La jurisprudence francophone des Cours suprêmes


recherche avancée

06/05/2022 | FRANCE | N°18/18464

France | France, Cour d'appel d'Aix-en-Provence, Chambre 4-3, 06 mai 2022, 18/18464


COUR D'APPEL D'AIX-EN-PROVENCE

Chambre 4-3



ARRÊT AU FOND



DU 06 MAI 2022



N° 2022/ 108



RG 18/18464

N° Portalis DBVB-V-B7C-BDMFW







SAS COLLEGE OSTEOPATHIQUE PROVENCE AIX MARSEILLE





C/



[U] [O]

























Copie exécutoire délivrée le 6 mai 2022

à :





-Me Christian MAILLARD, avocat au barreau de MARSEILLE



- Me Odile LENZ

IANI, avocat au barreau de MARSEILLE























Décision déférée à la Cour :



Jugement du Conseil de Prud'hommes - Formation de départage de MARSEILLE en date du 14 Novembre 2018 enregistré au répertoire général sous le n° 17/01175.





APPELANTE



SAS COLLEGE OSTE...

COUR D'APPEL D'AIX-EN-PROVENCE

Chambre 4-3

ARRÊT AU FOND

DU 06 MAI 2022

N° 2022/ 108

RG 18/18464

N° Portalis DBVB-V-B7C-BDMFW

SAS COLLEGE OSTEOPATHIQUE PROVENCE AIX MARSEILLE

C/

[U] [O]

Copie exécutoire délivrée le 6 mai 2022

à :

-Me Christian MAILLARD, avocat au barreau de MARSEILLE

- Me Odile LENZIANI, avocat au barreau de MARSEILLE

Décision déférée à la Cour :

Jugement du Conseil de Prud'hommes - Formation de départage de MARSEILLE en date du 14 Novembre 2018 enregistré au répertoire général sous le n° 17/01175.

APPELANTE

SAS COLLEGE OSTEOPATHIQUE PROVENCE AIX MARSEILLE, demeurant [Adresse 1]

représentée par Me Christian MAILLARD de la SCP SCP MAILLARD ET LEFEVRE, avocat au barreau de MARSEILLE

INTIMEE

Madame [U] [O], demeurant [Adresse 2]

représentée par Me Odile LENZIANI, avocat au barreau de MARSEILLE substitué par Me Gilles BOUKHALFA, avocat au barreau de MARSEILLE

*-*-*-*-*

COMPOSITION DE LA COUR

En application des dispositions des articles 804 et 805 du code de procédure civile, l'affaire a été débattue le 29 Mars 2022, en audience publique, les avocats ne s'y étant pas opposés, devant Madame Estelle DE REVEL, Conseiller, chargée du rapport, qui a fait un rapport oral à l'audience, avant les plaidoiries.

Ce magistrat a rendu compte des plaidoiries dans le délibéré de la cour, composée de :

Madame Pascale MARTIN, Président de Chambre

Madame Ghislaine POIRINE, Conseiller faisant fonction de Président

Madame Estelle DE REVEL, Conseiller

Greffier lors des débats : Madame Florence ALLEMANN-FAGNI.

Les parties ont été avisées que le prononcé de la décision aurait lieu par mise à disposition au greffe le 06 Mai 2022.

ARRÊT

CONTRADICTOIRE,

Prononcé par mise à disposition au greffe le 06 Mai 2022

Signé par Madame Pascale MARTIN, Président de Chambre et Madame Florence ALLEMANN-FAGNI, Greffier, auquel la minute de la décision a été remise par le magistrat signataire.

***

EXPOSE DU LITIGE

Le 15 août 2015, Mme [U] [O] a été engagée par la SAS Collège Ostéopathique Provence Aix Marseille (COP) en qualité de secrétaire, catégorie E, niveau 1, par contrat de travail à durée indéterminée.

Dans les dernier état de la relation contractuelle, régie par la convention collective nationale de l'enseignement privé hors contrat, la salariée percevait une rémunération brute mensuelle de 1768 euros.

