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29/01/2021 | FRANCE | N°17/19946

France | France, Cour d'appel d'Aix-en-Provence, Chambre 4-3, 29 janvier 2021, 17/19946


COUR D'APPEL D'AIX-EN-PROVENCE

Chambre 4-3



ARRÊT AU FOND



DU 29 JANVIER 2021



N°2021/ 24



RG 17/19946

N° Portalis DBVB-V-B7B-BBN4I







[X] [W]





C/



[SV] [P]-[W]

SELARL [S]-[U]





































Copie exécutoire délivrée

le 29 Janvier 2021 à :



- Me Romain CHERFILS, avocat au barreau d'AIX-EN-PRO

VENCE





- Me Marie-dominique POINSO-POURTAL, avocat au barreau de MARSEILLE



-Me Charles REINAUD, avocat au barreau D'AIX-EN-PROVENCE











Décision déférée à la Cour :



Jugement du Conseil de Prud'hommes - Formation paritaire de MARSEILLE en date du 29 Septembre 2017 enregistré au répertoire...

COUR D'APPEL D'AIX-EN-PROVENCE

Chambre 4-3

ARRÊT AU FOND

DU 29 JANVIER 2021

N°2021/ 24

RG 17/19946

N° Portalis DBVB-V-B7B-BBN4I

[X] [W]

C/

[SV] [P]-[W]

SELARL [S]-[U]

Copie exécutoire délivrée

le 29 Janvier 2021 à :

- Me Romain CHERFILS, avocat au barreau d'AIX-EN-PROVENCE

- Me Marie-dominique POINSO-POURTAL, avocat au barreau de MARSEILLE

-Me Charles REINAUD, avocat au barreau D'AIX-EN-PROVENCE

Décision déférée à la Cour :

Jugement du Conseil de Prud'hommes - Formation paritaire de MARSEILLE en date du 29 Septembre 2017 enregistré au répertoire général sous le n° F 15/02437.

APPELANTE

Madame [X] [W], demeurant [Adresse 8]

représentée par Me Romain CHERFILS de la SELARL LEXAVOUE BOULAN CHERFILS IMPERATORE, avocat au barreau d'AIX-EN-PROVENCE et Me Cécile PROCIDA, avocat au barreau de MARSEILLE

INTIMEES

Madame [SV] [P]-[W], demeurant [Adresse 4]

représentée par Me Marie-dominique POINSO-POURTAL, avocat au barreau de MARSEILLE

SELARL [S]-[U], demeurant [Adresse 7]

représentée par Me Jérôme FERRARO, avocat au barreau de MARSEILLE et Me Charles REINAUD, avocat au barreau d'AIX-EN-PROVENCE

*-*-*-*-*

COMPOSITION DE LA COUR

En application des dispositions des articles 804 et 805 du code de procédure civile, l'affaire a été débattue le 01 Décembre 2020 en audience publique, les avocats ne s'y étant pas opposés, devant Madame Dominique DUBOIS, Président de Chambre, et Madame Frédérique BEAUSSART, Conseiller, chargées du rapport.

Madame Dominique DUBOIS, Président de Chambre, a fait un rapport oral à l'audience, avant les plaidoiries.

Ces magistrats ont rendu compte des plaidoiries dans le délibéré de la cour, composée de :

Madame Dominique DUBOIS, Président de Chambre

Madame Ghislaine POIRINE, Conseiller faisant fonction de Président

Madame Frédérique BEAUSSART, Conseiller

Greffier lors des débats : Madame Florence ALLEMANN-FAGNI.

Les parties ont été avisées que le prononcé de la décision aurait lieu par mise à disposition au greffe le 29 Janvier 2021.

ARRÊT

CONTRADICTOIRE,

Prononcé par mise à disposition au greffe le 29 Janvier 2021.

Signé par Madame Dominique DUBOIS, Président de Chambre et Madame Florence ALLEMANN-FAGNI, greffier auquel la minute de la décision a été remise par le magistrat signataire.

* * * * * * * * * *

FAITS, PROCÉDURE ET PRÉTENTIONS DES PARTIES

Mme [X] [W] a été engagée par le Cabinet d'Avocats « [P]-[W]» à compter du 17 février 2002, en qualité de « Juriste », dans le cadre d'un contrat de travail à temps complet.

Le Cabinet « [P]-[W] » était alors composé de Maître [E] [W], père de la requérante et de Maître [SV] [P]-[W] (son épouse, belle-Mère de la salariée).

Il s'agissait d'un cabinet familial où la salariée travaillait depuis des années.

Suite à la naissance du 3ème enfant de Mme [W], et par avenant du 4 février 2010, sa durée de travail était diminuée à hauteur de 31,5 h hebdomadaires.

Au moment des faits litigieux, elle occupait donc l'emploi précité, moyennant un salaire mensuel de base d'un montant brut de 2 709,75 €, outre le paiement de diverses primes, les rapports étant régis par la convention collective du personnel salarié des Avocats.

Le Cabinet « [P]-[W] », alors situé à [Localité 12], a cédé son activité à la S.E.L.A.R.L. « [S] - [U] » à compter du 1er janvier 2015.

Maître [U] occupait le poste de « collaborateur » au sein de la structure depuis 3 années.

Cette cession portait, essentiellement, sur la présentation de la clientèle du cabinet : Le fichier et les dossiers des clients / les fichiers informatiques / le matériel et le mobilier et le droit au bail pour le local / la documentation juridique / les comptes-clients / les numéros de téléphone/fax / le droit d'utiliser le nom « [W] », etc'

Il était prévu un prix de cession d'un montant de 250 000 €, étant précisé que Maître [P]-[W] avait fait savoir qu'elle allait « cesser son activité libérale principale » après cette cession (page 3 de l'acte de cession), dans le cadre de laquelle elle ne devait conserver que les dossiers personnels de la famille (page 6 de l'acte).

Maître [W]-Père , quant à lui, avait fait savoir qu'étant en fin de carrière, il allait également se retirer et solliciter le bénéfice de l'honorariat, après avoir été « retraité actif » jusqu'au mois de décembre 2014.

Il était contractuellement garanti aux acquéreurs un chiffre d'affaires de 400 000 € H.T. pour l'année du rachat (savoir 2015).

En contrepartie de la somme précitée, les cédants s'engageaient enfin à ne pas se réinstaller en qualité d'Avocat sur la commune de [Localité 12], durant 3 ans, à ne pas solliciter leurs anciens clients -directement ou indirectement- et à ne pas troubler une exploitation normale par les repreneurs.

Maîtres [S] et [U] créaient au même moment une « SELARL » et finançaient cette acquisition avec leurs deniers personnels (pour 25 000 €) et au moyen d'un prêt bancaire de 225 000 €.

L'acte de cession dressait enfin la liste du personnel ayant vocation à être repris en application de l'article L.1224-1 du Code du travail : [X] [W] (Juriste) / Mme [R] (1er Clerc) / Mme [Z] (secrétaire) / Mme [V] (femme de ménage) et Mme [B] (femme de ménage également).

Mme [W] a été convoquée à un entretien préalable par courrier du 17 mars 2015, pour le 30 mars, avec mise à pied à titre conservatoire.

Elle a ensuite été licenciée par courrier du 10 avril pour les raisons suivantes :

« Vous avez sorti hors du cabinet des données strictement confidentielles, confiées par nos clients, en parfaite méconnaissance des obligations professionnelles inhérentes à vos fonctions et des dispositions de la Convention collective applicable.

En effet, le 13 mars dernier, nous avons constaté que vous êtes adressé par courriel, sur votre boîte mail privée, des éléments extraits des dossiers du cabinet, à savoir des actes de procédure, notes internes, documents comptables.

Vous avez procédé à ce transfert de mails sur la période du 9 mars 2015 au 16 mars 2015.

Ce comportement va à l'encontre même du secret professionnel, pourtant défini comme d'ordre public absolu, et met en péril le caractère confidentiel de la relation entre l'avocat et son client.

Par ailleurs, les éléments que vous vous êtes envoyés ne correspondent pas à des dossiers que nous vous avions confiés et les éléments de procédure ne sont pas des éléments que vous avez personnellement rédigés. Aucune instruction ne vous ayant été donnée dans ces dossiers, ce transfert de données n'avait donc absolument pas lieu d'être.

Lors de l'entretien que nous avons eu, vous n'avez d'ailleurs pas nié avoir extrait des éléments de procédure des dossiers, pour les envoyer sur votre boîte mail personnelle.

Dès lors, aucune excuse ne serait de nature à justifier de tels agissements et vous n'en avez d'ailleurs trouvé aucune à nous fournir, lors de l'entretien du 30 mars dernier.

De plus, lorsque nous avons consulté votre boîte électronique professionnelle, le 13 mars 2015, nous avons également constaté que vous aviez pris soin d'effacer les mails que vous vous étiez envoyés, les laissant par mégarde, dans la boîte mail supprimés. Cet état de fait dénote le caractère volontairement malveillant de vos actes ainsi que votre intention de nuire évidente aux intérêts de notre structure.

Étant précisé qu'il s'agissait là de mails non identifiés comme personnel, que nous étions donc parfaitement en droit de consulter.

Vos agissements sont inacceptables dans l'absolu mais le sont d'autant plus compte tenu de la situation actuelle du cabinet.

En effet, vous n'êtes pas sans ignorer le contexte actuel dans lequel nous nous trouvons, résultant de la cession de clientèle qui a eu lieu au mois de janvier dernier et aux termes de laquelle certains dossiers nous ont été retirés par des clients, dans des conditions très discutables.

A ce titre nous avons d'ailleurs pu constater que les dossiers qui nous ont été retirés font partie de ceux que vous vous êtes envoyés par mail.

Il est indéniable que vos agissements avaient pour seul objet de détourner la clientèle que notre cabinet a pourtant valablement reprise depuis le début de l'année.

En effet, nous avons constaté que vous êtes adressé le bloc-notes d'un dossier en particulier (note interne à usage exclusif du cabinet) par mail le 9 mars 2015, dès votre arrivée à votre poste, soit juste avant que les clients intéressés par ce dossier ne sollicitent sa récupération, et donc son retrait de notre cabinet, à seulement quelques heures d'intervalle.

Ce comportement a pour seule visée de nuire au cabinet et de permettre la poursuite du dossier (avec nos notes) par un autre cabinet.

Plus grave encore, nous avons constaté que vous avez établi un détail complet de la comptabilité du cabinet le 12 mars dernier, en antidatant le document au 31 décembre 2014, alors même que vous n'êtes pas censée avoir accès à ces éléments, qui sont exclusivement gérés par un comptable.

De surcroît, vous avez récupéré ce document confidentiel et avez manifestement transmis ces nformations à une personne, extérieure au cabinet, pour en faire usage auprès de nos clients et désormais ancien client, et percevoir ou faire percevoir ainsi des honoraires qui reviennent pourtant directement à notre cabinet.

Votre comportement est parfaitement intolérable et cause un grave préjudice à notre structure.

En effet, vous agissements ont fait perdre des clients et honoraires à notre cabinet, impliquant une baisse de chiffre d'affaires.

