COUR D'APPEL D'AIX-EN-PROVENCE
AU NOM DU PEUPLE FRANCAIS
2021
ORDONNANCE
du 11 Octobre 2021
No RG 20/11638
No Portalis DBVB-V-B7E-BGSCGChambre 2-2
ORDONNANCE NoM126
[J] [E] [D]
C/
[K] [P] [X] [W] épouse [D]
copie exécutoire
délivrée le :
à : Me Isabelle BERNI-HERVOIS
à : Me Elisabeth ESTIVAL-WELLAND
Le 11 Octobre 2021
Nous, Jean-Marc BAÏSSUS, Président de la Chambre 2-2, assisté de Jessica FREITAS, Greffier après avoir entendu les parties à l'audience d'incident du 06.09.2021 et mis l'affaire en délibéré au 11 Octobre 2021, avons rendu ce jour l'ordonnance suivante dans l'instance opposant :
Monsieur [J] [E] [D]
né le [Date naissance 1] 1956 à [Localité 3], demeurant [Adresse 1]
de nationalité Française
représenté par Me Isabelle BERNI-HERVOIS de l'ASSOCIATION GARNIER-COURTY BERNI-HERVOIS, avocat au barreau de TOULON
DEMANDEUR A L'INCIDENT
INTIME du jugement rendu le 14 Octobre 2020 par le Juge aux affaires familiales de TOULON
CONTRE /
Madame [K] [P] [X] [W] épouse [D]
née le [Date naissance 2] 1956 à [Localité 1], demeurant [Adresse 2]
de nationalité Française
représentée par Me Elisabeth ESTIVAL-WELLAND, avocat au barreau de TOULON
DEFENDERESSE A L'INCIDENT
APPELANTE dudit jugement
No RG 20/11638
Chambre 2-2
M. [J] [D] et Mme [K] [W] ont contracté mariage le [Date mariage 1] 2006 par devant l'Officier d'Etat Civil de la commune de [Localité 2] après signature d'un contrat de mariage reçu le 1er juin 2006 par Maître [C] [T], notaire à Cavalaire-sur-Mer.
Aucun enfant n'est issu de cette union.
Le 21 avril 2016, M. [J] [D] a déposé une requête en divorce.
Par ordonnance de non-conciliation en date du 13 juillet 2016, le juge aux affaires familiales de Toulon a autorisé les époux à introduire l'instance et statué sur les mesures provisoires sollicitées, à savoir :
- Condamné M. [J] [D] à payer à Mme [K] [W] une pension alimentaire de 800€ au titre du devoir de secours
- Condamné M. [J] [D] à payer à Mme [K] [W] une provision pour frais d'instance d'un montant de 600€.
Par acte délivré le 4 janvier 2019, Mme [K] [W] a assigné son mari aux fins de voir prononcer le divorce sur le fondement des articles 237 et 238 du Code Civil. M. [J] [D] a formé une demande reconventionnelle sur le même fondement.
Par jugement en date du 14 octobre 2020, le Juge aux affaires familiales de Toulon a :
- Prononcé le divorce pour altération définitive du lien conjugal
- Rappelé que le jugement prenait effet dans les rapports entre les époux en ce qui concerne leurs biens à la date de l'ordonnance de non-conciliation
- Constaté la révocation de plein droit des avantages matrimoniaux qui ne prennent effet qu'à la dissolution du régime matrimonial ou au décès de l'un des époux et des dispositions à cause de mort accordées par un époux envers son conjoint par contrat de mariage ou pendant l'union.
- Débouté Mme [K] [W] de sa demande de prestation compensatoire
- Condamné Mme [K] [W] aux dépens
- Débouté les parties de leurs demandes respectives formées au titre de l'article 700 du Code de Procédure Civile.
Mme [K] [W] a formé appel de cette décision par déclaration au greffe de la Cour d'appel de céans en date du 26 novembre 2020, la critique de la décision entreprise portant sur toutes les dispositions du jugement.
M. [J] [D] a constitué avocat le 8 décembre 2020.
M. [J] [D] a introduit le 2 juin 2021 un avenir d'audience. Il demande au Conseiller de la mise en état de :
- constater le caractère définitif du divorce pour altération définitive du lien conjugal, à la date de notification des premières conclusions de l'appelante le 25 février 2021,
supprimer à compter de cette date la pension alimentaire mise à sa charge de M. [J] [D] au titre du devoir de secours ,
- condamner Mme [K] [W] à lui rembourser les somme perçues indûment à compter du 25 février 2021
- condamner Mme [K] [W] au paiement de la somme de 3200€ à titre de dommages et intérêts pour manoeuvre dilatoire
- condamner Mme [K] [W] au paiement de la somme de 2000€ en application de l'article 700 du Code de Procédure Civile et aux entiers dépens de l'incident.
No RG 20/11638
Chambre 2-2
Il fait valoir qu'en interjetant appel le 26 novembre 2020 du principe du divorce pour altération définitive du lien conjugal, puis en réitérant dans ses premières conclusions la réformation du jugement tout en sollicitant en même temps la confirmation de la décision sur le fondement des articles 237 et 238 du Code Civil, Mme [K] [W] tente par cette manoeuvre, de maintenir artificiellement le temps de la procédure d'appel, le bénéfice de la pension alimentaire mise à la charge du mari par le magistrat conciliateur le 13 juillet 2021. Par cette manoeuvre dilatoire, il a été contraint de régler la pension alimentaire due à son épouse, entre le mois de novembre 2020 et le mois de février 2021. C'est pourquoi, il sollicite des dommages et intérêts.
