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04/05/2022 | FRANCE | N°19/04755

France | France, Cour d'appel d'Aix-en-Provence, Chambre 1-8, 04 mai 2022, 19/04755


COUR D'APPEL D'AIX-EN-PROVENCE

Chambre 1-8



ARRÊT AU FOND

DU 04 MAI 2022



N° 2022/ 213









N° RG 19/04755



N° Portalis DBVB-V-B7D-BD7YM







[S] [V]





C/



[M] [P]















































Copie exécutoire délivrée

le :

à :





Me Philippe-

laurent SIDER



Me Alexia PICCERELLE







Décision déférée à la Cour :



Jugement du Tribunal d'Instance de CANNES en date du 21 Janvier 2019 enregistrée au répertoire général sous le n° 17/000341.





APPELANT



Monsieur [S] [V]

né le 23 janvier 1951 à DIEPPE (76), demeurant 1 rue du Petit Aubilly Le Grand Aubilly 18520 AVORD



représenté par Me Phi...

COUR D'APPEL D'AIX-EN-PROVENCE

Chambre 1-8

ARRÊT AU FOND

DU 04 MAI 2022

N° 2022/ 213

N° RG 19/04755

N° Portalis DBVB-V-B7D-BD7YM

[S] [V]

C/

[M] [P]

Copie exécutoire délivrée

le :

à :

Me Philippe-laurent SIDER

Me Alexia PICCERELLE

Décision déférée à la Cour :

Jugement du Tribunal d'Instance de CANNES en date du 21 Janvier 2019 enregistrée au répertoire général sous le n° 17/000341.

APPELANT

Monsieur [S] [V]

né le 23 janvier 1951 à DIEPPE (76), demeurant 1 rue du Petit Aubilly Le Grand Aubilly 18520 AVORD

représenté par Me Philippe-laurent SIDER, avocat au barreau d'AIX-EN-PROVENCE, et pour avocat plaidant Me Philippe CRUON de la SCP BIGAND - CRUON, avocat au barreau de GRASSE,

INTIMEE

Madame [M] [P]

demeurant Résidence Calmette Bâtiment 3, 31/33 Rue du Docteur Calmette 06110 LE CANNET

représentée par Me Alexia PICCERELLE de la SCP COURTAUD PICCERELLE ZANOTTI GUIGON-BIGAZZI AVOCATS ASSOCIES, avocat au barreau de GRASSE

*-*-*-*-*

COMPOSITION DE LA COUR

En application des dispositions des articles 805 et 907 du code de procédure civile, l'affaire a été débattue le 07 Février 2022, en audience publique, les avocats ne s'y étant pas opposés, devant Monsieur Jean-Paul PATRIARCHE, Conseiller, chargé du rapport.

Ce magistrat a rendu compte des plaidoiries dans le délibéré de la Cour, composée de :

Monsieur Philippe COULANGE, Président

Madame Céline ROBIN-KARRER, Conseillère

Monsieur Jean-Paul PATRIARCHE, Conseiller

Greffier lors des débats : Mme Maria FREDON.

Les parties ont été avisées que le prononcé de la décision aurait lieu par mise à disposition au greffe le 04 Mai 2022.

ARRÊT

Contradictoire, prononcé par mise à disposition au greffe le 04 Mai 2022, signé par Monsieur Philippe COULANGE, Président et Madame Maria FREDON, greffière auquel la minute de la décision a été remise par le magistrat signataire.

***

EXPOSÉ DES FAITS ET DE LA PROCÉDURE ANTÉRIEURE

Suivant acte sous seing privé, Monsieur [S] [V] a donné à bail d'habitation à Madame [M] [P] un appartement de type 3 au sein de la résidence Calmette située 31/33 rue du Docteur Calmette au Cannet (06110), pour une durée de trois ans commençant à courir le 1er mars 2011, renouvelable par tacite reconduction, moyennant un loyer mensuel de 725 euros révisable annuellement suivant la variation de l'indice de référence.

Par exploit d'huissier du 17 août 2016, le bailleur a fait signifier un congé pour vendre venant à échéance le 28 février 2017, date d'échéance du bail tacitement renouvelé, et contenant offre de cession au prix de 210.000 euros.

Il a ensuite refusé l'offre d'achat formulée par la locataire au prix de 160.000 euros.

Madame [M] [P] s'étant maintenue dans le logement au delà de l'échéance du congé, M. [S] [V] l'a assignée le 30 mars 2017 à comparaître devant le tribunal d'instance de Cannes pour entendre prononcer son expulsion et lui réclamer paiement d'une somme de 6.008,46 euros au titre de sa dette locative, outre 2.000 euros à titre de dommages-intérêts du fait de son obstruction à la réalisation de la vente.