Vous avez ainsi gravement manqué à vos obligations professionnelles, notamment celle de confidentialité et de loyauté à l'égard de votre employeur, pourtant inhérentes à toute relation de travail et d'autant plus dans le cas de notre activité.

Vous avez délibérément agi à l'encontre des intérêts de notre cabinet : vous étiez donc animée d'une intention de nuire évidente.

Ce licenciement étant causé par une faute lourde,'' »

A la suite du licenciement prononcé pour faute lourde, les relations contractuelles ont pris fin le 11 avril 2015.

Par convocation du 17 septembre 2015, Mme [W] a saisi le Conseil de Prud'hommes de Marseille, en sa Section « Encadrement », de diverses demandes afférentes à l'exécution et la rupture de son contrat de travail.

Suivant jugement du 29 sept. 2017, le Conseil de Prud'hommes de MARSEILLE a débouté la salariée de la majeure partie de ses demandes et a condamné la SELARL [S] [U] au paiement des sommes suivantes :

- 3 781,40 € à titre de rappel d'indemnités de congés payés de l'année N-1,

- 3 337,56 € à titre de rappel d'indemnités de congés payés de l'année N

- 1000 € au titre de l'Article 700 du CPC.

Madame [W] a interjeté appel de cette décision le 6 novembre 2017.

Dans ses dernières conclusions en date du 6 août 2018, auxquelles il est expressément référé pour un plus ample exposé des prétentions et des moyens, Madame [W] demande à la cour de :

Vu les dispositions légales et conventionnelles invoquées

Vu la jurisprudence applicable

Vu les pièces justificatives versées aux débats

- écarter des débats la pièce adverse référencée sous le numéro 33 sous bordereau de pièces communiquées par la SELARL CABINET [S] [U]

- infirmer le jugement rendu le 29 septembre 2017 par le Conseil de Prud'hommes sauf notamment en ce qu'il a :

- condamné la SELARL CABINET [S] [U] régler à Madame [X] [W] à titre de rappel de salaire sur indemnités de congés payés les sommes de :

- 3781,40 € bruts au titre de l'année N-1 ;

- 3 337,56 € bruts au titre de l'année N ;

- acté que la SELARL CABINET [S] [U] a d'ores et déjà réglé la somme de 2000€ bruts de ce chef en exécution de la décision du bureau de conciliation ;

- condamné la SELARL CABINET [S] [U] à payer à Mme [X] [W], une indemnité de procédure de 1 000 € en application des disposition de l'article 700 du Code de Procédure Civile ;

-condamné la SELARL CABINET [S] [U] aux entiers dépens.

- l'infirmer en ce qu'il a débouté Mme [X] [W] de ses autres demandes.

Et statuant à nouveau sur les chefs infirmés

- dire et juger que Madame [X] [W] n'a commis aucune faute a fortiori grave ou lourde.

- dire et juger, à titre principal nul et sans cause réelle et sérieuse le licenciement dont a été victime Madame [X] [W], à titre subsidiaire dénué de cause réelle et sérieuse

En conséquence

- condamner la SELARL CABINET [S]-[U] à verser à Mme [X] [W] la

somme de :

- 40 000 € nets à titre de dommages et intérêts pour licenciement nul à titre principal, pour absence de cause réelle et sérieuse à titre subsidiaire ;

- 9186,03 € bruts à titre d'indemnité compensatrice de préavis, outre 918, 60 € bruts à titre d'indemnité de congés payés y afférents ;

- 2551,675 € bruts à titre de rappel de salaire sur mise à pied conservatoire, outre 255,17 € bruts à titre de congés payés y afférents ;

- 1913,76 € bruts à titre de rappel de salaire sur indemnité conventionnelle de 13ième mois 2015 prorata temporis, outre 191,38 € bruts à titre de congés payés y afférents ;

- 10 664,37 € nets à titre d'indemnité conventionnelle de licenciement ;

- 2 000 € nets à titre de dommages et intérêts pour privation abusive du droit à portabilité frais soins de santé et prévoyance.

- dire et juger que la procédure de licenciement a été irrégulière et condamner de ce chef la SELARL CABINET [S] [U] à verser à son ancienne salariée, la somme de 2 000 € nets à titre de dommages et intérêts pour irrégularité de la procédure.

- dire et juger que la procédure de licenciement a été entourée de circonstances vexatoires et condamner de ce chef la SELARL CABINET [S] [U] à verser la somme de 5.000 € nets à titre de dommages et intérêts pour préjudice moral distinct

- dire et juger que les documents de fin de contrat remis à la salariée sont affectés d'irrégularités et ont été remis tardivement

- condamner la SELARL CABINET [S] [U] à verser la somme de 3 000 € nets à titre de dommages et intérêts pour irrégularité et remise tardive des documents de fin de contrat

- dire et juger que Mme [X] [W] a fait l'objet d'harcèlement moral et de discrimination fondée sur son origine, sa situation de famille, son nom et sa qualité de témoin

- condamner de ce chef la SELARL CABINET [S] [U] à lui régler la somme symbolique de 1 € nets à titre de dommages et intérêts pour harcèlement moral et la somme symbolique de 1 €nets pour discrimination.

- ordonner pour assurer l'entière réparation du préjudice moral de la salariée, la publication partielle du dispositif du jugement en ce qu'il constate le caractère illicite(nul) et sans cause réelle et sérieuse du licenciement dont a fait l'objet Madame [X] [W] dans le journal et l'édition du choix de la requérante ou à défaut de la juridiction aux frais de l'employeur

- dire et juger que la SELARL CABINET [S] [U] a manqué à son obligation d'exécuté de bonne foi et loyalement le contrat de travail et a commis des exécutions fautives du contrat de travail

- la condamner de ce chef à verser la somme de 4 000 € nets à titre de dommages et intérêts pour exécution fautive et déloyale du contrat de travail en réparation du préjudice moral distinct occasionné à la salariée

- fixer la rémunération mensuelle moyenne de Mme [X] [W] à la somme de 3 554,79 € bruts.

- ordonner sous astreinte de 100 € par jour de retard passé le délai de 10 jours à compter de la notification du jugement à intervenir : d'un certificat de travail régularisé, d'un bulletin de salaire récapitulatif des condamnations salariales prononcées par le jugement précisant leur périodicité ainsi que d'une attestation POLE EMPLOI régularisée conforme et une attestation au titre du droit individuel à la formation de 120 heures tout en réservant à la Cour la faculté de liquider l'astreinte en cas de défaillance du débiteur

- donner injonction sous astreinte identique à la SELARL CABINET [S] [U] d'avoir à régulariser la situation de Madame [X] [W] auprès des organismes sociaux au bénéfice desquels ont été prélevées les cotisations figurant sur les bulletins de paie édités par l'employeur

- condamner la SELARL CABINET [S]-[U] à verser la somme de 2000 € sur le fondement de l'article 700 du Code de procédure civile pour les frais irrépétibles exposés en cause d'appel, en sus des 1000 € déjà alloués par les premiers juges au titre de la première instance :

- fixer le point de départ des intérêts légaux à compter du 11 avril 2015 pour les condamnations au titre de l'indemnité compensatrice de préavis, de rappel de salaire sur mise à pied conservatoire, de complément de treizième mois, d'indemnités de congés payés et d'indemnité de licenciement et à compter de la demande en justice, soit le 16 septembre 2015 pour les autres condamnations à intervenir avec capitalisation des intérêts pour les intérêts dus au moins pour une année entière

- dire et juger infondé et/ou irrecevable l'appel incident formulé par la SELARL CABINET [S] [U]

- débouter la SELARL [S]- [U] de toutes ses demandes, fins et conclusions plus amples ou contraires.

- condamner la SELARL CABINET [S]-[U] à supporter les entiers dépens d'appel.

Dans ses dernières conclusions en date du 18 avril 2018, auxquelles il est expressément référé pour un plus ample exposé des prétentions et des moyens ,Madame [P] [W] demande à la cour de :

Vu le jugement du Conseil de Prud'hommes de Marseille du 29 septembre 2017

- confirmer le jugement en ce qu'il a condamné la SELARL CABINET [S] [U] à régler à Madame [X] [W] à titre de rappel sur indemnités de congés payés les sommes de :

o 3 781.40 € bruts au titre de l'année N-l

o 3 337.56 € bruts au titre de l'année N

- confirmer le jugement en ce qu'il a débouté la SELARL CABINET [S] [U] de son appel en garantie formé à l'encontre de Me Sophie KUJUMGIAN ANGLADE

- statuer ce que de droit sur les dépens.

Dans ses dernières conclusions en date du 11 novembre 2020 , auxquelles il est expressément référé pour un plus ample exposé des prétentions et des moyens , la SELARL CABINET [S] [U] demande à la cour de :

Vu notamment les articles L.1134-1, L.1235-5, L. 1224-1 et 2 du Code du Travail

Vu notamment l'article L.911-8 du Code de la sécurité sociale

Vu la Convention collective applicable,

Vu le Jugement du 29 septembre 2017,

- dire Mme [W] infondée en son appel,

- confirmer le Jugement entrepris en ce qu'il a dit et jugé que le licenciement de Mme [X] [W] reposait sur une faute lourde,

- le confirmer en ce qu'il a débouté la salariée de l'intégralité de ses autres demandes,

- le réformer pour le surplus,

Y ajoutant, à titre incident,

- condamner Mme [W] au paiement des sommes suivantes :

- 86 949 € à titre de dommages-intérêts pour exécution lourdement fautive du contrat de travail, autorisant la mise en jeu de la responsabilité pécuniaire du salarié,

- 1 000 € à titre de dommages-intérêts pour procédure abusive,

- en tout état de cause, condamner Mme [SV] [P] [W], ès-qualité d'employeur initial, à relever et garantir la SELARL [S]-[U] de toute condamnation relative à l'indemnité compensatrice de congés payés qui pourrait être prononcée contre elle compte tenu des dates d'acquisition et de prise de congés,

- condamner Mme [W] à restituer à la SELARL [S]-[U] la somme de 2000 € indûment versée à titre de provision sur l'indemnité de congés payés.

- condamner Mme [W] à la somme de 2500 € au titre de l'article 700 du CPC en cause d'appel.

- condamner Mme [W] aux entiers dépens distraits au profit de Maître [A] [TN] sur son intervention de droit.

- Sur la demande de rejet de la pièce adverse 33

Madame [W] sollicite le rejet de la pièce adverse 33, soit un acte interne de procédure des services du parquet, faute d'autorisation expresse par le procureur général de production, cette communication allant à l'encontre du secret de l'enquête prescrit par l'article 11 du code de procédure pénale.

La SELARL [S] [U] ne conclut pas sur ce point.

- Sur le caractère abusif et la nullité du licenciement

Madame [W] soutient en premier lieu que le licenciement est abusif, en second lieu qu'il est nul car discriminatoire.

Elle expose que la lettre de licenciement qui fixe les limites du litige ne contient :

- aucun grief tiré d'un prétendu dénigrement par la salariée de son employeur auprès de quiconque ni même le grief plus général tiré de l'existence de prétendus agissements inappropriés de la salariée directement envers la clientèle du cabinet.