Dans ses écritures en réplique notifiées le 30 août 2021, Mme [K] [W] demande à la cour de :
- supprimer à compter du 21 mai 2021, la pension alimentaire mise à la charge de M. [J] [D] au titre du devoir de secours
- la condamner à rembourser à compter du 21 mai 2021 et jusqu'au 30 juin 2021, les sommes perçues au titre du devoir de secours soit la somme de 1058.06€
- condamner M. [J] [D] à lui verser la somme de 1500€ sur le fondement de l'article 700 du Code de Procédure Civile
- condamner M. [J] [D] aux entiers dépens de l'incident.
Elle rappelle que le devoir de secours subsiste jusqu'à ce que la décision prononçant le divorce soit devenue définitive, c'est-à-dire quand aucune voie de recours ne peut plus être exercée. Le jugement qui prononce le divorce devient irrévocable à la date d'expiration du délai ouvert pour former appel incident. Il était donc loisible à M. [J] [D] de former appel incident sur le fondement juridique du divorce par le biais de ses conclusions notifiées le 21 mai 2021. C'est cette date qu'il faut retenir comme mettant fin au devoir de secours.
Sur la demande de remboursement sollicitée par l'époux, elle fait valoir qu'elle a accepté spontanément par courrier officiel de son conseil, que M. [J] [D] cesse de lui verser la pension alimentaire en exécution du devoir de secours à compter du mois de juillet 2021, sitôt après la réception des conclusions d'incident.
Sur la demande de dommages et intérêts, elle fait observer que M. [J] [D] a déjà sollicité le remboursement du trop-perçu, et qu'il ne justifie pas d'un préjudice distinct qu'il aurait subi. Elle considère que le versement de la pension alimentaire n'a été que la conséquence juridique de l'appel interjeté. Elle s'étonne d'ailleurs qu'aucune demande préalable aux conclusions d'incident n'ait été formulée par le mari.
SUR CE
Sur le caractère définitif du divorce.
Aux termes de l'article 270 alinéa 1 du Code Civil, le divorce met fin au devoir de secours entre époux.
Alors qu'elle avait obtenu satisfaction sur le fondement du prononcé du divorce, Mme [K] [W] en a interjeté appel le 26 novembre 2020. Dans ses premières conclusions notifiées le 25 février 2021, Mme [K] [W] n'a soulevé aucun moyen pour s'opposer au prononcé du divorce pour altération définitive du lien conjugal, et a demandé de façon contradictoire à la fois que le jugement soit réformé, et en même temps que le divorce soit prononcé par application des articles 237 et 238 du Code Civil.
M. [J] [D] soutient que le divorce est devenu définitif à la date des premières conclusions de l'appelante et que le devoir de secours a pris fin à cette date.
No RG 20/11638
Chambre 2-2
Mais le divorce ne devient définitif qu'au jour où plus aucune voie de recours ordinaire ne peut être exercée, donc en fait à la date des premières conclusions de l'intimé qui n'a pas remis en cause le prononcé du divorce (Cass. Civ 1er 15 décembre 2010).
C'est à bon droit que Mme [K] [W] demande à la cour de constater que le divorce est devenu définitif à la date du 21 mai 2021.
Sur le remboursement des pensions alimentaires indûment perçues
Mme [K] [W] sera tenue de rembourser à M. [J] [D] les sommes qu'elle a indûment perçues au titre du devoir de secours à compter du 21 mai 2021.
Sur l'octroi de dommages et intérêts
Aux termes de l'article 1240 du Code Civil, tout fait quelconque de l'homme qui cause dommage à autrui un dommage, oblige celui par la faute duquel il est arrivé à le réparer.
En interjetant appel d'une disposition du jugement pour laquelle elle avait obtenu entière satisfaction, Mme [K] [W] a fait usage d'une manoeuvre dilatoire pour faire perdurer artificiellement le devoir de secours.
Ce comportement fautif justifie de l'octroi à M. [J] [D] de dommages et intérêts.
Il sera alloué à l'intimé, demandeur à l'incident, la somme de 1500€.
Sur les dépens et l'application de l'article 700 du Code de Procédure Civile
Les dépens de l'incident seront mis à la charge de Mme [K] [W] .
Tenue aux dépens, celle-ci n'est pas recevable en sa demande au titre des frais irrépétibles.
La situation économique de M. [J] [D] ne commande pas qu'il soit fait droit à sa demande formée en application de l'article 700 du Code de Procédure Civile.
Par ces motifs
Nous, Magistrat de la mise en état, statuant contradictoirement, en chambre du conseil
Constatons que le divorce des époux Mme [K] [W] et M. [J] [D] est devenu définitif à la date du 21 mai 2021.
Supprimons à compter du 22 mai 2021 la pension alimentaire mise à la charge de M. [J] [D] au titre du devoir de secours
Condamnons Mme [K] [W] à rembourser les sommes indûment perçues à partir de cette date
No RG 20/11638
Chambre 2-2
Invitons les parties à saisir le juge de l'exécution en cas de désaccord sur le montant des sommes dues
Condamnons Mme [K] [W] à payer à M. [J] [D] la somme de 1500€ de dommages et intérêts
Disons que Mme [K] [W] sera tenue aux dépens de l'incident
La déclarons irrecevable en sa demande fondée sur l'article 700 du Code de Procédure Civile et déboutons M. [J] [D] de sa demande au même titre.
Le GREFFIER Le PRÉSIDENT