COUR D'APPEL D'AIX-EN-PROVENCE
Chambre 4-3
ARRÊT AU FOND
DU 29 JANVIER 2021
N°2021/ 38
RG 17/17660
N° Portalis DBVB-V-B7B-BBIDP
[G] [YB]
C/
[Y] [P]
Copie exécutoire délivrée
le 29 Janvier 2021 à :
-Me Jérôme FERRARO, avocat au barreau de MARSEILLE
- Me Robert BALLESTRACCI, avocat au barreau de MARSEILLE
Décision déférée à la Cour :
Décision du Bâtonnier de l'ordre des avocats de MARSEILLE en date du 23 Mai 2013 enregistré au répertoire général
APPELANTE
Madame [G] [YB], demeurant [Adresse 3]
représentée par Me Jérôme FERRARO, avocat au barreau de MARSEILLE
INTIME
Monsieur [Y] [P], demeurant [Adresse 1]
représenté par Me Robert BALLESTRACCI, avocat au barreau de MARSEILLE
*-*-*-*-*
COMPOSITION DE LA COUR
En application des dispositions des articles 804 et 805 du code de procédure civile, l'affaire a été débattue le 01 Décembre 2020 en audience publique, les avocats ne s'y étant pas opposés, devant Madame Dominique DUBOIS, Président de Chambre, et Madame Frédérique BEAUSSART, Conseiller, chargées du rapport.
Madame Frédérique BEAUSSART, Conseiller, a fait un rapport oral à l'audience, avant les plaidoiries.
Ces magistrats ont rendu compte des plaidoiries dans le délibéré de la cour, composée de :
Madame Dominique DUBOIS, Président de Chambre
Madame Ghislaine POIRINE, Conseiller faisant fonction de Président
Madame Frédérique BEAUSSART, Conseiller
Greffier lors des débats : Madame Florence ALLEMANN-FAGNI.
Les parties ont été avisées que le prononcé de la décision aurait lieu par mise à disposition au greffe le 29 Janvier 2021.
ARRÊT
CONTRADICTOIRE
Prononcé par mise à disposition au greffe le 29 Janvier 2021.
Signé par Madame Dominique DUBOIS, Président de Chambre et Madame Florence ALLEMANN-FAGNI, greffier auquel la minute de la décision a été remise par le magistrat signataire.
* * *
FAITS ET PROCÉDURE
A la suite d'un engagement initial en qualité de juriste à compter du 10 mars 2003 [G] [YB] a été engagée par contrat à durée indéterminée du 27 août 2003 par [Y] [P] en qualité d'avocat, moyennant un salaire annuel de 18 400€ réparti en 12 mensualités de 1533,33€ correspondant à la rémunération minimale prévue par la convention collective. Ce contrat a été suivi d'un avenant 24 novembre 2003 venant préciser les éléments de rémunération et notamment que la rémunération forfaitaire n'incluait pas l'indemnisation des missions d'aide juridictionnelle et des commissions d'office.
Dans le dernier état de la relation contractuelle elle percevait un salaire brut mensuel de 3375€ comprenant le salaire de base ainsi que la mensualisation du 13ème mois.
Les relations contractuelles entre les parties étaient soumises à la convention collective nationale des avocats salariés du 17 février 1995.
Au retour de congés de la salariée le 7 avril 2011 l'employeur lui a remis en main propre une lettre qui constitue selon elle une sanction disciplinaire. Elle a été placée en arrêt maladie du 7 avril au 17 juin 2011.
Le 28 avril 2011 [G] [YB] a été convoquée à un entretien préalable initialement prévu le 11 mai 2011, assorti d'une mise à pied conservatoire, l'entretien ayant été remis suivant nouvelle convocation à la date du 24 mai 2011.
Par lettre du 26 mai 2011 [Y] [P] lui a notifié son licenciement pour faute grave.
[G] [YB] a saisi le 5 décembre 2012 le Bâtonnier de l'Ordre des Avocats de Marseille, exerçant les fonctions de juridiction prud'homale de premier degré, d'une contestation de son licenciement, de demandes subséquentes, de rappel de salaire au titre d'heures supplémentaires, de prime et de minima conventionnels, de dommages et intérêts pour travail dissimulé et pour exécution fautive du contrat de travail. Par décision du 23 mai 2013 le Bâtonnier de l'Ordre des Avocats de Marseille a :
- dit que le licenciement de Madame [YB] repose sur une faute grave.
En conséquence,
- débouté Madame [YB] de ses demandes, fins et conclusions au titre de la rupture du contrat de travail,
- débouté Madame [YB] de sa demande au titre des heures supplémentaires et congés payés afférents.
