a :

CONSTATER que le licenciement de Monsieur [B] repose sur une cause réelle et sérieuse,

DEBOUTER Monsieur [B] de toutes ses demandes,

CONDAMNER Monsieur [B] aux entiers dépens.

Statuant à nouveau :

- CONSTATER que le licenciement notifié à Monsieur [B] repose sur une cause réelle et sérieuse,

- CONSTATER que Monsieur [B] a été intégralement rempli de ses droits à jours de RTT,

En conséquence,

- DEBOUTER Monsieur [B] de l'intégralité de ses demandes,

A titre reconventionnel,

- CONDAMNER Monsieur [B] au versement de la somme de 3.000 € sur le fondement de l'article 700 du CPC et aux entiers dépens.

Pour l'exposé plus détaillé des prétentions et moyens des parties, il sera renvoyé, conformément à l'article 455 du code de procédure civile, aux conclusions des parties.

MOTIFS DE L'ARRÊT

A titre liminaire, la cour rappelle qu'en application des dispositions de l'article 954 du code de procédure civile « la cour ne statue que sur les prétentions énoncées au dispositif » et que les 'dire et juger' et les 'constater' ne sont pas des prétentions en ce que ces demandes ne confèrent pas de droit à la partie qui les requiert hormis les cas prévus par la loi ; en conséquence, la cour ne statuera pas sur celles-ci, qui ne sont en réalité que le rappel des moyens invoqués .

Sur les RTT

Le salarié réclame un rappel de jours de RTT basé sur 22 jours par an en faisant valoir que l'employeur en a toujours refusé le paiement. Il produit un procès-verbal du 1er décembre 2016 du comité d'entreprise.

La société soutient que les jours de RTT sollicités par M. [B] ne sont pas dûs car celui-ci fait partie du personnel de production et se voit attribuer à ce titre, 6,5 jours ouvrés de réduction de temps de travail sur la période de référence de 12 mois.

Il ressort de la note interne de la direction des ressources humaines intitulée 'Point sur les règles en matière de durée et d'organisation du travail (pièce 37) que le salarié n'a droit qu'à 6,5 jours ouvrés au titre des RTT comme indiqué par l'employeur.

Il convient par conséquent de rejeter sa demande.

Sur le licenciement

Le salarié reproche à l'employeur de l'avoir licencié pour motif disciplinaire plus d'un mois après le premier entretien préalable alors qu'aucun fait nouveau ne justifiait un second entretien.

Il soutient ensuite qu'il ne pouvait être licencié au regard de son ancienneté et de ses qualités professionnelles reconnues durant tout son parcours au sein de la société.

Il conteste enfin l'ensemble des griefs évoqués dans la lettre de licenciement et affirme que le véritable motif de la rupture est économique au vu des difficultés de l'entreprise.

L'employeur réplique que les manquements reprochés dans la lettre de licenciement sont parfaitement caractérisés et constituent une insuffisance professionnelle. Il expose avoir, à plusieurs reprises, demandé au salarié de se ressaisir et ajoute que ce dernier a pu bénéficier d'un accompagnement de sa hiérarchie.

Il conteste l'existence d'un licenciement économique déguisé.

L'employeur, à condition de respecter les règles de procédure applicables à chaque cause de licenciement, peut invoquer dans la lettre de licenciement des motifs différents de rupture inhérents à la personne du salarié, dès lors qu'ils procèdent de faits distincts.

L'employeur qui prend l'initiative de rompre le contrat de travail doit énoncer son ou ses motifs dans la lettre de licenciement qui fixe les limites du litige. Il incombe à l'employeur d'alléguer des faits précis sur lesquels il fonde le licenciement.

L'insuffisance professionnelle se définit comme l'incapacité objective et durable d'un salarié à exécuter de façon satisfaisante un emploi correspondant à sa qualification. L'appréciation de cette insuffisance professionnelle relève du pouvoir de direction de l'employeur mais ce dernier doit, en tout état de cause, invoquer des faits objectifs précis et vérifiables imputables au salarié pour justifier le licenciement.

Par ailleurs, le juge doit contrôler le respect des dispositions de l'article L. 6321-1 du code du travail qui prévoient que l'employeur doit assurer l'adaptation de ses salariés à leurs poste de travail et veiller au maintien de leur capacité à occuper un emploi compte tenu de l'évolution des technologies, des organisations et des emplois.

