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04/05/2022 | FRANCE | N°19/05184

France | France, Cour d'appel d'Aix-en-Provence, Chambre 1-8, 04 mai 2022, 19/05184


COUR D'APPEL D'AIX-EN-PROVENCE

Chambre 1-8



ARRÊT AU FOND

DU 04 MAI 2022



N° 2022/ 215









N° RG 19/05184



N° Portalis DBVB-V-B7D-BEBCT







[Z] [O]



[F] [C]





C/



[Y] [I] veuve [X]



SCI JESLY



































Copie exécutoire délivrée

le :

à :



Me Carole

RAFFERMI





Me Alexandra MONDINI















Décision déférée à la Cour :



Jugement du Tribunal d'Instance de Cannes en date du 15 Mars 2019 enregistrée au répertoire général sous le n° 11-16-0657.





APPELANTS



Monsieur [Z] [O]

né le 14 Décembre 1966 à SAINT CERE, demeurant 3 rue des Jacourets 06560 PEYMEINADE



Monsieur [F] [C...

COUR D'APPEL D'AIX-EN-PROVENCE

Chambre 1-8

ARRÊT AU FOND

DU 04 MAI 2022

N° 2022/ 215

N° RG 19/05184

N° Portalis DBVB-V-B7D-BEBCT

[Z] [O]

[F] [C]

C/

[Y] [I] veuve [X]

SCI JESLY

Copie exécutoire délivrée

le :

à :

Me Carole RAFFERMI

Me Alexandra MONDINI

Décision déférée à la Cour :

Jugement du Tribunal d'Instance de Cannes en date du 15 Mars 2019 enregistrée au répertoire général sous le n° 11-16-0657.

APPELANTS

Monsieur [Z] [O]

né le 14 Décembre 1966 à SAINT CERE, demeurant 3 rue des Jacourets 06560 PEYMEINADE

Monsieur [F] [C]

né le 25 Juillet 1966 à ALGERS (ALGERIE), demeurant 3 rue des Jacourets 06530 PEYMEINADE

représentés par Me Carole RAFFERMI, avocat au barreau de GRASSE

INTIMEES

Madame [Y] [I] veuve [X]

née le 15 Août 1943 à PARIS (75), demeurant 899 boulevard de la Corniche 06250 MOUGINS

SCI JESLY

dont le siège social est sis 10 rue du Colonel Mattei 06110 LE CANNET, prise en la personne de sa gérante en exercice domiciliée es qualité audit siège

représentées par Me Alexandra MONDINI, avocat au barreau de GRASSE

*-*-*-*-*

COMPOSITION DE LA COUR

En application des dispositions des articles 805 et 907 du code de procédure civile, l'affaire a été débattue le 07 Février 2022, en audience publique, les avocats ne s'y étant pas opposés, devant Monsieur Jean-Paul PATRIARCHE, Conseiller, chargé du rapport.

Ce magistrat a rendu compte des plaidoiries dans le délibéré de la Cour, composée de :

Monsieur Philippe COULANGE, Président

Madame Céline ROBIN-KARRER, Conseillère

Monsieur Jean-Paul PATRIARCHE, Conseiller

Greffier lors des débats : Mme Maria FREDON.

Les parties ont été avisées que le prononcé de la décision aurait lieu par mise à disposition au greffe le 04 Mai 2022.

ARRÊT

Contradictoire, prononcé par mise à disposition au greffe le 04 Mai 2022, signé par Monsieur Philippe COULANGE, Président et Madame Maria FREDON, greffière auquel la minute de la décision a été remise par le magistrat signataire.

***

EXPOSÉ DES FAITS ET DE LA PROCÉDURE ANTÉRIEURE

Suivant contrat conclu sous seing privé, Madame [Y] [I] veuve [X], agissant en qualité de gérante de la société civile immobilière JESLY, a donné à bail d'habitation à MM. [Z] [O] et [F] [C] un appartement de type 3 en rez-de-chaussée de sa villa située 899 boulevard de la Corniche à Mougins (06250), pour une durée de trois années commençant à courir le 1er octobre 2013, moyennant un loyer mensuel de 1.350 euros et une provision sur charges de 50 euros.

