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28/04/2022 | FRANCE | N°21/04592

France | France, Cour d'appel d'Aix-en-Provence, Chambre 1-2, 28 avril 2022, 21/04592


COUR D'APPEL D'AIX-EN-PROVENCE

Chambre 1-2



ARRÊT

DU 28 AVRIL 2022



N° 2022/ 337













Rôle N° RG 21/04592 - N° Portalis DBVB-V-B7F-BHGAZ







[J], [N] [D] épouse [T]





C/



[W] [L] épouse [Z]



























Copie exécutoire délivrée

le :



à :



Me David TRAMIER










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Décision déférée à la Cour :



Ordonnance de référé rendue par Monsieur le Président du Tribunal de Proximité de CANNES en date du 10 Mars 2021 enregistrée au répertoire général sous le n° 21-000085.





APPELANTE



Madame [J] [D] épouse [T]

née le 11 Juillet 1939 à [Localité 2],

demeurant [Adresse 1]



représentée...

COUR D'APPEL D'AIX-EN-PROVENCE

Chambre 1-2

ARRÊT

DU 28 AVRIL 2022

N° 2022/ 337

Rôle N° RG 21/04592 - N° Portalis DBVB-V-B7F-BHGAZ

[J], [N] [D] épouse [T]

C/

[W] [L] épouse [Z]

Copie exécutoire délivrée

le :

à :

Me David TRAMIER

Décision déférée à la Cour :

Ordonnance de référé rendue par Monsieur le Président du Tribunal de Proximité de CANNES en date du 10 Mars 2021 enregistrée au répertoire général sous le n° 21-000085.

APPELANTE

Madame [J] [D] épouse [T]

née le 11 Juillet 1939 à [Localité 2],

demeurant [Adresse 1]

représentée par Me David TRAMIER, avocat au barreau d'AIX-EN-PROVENCE

assistée par Me Florian FOUQUES, avocat au barreau de GRASSE,

INTIMEE

Madame [W] [L] épouse [Z]

née le 16 Janvier 1939 à [Localité 3],

demeurant Lieudit [Localité 4]

défaillante

*-*-*-*-*

COMPOSITION DE LA COUR

En application des dispositions des articles 804 et 805 du code de procédure civile, l'affaire a été débattue le 16 Mars 2022, en audience publique, les avocats ne s'y étant pas opposés, devant M. Gilles PACAUD, Président, chargé du rapport.

Ce magistrat a rendu compte des plaidoiries dans le délibéré de la Cour, composée de :

M. Gilles PACAUD, Président

Mme Catherine OUVREL, Conseillère

Mme Angélique NETO, Conseillère

Greffier lors des débats : Mme Pauline BILLO-BONIFAY.

Les parties ont été avisées que le prononcé de la décision aurait lieu par mise à disposition au greffe le 28 Avril 2022.

ARRÊT

Réputé contradictoire,

Prononcé par mise à disposition au greffe le 28 Avril 2022

Signé par M. Gilles PACAUD, Président et Mme Pauline BILLO-BONIFAY, greffier placé auquel la minute de la décision a été remise par le magistrat signataire.

***

EXPOSÉ DU LITIGE

Par acte d'huissier en date du 19 janvier 2021, Mme [W] [L] épouse [Z] a fait assigner Mme [J] [D] épouse [T] devant le juge des référés du tribunal de proximité de Cannes aux fins d'obtenir :

- la restitution de la chienne Happy des Terres Sacrées ;

- le paiement d'une somme de 2 000 euros par application des dispositions de l'article 700 du code de procédure civile, outre les entiers dépens.

A l'appui de ses prétentions, elle exposait que, selon carte d'identification établie le 10 novembre 2017, elle était propriétaire d'une chienne de race Labrador, prénommée Happy des Terres Sacrées. Par courrier daté du 28 avril 2020, elle avait été informée par le fichier national d'identification des carnivores domestiques que cette dernière avait été recueillie par la fourrière de [Localité 5]. Elle n'était pas parvenue, malgré plusieurs appels téléphoniques, à entrer en contact avec le refuge mais avait ultérieurement appris que l'animal se trouvait chez Mme [J] [T]. Cette dernière s'était refusée à la lui restituer malgré une sommation interpellative délivrée le 2 décembre 2020.