- aucun grief tiré d'un prétendu manque de sérieux ou de suivi de dossiers par ses soins ou acte positif/négatif de la salariée envers la clientèle du cabinet ;

- aucun grief tiré d'une incitation par la salariée auprès de la clientèle du cabinet de retirer leur dossier.

Elle soutient que l'employeur produit pourtant de nombreux éléments relatifs à ces griefs qu'elle conteste de surcroît.

Elle prétend que l'employeur ne rapporte pas la preuve de la faute lourde qui lui incombe, qu'il était notamment informé du fait qu'elle travaillait à partir de sa boîte mail personnelle et de ses méthodes de travail en dehors des lieux, outils et horaires de travail.

Elle allègue du caractère non probant du constat d'huissier dressé le 13 mars 2015 hors sa présence ainsi que de la plainte déposée par son employeur le 5 mai 2015 pour d'autres motifs que ceux développés dans la lettre de licenciement.

Elle expose que les éléments produits par l'employeur ne lui sont pas imputables personnellement et qu'elle s'était inquiétée à plusieurs reprises auprès de ce dernier du fait que des documents sur son poste avaient été consultés , créés ou modifiés.

Elle conteste le caractère fautif des faits reprochés et l'intention de nuire.

Elle soutient que le véritable motif du licenciement est discriminatoire et que la procédure est la résultante directe de sa qualité de témoin dans le cadre d'une procédure pénale opposant l'un de ses employeurs à son père suite à une altercation à laquelle elle a assisté le 24 février 2015.

Le licenciement, est selon elle, en lien avec l'appartenance familiale et le nom de famille de la salariée.

En outre, il s'agirait d'un licenciement économique déguisé.

La SELARL [S] [U] soutient que les consorts [P] [W], loin d'arrêter leur activité, ont ouvert un cabinet d'avocat sur [Localité 11] , à quelques kilomètres de leur précédent cabinet cédé portant le même nom et qu'a intégré par la suite Madame [W] suite à son licenciement, que Madame [W] a mis à profit les quelques semaines passées dans le cabinet après la reprise pour permettre, encourager et faciliter le transfert d'une partie de la clientèle cédée vers le cabinet créé par ses parents.

Ainsi Madame [W] transférait toutes les données des dossiers sur sa boîte mail personnelle y compris ceux dont elle n'avait pas la charge ainsi que des éléments comptables, des suivis de diligence qu'elle a ensuite supprimés et ce jusqu'à son dernier jour de travail effectif le 16 mars 2015.

Ces faits ont été constatés par un huissier de justice le 13 mars 2015.

Madame [W] ne prouve pas le piratage de sa boîte mail ni n'explique comment elle n'a pu s'apercevoir de leur envoi sur sa boîte mail personnelle.

Contrairement à ses allégations, elle n'a jamais signalé ce problème à ses employeurs.

Elle se contredit dans ses explications en soutenant qu'elle travaillait à domicile et n'explique pas dans ce cas pour quelle raison elle a tenté de supprimer les mails envoyés.

Contrairement aux affirmations de la salariée, la lettre de licenciement vise bien ces agissements qui avaient pour seul objet de détourner la clientèle du cabinet cédé ainsi que l'intention de nuire de Madame [W].

Quant à la discrimination alléguée, il est constant que les transferts de mails sont antérieurs à l'altercation invoquée et que la salariée n'étaye pas sa demande.

Quant au licenciement prétendument économique déguisé, l'employeur rappelle que l'embauche d'un collaborateur faisait suite au départ de Maître [P] .

- Sur l'irrégularité de la procédure de licenciement

Madame [W] soutient que la procédure est irrégulière car il est fondé sur des faits non évoqués lors de l'entretien préalable, en violation des dispositions de l'article L 1232-3 du code du travail.

L'employeur expose que la procédure a été respectée , que la salariée était assistée d'un conseiller du salarié et ne justifie d'aucun préjudice.

- Sur la demande de dommages et intérêts du fait des circonstances vexatoires de la procédure de licenciement

Madame [W] soutient que le licenciement est intervenu dans des circonstances vexatoires et qu'elle a subi un préjudice moral , ayant été mise à pied conservatoire alors qu'elle était en arrêt maladie.

L'employeur expose qu'il a simplement suivi les dispositions du code du travail .

- Sur les demandes au titre de l'irrégularité des documents de fin de contrat et leurs remises tardives

Madame [W] expose qu'elle n'a récupéré ses documents de fin de contrat que le 21 avril 2015 alors qu'elle s'était déplacée plusieurs fois en vain et que l'attestation Pôle Emploi n'était pas conforme en de nombreux points, ce qui a occasionné un retard dans sa prise en charge et qu'elle n'a pu percevoir ses allocations chômage que le 19 juin 2015.

L'employeur souligne que Madame [W] a reçu la lettre de licenciement le 12 avril et les documents sociaux lui ont été adressés le 21 avril et que le préjudice n'est pas établi.

Quant à l'erreur supposée dans l'attestation Pôle Emploi, la salariée ne le démontre pas plus le préjudice causé.

- Sur l'exécution fautive et déloyale du contrat de travail

Madame [W] prétend que par avenant du 29 janvier 2015, son employeur a modifié son contrat de travail, en supprimant un vendredi sur 5 non travaillé et en prévoyant qu'au delà des 20 heures de formation annuelles , les heures de formation durant le temps de travail seraient décomptées des congés payés ou des heures de récupération, ce qui serait dolosif et illégal , qu'elle n'a pas bénéficié d'aide pour financer sa formation à la différence de Madame [Z], secrétaire.

L'employeur soutient que le contrat de travail a été modifié à la demande de la salariée et que l'avenant est signé des deux parties.

Madame [W] soutient ensuite avoir été victime de harcèlement moral et de discrimination.

Au titre du harcèlement moral, elle se prévaut des faits suivants :

Mise en difficulté et pressions dans le cadre de l'accomplissement de ses fonctions

Privation des outils de travail et mise à l'écart

Modification de la répartition de ses horaires de travail avec désormais obligation de poursuivre sa formation pendant ses congés payés dans les conditions illicites

Des mesures attentatoires à sa crédibilité professionnelle

Une mise à l'écart des autres membres du cabinet

Un contexte anxiogène de travail

Des faits de déstabilisation

Ces agissements répétés ayant eu un impact sur son état de santé et son avenir professionnel.

L'employeur expose qu'aucun élément n'est versé aux débats , si ce n'est la prétendue modification du contrat de travail et souligne que la prescription d'un traitement médicamenteux du 12 mars 2015 semble avoir été fait au profit D'[W] 'JJ' et non 'N' pour [X].

S'agissant de la discrimination, Madame [W] se prévaut du fait que le lien de parenté entre elle et les cédants a été déterminant dans la logique d'éviction de la salariée.

L'employeur le conteste.

- Sur les congés payés et l'appel en garantie de Maître Sophie KUJUMGIAN ANGLADE

Madame [W] rappelle que de principe aucun motif de licenciement ne peut provoquer la perte des congés et conteste avoir pris ses congés , elle sollicite confirmation du jugement déféré et s'en remet à justice sur l'appel en garantie de Maître [SV] [P] [W].

Maître Sophie KUJUMGIAN ANGLADE , qui ne conteste pas que s'agissant des congés acquis par Madame [W] antérieurement à la cession du cabinet, le cédant en est débiteur à première demande du cessionnaire , dans les conditions prévues au contrat, soutient que le compteur congés payés de Madame [W] est exact et que cette dernière n'a pris que très peu de congés et prétend qu'il appartenait en dehors de toute procédure à l'employeur de se faire subroger par le cédant, la procédure étant par conséquent abusive.

La SELARL [S] [U] expose que Madame [W] qui avait un compteur de plus de 50 jours de congés payés acquis chez son précédent employeur avait pris ses congés payés qui n'étaient pas décomptés volontairement et qu'aucune somme ne lui est due à ce titre.

En outre, Madame [W] a été privée de son indemnité de congés payés en raison de la faute lourde commise, et si cette privation a été invalidée par la conseil constitutionnel et que la cour de cassation en a pris acte, pour autant le nouvel employeur est en droit de demander le remboursement de la créance salariale dont une partie incombait à l'ancien , ce qui est d'ailleurs prévu par l'acte de cession.

Madame [W] qui n'a pas travaillé trois mois au sein de la SELARL a acquis au plus 7,5 jours de congés payés et elle en a pris 8 en janvier.

La SELARL n'est donc redevable d'aucune indemnité de congés payés et en tout état de cause, il appartient à Maître [P] [W] de la garantir pour les 44,5 jours acquis au 31 décembre 2014 par la salariée.

- Sur la demande au titre de la responsabilité pécuniaire de Madame [W]

Madame [W] expose que le licenciement ne reposant sur aucune cause réelle et sérieuse, sa responsabilité pécuniaire ne peut être recherchée, qu'elle n'est pas partie au contrat de cession et qu'aucun lien de causalité n'est établi entre une faute de la salariée et la perte de chiffre d'affaires alléguée par son employeur qui n'a d'ailleurs pas mis en oeuvre la clause résolutoire et/ou autres garanties prévues au contrat.

La salariée, s'agissant des dommages et intérêts sollicités pour procédure abusive, indique qu'elle n'a fait qu'user de son droit d'ester en justice sans qu'aucun abus ou excès ne puisse lui être imputé.

L'employeur rappelle que, de principe, la faute lourde autorise la mise en oeuvre de la responsabilité pécuniaire du salarié.

Sur les 400.000 € HT de chiffre d'affaires garantis, ils n'ont pu faire que 313.051 € de chiffre pour leur premier exercice 2015 avec un résultat net de 72.150 € et Madame [W] en est directement responsable et co-auteur.

Le montant du préjudice subi s'élève à la somme de 86.949 € .

Compte tenu de sa mauvaise foi, Madame [W] sera également condamnée à des dommages et intérêts pour procédure abusive.

Vu l'ordonnance de clôture en date du 13 novembre 2020 ;

Vu l'article 455 du code de procédure civile ;

SUR CE

- Sur la demande de rejet de la pièce adverse 33

Cette pièce dont il est sollicité le rejet est un soit-transmis du procureur de la république adjoint d'Aix en Provence adressé au CSP [Localité 12], en date du 23 juin 2017, le priant de BV procéder à une enquête concernant les faits dénoncés dans le courrier de plainte ci-joint de Maître [S] et [U] et mettant en cause Maître [E] [W], [SV] [P] -[W] et [X] [W], des chefs notamment d'exercice illégal de la profession d'avocat, menaces, escroquerie, faux en écriture et usage, vol et de bien vouloir le tenir informé de l'avancée de ses investigations.

Ce soit transmis concerne bien la salariée et s'il n'y est pas joint le courrier de plainte, l'employeur verse aux débats la plainte qu'il a déposé à l'encontre de la salariée le 5 mai 2015 qui indiquait que les éléments de procédures avaient été transmis , selon l'employeur à M. [W] et que le bâtonnier était saisi.

Il s'en suit que la cour, dans son pouvoir souverain, retient cette pièce, aucune violation du secret de l'enquête ne pouvant être utilement allégué par la salariée au vu de ce seul soit-transmis, antérieur par définition à toute enquête.