Le 4 novembre 2016, Mme [O] a été convoquée à un entretien préalable à un éventuel licenciement fixé au 24 novembre suivant.

Le 2 décembre 2016, elle a été licenciée pour insuffisance professionnelle.

Contestant son licenciement, la salariée a, le 15 mai 2017, saisi le conseil de prud'hommes de Marseille.

Le 14 novembre 2018, le conseil de prud'hommes a:

'DIT le licenciement de [U] [O] sans cause réelle et sérieuse,

CONDAMNE de ce chef la société COLLÈGE OSTÉOPATHIQUE DE PROVENCE à payer à [U] [O] les sommes suivantes :

8 500 euros de dommages-intérêts pour licenciement sans cause réelle et sérieuse

500 euros de dommages-intérêts pour licenciement économique déguisé,

CONDAMNE la société COLLÈGE OSTÉOPATHIQUE DE PROVENCE à rembourser à l'organisme PÔLE EMPLOI les indemnités de chômage perçues par [U] [O] à hauteur de trois mois,

CONDAMNE la société COLLÈGE OSTÉOPATHIQUE DE PROVENCE :

à remettre à la salariée un bulletin de salaire récapitulatif des sommes allouées, une attestation PÔLE EMPLOI, un certificat de travail et un solde de tout compte rectifiés conformément à la présente procédure,

à régulariser la situation de la salariée auprès des organismes sociaux,

PRÉCISE que les condamnations concernant des créances de nature indemnitaire porteront intérêt au taux légal à compter de la présente décision,

DIT n'y avoir lieu à exécution provisoire des dispositions du présent jugement qui ne sont pas de plein droit exécutoire par provision,

CONDAMNE la société COLLÈGE OSTÉOPATHIQUE DE PROVENCE à payer à [U]

[O] la somme de 1 500 euros en application de l'article 700 du code de procédure civile'.

Le 23 novembre 2018, la SAS COP a relevé appel du jugement.

Aux termes de ses dernières conclusions notifiées par voie électronique le 10 mai 2019, la société demande à la cour de :

'Réformer le jugement du Conseil de Prud'hommes de Marseille.

Constater le comportement récurrent de Mme [O] peu après son embauche et depuis des mois avec ses collègues et ses supérieurs

Considérer ses réponses et écrits démontrant l'absence de mauvaise volonté délibérée

Confirmer le licenciement prononcé pour insuffisance professionnelle

Considérer que les arguments de Mme [O] relatifs à des prétendus licenciements

économiques sont dépourvus de toute réalité

Constater l'absence de toute preuve de préjudice de la part d'une salariée ayant 15 mois d'ancienneté

Débouter Madame [U] [O] de toutes ses demandes ;

La condamner aux entiers dépens ;

La condamner au paiement de la somme de 3.000 € nets au titre de l'article 700 du CPC ;

Dire que dans l'hypothèse où, à défaut de règlement spontané des condamnations prononcées dans le jugement à intervenir, l'exécution forcée devra être réalisée par l'intermédiaire d'un huissier, le montant des sommes retenues par l'huissier devra être supporté par le débiteur en sus de l'application de l'article 700 du CPC'.

Aux termes de ses dernières conclusions notifiées par voie électronique le 28 février 2022, la salariée demande à la cour de :

'Confirmer le jugement rendu par le conseil de prud'hommes sauf en ce qu'il a condamné la société SAS COP Aix-Marseille à verser la somme de 500€ à titre de dommages et intérêts pour licenciement économique déguisé.

Et statuant à nouveau de :

Juger abusif le licenciement prononcé

Juger que Madame [O] a été injustement privée des dispositions et dispositifs légaux applicables en matière de licenciement pour motif économique.

Par conséquent de :

Condamner la SAS COP Aix-Marseille à verser à Mme [O] la somme de 8 500,00€ à titre de dommages et intérêts pour licenciement abusif

Condamner la SAS COP Aix-Marseille à verser à Mme [O] la somme de 5 000,00€ à titre de dommages et intérêts en réparation des préjudices liées à l'inapplication des dispositions légales applicables au licenciement pour motif économique

Condamner la SAS COP Aix-Marseille à verser à Mme [O] la somme de 2 500,00€ au titre des dispositions de l'article 700 du code de procédure civile en sus de la somme de 1 500,00€ allouée par les premiers juges

Condamner la SAS COP Aix-Marseille aux dépens'.

