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29/04/2022 | FRANCE | N°22/00394

France | France, Cour d'appel d'Aix-en-Provence, Rétention administrative, 29 avril 2022, 22/00394


COUR D'APPEL D'AIX-EN-PROVENCE

Rétention Administrative

CHAMBRE 1-11 RA



ORDONNANCE

DU 29 AVRIL 2022



N° 2022/394























Rôle N° RG 22/00394 - N° Portalis DBVB-V-B7G-BJJYC



























Copie conforme

délivrée le 29 Avril 2022 par courriel à :

-l'avocat

-le préfet

-le CRA

-le JLD/TGI

-le retenu

-le MP
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Signature,

le greffier





























Décision déférée à la Cour :



Ordonnance rendue par le juge des libertés et de la détention du tribunal judiciaire de MARSEILLE en date du 27 Avril 2022 à 12h10.







APPELANT



Monsieur [L] [U] [N]

né le 24 Juin 2003 à MASCARA (ALGERIE) (...

COUR D'APPEL D'AIX-EN-PROVENCE

Rétention Administrative

CHAMBRE 1-11 RA

ORDONNANCE

DU 29 AVRIL 2022

N° 2022/394

Rôle N° RG 22/00394 - N° Portalis DBVB-V-B7G-BJJYC

Copie conforme

délivrée le 29 Avril 2022 par courriel à :

-l'avocat

-le préfet

-le CRA

-le JLD/TGI

-le retenu

-le MP

Signature,

le greffier

Décision déférée à la Cour :

Ordonnance rendue par le juge des libertés et de la détention du tribunal judiciaire de MARSEILLE en date du 27 Avril 2022 à 12h10.

APPELANT

Monsieur [L] [U] [N]

né le 24 Juin 2003 à MASCARA (ALGERIE) (99)

de nationalité Algérienne

comparant en personne, assisté de Me Lucie BRACA, avocat au barreau d'AIX-EN-PROVENCE, avocat commis d'office

et de M. [Y] [J] (Interprète en langue arabe) en vertu d'un pouvoir spécial, non inscrit sur la liste des experts de la cour d'appel d'Aix-en-Provence, ayant préalablement prêté serment.

INTIME

Monsieur le préfet des Bouches du Rhône

Avisé non représenté

MINISTÈRE PUBLIC :

Avisé et non représenté

DEBATS

L'affaire a été débattue en audience publique le 29 Avril 2022 devant Madame Rachel ISABEY, Conseiller à la cour d'appel déléguée par le premier président par ordonnance, assistée de Mme Nezha BOURIABA, Greffier,

ORDONNANCE

Réputée contradictoire,

Prononcée par mise à disposition au greffe le 29 Avril 2022 11h40

Signée par Madame Rachel ISABEY, Conseiller et Mme Nezha BOURIABA, Greffier,

PROCÉDURE ET MOYENS

Vu les articles L 740-1 et suivants du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile (CESEDA) ;

Vu l'arrêté portant obligation de quitter le territoire national pris le 26 juin 2021 par le préfet des Bouches du Rhône , notifié le même jour à 13h40 ;

Vu la décision de placement en rétention prise le 22 avril 2022 par le préfet des Bouches du Rhône notifiée le 25 avril 2022 à 09h35;

Vu l'ordonnance du 27 Avril 2022 rendue par le juge des libertés et de la détention de MARSEILLE décidant le maintien de Monsieur [L] [U] [N] dans des locaux ne relevant pas de l'administration pénitentiaire ;

Vu l'appel interjeté le 27 avril 2022 par Monsieur [L] [U] [N] ;

Monsieur [L] [U] [N] a comparu et a été entendu en ses explications. Il déclare qu'il souhaite être libéré pour se soigner, souffrant de troubles neurologiques depuis un accident survenu en 2021. Il indique 'se débrouiller' en langue française mais soutient qu'il n'a pas pu s'exprimer devant le juge des libertés et de la détention parce qu'il n'avait pas d'interprète. Interrogé sur le fait que l'ordonnance contestée reprend pourtant ses observations formulées en langue française, il admet qu'il a pu parler mais prétend qu'il n'a pas compris ce que lui disait le juge.