Par ordonnance réputée contradictoire en date du 10 mars 2021, le juge des référés du tribunal de proximité de Cannes a :

-ordonné la restitution de la chienne Happy des Terres Sacrées à Mme [W] [Z] ;

-condamné Mme [J] [T] à payer à Mme [W] [Z] la somme de 300 euros par application des dispositions de l'article 700 du Code de procédure civile ;

-condamné Mme [J] [T] aux entiers dépens ;

-rejeté les autres demandes des parties ;

Selon déclaration reçue au greffe le 29 mars 2021, Mme [J] [D] épouse [T] a interjeté appel de cette décision, l'appel visant à la critiquer en ce qu'elle a :

-ordonné la restitution de la chienne Happy des Terres Sacrées à Mme [W] [Z] ;

-condamné Mme [J] [T] à payer à Mme [W] [Z] la somme de 300 euros par application des dispositions de l'article 700 du Code de procédure civile ;

-condamné Mme [J] [T] aux entiers dépens ;

Par dernières conclusions transmises le 3 mars 2022, auxquelles il est renvoyé pour plus ample exposé des prétentions et moyens, Mme [J] [T] sollicite de la cour qu'elle réforme la décision rendue en première instance en toutes ses dispositions et :

- à titre principal, renvoie l'affaire sur incompétence d'attribution auprès du juge des référés du tribunal judiciaire de Grasse ;

- à titre subsidiaire, renvoie l'affaire sur l'incompétence territoriale auprès du juge de proximité de Grasse ;

- à titre infiniment subsidiaire :

' constate que la chienne est présente depuis plus de 5 années au domicile de la concluante ;

' constate que la concluante produit un certificat I-CAD de mai 2020 indiquant sa qualité de propriétaire ;

' dise et juge que la concluante est propriétaire du chien ;

' dise et juge que le juge des référés est incompétent pour connaître de cette affaire du fait de contestations sérieuses soulevées et de l'absence d'urgence ;

' condamne la partie adverse au paiement de la somme de 4 000 euros au titre des dispositions de l'article 700 du code de procédure civile ainsi qu'aux entiers dépens de l'instance.

Mme [W] [L] épouse [Z], régulièrement assignée à étude le 22 avril 2021, n'a pas constitué avocat.

L'instruction de l'affaire a été close par ordonnance en date du 2 mars 2022.

MOTIFS DE LA DÉCISION

Sur les exceptions d'incompétence

Attendu que Mme [T] soulève l'incompétence tant matérielle que territoriale du tribunal de proximité de Cannes au profit du tribunal judiciaire de Grasse sur le ressort duquel elle est domiciliée ;

Attendu que le tribunal de proximité de Cannes se trouve sur le ressort du tribunal judiciaire de Grasse ; que, de par son montant indéterminé, le présent litige ressort de la compétence de cette dernière juridiction ; qu'il convient dès lors de constater l'incompétence matérielle du juge des référés du tribunal de proximité de Cannes pour en connaître au profit de celle de son collègue du tribunal judiciaire de Grasse ; que l'ordonnance sera infirmée de ce chef ;

Attendu néanmoins que l'article 88 du code de procédure civile dispose que lorsque la cour est juridiction d'appel relativement à la juridiction qu'elle estime compétente, elle peut évoquer le fond si elle estime de bonne Justice de donner à l'affaire une solution définitive après avoir ordonné elle-même, le cas échéant, une mesure d'instruction ;

Attendu que la cour d'appel d'Aix-en-Provence est juridiction d'appel du tribunal judiciaire de Grasse ; que, compte tenu de la nature et de l'ancienneté du litige, portant de surcroît sur une chienne âgée de plus de 9 ans, il convient de faire application des dispositions de ce texte et donc d'évoquer l'affaire ;

Sur l'appel principal

Attendu qu'aux termes de l'article 834 du code de procédure civile, dans tous les cas d'urgence, le président du tribunal judiciaire ou le juge du contentieux dans les limites de sa compétence, peuvent ordonner en référé toutes les mesures qui ne se heurtent à aucune contestation sérieuse ou que justifie l'existence d'un différend ; que l'article 835 alinéa 2 du même code dispose que dans les cas où l'existence de l'obligation n'est pas sérieusement contestable, ils peuvent accorder une provision au créancier ou ordonner l'exécution d'une obligation même s'il s'agit d'une obligation de faire ;

Attendu qu'une contestation sérieuse survient lorsque l'un des moyens de défense opposés aux prétentions du demandeur n'apparaît pas immédiatement vain et laisse subsister un doute sur le sens de la décision au fond qui pourrait éventuellement intervenir par la suite sur ce point ; que c'est au moment où la cour statue qu'elle doit apprécier l'existence d'une telle contestation, le litige n'étant pas figé par les positions initiale ou antérieures des parties dans l'articulation de ce moyen ;