- débouté Madame [YB] de sa demande au titre du travail dissimulé.
- constatant le respect des dispositions conventionnelles, débouté Madame [YB] de sa demande au titre de rappel de salaire.
- débouté Madame [YB] de l'ensemble de ses autres demandes, fins et conclusions
comme non fondées.
- dit n'y avoir lieu à article 700 du code de procédure civile.
- condamné Madame [YB] aux dépens.
[G] [YB] a interjeté appel du jugement par acte du 29 mai 2013.
Par deux fois, le 7 février 2015 puis le 17 mars 2017 la cour d'appel d'Aix en Provence a ordonné la radiation de l'instance et l'affaire a été réenrôlée à la demande de Mme [G] [YB] la dernière fois le 18 septembre 2017.
PRÉTENTIONS ET MOYENS
Dans ses dernières conclusions du 17 novembre 2020 [G] [YB], appelante, demande de:
- dire Mme [YB] recevable et bien fondée en son appel,
- constater que les diligences ont été accomplies aux fins de « ré-enrôlement »
- réformer la Décision entreprise, en toutes ses dispositions,
- dire et juger que la correspondance notifiée à la salariée le 7 avril 2011 s'analysait en une sanction disciplinaire, et plus exactement en un avertissement,
- annuler le-dit avertissement
En tout état de cause,
- dire que le licenciement de Mme [YB] est dépourvu de cause réelle et sérieuse,
- condamner, en conséquence, l'intimé au paiement des sommes suivantes :
- 10 054,98 € à titre d'indemnité compensatrice de préavis,
- 1 005,49 € au titre des congés payés afférents,
- 5 641,95 € au titre de l'indemnité de licenciement,
- 3 351,66 € à titre de dommages et intérêts pour irrégularité de la procédure de licenciement
- 40 000 € à titre de dommages et intérêts pour licenciement sans cause réelle et sérieuse,
- 2 000 € au titre de l'article 700 du CPC,
- ordonner la fixation des intérêts légaux à compter de la demande en justice avec capitalisation.
Dans ses dernières conclusions déposées le 22 juin 2020 [Y] [P], intimé, demande de:
A titre principal :
- constater la préemption d'instance au visa des articles R 1452-8 du code du travail et 386 du code de procédure civile
- dire et juger que la préemption d'instance est acquise en cause d'appel et confère l'autorité de la chose jugée du jugement rendu par Monsieur le Bâtonnier le 23 mai 2013
A titre subsidiaire
- constater que le licenciement pour faute grave de Madame [YB] [G] est fondé sur des griefs particulièrement pertinents
- confirmer en toute ses dispositions le jugement rendu par Monsieur le Bâtonnier le 23 mai 2013
- condamner Madame [YB] payer a Monsieur [P] la somme de 3.000€ euros au titre de l'article 700 du Code de PROCÉDURE Civile,
- condamner Madame [YB] aux entiers dépens.
Sur la péremption d'instance
Se fondant sur les articles R1452-8 du code du travail et 386 du code de procédure civile, Me [P] invoque la péremption d'instance en faisant valoir que l'appelante n'a pas réalisé dans le délai de 2 ans l'une des diligences mises à sa charge par l'arrêt de radiation prononcé le 17 mars 2017 ensuite du refus du renvoi qu'il avait sollicité pour répliquer aux conclusions venant d'être notifiées par l'appelant le 27 février 2017.
Il indique que l'arrêt de radiation prévoyait d'une part, que la procédure pourra être rétablie au rôle qu'après l'accomplissement par l'appelant et éventuellement l'intimé des diligences suivantes : dépôt au greffe des conclusions écrites avec bordereau de communication de pièces et justification de la communication à la partie adverse de ses conclusions et pièces. D'autre part l'arrêt précisait que ces diligences devront être accomplies au plus tard dans les deux mois de la notification du présent arrêt, qu'à l'expiration d'un délai de deux ans suivant ce délai de deux mois, la péremption de l'instance pourra être encourue si les diligences précitées n'ont pas été effectuées dans ce délai.
Selon Me [P] seul l'accomplissement de l'acte prescrit pouvait interrompre le délai de péremption, ce que l'appelant n'a pas fait. L'appelant a déposé au greffe une demande de réenrôlement le 18 septembre 2017 sur la base des conclusions déjà notifiées le 27 février 2017 sans justification de leur communication à l'intimé parce qu'il ne les avait justement pas communiquées, l'intimé apprenant incidemment le 4 juin 2019 l'existence de la demande de remise au rôle déposée près de deux ans auparavant. Si l'appelant se prévaut d'un courrier d'information qu'il aurait déposé dans la boîte Carpa le 19 septembre 2017, il n'est pas signé, ne comporte aucune mention officielle et n'a pas été communiqué par mail ou par télécopie comme ses autres correspondances . Selon Me [P] il n'a jamais reçu les dites conclusions et pièces.