Pour l'exposé plus détaillé des prétentions et moyens des parties, il sera renvoyé, conformément à l'article 455 du code de procédure civile, aux conclusions des parties.

MOTIFS DE LA DECISION

A titre liminaire, la cour rappelle qu'en application des dispositions de l'article 954 du code de procédure civile « la cour ne statue que sur les prétentions énoncées au dispositif » et que les 'dire et juger' et les 'constater' ne sont pas des prétentions en ce que ces demandes ne confèrent pas de droit à la partie qui les requiert hormis les cas prévus par la loi ; en conséquence, la cour ne statuera pas sur celles-ci, qui ne sont en réalité que le rappel des moyens invoqués .

Sur le licenciement

Pour contester le jugement et en réponse à l'intimée, l'employeur soutient qu'il a entendu procéder à un licenciement pour insuffisance professionnelle, lequel est caractérisé par le comportement de l'intéressée dont les conséquences ont créé des perturbations dans l'établissement.

Il soutient que la salariée a reconnu l'insuffisance professionnelle et que si elle indique avoir agi de façon délibérée et fautive, ce n'est que pour voir son licenciement qualifié d'abusif.

Sollicitant la confirmation du jugement, la salariée soutient que son licenciement est en réalité fondé sur un motif économique sans qu'elle ait pu bénéficier de la procédure spécifique.

Selon elle, l'employeur s'est fondé sur une insuffisance professionnelle tout en invoquant dans la lettre de licenciement des faits de nature disciplinaire.

Elle soutient que la preuve des griefs n'est pas rapportée et que les faits invoqués dans la lettre d'avertissement et repris dans la lettre de rupture sont prescrits.

L'insuffisance professionnelle, qui est un motif inhérent à la personne du salarié mais n'est pas un motif disciplinaire de licenciement, se définit comme l'incapacité objective, non fautive et durable, d'un salarié à accomplir correctement la prestation de travail résultant de l'emploi qu'il occupe et correspondant à sa qualification.

L'appréciation de cette insuffisance professionnelle relève du pouvoir de direction de l'employeur, seul à même d'apprécier les aptitudes professionnelles de son salarié et de son adaptation à l'emploi, mais qui doit s'appuyer sur des faits objectifs précis et vérifiables imputables au salarié pour justifier le licenciement.

Ainsi, si la preuve est partagée en matière de licenciement pour cause réelle et sérieuse, il incombe à l'employeur d'apporter au juge des éléments objectifs à l'appui des faits qu'il invoque comme propres, selon lui, à caractériser l'insuffisance professionnelle dont il se prévaut.

S'il résulte des termes de la lettre de licenciement, quand bien même l'employeur n'aurait pas expressément qualifié des faits de fautifs, que celui-ci a entendu sanctionner par le licenciement un ou des agissements du salarié qu'il estimait fautif, ce licenciement présente un caractère disciplinaire et le juge est tenu par cette qualification.

En l'espèce, la lettre de licenciement du 2 décembre 2016 qui fixe les limites du litige, est libellée comme suit :

«Vous avez été reçue en entretien préalable au licenciement le jeudi 24 novembre 2015.

Les griefs que nous vous avons exposés à cette occasion, et sur lesquels nous avons recueilli vos explications, sont les suivants.

En juillet 2016, suite à plusieurs recadrages, vous avez reçu un avertissement concernant votre comportement à la clinique : agressivité à l'égard de patients ou de vos collègues, initiatives inappropriées, non-respect des consignes de votre responsable hiérarchique.

Votre réponse à cet avertissement a été un courrier date du 12 septembre 2016, dans lequel vous critiquez vivement votre collègue de travail. Vous avez laissé ce courrier sur le poste de travail de la clinique, auquel elle a accès dans le cadre de ses fonctions, et elle en a ainsi pris connaissance, ce qui n'a pas manqué de la déstabiliser.