La défenderesse a sollicité une suspension des effets du congé durant douze mois afin de pourvoir à son relogement et s'est opposée aux demandes en paiement formulées à son encontre. Elle a réclamé reconventionnellement la condamnation sous astreinte de son bailleur à lui délivrer des quittances de loyer régulières.

Par jugement rendu le 21 janvier 2019, le tribunal a :

- validé le congé, et dit en conséquence que Madame [P] était dépourvue de titre d'occupation à compter du 28 février 2017,

- débouté la défenderesse de sa demande de délais et ordonné son expulsion, ainsi que celle de tous occupants de son chef,

- débouté le bailleur de sa demande en paiement d'une dette locative en l'absence de production d'un décompte suffisamment clair et détaillé,

- condamné Madame [P] à lui payer la somme de 500 euros à titre de dommages-intérêts pour avoir fait obstruction à la visite de l'appartement,

- condamné M. [V] sous peine d'astreinte à délivrer des quittances de loyer régulières,

- condamné Madame [P] aux dépens, en ce compris le coût du congé,

- dit que chacune des parties conserverait la charge de ses propres frais irrépétibles,

- et ordonné l'exécution provisoire de sa décision.

Monsieur [S] [V] a relevé appel de ce jugement par déclaration adressée le 22 mars 2019 au greffe de la Cour, son recours étant limité aux dispositions ayant rejeté sa demande en paiement d'une dette locative ainsi que sa demande accessoire fondée sur l'article 700 du code de procédure civile.

Madame [M] [P] a notifié le 21 juin 2019 des conclusions contenant appel incident sur d'autres chefs de la décision.

MOYENS ET PRÉTENTIONS DES PARTIES

Aux termes de ses conclusions récapitulatives notifiées le 11 janvier 2022, Monsieur [S] [V] produit un nouveau décompte récapitulatif de créance arrêté à la somme de 7.244,98 euros au 31 janvier 2019.

Il fait valoir que les paiements effectués par la locataire ainsi que par la CAF au titre de l'allocation logement entre le 1er avril 2014 et le 30 mars 2017 ont été imputés sur l'arriéré antérieur au 30 mars 2014 conformément à l'article 1256 (ancien) du code civil, et que les sommes dues pour la période antérieure au 1er septembre 2015 sont désormais intégralement apurées.

Il soutient que le premier juge aurait renversé la charge de la preuve, alors qu'il incombe au locataire de rapporter la preuve du paiement du loyer en vertu de l'article 1315 (ancien) du même code.

Il ajoute que Madame [P] a finalement libéré les lieux fin juillet 2019, et réactualise sa créance définitive à la somme de 9.718,74 euros pour tenir compte des dernières indemnités d'occupation échues, dont il accepte de déduire cependant la somme de 1.266,33 euros au titre d'une facture de remplacement du chauffe-eau réglée par la locataire.

Il demande à la Cour :

- de réformer partiellement le jugement entrepris, en condamnant Madame [P] à lui payer la somme de 8.452,41 euros au titre de la dette locative et celle de 3.000 euros en application de l'article 700 du code de procédure civile,

- de confirmer la décision pour le surplus,

- et de condamner l'intimée aux entiers dépens.

Par conclusions notifiées le 21 juin 2019, Madame [M] [P] soutient pour sa part:

- que l'action en paiement des loyers échus antérieurement au 30 mars 2014 est éteinte par la prescription triennale, et que le décompte du bailleur n'intègre pas les rappels versés par la CAF,

- qu'elle reste dans l'attente de l'attribution d'un logement social,

- qu'elle ne s'est jamais opposée à la visite de l'appartement,

- et qu'en tout état de cause il ne lui incombe pas de supporter le coût du congé.

Elle demande à la Cour :

- de confirmer le jugement en ce qu'il a débouté le bailleur de sa demande en paiement d'une dette locative et d'une indemnité au titre de ses frais irrépétibles,

et le réformant pour le surplus :

- de suspendre les effets du congé jusqu'au 31 décembre 2019 afin de lui permettre de se reloger,

- de débouter M. [V] de sa demande en dommages-intérêts,

- et de le condamner aux dépens.

DISCUSSION

Sur l'expulsion :

Les conclusions de l'intimée ayant été notifiées le 21 juin 2019, avant qu'elle ne libère finalement le logement au cours du mois de juillet suivant, il y a lieu de considérer que la demande tendant à suspendre les effets du congé est désormais dépourvue d'objet.

Sur l'existence d'une dette locative :

L'article 7-1 de la loi du 6 juillet 1989 tendant à améliorer les rapports locatifs, dans sa rédaction issue de la loi n° 2014-366 du 24 mars 2014, dispose que toutes les actions dérivant d'un contrat de bail sont prescrites par trois ans à compter du jour où le titulaire d'un droit a connu ou aurait dû connaître les faits lui permettant de l'exercer, sauf l'action en révision du loyer qui se prescrit un an après la date convenue par le contrat de bail.