La lettre de licenciement est libellée comme suit:

« Vous avez été embauché par la Société en contrat à durée indéterminée à compter du 1er juin 2012 en qualité dernière de Chargé d'Affaires Protection Incendie. A ce titre, vous devez garantir le bon fonctionnement du service Protection Incendie de l'agence de [Localité 3], assurer la charge de travail de votre équipe constituée de 4 techniciens et atteindre les objectifs fixés par votre hiérarchie.

Nous sommes au regret de constater que vous n'assumez pas les missions qui sont les vôtres avec tout le sérieux et le professionnalisme que nous sommes en droit d'attendre. Nous avons constaté de votre part:

1) Une réelle carence managériale :

Depuis le début de l'année, vous avez eu de nombreux entretiens avec vos responsables hiérarchiques au cours desquels il vous a régulièrement été reproché vos carences managériales. En effet, vous ne gérez pas le quotidien de vos équipes. Notamment, nous avons dû prendre le relai sur de nombreux sujets qui relevaient pourtant de votre responsabilité:

- la gestion des congés : à plusieurs reprises, vous avez accepté la prise de congés simultanée de vos équipes sans vous soucier de la continuité de l'activité;

- de la même manière, nous vous reprochons de ne pas prendre en compte les besoins de votre service puisque vous n'avez pas recruté de technicien en CDD à fin juin pour alléger et mieux partager la charge de travail de votre équipe. Votre seule réponse a consisté à nier votre mission et à vous retrancher derrière de prétendues tâches administratives trop nombreuses;

- l'accompagnement terrain : vous n'effectuez pas de contrôle de chantiers et encore moins ne rédigez les rapports de vérification;

- l'accueil sécurité : alors qu'il est prévu pour chaque nouveau collaborateur un accueil sécurité conformément à la procédure n°10 APSAD, nous sommes au regret de constater que vous faites l'impasse sur cette dernière faisant courir par la même des risques à nos collaborateurs. Nous vous rappelons que l'obligation de sécurité de nos collaborateurs est un objectif de résultat;

- en outre, malgré nos multiples relances, vous n'avez toujours pas organisé la signature des avenants aux contrats de travail de vos techniciens prévoyant un simple changement d'intitulé de poste confirmant leur passage de technicien maîtrise des nuisibles à technicien protection incendie. Là encore, en agissant de la sorte, vous faites courir des risques de contentieux à la société. Vous n'apportez aucune raison valable de ne pas réaliser cette tâche qui relève pourtant de vos fonctions. Surtout, vous savez pertinemment que ce changement de fonction est essentiel pour notre agence car il est imposé pour le maintien de la certification APSAS;

- lors de vos nombreux échanges, Monsieur [H] vous a également fait remarquer que les feuilles de pointage des techniciens de votre service n'étaient pas conformes aux règles internes de l'entreprise puisqu'il manquait systématiquement les signatures des techniciens. A cet égard, vos justifications ne sont pas satisfaisantes puisque vous considérez que vous avez l'accord verbal de vos techniciens pour signer les bons d'intervention et que cela est suffisant. A ce jour, les feuilles de reporting hebdomadaire font apparaître votre signature accompagnée de la mention 'accord par téléphone', ou simplement votre signature, et en aucun cas la signature de vos techniciens, ce qui est contraire aux règles fixées par l'entreprise et ne nous protège aucunement en cas de litige;

- enfin, malgré nos demandes réitérées, vous faites l'impasse sur les rituels managériaux puisque vous n'avez réalisé qu'une seule réunion de service en 2015 et seulement 2 en 2016, lesquelles n'ont par ailleurs pas donné lieu à compte-rendu, ni émargement.

Cette situation est regrettable, puisque malgré un réel accompagnement de M. [S] [G], directeur technique protection incendies des formations (formation APSAD en septembre 2013 et en août 2014, puis en février 2015) tout au long de votre parcours au sein de notre entreprise, vous n'arrivez toujours pas à remplir vos fonctions avec le sérieux que nous sommes en droit d'attendre.

Nous considérons qu'un tel état d'esprit ne peut être toléré de la part d'un salarié doté de fonctions d'encadrement.

2) Non-respect des directives de votre responsable hiérarchique :

Nous vous reprochons votre refus de suivre les directives imposées par votre responsable hiérarchique.