Ce courrier, destiné à la Direction et dont l'intitulé ne permettait aucunement de deviner le caractère confidentiel, n'aurait pas dû être disponible sur l'ordinateur commun.

Vous êtes malheureusement coutumière de ce manque de discernement et de discrétion, ignorant délibérément le caractère confidentiel des informations que vous diffusez, et peu soucieuse des conséquences de cette diffusion.

Vous n'avez tiré aucune leçon de cet incident, qui a pourtant été lourd de conséquences pour le moral de votre collègue et les relations au sein de l'équipe.

En effet, le vendredi 21 octobre 2016, vous avez reçu un mail de la Direction de l'établissement vous indiquant que la clinique pédagogique d'[Localité 3] serait fermée pendant les vacances de la Toussaint. Cette information n'avait pas encore été délivrée aux étudiants, puisqu'il était prévu que le Directeur vienne expliquer cette décision la semaine suivante.

Or, vous avez divulgué cette information aux étudiants dès le samedi matin, en leur affirmant que la clinique serait désormais fermée pendant toutes les vacances scolaires. Pendant le week-end cette information a circulé auprès de l'ensemble des étudiants qui, faute de disposer d'une information fiable et accompagnée d'explications, ont amplifié et déformé vos propos.

C'est ainsi que, le lundi matin, l'information relayée parmi les étudiants était : « la clinique d'[Localité 3] va fermer ». Cette rumeur a créé des remous et inquiétude au sein des étudiants et des enseignants, à tel point que Monsieur [Y] a été obligé de se rendre le mardi matin sur le site d'[Localité 3] et de faire dans l'urgence le tour des promotions d'étudiants pour démentir la femeture de la clinique et calmer les esprits, en fournissant les explications nécessaires.

En raison de votre comportement inconséquent et de votre légèreté dans l'exercice de vos fonctions il a été contraint de communiquer dans la précipitation et hors du cadre initialement prévu.

Au cours de l'entretien, vous nous avez expliqué que vous n'aviez pas volontairement divulté cette information. Selon vous, alors que vous étiez au téléphone avec un patient le samedi matin, une étudiante était présente à l'accueil de la clinique. Celle-ci vous aurait entendu dire au patient que la clinique était fermée pendant les vacances scolaires. Vous indiquez que vous ne pouviez savoir que cette information était confidentielle, ce qui est totalement en contradiction avec les propos que vous avez reconnu avoir tenus auprès de l'étudiante : « ne pas répéter, c'est un scoop ». Cette confidence auprès de cette étudiante (qui plus est déléguée de promotion des 5e année) montre que vous aviez à la fois conscience que la nouvelle était importante et à ne pas diffuser sans explications, mais aussi que vous n'avez pas pu vous empêcher d'échanger avec elle. Vous avez également reconnu que dire à une étudiante « c'est un scoop » avait pu avoir un effet amplificateur, contraire à la discrétion rechercher à votre poste.

Votre poste vous amène à avoir connaissance d'informations confidentielles, et il vous incombe de conserver la plus grande discrétion, et de prendre les mesures appropriées pour cela. M. [V] nous a indiqué qu'il vous avait alerté à plusieurs reprises sur le fait de ne pas communiquer avec les étudiants sur des sujets qui ne relèvent pas de vos attributions.

Nous vous avons également signalé que, le jour même de l'entretien du 24 novembre, alors que Monsieur [Y] passait dans l'établissement d'[Localité 3] en provence où vous travaillez, les étudiants l'interpellaient en lui affirmant que « Madame [O] est virée.» Manifestement, vous aviez là encore largement partagé une information erronée, car, comme nous l'avons rappelé, une convocation à entretien préalable n'est pas un licenciement.

En effet, ce ne sont ni le Directeur, ni son Adjointe, ni moi-même qui avons pu diffuser cette information. Seule vous-même avez pu en parler sur votre lieu de travail, créant ainsi des remous dans un contexte compliqué (formation répartie sur deux sites, changement de rythme de la clinique, suppression de stages externes...).