Son avocat a été régulièrement entendu. Il conclut en premier lieu à l'irrecevabilité de la requête préfectorale, faisant valoir qu'elle n'était pas accompagnée de la procédure pénale dont M. [N] a fait l'objet avant son incarcération. Il invoque par ailleurs l'irrégularité de la procédure administrative en l'absence d'interprète lors de la notification de l'arrêté de placement en rétention et des droits. Il conclut à l'illégalité de l'arrêté de placement en rétention, comme disproportionné, insuffisamment motivé au regard de la vulnérabilité de l'intéressé et fondé sur une appréciation erronée des garanties de représentation et de l'état de santé. Il sollicite à titre subsidiaire une assignation à résidence.

MOTIFS DE LA DÉCISION

La recevabilité de l'appel contre l'ordonnance du juge des libertés et de la détention n'est pas contestée et les éléments du dossier ne font pas apparaître d'irrégularité.

Sur la recevabilité de la requête préfectorale :

Aux termes de l'article R. 743-2 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile, à peine d'irrecevabilité, la requête est motivée, datée et signée, selon le cas, par l'étranger ou son représentant ou par l'autorité administrative qui a ordonné le placement en rétention.

Lorsque la requête est formée par l'autorité administrative, elle est accompagnée de toutes pièces justificatives utiles, notamment une copie du registre prévu à l'article L. 744-2.

L'appelant reproche à l'administration de ne pas avoir joint à sa requête les pièces de la procédure pénale ayant donné lieu à la condamnation de M. [N] et à son incarcération.

Or les pièces de cette procédure, qui n'a pas précédé immédiatement le placement en rétention, ne sont pas des pièces utiles devant être annexées à la requête préfectorale ; dès lors, il convient de rejeter la fin de non recevoir soulevée.

Sur l'absence d'interprète :

Aux termes de l'article L 141-2 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile "Lorsqu'un étranger fait l'objet d'une décision de refus d'entrée en France, de placement en rétention ou en zone d'attente, de retenue pour vérification du droit de circulation ou de séjour ou de transfert vers l'Etat responsable de l'examen de sa demande d'asile et qu'il ne parle pas le français, il indique au début de la procédure une langue qu'il comprend. Il indique également s'il sait lire.

Ces informations sont mentionnées sur la décision de refus d'entrée, de placement ou de transfert ou dans le procès-verbal prévu au premier alinéa de l'article L. 813-13. Ces mentions font foi sauf preuve contraire. La langue que l'étranger a déclaré comprendre est utilisée jusqu'à la fin de la procédure.

Si l'étranger refuse d'indiquer une langue qu'il comprend, la langue utilisée est le français."

En application de ces dispositions c'est l'étranger qui, d'une part, choisit la langue d'échange avec l'administration, d'autre part, doit déclarer s'il sait lire et écrire cette langue, et ce choix, qui doit être effectué en début de chaque procédure de non-admission, d'éloignement ou de rétention , lie l'administration et l'étranger lui même jusqu'à la fin de ladite procédure, l'étranger étant libre de choisir pour chaque procédure , telle langue qu'il pratique sans être tenu par ses éventuels choix antérieurs.

En l'espèce, il résulte de l'examen de la procédure que M. [N] a été invité à présenter ses observations le 31 janvier 2022 sur l'éventualité d'un placement en rétention. Il a été entendu en langue française, sans faire état d'une difficulté de compréhension, et a indiqué être arrivé en France en 2016 et vivre dans un foyer de jeune travailleur. Par ailleurs il ressort de l'ordonnance contestée que M. [N] s'est exprimé en langue française devant le premier juge.