- Sur le licenciement pour faute lourde

Dès lors qu'un employeur, pour donner un effet immédiat à sa décision de rompre la relation de travail et se dispenser des obligations de délai-congé et d'indemnisation, a invoqué une faute lourde du salarié, il lui incombe d'en apporter la preuve dans les termes énoncés dans la lettre de licenciement.

En l'espèce, dans la lettre de licenciement du 10 avril 2015, la société intimée a énoncé les motifs suivants pour prononcer une rupture immédiate du contrat de travail pour faute lourde :

« Vous avez sorti hors du cabinet des données strictement confidentielles, confiées par nos clients, en parfaite méconnaissance des obligations professionnelles inhérentes à vos fonctions et des dispositions de la Convention collective applicable.

En effet, le 13 mars dernier, nous avons constaté que vous êtes adressé par courriel, sur votre boîte mail privée, des éléments extraits des dossiers du cabinet, à savoir des actes de procédure, notes internes, documents comptables.

Vous avez procédé à ce transfert de mails sur la période du 9 mars 2015 au 16 mars 2015.

Ce comportement va à l'encontre même du secret professionnel, pourtant défini comme d'ordre public absolu, et met en péril le caractère confidentiel de la relation entre l'avocat et son client.

Par ailleurs, les éléments que vous vous êtes envoyés ne correspondent pas à des dossiers que nous vous avions confiés et les éléments de procédure ne sont pas des éléments que vous avez personnellement rédigés. Aucune instruction ne vous ayant été donnée dans ces dossiers, ce transfert de données n'avait donc absolument pas lieu d'être.

Lors de l'entretien que nous avons eu, vous n'avez d'ailleurs pas nié avoir extrait des éléments de procédure des dossiers, pour les envoyer sur votre boîte mail personnelle.

Dès lors, aucune excuse ne serait de nature à justifier de tels agissements et vous n'en avez d'ailleurs trouvé aucune à nous fournir, lors de l'entretien du 30 mars dernier.

De plus, lorsque nous avons consulté votre boîte électronique professionnelle, le 13 mars 2015, nous avons également constaté que vous aviez pris soin d'effacer les mails que vous vous étiez envoyés, les laissant par mégarde, dans la boîte mail supprimés. Cet état de fait dénote le caractère volontairement malveillant de vos actes ainsi que votre intention de nuire évidente aux intérêts de notre structure.

Étant précisé qu'il s'agissait là de mails non identifiés comme personnel, que nous étions donc parfaitement en droit de consulter.

Vos agissements sont inacceptables dans l'absolu mais le sont d'autant plus compte tenu de la situation actuelle du cabinet.

En effet, vous n'êtes pas sans ignorer le contexte actuel dans lequel nous nous trouvons, résultant de la cession de clientèle qui a eu lieu au mois de janvier dernier et aux termes de laquelle certains dossiers nous ont été retirés par des clients, dans des conditions très discutables.

A ce titre nous avons d'ailleurs pu constater que les dossiers qui nous ont été retirés font partie de ceux que vous vous êtes envoyés par mail.

Il est indéniable que vos agissements avaient pour seul objet de détourner la clientèle que notre cabinet a pourtant valablement reprise depuis le début de l'année.

En effet, nous avons constaté que vous êtes adressé le bloc-notes d'un dossier en particulier (note interne à usage exclusif du cabinet) par mail le 9 mars 2015, dès votre arrivée à votre poste, soit juste avant que les clients intéressés par ce dossier ne sollicitent sa récupération, et donc son retrait de notre cabinet, à seulement quelques heures d'intervalle.

Ce comportement a pour seule visée de nuire au cabinet et de permettre la poursuite du dossier (avec nos notes) par un autre cabinet.

Plus grave encore, nous avons constaté que vous avez établi un détail complet de la comptabilité du cabinet le 12 mars dernier, en antidatant le document au 31 décembre 2014, alors même que vous n'êtes pas censée avoir accès à ces éléments, qui sont exclusivement gérés par un comptable.

De surcroît, vous avez récupéré ce document confidentiel et avez manifestement transmis ces informations à une personne, extérieure au cabinet, pour en faire usage auprès de nos clients et désormais ancien client, et percevoir ou faire percevoir ainsi des honoraires qui reviennent pourtant directement à notre cabinet.

Votre comportement est parfaitement intolérable et cause un grave préjudice à notre structure.

En effet, vous agissements ont fait perdre des clients et honoraires à notre cabinet, impliquant une baisse de chiffre d'affaires.

Vous avez ainsi gravement manqué à vos obligations professionnelles, notamment celle de confidentialité et de loyauté à l'égard de votre employeur, pourtant inhérentes à toute relation de travail et d'autant plus dans le cas de notre activité.

Vous avez délibérément agi à l'encontre des intérêts de notre cabinet : vous étiez donc animée d'une intention de nuire évidente.

Ce licenciement étant causé par une faute lourde,'' »

Au soutien de ces griefs, l'employeur produit un constat d'huissier en date du 13 mars 2015 dont il résulte qu'il a été désigné à l'huissier intervenant au cabinet [S] [U] à leur demande le poste informatique de Madame [X] [W]

- l'huissier a double cliqué sur l'écran d'accueil sur l'icône raccourcis intitulée 'Clior Open' puis double cliqué sur l'onglet 'Cabinet [SV] [P] ANGLA', entré le code responsable 'NA', le nom responsable [W] [X] est apparu, il a validé, la page d'accueil Clior Open s'est affichée, il a cliqué sur 'Emails/Internet', la boîte mail est apparue, il a cliqué sur 'Eléments supprimés', une liste de messages est apparue.

- Il a édité 9 mails de cette liste sur 9 pages qu'il a annexé au constat.

- Il lui a été déclaré qu'en ce qui concerne les pièces jointes aux mails des Lundi 9 Mars 2015 à 9h00 (1doc), Mardi 10 Mars 2015 à 15h45 (1doc) et Mardi 10 Mars 2015 à 16h07 (2doc), il s'agit des « bloc-notes» internes au dossier qui sont des documents qui regroupent l'ensemble des éléments relatifs au dossier: éléments comptables, suivi des rendez-vous, suivi des diligences effectuées, échanges de mail, recherches juridiques relatives au dossier ...

- Son Ministère étant clos, il s'est retiré.

Il est annexé à ce constat une photographie de l'écran d'accueil Clior Open, de la boîte de réception [X] [W], des éléments supprimés de [X] [W] en grande partie illisible, et les 9 mails suivants de la boîte éléments supprimés de [X] [W] :

De: [Courriel 6]

A : [Courriel 10]

Date: Jeudi 26 Février 2015 à 13:16

Pièce jointe: MÉMOIRE RÉCAPITULATIF PROJET.doc

Message rattaché au dossier n° 20120167

Objet :Dossier n° 20120167 (BOURI! ODD)

CABINET [W] & ASSOCIES

SELARL d'Avocats à la Cour

Le mémoire récapitulatif n'est pas joint. L'employeur ne le produit pas plus.

De: [Courriel 6]

A : [Courriel 10]

Date: Jeudi 26 Février 2015 à 15:15

Pièce jointe: MÉMOIRE RÉCAPITULATIF PROJET.doc

Message rattaché au dossier n° 20120167

Objet :Dossier n° 20120167 (BOURI/QDD)

CABINET [W] & ASSOCIES

SELARL d'Avocats à la Cour

Le mémoire récapitulatif n'est pas joint ni versé aux débats par l'employeur.

De: [Courriel 6]

A: [Courriel 10]

Date: Jeudi 26 Février 2015 à 16:51

Pièce jointe: MÉMOIRE RÉCAPITULATIF PROJET.doc

Message rattaché au dossier n° 20120167

Objet :Dossier n° 20120167 (BOURI! ODD)

CABINET [W] & ASSOCIES

SELARL d'Avocats à la Cour

La pièce jointe n'est pas plus annexée ni produite aux débats.

De: [Courriel 6]

A: [Courriel 10]; [Courriel 6]

Date: Jeudi 26 Février 2015 à 15:58

Pièce jointe: MÉMOIRE RÉCAPITULATIF PROJET.doc

Message rattaché au dossier n° 20120167

Objet :Dossier n° 20120167 (BOURI/QDD) le MÉMOIRE complémentaire

CABINET [W] & ASSOCIES

SELARL d'Avocats à la Cour

Aucune pièce jointe annexée au constat ni versée aux débats.

De: [Courriel 6]

A: [Courriel 10]

Date: Lundi 09 Mars 2015 à 09:00

Pièce jointe: 1.doc

Message rattaché au dossier n° 20140124

Objet :Dossier n° 20140124 (SCI [L] ([O]) I QDD 1ÈRECH. SECTIONA RG

14/0441

CABINET [W] & ASSOCIES

SELARL d'Avocats à la Cour

La pièce jointe n'est pas produite et il est donc impossible de savoir quel document a été transmis en l'espèce.

De: [Courriel 6]

A: [Courriel 10]

Date: Mardi 10 Mars 2015 à 15:45

Piècejoint : 3 doc

Message rattaché au dossier n° 20130149

Objet :Dossier n° 20130149 (KERROUMI ACCIDENT)

CABINETANGLADE & ASSOCIES

SELARLd'Avocats à la Cour

Les documents joints ne sont pas produits de même.

De : [Courriel 6]

A : [Courriel 10]

Date : Mardi 10 Mars 2015 à 16:07

Pièce jointe: 2.doc

Message rattaché au dossier n° 20140059

Objet :Dossier n° 20140059 (LABORDE I SANTE VERTE)

CABINET [W] & ASSOCIES

SELARL d'Avocats à la Cour

Les documents joints ne sont encore pas produits.

De: [Courriel 6]

A : nathalie.anglade@freeJr

Date: Mardi 10 Mars 2015 à 17:32

Pièce jointe: - BLOC NOTE DU DOSSIER.doc

Message rattaché au dossier n° 20130198

Objet :Dossier n° 20130198 (DI RENZO I ODD JUGE DES ENFANTS ET MAZIANI)

CABINET [W] &ASSOCIES

SELARL d'Avocats à la Cour

Ce bloc note n'est ni annexé ni produit aux débats.

De: [Courriel 6]

A: [Courriel 10]

Date: Mardi 10 Mars 2015 à 17:51

Pièce jointe: Point sur la situation merlin. doc

Message rattaché au dossier n° 20140001

Objet :Dossier n° 20140001 (CONSUL TATJONS 2014)

CABINET [W] & ASSOCIES

SELARL d'Avocats à la Cour

Là encore, ce point sur la situation n'est pas annexé au constat ni versé au dossier par l'employeur.

L'employeur produit également sa plainte déposée au commissariat de [Localité 12] le 5 mai 2015 à l'encontre de Madame [W] [X] dont il ne résulte pas d'éléments précis et circonstanciés puisqu'il se contente de déclarer que :

--"J'ai racheté le cabinet [W] ET ASSOCIES à M. [W] [E] en janvier 2015, selon certaines clauses, comme préserver le nom du cabinet et garder sa fille [W] [X] an contrat de travail.--

- II y a déjà eu des problèmes avec M. [W] [E] qui malgré sa mise en retraite continuait d'exercer et en plus dans mon Cabinet en démarchant ma clientèle.