En application de l'article 2222 du code civil, en cas de réduction de la durée du délai de prescription, le nouveau délai court à compter du jour de l'entrée en vigueur de la loi nouvelle, le point de départ du délai pour agir se situant, pour les créances à exécution successive, à la date d'exigibilité de chacune des échéances.

Au cas présent le délai triennal a commencé à courir au jour de l'entrée en vigueur de la loi du 24 mars 2014, soit le 27 mars 2014, et l'assignation a été délivrée le 30 mars 2017. Il en résulte que l'action en paiement des loyers échus antérieurement au 30 mars 2014 est éteinte par la prescription.

Or il résulte du nouveau décompte récapitulatif produit par M. [V] (pièce n°14 de son dossier de plaidoirie) que l'arriéré existant au 30 mars 2014 s'élevait déjà à la somme de 8.061,90 euros.

Le créancier ne peut invoquer les dispositions de l'article 1256 (ancien) du code civil relatives à l'imputation des paiements, partiellement reprises à l'article 1342-10 nouveau, pour faire échec au jeu de la prescription, laquelle n'est pas ici fondée sur une présomption de paiement, mais sur la protection du débiteur contre une accumulation de sa dette.

Il convient en conséquence de juger que le reliquat de la dette locative non éteinte par la prescription s'établit à la somme de 1.656,84 euros, dont il y a lieu de déduire le montant de la facture de remplacement du chauffe-eau acquittée par la locataire et que le bailleur reconnaît devoir prendre à sa charge, soit 1.266,33 euros, de sorte que la créance résiduelle de M. [V] doit être fixée à 390,51 euros.

Sur les dommages-intérêts :

Il est établi par une attestation de M. [F] [G], agent immobilier mandaté pour mettre en vente l'appartement, que Madame [P] avait refusé de lui donner un rendez-vous pour visiter le bien, en invoquant l'existence d'un différend avec le bailleur.

L'obstruction à la vente du bien résulte également de son maintien dans les lieux au delà de l'échéance du congé.

Il y a lieu en conséquence de confirmer le jugement entrepris en ce qu'il a condamné la locataire au paiement d'une somme de 500 euros à titre de dommages-intérêts, le montant de cette condamnation n'étant pas remis en cause par le bailleur en cause d'appel.

Sur les dépens et les frais irrépétibles :

En vertu de l'article 696 du code de procédure civile la partie perdante doit être condamnée aux dépens, à moins que le juge, par décision motivée, n'en mette la totalité ou une fraction à la charge d'une autre partie.

En l'espèce l'action introduite par M. [V] avait essentiellement pour objet d'obtenir l'expulsion de sa locataire par suite de l'échéance du congé, de sorte que Madame [P] doit être considérée comme la partie perdante, tenue comme telle aux entiers dépens.

Toutefois ces derniers s'entendent des seuls débours relatifs à des actes ou procédures judiciaires, et ne peuvent comprendre le coût du congé, qui constitue un acte extra-judiciaire, de sorte que le jugement doit être réformée de ce chef.

Le jugement doit être également réformé en ce qu'il a débouté M. [V] de sa demande fondée sur l'article 700 du code de procédure civile, l'équité commandant au contraire de lui allouer une indemnité au titre des frais irrépétibles qu'il a été contraints d'exposer pour faire valoir ses droits.

PAR CES MOTIFS

La Cour, statuant par arrêt contradictoire,

Réforme le jugement entrepris en ce qu'il a entièrement débouté Monsieur [S] [V] de sa demande en paiement d'une dette locative, et condamne Madame [M] [P] à lui verser à ce titre la somme de 390,51 euros,

Le réforme également en ce qu'il a inclus le coût du congé dans les dépens mis à la charge de la défenderesse,

Le réforme enfin en ce qu'il a débouté Monsieur [S] [V] de sa demande accessoire au titre de ses frais irrépétibles, et condamne Madame [M] [P] à lui verser à ce titre la somme de 1.500 euros,

Confirme le jugement pour le surplus,

Y ajoutant,

Condamne Madame [M] [P] aux dépens d'appel, ainsi qu'au paiement d'une somme de 1.500 euros en application de l'article 700 du code de procédure civile.

LA GREFFIERELE PRESIDENT


Synthèse
Tribunal : Cour d'appel d'Aix-en-Provence
Formation : Chambre 1-8
Numéro d'arrêt : 19/04755
Date de la décision : 04/05/2022

Origine de la décision
Date de l'import : 26/03/2024
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.appel;arret;2022-05-04;19.04755 ?
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