Aucun état des lieux d'entrée n'a été établi par les parties, les locataires ayant en fait emménagé dès le 17 septembre.

Compte tenu de l'existence d'un compteur unique d'énergie, Madame [X] récupérait auprès de ses locataires une partie des consommations d'électricité et de gaz, étant précisé qu'elle occupait elle-même l'appartement du premier étage et qu'un autre logement de type 2 était loué au rez-de-chaussée.

Les locataires ont donné congé pour le 31 août 2015.

Le 27 août précédent, ils ont requis un huissier de justice afin de dresser constat de l'état des lieux, hors la présence de la bailleresse, puis ont restitué les clés par courrier.

Par acte du 8 juillet 2016, MM. [Z] [O] et [F] [C] ont fait assigner Madame [Y] [X] et la SCI JESLY à comparaître devant le tribunal d'instance de Cannes pour les entendre condamner à leur restituer l'intégralité du dépôt de garantie, soit la somme de 1.300 euros, outre 350 euros à titre de pénalités de retard, ainsi qu'à leur rembourser une somme de 1.478 euros correspondant selon eux à un trop perçu sur leurs consommations d'énergie. Ils réclamaient également paiement d'une somme de 3.000 euros à titre de dommages-intérêts.

Les défenderesses ont conclu au rejet des prétentions adverses, notamment en raison de l'existence de dégradations locatives, et réclamé reconventionnellement paiement d'une somme de 301,33 euros au titre de la quote-part de la taxe d'enlèvement des ordures ménagères 2014 récupérable sur les locataires.

Par jugement rendu le 15 mars 2019, le tribunal a débouté les parties de l'ensemble de leurs prétentions respectives et condamné les demandeurs aux dépens, ainsi qu'au paiement d'une somme de 1.500 euros en application de l'article 700 du code de procédure civile.

MM. [O] et [C], qui ont reçu signification de la décision le 25 mars 2019, en ont relevé appel par déclaration adressée le 29 mars 2019 au greffe de la Cour.

MOYENS ET PRÉTENTIONS DES PARTIES

Aux termes de leurs conclusions récapitulatives notifiées le 23 octobre 2019, MM. [Z] [O] et [F] [C] font valoir :

- qu'en l'absence d'état des lieux d'entrée, le logement est présumé avoir été reçu en bon état de réparations locatives conformément à l'article 1731 du code civil,

- qu'il a été rendu comme tel en fin de bail, ainsi qu'il ressort du procès-verbal de constat dressé le 27 août 2015,

- que la bailleresse ne leur a jamais adressé un décompte de sortie justifiant une quelconque retenue sur le montant du dépôt de garantie, ni un état de régularisation des charges,

- qu'elle ne saurait leur imputer le coût d'une remise du logement dans son état d'origine, alors qu'ils étaient en droit de réaliser des aménagements et travaux de peinture à leur goût en vertu de l'article 6 de la loi du 6 juillet 1989,

- qu'ils étaient également en droit d'emporter les meubles de cuisine qu'ils avaient eux-mêmes acquis et installés en remplacement du mobilier existant,

- que la participation aux factures d'énergie qui leur a été réclamée s'avère exorbitante,

- et qu'ils ont subi un harcèlement continu de la part de la bailleresse pendant toute la durée du bail, qui les a contraints à y mettre un terme de manière anticipée.