- J'avais déjà rapporté ces faits à vos services et aujourd'hui c'est l'ordre des Avocats qui en est saisi .

- Ce qui m'amène vers vous aujourd'hui c'est le transfert de données personnelles fait par Mme [W] [X] [Adresse 5] tel: [XXXXXXXX03] vers sa boîte mail personnelle.

Elle s'est rendu sur le logiciel d'exploitation du Cabinet qui s'appelle Clior". elle a extrait des éléments de procédures couverts par le secret professionnel de certains dossiers pour se l'envoyer vers sa boîte mail personnelle (conclusion, coordonnées de clients, acte de procédure).

- Je me suis rendu compte, le mercredi 11/03/2015, son ordinateur était allumé alors qu'elle ne travaillait pas, dès que l'on envoie un mail à partir du logiciel sur une autre boîte mail du cabinet, cela ouvre une.fenêtre et c'est pour cela que j'ai découvert qu'elle l'avait fait.

- J'ai fait intervenir un Huissier de Justice en Résidence à [Localité 9] en la personne de monsieur [H] [C] qui a établi un procès-verbal de CONSTAT dont Je Vous remets copie. (ANNEXE)

J'ai donc établi ensuite une lettre de convocation à I'entretien de licenciement du 30/03/2015 à 11h.---(ANNEXE)

---Elle est venue et son licenciement pour faute lourde a pris effet immédiat dès réception de la lettre de licenciement du 10/04/2015.

Je suis persuadé que ces données ont été transmise Maître [W].

Cette plainte, qui ne comporte pas en annexe de nouvelles pièces, ne démontre pas les faits reprochés à la salariée.

L'employeur pour démontrer la réalité des faits reprochés à la salariée produit un courrier de la SCI [L] en date du 7 mai 2015 selon lequel cette dernière écrit :

'Le 7 mai 2015

Maîtres,

Je vous confirme que Maître [SV] [P]-[W], m'a fait part de la convention de présentation de clientèle régularisée entre vous, et a insisté pour que je poursuive les procédures avec vous.

Néanmoins, j'ai été amené à vous retirer le dossier.

Pour des raisons personnelles et impératives, j'ai décidé formellement, comme j'en ai le droit, de ne pas vous accorder ma confiance, et de conserver Me [SV] [P]-[W], comme avocat.

Entant que de besoin, je vous précise, que Me [SV] [P]-[W] n'a effectué aucune démarche en ce sens envers moi.

J'estime en outre que vous ne m'avez pas correctement tenu informé du dossier.

En effet, l'un des notaires intervenant dans la procédure m'a indiqué qu'il vous avait transmis des éléments dont vous ne m'avez donné connaissance.

Sentiments distingués

R. [O]'

Ce courrier ne permet pas de rapporter la preuve d'un détournement de clientèle par la salariée au profit de Maître [P] qui s'occupait antérieurement à la cession de ce client.

L'employeur produit un courriel de la salariée ainsi libellé :

De : CABINETANGLADEETASSOCIES

Objet: Re: suite décès Mme [J]/pour Maître [E][W]

À : [CL] [K]

madame,

je reviens vers vous suite à notre mail d'hier,

Pourriez vous nous transmettre les coordonnées du voisin qui a les clefs pour que nous puissions visiter la maison,

je vous en remercie par avance

restant a votre disposition,

Votre bien dévouée

[X] [W]

j'en profiterai également si vous m'y autorisé a prendre en photos les tranches des divers ouvrages, livres et encyclopédies pour avancer sur ce point,

bien cordialement

vous pouvez joindre JJ ANGLADE06.86.46.83.77

bien cordialement

cabinet [W] et Associés

Selarl d'Avocats

[Adresse 7]

[Adresse 7]

[Adresse 7]

TeI[XXXXXXXX02]

fax [XXXXXXXX01]

Ce courriel démontre tout au plus que la salariée a travaillé pour le cabinet [W] ET Associés alors qu'elle était au service de la société [S] -[U] mais l'employeur ne démontre pas qu'il s'occupait de cette affaire et ne reproche pas à la salariée dans la lettre de licenciement d'avoir travaillé pour un autre employeur.

Il verse encore aux débats une attestation de M. [D] en date du 23 mars 2015 selon laquelle : ' début février 2015, j'ai contacté le cabinet de Maître [U] qui a pris la main de M. [W] et en qui j'ai toute confiance. Mon appel a été réceptionné par une dame se présentant comme [X] [W] , fille de M. [W] , elle m'a immédiatement conseillé de retirer mon dossier de ce cabinet et de consulter M. [W] sur son portable. J'ai été très étonné de ce comportement.'

Et une autre attestation de M. [N] selon laquelle 'en janvier 2015, j'avais rendez-vous avec mon avocat, Maître [U], je patientais dans la salle d'attente quand j'ai croisé [X] [W] que j'avais déjà vu dans le cabinet, elle s'est approchée de moi et m'a dit : 'vous devriez plutôt prendre rendez-vous avec Maître [W] car le cabinet va couler'. J'ai été surpris qu'une salariée parle ainsi de son employeur.'

Mais ces faits ne figurent pas dans la lettre de licenciement qui fixe les limites du litige et ne peuvent donc être utilement invoqués à l'encontre de la salariée.

L'employeur verse encore aux débats une attestation de Madame [T] selon laquelle le 6 juin 2015, Madame [P] m'a contacté par téléphone pour me demander de récupérer le dossier chez Maître [G] [U]; Ce que j'ai fait à sa demande. Elle de récupérer le dossier sans rien dire.'

Mais d'une part ces faits sont postérieurs à la lettre de licenciement, ils ne concernent que Maître [P] et non la salariée et ne sont pas visés, pour cause, dans la lettre de licenciement.

L'employeur verse ensuite une pièce 35 totalement illisible dont il ne peut par conséquent rien être tiré et encore un courriel du 24 avril 2015 adressé par l'ordre des avocats à Maître [P]-[W], Maître [U], Maître [S] selon lequel :

'Mes Chers Confrères,

J'apprends par notre Confrère, [M] [F], que vous apposez, sur l'entrée du Cabinet de la SCP [U] - [W], un panneau indiquant que le Cabinet [W] est transféré chez Maître [SV] [P]-[W].

Cette attitude est inacceptable et je vous demande d'avoir un comportement confraternel jusqu'à notre réunion du 7 mai prochain.

II s'agit là d'une injonction.'

Or Madame [W] a été licenciée le 10 avril 2015, ce courriel est postérieur, il n'est pas démontré que la salariée soit à l'origine de ce panneau et ces faits ne figurent pas dans la lettre de licenciement.

Il produit ensuite un procès-verbal du conseil de l'Ordre en date du 6 février 2017 informant que:

'Arrêt de la Cour d'Appel: Par décision du 26 janvier 2017, La Cour d'appel d'Aix-en-Provence a confirmé la décision du Conseil de l'Ordre dans l'affaire opposant l'Ordre à Monsieur [E] [W], ayant statué sur le retrait de son admission à l'honorariat.'

Ce procès-verbal , qui ne concerne que le père de Madame [X] [W], ne permet en rien de démontrer la réalité des faits invoqués à l'encontre de la salariée, l'arrêt de la cour n'étant pas communiqué.

Enfin, l'employeur produit son résultat fiscal pour l'année 2015 duquel il ressort que sur les 400.000 € HT de chiffre d'affaires garantis, ils n'ont pu réaliser qu'un chiffre d'affaires de 313;051 € et un résultat net de 72.150 € mais la production de cette seule pièce n'établit pas que le salariée , qui n'était pas partie au contrat et n'a rien garanti, soit responsable de la baisse du chiffre d'affaires.

Il s'en suit que l'employeur ne rapporte pas la preuve qui lui incombe des faits allégués dans la lettre de licenciement, à savoir la sortie du cabinet de données strictement confidentielles, dans des dossiers qui n'avaient pas été confiés à la salariée ou des éléments de procédure qu'elles n'auraient pas rédigés, étant observé qu'aucun élément n'est fourni permettant de connaître les dossiers ou éléments de procédure confiés ou rédigés par Madame [X] [W], l'employeur procédant uniquement par affirmation.

Il s'en suit que le simple fait pour la salariée d'effacer les mails envoyés ne saurait démontrer un caractère volontairement malveillant des actes de cette dernière, comme le prétend l'employeur.

Il n'est pas plus non plus rapporté la preuve, compte-tenu des pièces produites d'un détournement de clientèle .

Enfin, si l'employeur prétend que la salariée aurait établi un détail complet de la comptabilité le 12 mars 2015, récupéré ce document et l'aurait manifestement transmis à une personne extérieure au cabinet, il ne produit aucune pièce à l'appui de cette allégation.

Et il ne démontre pas que le cabinet ait perdu, du fait des agissements de la salariée des clients et des honoraires.

Aucun manquement aux obligations professionnelles , notamment de confidentialité et de loyauté en rapport avec les faits allégués dans la lettre de licenciement n'est prouvé.

Il en résulte que non seulement la faute lourde invoquée n'est pas démontrée, mais que le licenciement s'avère dépourvu de cause réelle et sérieuse.

En conséquence, il s'ensuit que la société intimée est mal fondée à rechercher la responsabilité de la salariée et qu'elle doit être déboutée de sa demande en dommages et intérêts.

- Sur la nullité du licenciement

La salariée prétend que son licenciement serait non seulement sans cause réelle et sérieuse mais encore nul.

Elle soutient qu'il s'agit d'un licenciement discriminatoire, qu'elle a été victime de harcèlement moral, qu'enfin le licenciement serait un licenciement économique déguisé.

En application de l'article L1134-1 du code du travail, dès lors qu'un salarié invoque une discrimination prohibée, il lui incombe de présenter des éléments de fait laissant au moins supposer l'existence d'une discrimination directe ou indirecte.

En l'espèce, la salariée se prévaut des articles 6 et 10 de la convention de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales pour rappeler que la liberté de témoigner constitue une liberté fondamentale.

Elle rappelle également qu'aux termes de l'article Ll132-3-3 « Aucune personne ne peut être écartée d'une procédure de recrutement ou de l'accès à un stage ou à une période de formation en entreprise, aucun salarié ne peut être sanctionné, licencié ou faire l'objet d'une mesure discriminatoire, directe ou indirecte, notamment en matière de rémunération, au sens de l'article L. 3221-3, de mesures d'intéressement ou de distribution d'actions, de formation, de reclassement, d'affectation, de qualification, de classification, de promotion professionnelle, de mutation ou de renouvellement de contrat, pour avoir relaté ou témoigné, de bonne foi, de faits constitutifs d'un délit ou d'un crime dont il aurait eu connaissance dans l'exercice de ses fonctions.

Et qu'indépendamment de la prohibition posée par l'article L1132-3-3 relatif à la qualité de témoin, qu'il s'agisse de qualification, d'embauche, de sanction ou de licenciement aucun salarié ne peut faire l'objet de mesure discriminatoire, directe ou indirecte, en raison, entres autres, de sa situation de famille, de son origine, de son nom de famille son appartenance vraie ou supposée à une ethnie, race, nation.