Notamment, il vous a été demandé d'opérer un suivi de l'activité Protection incendie en recensant de manière précise les actions correctives engagées pour chaque sujet. Or, fin mai 2016, nous constatons que le tableau n'a pas été renseigné et ce à quelques jours de l'audit de certification APSAD plaçant l'agence dans une situation extrêmement délicate. Nous considérons que cette négligence est fautive et que rien n'est en mesure de la justifier;

Lorsque votre responsable hiérarchique vous a fait remarquer votre faute, vous lui avez répondu avec beaucoup d'aplomb qu'à partir de 17h vous n'étiez plus productif et que vous n'arriviez plus à travailler. Vous avez fait preuve de désinvolture en ajoutant que vous pourriez rester à l'agence plus longtemps, mais que vous joueriez sur votre téléphone portable.

Plus grave, alors que nous vous avons refusé un RTT le vendredi 3 juin compte tenu de votre retard dans la réalisation de vos plannings, vous avez fait preuve d'un état d'esprit déplorable en quittant votre poste à 15h et ce malgré nos consignes inverses. Nous considérons qu'il s'agit là d'un abandon de poste.

Le 7 juin 2016, M. [R], directeur général, présent ce jour-là à l'agence, vous demande en personne de remplir votre tableau d'activité du mois de juin pour avoir une meilleure visibilité économique et financière sur les semaines à venir. En effet, ce dernier était incomplet puisqu'il faisait apparaître une planification faible et un chiffre d'affaires journalier nécessairement en deça des ratios attendus. Il vous a également été demandé de mettre les cadences de travail aux normes nationales appliquées dans toutes les agences de France. Vous n'avez pas respecté cette consigne faisant preuve d'une insubordination caractérisée.

3) Absence de suivi de vos clients et de leurs réclamations :

Nous avons constaté de sérieuses lacunes dans le suivi de vos clients et des interventions gérées par votre service:

Il est constaté en effet que soit vous ne remplissez pas correctement les bons d'intervention ce qui génère des retards de facturation soit vous ne terminez pas vos interventions et laissez les bons non clôturés ce qui en plus de générer des retards de facturation engendre le mécontentement légitime de nos clients et entame notre image de marque.

A titre d'exemple, le client Grand Delta passe une commande n° en date du 1er mars 2016, pour changer du matériel de lutte contre les incendies et mettre en place des moyens supplémentaires. L'intervention de votre service se déroule le 19 avril soit plus d'un mois après la commande mais votre équipe ne termine pas le travail et, à ce jour, la fin des travaux n'est toujours pas reprogrammée soit un délai supplémentaire de 3 mois. Le commercial du secteur a régulièrement des relances du client très insatisfait de cette situation. Non seulement nous n'avons toujours pas facturé cette prestation mais surtout en agissant de la sorte, vous faites courir des risques importants à notre société notamment en cas d'incendies sur cette [Adresse 4].

De la même façon, Grand Delta Habitat nous a signalé que depuis 2 ans des extincteurs ont été vandalisés dans le garage souterrain et qu'ils étaient vides et ce alors que vous avez réalisé des prestations de vérification et contrôle des équipements sur place sur les 2 dernières années. En d'autres termes, les prestations n'ont pas été réalisées. Si vous faisiez régulièrement des contrôles de chantiers et assuriez correctement le suivi de vos clients, une telle situation ne vous aurait pas échappé et vous auriez procédé à sa régularisation. Toutefois, votre négligence est de nouveau avérée puisqu'aucune intervention n'est programmée dans les plannings. Là encore, le risque pénal pour l'entreprise est important en cas d'incendie.

Vos lacunes en matière de suivi clients sont manifestes puisque nous constatons que 5 réclamations clients sont toujours non soldées à ce jour, que certaines sont ouvertes depuis plus de 3 mois, et que vos clients attendent toujours que vous puissiez satisfaire les obligations contractuelles.

Vos temps de réaction sont anormalement longs pour satisfaire nos clients. Par exemple, dans le cadre de notre contrat conclu en décembre avec notre client Ares X Pert, le lundi 25 avril 2016, vous avez envoyé à ce client les plans d'évacuation à valider pour finaliser la prestation. Au final, notre client a dû attendre près de 5 mois pour recevoir les plans demandés. Pire, il nous a fait remarquer dernièrement qu'il manquait toujours les plans pour les parties communes, ce qui est inadmissible.