Il résulte de ces énonciations et constatations d'une part, que la personne étrangère a été mise en mesure de choisir la langue qu'elle comprend dès le début de la procédure, et, d'autre part, qu'il n'est pas établi qu'elle n'aurait pas suffisamment compris les droits qu'elle pouvait exercer et les différentes mesures prises à son encontre.

En conséquence, le moyen doit être rejeté.

Sur la contestation de l'arrêté de placement en rétention :

Aux termes de l'article L741-4 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile la décision de placement en rétention prend en compte l'état de vulnérabilité et tout handicap de l'étranger.

Le handicap moteur, cognitif ou psychique et les besoins d'accompagnement de l'étranger sont pris en compte pour déterminer les conditions de son placement en rétention.

Monsieur [N] soutient que le préfet n'a pas pris en considération sa pathologie.

Si M. [N] produit des documents médicaux faisant état d'un polytraumatisme (pétéchies frontales gauches, hématomes extraduraux pariétaux, fracture temporo-fronto-pariétale, fracture de processus transverse) mais ces éléments n'étaient pas connus du Préfet lors de la prise de l'arrêté de placement en rétention, l'intéressé n'en ayant pas fait état lors du recueil de ses observations. Par ailleurs M. [N] n'établit pas que son état de santé serait incompatible avec son placement en rétention, la seule pièce médicale étant une confirmation de consultation médicale pour le 12 juillet, sans visa d'urgence ou de traitement particuliers.

C'est donc sans méconnaître le principe de proportionnalité et de nécessité et en procédant à un examen de la situation de l'étranger, et notamment de sa vulnérabilité médicale, que la décision de placement en rétention a été prise.

En application de l'article L741-1 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile l'autorité administrative peut placer en rétention, pour une durée de quarante-huit heures, l'étranger qui se trouve dans l'un des cas prévus à l'article L. 731-1 lorsqu'il ne présente pas de garanties de représentation effectives propres à prévenir un risque de soustraction à l'exécution de la décision d'éloignement et qu'aucune autre mesure n'apparaît suffisante à garantir efficacement l'exécution effective de cette décision.

Le risque mentionné au premier alinéa est apprécié selon les mêmes critères que ceux prévus à l'article L. 612-3.

Aux termes de l'article L612-3 le risque peut être regardé comme établi, sauf circonstance particulière, dans les cas suivants :

1° L'étranger, qui ne peut justifier être entré régulièrement sur le territoire français, n'a pas sollicité la délivrance d'un titre de séjour ;

2° L'étranger s'est maintenu sur le territoire français au-delà de la durée de validité de son visa ou, s'il n'est pas soumis à l'obligation du visa, à l'expiration d'un délai de trois mois à compter de son entrée en France, sans avoir sollicité la délivrance d'un titre de séjour ;

3° L'étranger s'est maintenu sur le territoire français plus d'un mois après l'expiration de son titre de séjour, du document provisoire délivré à l'occasion d'une demande de titre de séjour ou de son autorisation provisoire de séjour, sans en avoir demandé le renouvellement ;

4° L'étranger a explicitement déclaré son intention de ne pas se conformer à son obligation de quitter le territoire français ;

5° L'étranger s'est soustrait à l'exécution d'une précédente mesure d'éloignement ;

6° L'étranger, entré irrégulièrement sur le territoire de l'un des États avec lesquels s'applique l'acquis de Schengen, fait l'objet d'une décision d'éloignement exécutoire prise par l'un des États ou s'est maintenu sur le territoire d'un de ces États sans justifier d'un droit de séjour ;

7° L'étranger a contrefait, falsifié ou établi sous un autre nom que le sien un titre de séjour ou un document d'identité ou de voyage ou a fait usage d'un tel titre ou document ;

8° L'étranger ne présente pas de garanties de représentation suffisantes, notamment parce qu'il ne peut présenter des documents d'identité ou de voyage en cours de validité, qu'il a refusé de communiquer les renseignements permettant d'établir son identité ou sa situation au regard du droit de circulation et de séjour ou a communiqué des renseignements inexacts, qu'il a refusé de se soumettre aux opérations de relevé d'empreintes digitales ou de prise de photographie prévues au 3° de l'article L. 142-1, qu'il ne justifie pas d'une résidence effective et permanente dans un local affecté à son habitation principale ou qu'il s'est précédemment soustrait aux obligations prévues aux articles L. 721-6 à L. 721-8, L. 731-1, L. 731-3, L. 733-1 à L. 733-4, L. 733-6, L. 743-13 à L. 743-15 et L. 751-5.