Madame [W] pour étayer sa demande fait état d'une convocation au commissariat de police en date du 9 décembre 2014 pour y être entendue comme témoin les 27 février et 13 mars 2015.

Mais la salariée qui produit cette convocation ne verse pas aux débats son procès-verbal d'audition qui fait suite d'après ses allégations d'une part à la plainte de son employeur mais cette plainte n'est pas versée aux débats et d'autre part à une altercation entre les cédants et les cessionnaires le 24 février 2015 suivi d'un dépôt de plainte de l'un des cédants qui n'est pas plus produite ni aucun élément sur cette altercation.

Il n'est pas allégué que Madame [W] aurait été empêchée de témoigner en tout état de cause.

Il n'est pas établi un quelconque lien entre le témoignage de la salariée et son licenciement qui repose en partie sur des faits antérieurs au 24 février (mails du 7 février), étant observé de surcroît que l'employeur n'a déposé plainte contre la salariée que le 5 mai 2015, postérieurement à son licenciement et que la lettre de licenciement ne vise aucunement les témoignages de la salariée dont la teneur est ignorée.

Il s'en suit que la salariée qui ne procède que par allégation n'étaye pas sa demande.

S'agissant de la discrimination en raison du nom de famille, la salariée se prévaut des conclusions de première instance de son employeur dans lesquelles il écrit que 'Madame [X] [W] tente de dissimuler dans ses écritures que les cédants ne sont autres que son père et sa belle-mère'.

Mais la rédaction de ses conclusions, bien après les faits, n'est pas l'oeuvre intellectuelle de l'employeur mais de son conseil.

La salariée se réfère également au constat d'huissier dressé le 13 mars 2015 au terme duquel il ressort que Madame [X] [W] s'est adressée par divers mails des dossiers et pièces de procédure couverts par le secret professionnel, mais surtout qui ont permis le démarchage de la clientèle cédée par son père, Maître [E] [W] et sa belle mère, Maître [SV] [P]-[W].

Mais il est constant que Madame [W] est bien la fille de Maître [E] [W] et la belle-fille de Maître [P], les cédants, qu'elle a continué à travailler pour les cédés, et qu'il est établi par ailleurs que son père et sa belle-mère se sont réinstallés à proximité du cabinet cédé et que diverses procédures opposent de ce fait les cédants et les cédés.

Enfin, la salariée se prévaut du fait qu'un courrier qui lui est adressé le 10 avril 2015 par son employeur relatif à la délivrance de ses bulletins de paie porte en référence : 'cession de cabinet'.

Il s'agit visiblement d'une simple erreur matérielle dont il ne peut être tiré aucune conclusion utile.

Il s'en suit qu'au vu de l'ensemble de ses éléments, la salariée ne présente pas des éléments de fait laissant au moins supposer l'existence d'une discrimination directe ou indirecte.

Elle sera donc déboutée de sa demande de nullité du licenciement ainsi que de sa demande de dommages et intérêts.

Sur le licenciement économique déguisé, il résulte du dossier que, suite au licenciement de la salariée, cette dernière a été remplacée, non par une embauche, mais par un avocat collaborateur libéral, étant observé qu'en aucun cas un licenciement économique déguisé n'emporte nullité du licenciement.

Sur l'existence d'un harcèlement moral,

En application de l'article L1154-1 du code du travail, lorsqu'un salarié établit la matérialité de faits précis et concordants constituant selon lui un harcèlement, il appartient au juge d'apprécier si ces éléments pris dans leur ensemble permettent de présumer l'existence d'un harcèlement moral et, dans l'affirmative, il incombe à l'employeur de prouver que ces agissements ne sont pas constitutifs d'un tel harcèlement et que sa décision est justifiée par des éléments objectifs étrangers à tout harcèlement.

En l'espèce, au soutien de sa prétention à la reconnaissance d'un harcèlement moral, la salariée appelante invoque en premier lieu une mise en difficulté et pressions dans le cadre de l'accomplissement de son travail.

Elle se prévaut du compte-rendu de l'entretien préalable du conseiller du salarié qui n'est pas signé des deux parties et ne fait que reprendre les dires de la salariée contestées par l'employeur et d'un courrier envoyé par son père à son employeur dans lequel ce dernier prétend que sa fille aurait été traitée de 'conne' sans que ce fait soit étayé par une pièce autre.

Il s'en suit que ce fait n'est pas établi.

En second lieu, la salarié se prévaut d'une privation de ses outils de travail et d'une mise à l'écart mais elle ne se réfère à aucun pièce de son dossier et ce fait n'est donc pas établi.

En troisième lieu, la salariée invoque des mesures attentatoires à sa crédibilité professionnelle mais elle se réfère uniquement au compte-rendu de l'entretien préalable du conseiller du salarié, sans autre preuve, les faits étant contestés par l'employeur.

En quatrième lieu, la salariée prétend qu'elle a été mise à l'écart des autres membres du cabinet mais ne produit aucune pièce à l'appui de ses allégations.

En cinquième lieu, la salariée dénonce un contexte anxiogène de travail .

Elle se réfère à un SMS du 13 janvier 2015 de Maître [S] selon lequel : 'Coucou je ne sais pas si ça été fait sinon prends avec toi une demande d'honoraire (lettre lol) pour l'expertise d'aujourd'hui de 500 € HT les clients n'ont pas réglé merci bisou' duquel il ne résulte pas de contexte anxiogène.

Elle soutient sans preuve que le 10 février 2015 elle devait être témoin de propos de l'un de ses employeurs, Me [U] envers l'un des cédants aux termes desquels il proclamait à nouveau la fin du temps des privilèges de [X] [W].

Elle se prévaut du fait que le 24 février 2015 au midi, elle devait être le témoin d'un incident verbal entre ses employeurs et les cédants et le soir de violences tant verbales que physiques envers l'un des cédants suites auxquels Me [U] proclamait à l'ensemble des « consorts [W]» : « Vous n'êtes plus les bienvenus ici ».

Mais elle ne produit pas de pièces à l'appui de ses allégations.

Elle invoque que, à l'issue de sa journée de travail et alors qu'elle s'apprêtait à suivre les pompiers, l'un de ses employeurs lui demandait si celle-ci serait présente le jeudi suivant ou si elle entendait abandonner ou démissionner de son poste de travail.

Le 25 février 2015, les clefs étaient changées sans qu'il n'en soit remis un jeu à Mme [X] [W] et ce, encore une fois, à la différence des autres membres de l'équipe, Me [U] informant Mme [X] [W] de ce qu'elle sera entendue au commissariat le lendemain après-midi sans autre forme de précisions.

Le 26 février 2015, Mme [X] [W] devait constater que les requêtes et diligences accomplies par ses soins pour des dossiers relevant du tribunal administratif (procédure écrite avec date de clôture au 26 février 2015) n'étaient toujours pas déposées et devait loyalement s'en inquiéter auprès de ses employeurs.

Mais aucune preuve n'est versée aux débats sur ces faits allégués.

Elle soutient que le 27 février 2015 après-midi Mme [X] [W] était entendue en tant que témoin dans le cadre de l'enquête pénale sur les faits survenus en sa présence le 24 février précédent.

Ce fait est établi par la convocation du commissariat de police qui ne précise cependant pas l'objet de la dite convocation.

La salariée invoque ensuite des faits de déstabilisation, se prévalant qu'à son retour de congés, soit le 9 mars 2015, elle devait constater que l'ensemble des dossiers qui lui avaient été confiés avaient été enlevés de son bureau à l'exception de quelques documents éparpillés sur celui-ci, la privant encore davantage de tout élément pour mener à bien son travail.

Elle devait également constater que sa boîte mail personnelle était ouverte à son arrivée, que des fichiers informatiques avaient été créés ou modifiés durant son absence sur son poste informatique sous ses initiales et immédiatement s'en inquiéter auprès de ses employeurs, lesquels lui répondaient ignorer ce qu'il en était.

Mais aucune pièce n'est produite à l'appui de cette affirmation, si ce n'est le compte-rendu d'entretien préalable, contesté par l'employeur.

La salariée soutient que le 9 mars 2015, elle devait à nouveau s'inquiéter de ne pas avoir encore eu son bulletin de janvier ni au demeurant celui de février. Mme [X] [W] rappelant combien elle en avait besoin dans le cadre de ses démarches bancaires pour l'obtention du prêt immobilier qu'elle tentait d'obtenir et produit un SMS selon lequel « Bonjour [I], il le faudrait mes bulletins de salaire de janvier et février SVP, toujours pas reçus, j'en ai vraiment besoin.. Merci. A plus. [Y] »

Mais ce fait est contesté par l'employeur dans un courrier adressé à la salariée et ne peut donc être retenu.

La salariée prétend encore que le 9 mars, un client mécontent contactait le cabinet et faisait part à Mme [X] [W] de reproches sur un prétendu non suivi de son dossier et absence de réponse aux courriels et pièces qu'il avait transmises au cabinet.

Mme [X] [W] qui n'avait ni accès à la boîte mail du cabinet ni au dossier papier (son bureau ayant été vidé de tout dossier durant son absence) devait se rapprocher immédiatement de Me [S] pour lui faire part de la situation ainsi déplorée, laquelle lui répondait gérer la situation.

Le 10 mars, Me [U] devait lui demander de traiter un dossier en urgence sans qu'elle ne dispose de l'ensemble des pièces de celui-ci pour ce faire.

Le jeudi 12 mars, la secrétaire du cabinet devait s'inquiéter à de nombreuses reprises auprès de Mme [X] [W] d'agendas et de dossiers « curieusement disparus ».

Le même jour, la salariée devait s'apercevoir que tous ses historiques avaient été consultés sur Google et que des documents avaient été créés le mercredi 11 mars sous ses initiales, jour non travaillé par ses soins.

A la fin de sa journée de travail, Mme [X] [W] devait demander confirmation à son employeur de son autorisation d'absence via jour de congé conformément à l'avenant qui lui avait été imposé pour pouvoir suivre la formation médiation du lendemain, autorisation qui ne lui avait toujours pas été confirmée.

Mais ces faits ne sont pas établis et la salariée ne produit que le compte-rendu d'entretien préalable contesté par l'employeur.

La salariée se réfère enfin au fait que le 13 mars, la salariée devait répondre à la convocation du commissariat en tant que témoin dans le cadre de la confrontation souhaitée par les autorités s'agissant des

événements du 24 février 2015.

Au cours de cette confrontation, la salariée n'avait d'autres choix malgré la terreur qui était la sienne de réitérer la description des événements dont elle avait été témoin.

A l'issue de celle-ci, son employeur devait lui confirmer avoir confiance dans sa compétence et son sérieux, nier avoir un jour fouillé son ordinateur et ses affaires tout en lui précisant qu'au vu du contexte une rupture conventionnelle était envisagée.

Mais si la salariée produit la convocation du commissariat, elle ne verse aux débats aucun élément concernant cette confrontation et par conséquent, cette simple audition, suite à une plainte de son employeur non dirigée contre elle, n'établit pas que ce dernier a cherché à la déstabiliser.