Ils demandent à la Cour :

- d'infirmer le jugement entrepris,

- de condamner solidairement Madame [X] et la SCI JESLY à leur payer :

* la somme de 1.300 euros au titre de la restitution de l'intégralité du dépôt de garantie, majorée de 10 % par mois à compter du 31 octobre 2015 en application de l'article 22 de la loi du 6 juillet 1989,

* la moitié du coût du constat d'huissier, soit 150 euros,

* la somme de 3.728,40 euros au titre du remboursement de l'intégralité de leur participation aux factures d'énergie, ou a minima celle de 472,28 euros suivant un calcul de répartition effectué sur des bases objectives,

* celle de 600 euros en remboursement de la totalité des provisions sur charges non régularisées, ou subsidiairement celle de 298,67 euros après imputation de leur quote-part sur la taxe d'enlèvement des ordures ménagères,

*- celle de 3.000 euros à titre de dommages-intérêts,

- et de condamner enfin les intimés aux entiers dépens, ainsi qu'au paiement d'une indemnité de 3.000 euros en application de l'article 700 du code de procédure civile.

Par conclusions récapitulatives notifiées le 18 mars 2021, Madame [Y] [X] et la société JESLY soutiennent pour leur part :

- que l'état des lieux de sortie n'a pas été établi de manière contradictoire, et leur est en conséquence inopposable,

- qu'il existait bien des dégradations locatives, dont le coût de réparation peut être évalué à 5.200 euros suivant devis produits aux débats,

- que les locataires sortants ont notamment démonté tous leurs meubles de cuisine sans remettre en place le mobilier existant à l'origine, en dépit d'une demande expresse de leur part, et que les embellissements qu'ils prétendent avoir réalisés ont au contraire endommagé l'appartement,

- que la participation aux factures d'énergie qui leur a été réclamée correspondait bien à leur consommation réelle,

- que Madame [X] n'a jamais adopté vis-à-vis de ses locataires le comportement qui lui est reproché,

- et que la participation à la taxe d'enlèvement des ordures ménagères qui leur est réclamée à concurrence d'un tiers est exigible en sus des autres charges récupérables.

Elles demandent à la Cour :

- de confirmer le jugement entrepris en ce qu'il a débouté les parties adverses de l'ensemble de leurs prétentions et les a condamnées aux dépens ainsi qu'au paiement d'une indemnité au titre de leurs frais irrépétibles,

- de le réformer pour le surplus en condamnant MM. [O] et [C] à leur payer la somme de 301,33 euros au titre de leur quote-part de la taxe susdite,

- y ajoutant, de les condamner à payer à Madame [X] une somme de 3.000 euros à titre de dommages-intérêts pour procédure abusive,

- et de condamner les appelants aux dépens d'appel, ainsi qu'au paiement d'une somme de 2.500 euros en application de l'article 700 du code de procédure civile.

DISCUSSION

Sur la demande en restitution du dépôt de garantie :

En l'absence d'état des lieux d'entrée, sans qu'il ne soit allégué que l'une ou l'autre des parties aurait fait obstacle à son établissement, celles-ci s'accordent à considérer que l'appartement a été remis en bon état de réparations locatives, en vertu de la présomption édictée par l'article 1731 du code civil.

En revanche la preuve de ce que le logement a été rendu comme tel en fin de bail ne peut résulter du procès-verbal de constat dressé le 27 août 2015 par l'huissier de justice requis par les locataires sortants, dès lors que les formalités de convocation préalable de la partie adverse prescrites par l'article 3-2 de la loi du 6 juillet 1989 n'ont pas été respectées, étant en outre observé qu'il n'est pas établi que Madame [X] se soit opposée à l'établissement d'un état des lieux amiable et contradictoire.

La bailleresse doit dès lors être admise à prouver l'existence de dégradations par tous moyens.

C'est donc à bon droit, et par des motifs adoptés par la Cour, que le premier juge a retenu la valeur probante des photographies et devis qui lui étaient produits pour considérer que le coût des réparations locatives excédait le montant du dépôt de garantie, de sorte qu'il n'y avait pas lieu d'en ordonner la restitution.

Sur le partage des frais de constat :

Il résulte des motifs qui précédent que les locataires sortants ne peuvent obliger la bailleresse à participer au coût d'un constat irrégulier.