Attendu qu'aux termes de l'article 515-14 du code civil, les animaux sont des êtres vivants doués de sensibilité : sous réserve des lois qui les protègent, (ils) sont soumis au régime des biens ;

Attendu que l'article 2276 alinéa 1 du code civil dispose qu'en fait de meuble, la possession vaut titre ; que l'alinéa 2 du même texte précise que celui qui a perdu ou auquel il a été volé une chose peut la revendiquer pendant trois ans, à compter du jour de la perte ou du vol, contre celui dans les mains duquel il la trouve, sauf à celui-ci son recours contre celui duquel il la tient ;

Attendu que Mme [T] soutient, sans être contredite (du fait de l'absence de constitution de l'intimée), que la chienne dénommée Happy des Terres Sacrées vit chez elle depuis 5 années, date à laquelle M. [Z] s'est installé chez elle ; qu'elle ajoute que ce n'est que récemment que le couple qu'elle formait avec ce dernier s'est séparé, M. [Z] étant alors reparti vivre avec son épouse, Mme [W] [L] ;

Attendu que chacune des parties a produit aux débats, à des stades procéduraux différents, des certificats I-CAD les reconnaissant comme 'détentrice' de la chienne objet du litige ; que ces documents qui se contentent d'enregistrer et mettre en relation les coordonnées d'un maître déclaré et le numéro d'identification (insert) de l'animal, ne constituent pas, en eux-mêmes, des titres de propriété ;

Attendu qu'il n'est pas contesté qu'au moment où Mme [W] [L] épouse [Z] a revendiqué la propriété de la chienne Happy des Terres Sacrées, cette dernière vivait, depuis plusieurs années, au domicile de Mme [J] [D] épouse [T] ; que M. [Z] qui l'y avait visiblement introduite n'a pas jugé utile de s'associer à son épouse pour la revendiquer ; que le certificat I-CAD produit en première instance par l'intimée, annulé et remplacé par celui délivré le 15 mai 2020 à l'appelante, est insuffisant pour invalider la présomption tirée de l'article 2276, précité du code civil, et établir, avec l'évidence requise en référé, la propriété de Mme [L] épouse [Z] sur l'animal ; que le droit de propriété de cette dernière étant dès lors sérieusement contestable, l'ordonnance entreprise sera infirmée en ce qu'elle a ordonné la restitution de la chienne Happy des Terres Sacrées à cette dernière ;

Sur l'article 700 du code de procédure civile et les dépens

Attendu qu'il convient d'infirmer l'ordonnance déférée en ce qu'elle a condamné Mme [J] [T] aux dépens à verser à Mme [W] [L] épouse [Z] la somme de 300 euros sur le fondement de l'article 700 du code de procédure civile outre les entiers dépens ;

Attendu qu'il serait inéquitable de laisser à la charge de l'appelante les frais non compris dans les dépens, qu'elle a exposés en première instance et appel ; qu'il lui sera donc alloué une somme de 1 500 euros sur le fondement de l'article susvisé ;

Que Mme [L] épouse [Z] supportera en outre les dépens des procédures de première instance et d'appel ;

PAR CES MOTIFS

La cour,

Infirme l'ordonnance entreprise en toutes ses dispositions ;

Reçoit l'exception d'incompétence matérielle soulevée par Mme [J] [D] épouse [T] et constate que le tribunal de proximité de Cannes était matériellement incompétent, au profit du tribunal judiciaire de Grasse, pour connaître de la présente affaire ;

Évoque la présente affaire ;

Statuant à nouveau et ajoutant à l'ordonnance entreprise :

Dit n'y avoir lieu à référé sur la demande de restitution de la chienne Happy des Terres Sacrées formulée par Mme [W] [L] épouse [Z] ;

Condamne Mme [W] [L] épouse [Z] à payer à Mme [J] [D] épouse [T] la somme de 1 500 euros sur le fondement des dispositions de l'article 700 du code de procédure civile ;

Condamne Mme [W] [L] épouse [Z] aux dépens de première instance et d'appel.

La greffière Le président


Synthèse
Tribunal : Cour d'appel d'Aix-en-Provence
Formation : Chambre 1-2
Numéro d'arrêt : 21/04592
Date de la décision : 28/04/2022

Origine de la décision
Date de l'import : 26/03/2024
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.appel;arret;2022-04-28;21.04592 ?
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