La salariée invoque l'impact sur son état de santé de ces faits et produit son arrêt maladie du 16 mars 2015 ainsi que son dossier de la médecine du travail.

Il en résulte que la salariée a consulté le médecin du travail le 16 mars 2015 et relaté un conflit avec son employeur, un état de stress majeur et que le médecin du travail l'a adressé à la psychologue de la médecine du travail, que le 13 avril 2015 le médecin du travail envisageait une inaptitude et a suspendu la procédure du fait du licenciement intervenu ainsi que des certificats médicaux, des ordonnances de son généraliste et de son psychothérapeute desquels il résulte que Madame [W] nécessite un arrêt de travail en rapport avec son activité professionnelle, un traitement et un suivi psychothérapeutique.

Mais ces pièces sont toutes concomitantes à la procédure de licenciement de la salariée et des faits de harcèlement moral ne sont jamais évoqués par ces divers professionnels.

Il résulte de ces éléments pour ceux qui sont établis, à savoir les convocations de la salariée pour témoigner qu'ils ne permettent pas , pris dans leur ensemble de présumer l'existence d'un harcèlement moral.

Il s'en suit que la salariée sera déboutée de sa demande de nullité du licenciement et de sa demande de dommages et intérêts au titre du harcèlement moral.

- Sur les conséquences du licenciement sans cause réelle et sérieuse

Aux termes de l'article 20 de la convention collective applicable, « En cas de licenciement ou de démission, et sauf faute grave, il doit être respecté un délai de préavis déterminé comme suit :

Pour les salariés ayant un coefficient hiérarchique inférieur à 385 "

- une ancienneté inférieure à 2 ans, 1mois;

- une ancienneté égale ou supérieure à 2 ans, 2 mois.

Pour les salariés ayant un coefficient hiérarchique égal ou supérieur à 385 :

- une ancienneté inférieure à 2 ans, 2 mois;

- une ancienneté égale ou supérieure à 2 ans: 3 mois.

Le même article précise in fine « Faute pour l'employeur d'effectuer immédiatement le paiement de ces indemnités de même que tous salaires arriérés, il devra de plein droit les intérêts au taux légal sur les sommes dues à compter du départ de l'étude ou cabinet. »

Madame [W] bénéficiait de plus de 13 ans d'ancienneté et occupait un poste de juriste, statut cadre, Niveau II échelon 3 coefficient 450.

Elle est fondée à solliciter une indemnisation à hauteur de 3 mois de salaires bruts au titre de l'indemnité compensatrice de préavis dont elle a été abusivement privée.

Il y a donc lieu de condamner la SELARL CABINET [S] [U] à lui verser la somme de 9186,03 € bruts à titre d'indemnité compensatrice de préavis, outre 918,60 € bruts à titre de congés payés y afférents : (3062,01 x 3 = 9186,03), les calculs de la salariée n'étant pas contestés dans leur quantum, outre intérêts au taux légal à compter du 11 avril 2015, date du licenciement.

Aux termes de l'article 20 de la convention collective applicable, « En cas de licenciement ou de démission, le treizième mois sera dû au prorata de la durée du contrat de travail au cours de l'année considérée. Il ne sera pas dû en cas de licenciement pour faute grave . Faute pour l'employeur d'effectuer immédiatement le paiement de ces indemnités de même que tous salaires arriérés, il devra de plein droit les intérêts au taux légal sur les sommes dues à compter du départ de l'étude ou cabinet. »

Il s'en suit que la salariée a droit à titre d'indemnité conventionnelle de 13éme mois prorata temporis à la somme de 1913,76 € brut outre 191,38 € de congés payés afférents selon des calculs non contestés adversairement outre intérêts au taux légal à compter du 11 avril 2015.

Toujours aux termes de l'article 20 de la convention collective applicable, « Le licenciement, s'il ne résulte pas d'une faute grave non contestée ou jugée comme telle par la juridiction compétente ou de tout autre fait exonératoire, donne droit, en sus de l'indemnité de préavis, à une indemnité dite 'indemnité de licenciement'I au profit du membre du personnel congédié ..... Cette indemnité sera calculée comme suit pour l'ensemble des salariés :

- 1 mois de salaire si le temps de présence à l'étude ou cabinet est compris entre 2 ans et 5 ans;

- 2 mois de salaire si le temps de présence à l'étude ou cabinet est compris entre 5 et 10 ans;

-3 mois de salaire si le temps de présence à l'étude ou cabinet est compris entre 10 et 15 ans;

- 4 mois de salaire si le temps de présence à l'étude ou cabinet est supérieur à 15 ans.

Le salaire mensuel retenu comme base de calcul sera celui résultant de la moyenne de salaires mensuels des 12 mois précédant le licenciement (y compris toutes gratifications et rémunérations quelconques déclarées avec le salaire) ..... »

Le même article précise in fine « Faute pour l'employeur d'effectuer immédiatement le paiement de ces indemnités de même que tous salaires arriérés, il devra de plein droit les intérêts au taux légal sur les sommes dues à compter du départ de l'étude ou cabinet. »

Il s'en suit que la salariée qui comptait 13 ans et 5 mois d'ancienneté a droit selon des calculs détaillés dans ses écritures et non contestés adversairement à la somme de 10.664,37 € à ce titre, outre intérêts au taux légal à compter du 11 avril 2015.

La salariée a encore droit à un rappel de salaire au titre de sa mise à pied injustifiée soit 25 jours représentant la somme de 2551,67 € brut outre 255,17 € au titre des congés payés afférents selon un calcul détaillé et non contesté adversairement.

La salariée a droit à des dommages et intérêts venant réparer le préjudice né de la rupture en application de l'article L 1235-5 du code du travail applicable au moment des faits, l'entreprise comptant

moins de 11 salariés.

Compte-tenu des éléments qu'elle fournit à la cour, le fait qu'elle n'avait pas retrouvé d'emploi pérenne en 2017 et exerçait des missions intérim mais également le fait qu'elle ne produit pas d'élément sur sa situation postérieurement à 2017, il lui sera alloué la somme de 20.000 €.

- Sur la demande de dommages et intérêts pour procédure irrégulière

Madame [W] soutient que la procédure est irrégulière car l'employeur ne lui aurait pas indiqué, en infraction aux dispositions de l'article L 1232-3 du code du travail , tous les griefs qui ont fondé la lettre de licenciement.

Cependant, la salariée ne prouve pas ce fait par le seul compte-rendu d'entretien préalable non signé des deux parties.

Elle prétend également que l'employeur aurait fixé l'entretien préalable à un horaire incompatible avec les horaires de sortie autorisée de la salariée (convoquée à 11h00 le 30 mars 2015 alors que la salariée ne pouvait quitter son domicile situé à près de 20 Km qu'à partir de 11h00), ce qui constitue une première cause d'irrégularité de la procédure mais la salariée ne démontre pas qu'elle a sollicité un report de cet entretien, a été présente à cet entretien et n'expose pas en quoi elle aurait subi un préjudice.

Elle sera donc déboutée de sa demande de dommages et intérêts à ce titre.

- Sur les dommages et intérêts pour privation abusive du droit à portabilité des frais soins de santé et prévoyance

Aux termes de l'article L.91l-8 du Code de la sécurité sociale « les salariés garantis collectivement, dans les conditions prévues à l'article L. 911-1, contre le risque décès, les risques portant atteinte à l'intégrité physique de !a personne ou liés à la maternité ou les risques d'incapacité de travail ou d'invalidité bénéficient du maintien à titre gratuit de cette couverture en cas de cessation du contrat de travail, non consécutive à une faute lourde, ouvrant droit à prise en charge par le régime d'assurance chômage ... ».

La salariée expose qu'en se plaçant abusivement sur le terrain de la faute lourde, l'employeur a privé la salariée de ce droit à portabilité d'une durée de douze mois dont elle aurait du pouvoir bénéficier à titre gratuit.

Elle était d'ailleurs en arrêt de travail et en soins au jour de son licenciement, soins poursuivis pendant de nombreux mois après son licenciement. Elle en justifie par les éléments qu'elle produit mais il résulte des factures de pharmacie qu'elle verse aux débats l'existence d'une mutuelle carte blanc puis AGF et faute de précisions sur le montant de cette mutuelle, le fait qu'elle ait été à sa charge, et des taux de remboursement par rapport à ceux de la mutuelle dont elle bénéficiait antérieurement, le préjudice n'est pas établi.

Elle sera déboutée de sa demande de dommages et intérêts à ce titre.

- Sur la demande de dommages et intérêts du fait des circonstances particulièrement vexatoires de la procédure de licenciement

Madame [W] réclame 5000 € à ce titre se prévalant du fait qu'elle a été mise à pied, ce qui est une mesure courante en cas de licenciement pour faute, que la lettre de convocation à entretien préalable est rédigée le 17 mars 2015 pour un entretien le 30 mars suivant, ce qui est dans le délai légal, alors qu'elle aurait été informée à la sortie de la confrontation qu'une rupture conventionnelle était envisagée, ce qui ne résulte que de son affirmation, du contenu de la lettre de licenciement qui s'ils se sont avérés insuffisamment démontrés ne contiennent aucun excès de langage, du compte-rendu de l'entretien préalable non contradictoire et contesté par l'employeur, d'échanges de SMS avec Maître [S] qui montrent plutôt une bonne entente entre la salariée et son employeur.

Elle ne démontre donc pas le caractère vexatoire de la rupture ni l'existence d'un préjudice particulier lié à ses circonstances qui n'aurait pas été réparé par l'allocation de dommages et intérêts au titre de la rupture.

Elle sera donc déboutée de sa demande à ce titre.

- Sur les demandes au titre de l'irrégularité des documents de fin de contrat et leurs remises tardives

En droit, les documents de fin de contrat sont quérables et non portables.

En l'espèce, la salariée a reçu la lettre de licenciement le 12 avril 2015 et les documents sociaux lui ont été adressés dès le 21 avril, soit 1 semaine plus tard.

L'employeur démontre que Mme [W] s'est présentée à plusieurs reprises au Cabinet à «l'improviste », avec un témoin, alors qu'il lui avait été demandé de prendre rendez-vous, et ce avant même que son employeur ait réceptionné l'accusé de réception de la lettre de licenciement.

En conséquence, la salariée ne prouve pas une remise tardive ni un quelconque préjudice.

La salariée soutient que l'attestation POLE EMPLOI remise n'était pas conforme en de nombreux points, à savoir :

- les salaires des 12 derniers mois travaillés payés n'étaient pas totalement renseignés (3 mois sur 12 mois)

- le dernier jour travaillé payé indiqué était erroné;

- les jours de congés payés bien que non réglés puisque totalement supprimés par l'employeur dans le solde de tout compte étaient mentionnés à hauteur de 40 jours au sein de ladite attestation et impliquait de ce chef un différé d'indemnisation injustifié pour la salariée dans ses rapports avec l'assurance chômage.

Ces différentes anomalies auraient rendu nécessaires des démarches supplémentaires auprès de POLE EMPLOI pour pouvoir régulariser dans les meilleurs délais sa prise en charge et par là un retard dans le traitement de son dossier.

Et ce n'est en effet que le 19 juin 2015 qu'elle va percevoir ses allocations chômage.