Enfin, dans votre lettre de réponse à avertissement, vous vous étonniez que nous vous reprochions « une agressivité verbale à l'égard de vous collègues, mais aussi des patients de la clinique ». Or votre attitude lors de l'entretien a montré à quel point vous pouviez être irrespectueuse de la hiérarchie et agressive, coupant la parole à votre Directeur ou à moi-même, incapable d'écouter ce que nous avions à dire, refusant même de me laisser parler ou refusant de laisser parler votre Directeur, alors même que nous vous demandions de nous laisser nous exprimer.

Enfin, vous n'acceptez pas toujours les décisions prises au cours de réunion (assurer l'accueil téléphonique). Alors qu'il était acté, suite à la réunion clinique du 3 mai 2016, en présence de la Direction et de vos collègues de travail, que vous deviez reprendre le standart de la clinique lorsque vous étiez en médiathèque, vous avez sollicité M. [V], votre Responsable, pour contourner cette décision et vous voir déchargée de cette tâches.

Cette attitude, les libertés que vous pouvez prendre dans l'exécution de vos tâches et qui portant préjudice à l'organisation, votre manque de discrétion, de retenue et de discernement vis-à-vis d'informations que vuos ne devez pas divulguer, caractérisent une insuffisance professionnelle ne vous permettant pas de tenir votre poste. Nous vous signifions donc par la présente votre licenciement (...).»

Contrairement à ce qui a été jugé par le conseil de prud'hommes, le fait que le licenciement n'ait pas été expressément qualifié de fautif ne suffit pas à le dire dépourvu de cause réelle et sérieuse. Il n'en est ainsi que si la procédure disciplinaire n'a pas été suivie et si les griefs ne sont pas établis.

Les formules et termes utilisés par l'employeur font référence à des griefs de nature disciplinaire ('ignorance délibérée du caractère confidentiel des informations', ' irrespectueuse', 'agressive', 'non acceptation des décisions').

En tout état de cause, il incombe à ce dernier de prouver les faits allégués dans la lettre de rupture.

Or, s'agissant tout d'abord du courrier du 12 septembre 2016 dans lequel la salariée répond à l'avertissement qui lui a été notifié et met en cause sa collègue, qu'elle aurait volontairement laissé sur le poste de travail, l'employeur ne rapporte ni le caractère confidentiel de ce courrier, ni en quoi le fait de l'avoir enregistré sur le poste informatique de la clinique constitue une quelconque violation d'une obligation de discrétion, ni l'ignorance délibérée d'informations confidentielles, ni enfin l'incident qui en aurait découlé.

S'agissant de la divulgation auprès des étudiants de l'information selon laquelle la clinique serait fermée pendant les vacances, il ressort du compte rendu d'entretien préalable produit par la salariée, repris dans ses conclusions, que celle-ci était en train de répondre au téléphone à un patient de la clinique qui voulait prendre rendez-vous pendant les vacances lorsqu'une élève est arrivée et a entendu cette information. La divulgation reprochée, qui revêt un caractère volontaire, n'est donc pas démontrée au vu de ces circonstances, l'employeur n'apportant aucun élément contraire, ni d'ailleurs sur le fait qu'il s'agissait d'une information confidentielle qui ne ressort pas du contenu intrinsèque de l'information. Aucune attestation n'est non plus produite quant aux démarches que M. [Y] aura dû effectuer auprès des étudiants pour démentir l'information querellée.

Le reproche d'avoir communiqué sur le licenciement lors de l'entretien préalable auprès des étudiants et d'avoir créé des remous n'est pas plus fondé et en tout état de cause ne peut constituer une quelconque insuffisance professionnelle en l'absence de caractère confidentiel de cette information et au vu de la liberté d'expression de la salariée dès lors qu'elle n'est pas abusive.

Le fait que la salariée soit coutumière d'indiscrétions et de divulgations d'informations confidentielles n'est étayé par aucune pièce et rien n'est versé quant aux mises en garde que lui aurait faites M. [V] (attestation par exemple).