Dans le même ordre d'idée, le 29 mai 2015, une commande a été validée par Foncia Agmo Parc des Cévennes pour une prestation d'un montant de 1 581,91 euros. Depuis août 2015, cette prestation fait l'objet de rappels de la part du client. Ce n'est qu'après de nombreuses relances que le 4 mai 2016, vous êtes intervenu pour achever la prestation soit près d'un an après ouverture de la commande. Cependant, après l'intervention, vous avez confirmé qu'il manquait toujours les signalétiques ascenseurs, en rupture de stock chez les fournisseurs selon vos dires. Un an après la facturation du client, il n'est pas normal que le contrat n'ait toujours pas été finalisé, d'autant plus qu'en septembre, le travail n'avait toujours pas été terminé mais facturé car les bons d'intervention ont été remontés par votre service à la comptabilité.

Vos manquements ont de graves conséquences puisque cette situation provoque des dysfonctionnements importants dans l'agence et entraîne la mobilisation du personnel d'exploitation et une baisse significative de la marge chantier.

De plus, votre attitude nuit gravement aux relations commerciales que nous entretenons avec nos clients et à l'image de marque de notre société et de notre agence.

4) Carence dans le suivi et la préparation de la certification APSAD

Lors de nos nombreux entretiens, nous vous avons demandé d'améliorer et d'adapter votre comportement.

A titre d'exemple, le 18 mai 2016, nous nous sommes rencontrés en présence de M. [O] [M], directeur de région, principalement en vue de la préparation de l'audit de certification APSAD. Lors de nos rencontres, vous vous êtes engagé à vous mettre rapidement à jour, mais dans les faits rien n'est venu nous rassurer quant à votre implication et votre sérieux dans ce dossier.

En effet, alors que vous saviez que de nombreuses non-conformités apparaissaient dans les comptes-rendus internes réalisés par Monsieur [G], directeur technique protection incendie, en date du 26 et 29 avril 2016, comptant pour le renouvellement de la certification, vous n'avez pas pris la peine de la corriger. En effet, quelques jours avant l'audit de certification, nous avons constaté que de nombreuses non conformités n'étaient toujours pas levées et compromettaient le renouvellement de la certification de l'agence. A titre d'illustration, le problème d'étiquettes étalonnage, déjà existant en 2014, n'était toujours pas résolu fin mai, alors que l'audit de certification avait lieu le 1er juin 2016 et que la réglementation nous impose un contrôle tous les 6 mois.

Malgré nos inquiétudes et nos demandes réitérées, le constat de vos lacunes est accablant puisque le compte rendu de l'audit interne du 31 mai 2016 conclut que les dossiers ne sont pas suivis et mis à jour dans le respect des règles, notamment du référentiel APSAD R4 et les notes de services internes.

Pire, Monsieur [G] a été contraint de se déplacer à [Localité 3], les 30 et 31 mai 2016, afin de mettre lui-même les éléments à jour pour être en conformité pour l'audit APSAD du 1er juin 2016.

Force est de constater que vous avez été entièrement passif entre les préparations des audits et la certification. Vous avez fait preuve de négligence et de désintérêt pour les actions à mener pour améliorer l'audit interne et obtenir la certification APSAD. A titre d'exemple, dans le compte-rendu du 31 mai, l'action 'les points de rechargement à eau et à poudre doivent être libres et identifiés' était toujours en cours, avec une date limite au 29 mai. L'action 'programmer les visites de sites qui seront susceptibles d'être audité' était dans ce compte-rendu toujours 'à faire', avec un délai limite au 1er mars.

Nous vous rappelons que la perte de certification APSAD aurait eu des conséquences graves pour l'agence avec à terme la perte d'une certaine clientèle et des conséquences sur l'emploi.

Au cours de notre entretien, alors même que l'entretien était l'occasion de nous faire part de vos observations, vous n'avez pas saisi l'opportunité de vous expliquer et avez préféré nous dire que vous répondriez par courrier recommandé à nos reproches.

Pour toutes ces raisons évoquées, notre collaboration ne peut se poursuivre.

La présente lettre vaut en conséquence notification de votre licenciement pour cause réelle et sérieuse.»

Il ressort de cette lettre qu'outre des griefs fondés sur des insuffisances professionnelles, la société reproche au salarié un non respect des directives de son responsable hiérarchique faisant état d'un abandon de poste et d'une insubordination.

S'agissant de faits de nature disciplinaire, ils doivent obéir à des règles de procédure spécifiques.

Il ressort du courrier du salarié du 22 juin 2016 que lors du 1er entretien préalable qui s'est tenu le 20 juin 2016, le fait qualifié d'abandon de poste le 3 juin 2016 lui a déjà été reproché et, à cette occasion, il n'est pas établi qu'il ait été fait état d'un quelconque refus fautif du salarié de respecter les consignes que lui aurait donné son employeur le 7 juin.