Mais les pièces qu'elle verse au dossier montent que Pôle Emploi a demandé à Madame [W] de lui fournir le 6 mai 2015 les copies de ces bulletins de salaires des 13 derniers mois précédents sa période de maladie, son attestation de prise en charge par la sécurité sociale , le formulaire 3316 de la sécurité sociale précisant les périodes de maladie et que le retard de prise en charge n'est donc pas dû à l'employeur mais à la salariée qui n'a pas complété en temps utile son dossier.

Elle sera donc déboutée de sa demande à ce titre.

- Sur les dommages et intérêts pour exécution fautive et déloyale du contrat de travail

Dès lors que la salariée appelante recherche la responsabilité de son employeur pour exécution déloyale du contrat de travail, il lui incombe de préciser et d'établir les griefs au soutien de sa prétention d'une part, et de prouver le préjudice qui en est résulté d'autre part.

Sur les griefs, la salariée appelante soutient au premier chef que l'employeur va modifier son contrat de travail en supprimant un vendredi non travaillé mais l'employeur fait justement observer que la salariée et l'employeur ont signé cet avenant au contrat de travail, que cet avenant prévoyait que la formation de médiateur de la salariée serait comptabilisée en temps de travail dans la proportion des 20 heures de formation professionnelle annuelle et qu'au-delà ces heures de formation seraient décomptés des congés payés ou des heures de récupération, partant le manquement de l'employeur n'est pas établi au vu de l'accord des parties et du respect du droit à la formation de la salariée.

La salariée se prévaut ensuite du fait que sa formation n'était pas prise en charge par l'employeur à la différence de celle de la secrétaire, Mademoiselle [Z] mais à supposer ce fait établi, aucune pièce n'étant produite, il n'en résulte pas une faute de l'employeur, cette formation ayant été entreprise non à la demande de l'employeur et antérieurement à la cession ce qui implique qu'il n'était pas tenu de la financer, la salariée ayant pu bénéficier de son droit au DIF comme spécifié dans l'avenant.

La salariée reprend ensuite les griefs qu'elle a développés au soutien du harcèlement moral et de la discrimination en se fondant sur ses arrêts maladie et le compte-rendu d'entretien préalable mais ces griefs n'ont pas été retenus.

La salariée prétend que les bulletins de salaire de janvier, février 2015 ne lui seront remis que le 16 avril 2015 mais l'employeur le conteste et aucune preuve n'est fournie sur ce point si ce n'est le compte-rendu non contradictoire d'entretien préalable.

La salariée invoque encore le fait que , placée en arrêt maladie le 16 mars 2015, elle ne recevra l'attestation d'indemnités journalières régularisée que le 22 avril malgré ses multiples relances.

Il est établi en effet que cette attestation n'a été adressée à la salariée que le 21 avril 2015 soit avec retard et que la CPAM va régler les indemnités à compter du 15 mai 2015.

Mais la salariée n'indique ni ne démontre à quelle date elle a elle-même transmis ses documents à la CPAM.

Et surtout , sur son préjudice, la salariée appelante se limite a réclamer un montant de 4.000 € sans établir ni l'étendue ni même la réalité du préjudice moral distinct qu'elle allègue.

La demande de la salariée appelante sera donc écartée.

- Sur la demande de publication de la décision

Madame [W] n'ayant pas été discriminée ni harcelée, mais simplement licenciée sans cause réelle et sérieuse, la publication de partie du dispositif de la décision dans un journal de son choix ne sera pas ordonnée.

- Sur les congés payés et l'appel en garantie de Maître Sophie KUJUMGIAN ANGLADE

De principe, aucun motif de licenciement ne peut provoquer la perte des congés payés.

Les parties s'accordent sur le fait qu'au titre de l'année N-1, au mois de décembre 2014, il restait acquis 27 jours de congés.

Mais comme le fait remarquer utilement l'employeur, au vu des bulletins de salaire des mois de mai et juin 2014, il apparaît qu'une erreur a été commise, dans la mesure où la salariée bénéficiait de 42 jours de congés payés acquis en Mai et qu'en juin, il a été reporté 44 jours.

Il s'en suit que la salariée n'avait au titre de l'année N -1 que 25 jours de congés payés acquis et 17,50 acquis au 31 décembre 2014.

La salariée a ensuite pris des congés payés en janvier 2015, soit 8 jours et en mars 2015 soit deux jours.

Il s'en suit qu'elle n'avait acquis que 39 jours de congés payés.

Elle a donc droit à une indemnité de 3945,39 € ( 3034,92 X 39/30 ).

L'employeur sera donc condamné à lui payer cette somme.

En effet, s'il prétend que Madame [W] avait toujours pris ses congés payés , il ne le prouve pas par les attestations très générales de salariés qu'il verse aux débats.

Sur l'appel en garantie, en application des articles L 1224-1 et L 1224-2 du code du travail, si le nouvel employeur est tenu de reprendre le contrat de travail et les créances afférentes, le cédant est tenu de rembourser les sommes acquittées par le nouvel employeur , ce que rappelait également l'acte de cession du 13 janvier 2015 ' étant précisé que les congés payés seront supportés prorata temporis'.

Il s'en suit que Maître [P] [W], cédante, est tenue de relever et garantir l'employeur à hauteur de cette somme, sans qu'elle puisse alléguer utilement une quelconque procédure abusive de l'employeur à son encontre, l'obligation de l'appelée en garantie résultant de la loi.

- Sur la demande reconventionnelle de l'employeur au titre de la procédure abusive

L'employeur succombant en grande partie, la procédure ne peut être qualifiée d'abusive et il sera donc nécessairement débouté de sa demande de dommages et intérêts.

- Sur les autres demandes

Il y a lieu d'ordonner à l'employeur de délivrer les documents de fin de contrat rectifiés en fonction du présent arrêt dans le mois de la notification de la décision sans qu'il soit besoin de prévoir en l'état une astreinte.

Les intérêts au taux légal sur les sommes allouées à titre de dommages et intérêts courront à compter de la présente décision et en ce qui concerne les créances salariales à compter du 11 avril 2015 conformément à la demande de la salariée, sauf pour les rappels de salaire dûs au titre de la convention collective , comme vu précédemment, avec capitalisation.

L'employeur qui succombe principalement sera condamné à payer à Madame [W] la somme de 2000 € au titre de l'article 700 du code de procédure civile ainsi qu'aux entiers dépens.

PAR CES MOTIFS

La Cour,

Statuant par arrêt contradictoire, par mise à disposition au greffe, les parties en ayant été préalablement avisées dans les conditions prévues à l'article 450 du code de procédure civile, en matière prud'homale,

Déboute Madame [W] de sa demande de rejet de la pièce adverse 33.

Confirme le jugement déféré en ce qu'il a

- débouté Madame [W] de ses demandes au titre de :

- nullité du licenciement

- dommages et intérêts pour privation abusive du droit à portabilité frais soins de santé et prévoyance,

- dommages et intérêts pour irrégularité de la procédure

- dommages et intérêts pour préjudice moral distinct en raison de circonstances vexatoires du licenciement

- dommages et intérêts pour irrégularité des documents de fin de contrat,

- harcèlement moral et discrimination fondée sur l'appartenance familiale, son nom et sa qualité de témoin,

- dommages et intérêts pour harcèlement moral et pour discrimination,

- dommages et intérêts pour exécution fautive du contrat de travail,

- publication du dispositif du jugement dans un journal du choix de la salariée

- condamné la SELARL CABINET [S] [U] à payer à Mme [X] [W], une indemnité de procédure de 1 000 € en application des dispositions de l'article 700 du Code de Procédure Civile ;

- condamné la SELARL CABINET [S] [U] aux entiers dépens.

- et en ce qu'il a débouté la SELARL CABINET [S] [U] de sa demande de dommages et intérêts au titre de l'exécution lourdement fautive du contrat de travail autorisant la mise en jeu de la responsabilité pécuniaire de la salariée et de sa demande de dommages et intérêts pour procédure abusive.

L'infirme pour le surplus et statuant à nouveau, y ajoutant,

Dit sans cause réelle et sérieuse le licenciement prononcé à l'encontre de Madame [X] [W]

En conséquence,

Condamne la SELARL CABINET [S]-[U] à verser à Mme [X] [W] la somme de :

- 20.000 € nets à titre de dommages et intérêts pour absence de cause réelle et sérieuse;

- 9186,03 € bruts à titre d'indemnité compensatrice de préavis, outre 918, 60 € bruts à titre d'indemnité de congés payés y afférents ;

- 2551,675 € bruts à titre de rappel de salaire sur mise à pied conservatoire, outre 255,17 € bruts à titre de congés payés y afférents ;

- 1913,76 € bruts à titre de rappel de salaire sur indemnité conventionnelle de 13ième mois 2015 prorata temporis, outre 191,38 € bruts à titre de congés payés y afférents ;

- 10 664,37 € nets à titre d'indemnité conventionnelle de licenciement ;

- 3945,39 € au titre de l'indemnité compensatrice de congés payés

Fixe la rémunération mensuelle moyenne de Mme [X] [W] à la somme de 3 554,79€ bruts.

Ordonne à l'employeur de délivrer sans astreinte dans le délai d'un mois à compter de la notification de l'arrêt : un certificat de travail régularisé, un bulletin de salaire récapitulatif des condamnations salariales prononcées par l'arrêt précisant leur périodicité ainsi qu'une attestation POLE EMPLOI régularisée conforme et une attestation au titre du droit individuel à la formation de 120 heures et de régulariser la situation de Madame [X] [W] auprès des organismes sociaux au bénéfice desquels ont été prélevées les cotisations figurant sur les bulletins de paie édités par l'employeur

Condamne la SELARL CABINET [S]-[U] à verser à Madame [W] la somme de 2000 € sur le fondement de l'article 700 du Code de procédure civile.

Fixe le point de départ des intérêts légaux à compter du 11 avril 2015 pour les condamnations au titre de l'indemnité compensatrice de préavis, de rappel de salaire sur mise à pied conservatoire, de complément de treizième mois, d'indemnités de congés payés et d'indemnité de licenciement, à compter du présent arrêt en ce qui concerne les dommages et intérêts alloués, à compter de la demande en justice, soit le 16 septembre 2015 pour les autres condamnations avec capitalisation des intérêts pour les intérêts

dus au moins pour une année entière.

Condamne Mme [SV] [P] [W], ès-qualité d'employeur initial, à relever et garantir la SELARL [S]-[U] de la condamnation relative à l'indemnité compensatrice de congés payés prononcée contre l'employeur.

Condamne la SELARL [S]-[U] aux entiers dépens d'appel.

LE GREFFIERLE PRESIDENT


Synthèse
Tribunal : Cour d'appel d'Aix-en-Provence
Formation : Chambre 4-3
Numéro d'arrêt : 17/19946
Date de la décision : 29/01/2021

Références :

Cour d'appel d'Aix-en-Provence 9C, arrêt n°17/19946 : Infirme partiellement, réforme ou modifie certaines dispositions de la décision déférée


Origine de la décision
Date de l'import : 27/03/2024
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.appel;arret;2021-01-29;17.19946 ?
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