Enfin, les reproches d'agressivité et d'irrespect envers la hiérarchie se sont pas plus démontrés, sauf à sanctionner des agissements ayant déjà fait l'objet d'une mesure. Le comportement agressif à l'égard de patients ou de collègues, d'initiatives inappropriées et du non-respect des consignes ont en effet déjà fait l'objet d'un avertissement tel que rappelé dans le courrier de licenciement et ne peuvent à nouveau être sanctionnés en vertu de la règle non bis in idem.

Le fait d'avoir répondu et coupé la parole lors de l'entretien préalable ne ressort pas du compte rendu et ne constituent pas un irrespect ni une agressivité en tant que tels.

Il convient en conséquence de dire le licenciement sans cause réelle et sérieuse.

Il sera enfin relevé que la salariée qui reproche à l'employeur d'avoir détourné la procédure de licenciement pour motif économique, doit en apporter la preuve.

Or, en se basant seulement sur un rapport réalisé suite à une réunion de consultation des délégués du personnel du 3 novembre 2016 sur un projet de licenciement économique qui ne concernait que le personnel enseignant sans autre élément pour établir qu'il a été suivi d'effet, elle échoue à apporter cette preuve; l'employeur justifiant avoir recherché des candidats pour occuper son poste (mails).

Dès lors, le licenciement ne peut être qualifié de licenciement économique déguisé et le jugement doit être infirmé en ce qu'il a été accordé à la salariée une indemnité de ce chef.

Sur les conséquences du licenciement

La salariée ayant moins de deux ans d'ancienneté (15 mois et 17 jours), ce sont les dispositions de l'article L.1235-5 du code du travail qui s'appliquent, et non celles de l'article L.1235-3, de sorte que l'indemnité à laquelle elle a droit est fonction du préjudice subi.

Mme [O] sollicite la confirmation du jugement sur le montant de la somme allouée.

Elle indique avoir rapidement trouvé un emploi.

Au vu de son âge lors de la rupture (45 ans) et de son ancienneté, il convient de confirmer la somme décidée en première instance par substitution de motifs.

Sur les autres demandes

Il y a lieu de confirmer la décision en ce que l'employeur a été condamné à rembourser les indemnités de chômage à Pôle Emploi, à remettre à la salariée les documents de fin de contrat et un bulletin de salaire rectifié, et à régulariser sa situation auprès de Pôle Emploi.

Il n'y a pas lieu de faire application des dispositions de l'article 700 du code de procédure civile.

La société est condamnée aux dépens d'appel.

PAR CES MOTIFS

La Cour,

Statuant par arrêt contradictoire, par mise à disposition au greffe, les parties en ayant été préalablement avisées dans les conditions prévues à l'article 450 du code de procédure civile, en matière prud'homale,

Confirme le jugement entrepris sauf s'agissant des dommages et intérêts pour licenciement économique déguisé,

Statuant à nouveau et Y ajoutant,

Déboute Mme [U] [O] de sa demande à titre de dommages et intérêts pour licenciement pour motif économique,

Dit n'y avoir lieu à application des dispositions de l'article 700 du code de procédure civile,

Condamne la SAS Collège Ostéopathique Provence Aix-Marseille (COP) aux dépens d'appel.

LE GREFFIERLE PRESIDENT


Synthèse
Tribunal : Cour d'appel d'Aix-en-Provence
Formation : Chambre 4-3
Numéro d'arrêt : 18/18464
Date de la décision : 06/05/2022

Origine de la décision
Date de l'import : 26/03/2024
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.appel;arret;2022-05-06;18.18464 ?
Association des cours judiciaires suprmes francophones
Organisation internationale de la francophonie
Juricaf est un projet de l'AHJUCAF, l'association des Cours suprêmes judiciaires francophones. Il est soutenu par l'Organisation Internationale de la Francophonie. Juricaf est un projet de l'AHJUCAF, l'association des Cours suprêmes judiciaires francophones. Il est soutenu par l'Organisation Internationale de la Francophonie.
Logo iall 2012 website award