La cour observe qu'il s'est écoulé plus d'un mois entre cet entretien préalable et la notification du licenciement intervenue le 3 août 2016, de sorte que le licenciement ne peut être fondé sur ces griefs de nature disciplinaire.

S'agissant de l'insuffisance professionnelle

La cour relève qu'aux termes de sa fiche de poste, le salarié doit assurer la mise en oeuvre des moyens humains pour répondre aux objectifs de développement de l'activité protection incendie dans une optique de satisfaction client et d'optimisation des coûts de production.

La cour retient, après analyse des pièces produites par la société (pièces 19, 1, 2, 3, 5, 30) qui ne sont pas utilement contredites par l'attestation de M. [P] versée par l'appelant, qu'il est bien justifié par l'employeur que M. [B]'a pas correctement géré les salariés de son équipe s'agissant de leur prise de congé, de la réalisation des plannings, du recrutement et de la signature des avenants, et ce, malgré des relances de son supérieur hiérarchique.

L'employeur justifie en outre des défaillances répétées du salarié dans la gestion et le suivi des dossiers, générant des lettres de mécontentement de clients et des mails de mise en garde et de relance adressés par son employeur (pièces 1, 3, 16, 17, 22, 23, 28, 15, 10, 12).

L'appelant indique, sans le justifier, qu'une grande partie de ces réclamations a été traitée, mais en reconnaît de fait l'existence et ne les explique ni par une surcharge de travail, ni par un manque de moyens. S'il affirme qu'il lui manquait une assistante, l'organigramme produit au dossier ainsi que sa fiche de poste démontrent que ces tâches lui incombaient et il ne verse pas d'élément relatif à des signalements qu'il aurait fait à son employeur sur des difficultés matérielles qu'il aurait rencontré dans la mise en oeuvre de ses missions.

Il n'est pas plus démontré qu'il aurait sollicité des formations qui lui auraient été refusées et qui avaient trait à ces missions.

S'agissant du défaut de suivi et de préparation de la certification APSAD, la carence du salarié est démontrée par les mails de relance concernant l'avancée des points d'amélioration suite à l'audit interne de février 2016 (pièces 18, 19, 36).

Outre les très nombreux courriels de mise en garde adressés au salarié et versés aux débats, l'employeur l'a convoqué le 20 juin 2016 à un premier entretien préalable auquel il a répondu par courrier du 22 juin suivant, sans que cela n'entraîne, en dépit de l'aide apportée par sa hiérarchie, une amélioration des performances du salarié, ou à tout le moins une attitude correctrice.

Le versement au salarié de primes exceptionnelles en août 2012, février 2013, juin 2014, avril 2015 est sans incidence sur l'existence de ces griefs, de même que son ancienneté.

Le grief d'insuffisance professionnelle est donc bien caractérisé.

Dès lors, le licenciement est bien fondé sur une cause réelle et sérieuse et le jugement entrepris doit en conséquence, être confirmé en ce qu'il a débouté le salarié de ses demandes liées à la rupture du contrat de travail.

Il sera enfin relevé que le salarié qui reproche à l'employeur d'avoir détourné la procédure de licenciement pour motif économique, doit en apporter la preuve.

Or, les bilans comptables produits ne suffisent pas à le démontrer, l'employeur justifiant avoir remplacé le salarié pour occuper son poste.

Sur les autres demandes

Il n'y a pas lieu de faire application des dispositions de l'article 700 du code de procédure civile.

M. [B] doit être condamné aux dépens d'appel.

PAR CES MOTIFS

La Cour,

Statuant par arrêt contradictoire, par mise à disposition au greffe, les parties en ayant été préalablement avisées dans les conditions prévues à l'article 450 du code de procédure civile, en matière prud'homale,

Confirme le jugement entrepris en toutes ses dispositions,

Y ajoutant,

Rejette l'ensemble des demandes de M. [C] [B],

Dit n'y avoir lieu à application de l'article 700 du code de procédure civile,

Condamne M. [B] aux dépens d'appel.

LE GREFFIERLE PRESIDENT


Synthèse
Tribunal : Cour d'appel d'Aix-en-Provence
Formation : Chambre 4-3
Numéro d'arrêt : 18/18829
Date de la décision : 06/05/2022

Origine de la décision
Date de l'import : 26/03/2024
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.appel;arret;2022-05-06;18.18829 ?
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