En l'espèce la décision de placement en rétention cite les textes applicables à la situation de M. [N] et énonce les circonstances qui justifient l'application des ces dispositions. Elle précise notamment que l'intéressé s'est soustrait à la décision d'éloignement du 26 juin 2021, qu'il ne présente pas de passeport valide et ne justifie pas d'un lieu de résidence effectif dès lors qu'il déclare être logé dans un foyer.

Ces circonstances correspondent aux éléments dont le préfet disposait au jour de sa décision, étant relevé que le préfet n'est pas tenu de faire état dans sa décision de tous les éléments de la situation personnelle de l'étranger dès lors que les motifs qu'il retient suffisent à justifier le placement en rétention au regard des critères légaux.

En conséquence cette décision comporte les motifs de droit et de fait qui en constituent le fondement et M. [N] a pu être regardé comme ne présentant pas de garanties de représentation effectives propres à prévenir le risque qu'il se soustraie à l'obligation de quitter le territoire.

Sur la demande d'assignation à résidence :

Aux termes de l'article L 743-13 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile (CESEDA), le juge des libertés et de la détention peut ordonner l'assignation à résidence de l'étranger lorsque celui-ci dispose de garanties de représentation effectives.

L'assignation à résidence ne peut être ordonnée par le juge qu'après remise à un service de police ou à une unité de gendarmerie de l'original du passeport et de tout document justificatif de son identité, en échange d'un récépissé valant justification de l'identité et sur lequel est portée la mention de la décision d'éloignement en instance d'exécution.

Lorsque l'étranger s'est préalablement soustrait à l'exécution d'une décision mentionnée à l'article L. 700-1, à l'exception de son 4°, l'assignation à résidence fait l'objet d'une motivation spéciale.

L'article L 743-14 prévoit que le juge des libertés et de la détention fixe les lieux dans lesquels l'étranger est assigné à résidence, et qu'à la demande du juge, l'étranger justifie que le local affecté à son habitation principale proposé pour l'assignation satisfait aux exigences de garanties de représentation effectives.

En l'espèce, M. [N] n'est pas titulaire d'un passeport en original et en cours de validité remis au directeur du centre de rétention administrative, il est hébergé dans un sa volonté de mettre à exécution la décision d'éloignement est plus que douteuse dès lors qu'il n'a pas exécuté volontairement son obligation de quitter le territoire.

Dans ces conditions, une assignation à résidence constituerait un risque sérieux de non exécution de la mesure d'éloignement et la demande sera rejetée.

Il convient en conséquence de confirmer l'ordonnance entreprise.

PAR CES MOTIFS

Statuant publiquement par décision réputée contradictoire en dernier ressort, après débats en audience publique,

Confirmons l'ordonnance du juge des libertés et de la détention du tribunal judiciaire de MARSEILLE en date du 27 avril 2022.

Les parties sont avisées qu'elles peuvent se pourvoir en cassation contre cette ordonnance dans un délai de 2 mois à compter de cette notification, le pourvoi devant être formé par déclaration au greffe de la Cour de cassation, signé par un avocat au conseil d'Etat ou de la Cour de cassation.

Le greffier,Le président,


Synthèse
Tribunal : Cour d'appel d'Aix-en-Provence
Formation : Rétention administrative
Numéro d'arrêt : 22/00394
Date de la décision : 29/04/2022

Origine de la décision
Date de l'import : 26/03/2024
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.appel;arret;2022-04-29;22.00394 ?
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