Sur la participation aux factures d'énergie :

Il est constant que sur une dépense totale de 8.419,21 euros au titre des factures d'énergie, la bailleresse a récupéré auprès de ses locataires une somme de 3.278,40 euros au cours des deux années d'exécution du bail, soit en moyenne 136 euros par mois, ce qui n'apparaît pas en soi exorbitant pour l'alimentation d'un logement de type 3 en électricité et en gaz, permettant notamment le chauffage et la production d'eau chaude sanitaire.

Si les bases de répartition retenues par Madame [X] apparaissent effectivement peu claires, celles proposées par MM. [O] et [C] dans leurs conclusions, à savoir 33,33 % de la dépense totale, ne sont pas davantage convaincantes, alors que la charge de la preuve leur incombe en qualité de demandeurs à la restitution d'un indu.

C'est donc à juste titre que le tribunal les a déboutés de cette réclamation.

Sur les charges locatives :

Selon l'article 23 de la loi du 6 juillet 1989, les charges récupérables, sommes accessoires au loyer principal, sont exigibles sur justification en contrepartie des services rendus liés à l'usage des différents éléments de la chose louée, des dépenses d'entretien courant et des menues réparations réalisées sur les éléments d'usage commun, ainsi que des impositions correspondant à des services dont le locataire profite directement.

Elles peuvent donner lieu au versement de provisions et doivent en ce cas faire l'objet d'une régularisation au moins annuelle.

En l'espèce la bailleresse a perçu 600 euros à titre de provisions, sans jamais adresser à ses locataires la moindre régularisation, et ses conclusions prises devant la Cour ne comportent pas davantage le détail de l'imputation des charges.

Il convient en conséquence de la condamner à restituer ladite somme, déduction faite cependant de la quote-part due par les locataires au titre de la taxe d'enlèvement des ordures ménagères 2014, qui s'élève à 301,33 euros suivant justificatif produit au dossier.

Sur les demandes en paiement de dommages-intérêts :

Les attestations produites par MM. [O] et [C] ne font pas la preuve du harcèlement dont ils soutiennent avoir été victimes de la part de la bailleresse, mais seulement de différends de voisinage du fait de la promiscuité existant entre les différents occupants de la villa, lesquels n'appellent pas réparation.

D'autre part, il n'apparaît pas que le droit des appelants d'agir en justice ait dégénéré en abus ni qu'il ait été exercé dans l'intention de nuire à la partie adverse, de sorte que Madame [X] doit être également déboutée de sa demande en dommages-intérêts.

PAR CES MOTIFS

La Cour, statuant par arrêt contradictoire,

Confirme le jugement déféré en ce qu'il a :

- débouté MM. [Z] [O] et [F] [C] de leurs demandes tendant à la restitution du dépôt de garantie et d'un trop perçu sur leurs consommations d'énergie,

- rejeté leur demande en paiement de dommages-intérêts,

- et condamné les demandeurs aux dépens de première instance, ainsi qu'au paiement d'une indemnité en application de l'article 700 du code de procédure civile.

Réforme le jugement en ce qu'il a débouté Madame [Y] [X] et la SCI JESLY de leur demande en paiement de la quote-part incombant aux locataires sur la taxe d'enlèvement des ordures ménagères,

Y ajoutant,

Condamne solidairement Madame [Y] [X] et la SCI JESLY à payer à MM. [Z] [O] et [F] [C] la somme de 298,67 euros au titre de la restitution d'une partie des provisions sur charges,

Déboute MM. [Z] [O] et [F] [C] de leur demande en paiement de la moitié du coût du constat d'huissier,

Déboute Madame [Y] [X] de sa demande en paiement de dommages-intérêts pour procédure abusive,

Condamne MM. [Z] [O] et [F] [C] aux dépens de l'instance d'appel, ainsi qu'à payer aux intimées une somme de 1.500 euros en application de l'article 700 du code de procédure civile.

LA GREFFIERELE PRESIDENT


Synthèse
Tribunal : Cour d'appel d'Aix-en-Provence
Formation : Chambre 1-8
Numéro d'arrêt : 19/05184
Date de la décision : 04/05/2022

Origine de la décision
Date de l'import : 26/03/2024
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.appel;arret;2022-05-04;19.05184 ?
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