En réplique Me [YB] souligne d'abord que l'arrêt de radiation mettait des diligences à la charge des parties dans un délai de 2 mois suivant notification de l'arrêt, ce qui suppose qu'il ait bien été notifié par l'envoi d'une lettre recommandée avec accusé de réception. Elle soutient ensuite que les diligences ont bien été accomplies avec le ré-enrôlement du dossier le 18 septembre 2017, avec dépôt des conclusions, la liste des pièces annexées et l'arrêt de radiation, suivi de l'envoi d'un courrier à l'adversaire dès le 19 septembre 2017. Elle affirme qu'au demeurant les conclusions étaient identiques à celles déjà notifiées dès avant la radiation le 22 février 2017 de sorte que cette condition était remplie avant même l'arrêt de radiation. Enfin elle souligne qu'elle s'est manifestée en mars 2019 pour informer d'un changement d'adresse, ce qui constitue une diligence interruptive en procédure orale et qu'en toutes hypothèses 2 des 3 diligences ayant été respectées, la 3ème n'était pas de nature à faire avancer l'affaire, puisque l'intimé était déjà en possession des conclusions.
Sur la demande de qualification de la lettre du 7 avril 2011 en avertissement et ce faisant d'annulation de la sanction disciplinaire
Me [YB] affirme que la lettre du 7 avril 2011 doit s'analyser comme une sanction disciplinaire au sens de l'article L1331-1 du code du travail, dès lors que l'employeur faisait état par écrit d'une succession de griefs, accompagnés d'une mise en garde et d'une injonction d'y remédier. Il se plaçait donc sur le terrain disciplinaire. Au fond cette sanction doit être annulée faute pour l'employeur de produire des éléments justificatifs. Elle fait valoir que Me [P] ne produit qu'un jugement du TGI dans un dossier [L] pour lui reprocher un dossier de plaidoiries non terminé alors que l'audience a eu lieu le 11 octobre 2011, soit 6 mois après l'avertissement et qu'en outre portant sur une question de communication tardive de conclusions signifiées le 6 décembre 2010 après une clôture le 5 novembre 2010, les faits sont prescrits à la date de l'avertissement. La prescription est de même acquise pour d'autres faits énoncés.
Me [P] fait valoir que cette lettre, visant précisément douze dossiers, est l'aboutissement d'un constat du désintérêt progressif de la salariée à l'égard de ses fonctions ayant déjà fait l'objet de rappels à l'ordre. Il soutient que la nature de ce courrier, sa qualification sont indifférents à l'égard de la procédure de licenciement, la lettre de licenciement exposant 6 griefs nouveaux sur les 7 exposés.
Au fond les faits énoncés dans la lettre sont contestés par Mme [YB] pour la première fois en cause d'appel en février 2017, soit plus de six ans après. Selon lui les reproches sont fondés et il souligne que, s'il exerçait un contrôle sur les assignations et conclusions conformément à sa charge, Mme [YB] bénéficiait bien d'une autonomie dans l'accomplissement de ses tâches, en particulier le suivi et le respect du calendrier judiciaire des dossiers dont elle avait la charge.
Sur la contestation du licenciement
Me [YB] soutient que la procédure de licenciement est irrégulière en ce que le délai de 2 jours entre l'entretien (le 2ème en date du 24 mai) et la notification du licenciement le 26 mai 2011 n'a pas été respecté, seul devant compter la date de la lettre correspondant à la décision de l'employeur et non la date d'expédition, étant précisé que le n° d'envoi sur la lettre ne correspond pas au n° du dépôt annexé. Elle soulève également l'entrave au bon déroulement du 1er entretien qui n'a pu se tenir compte tenu de l'attitude de l'intimé à l'égard du conseiller du salarié.
Sur le bien-fondé du licenciement Me [YB] invoque le principe 'non bis in idem' en faisant valoir que son employeur a épuisé son pouvoir disciplinaire dès lors qu'à la date de la lettre du 7 avril 2011 il avait connaissance des faits reprochés dans la lettre de licenciement, tous antérieurs à cette date, sans avoir choisi de les sanctionner. Cette connaissance résulte de la chronologie, de la configuration de l'étude, de la supervision constante qu'il exerçait sur son activité professionnelle et de l'exposé même des faits reprochés. Elle fait par ailleurs valoir que certains faits sont prescrits et le fait l'un d'entre eux soit expressément mentionné dans la lettre du 7 avril 2011. Au fond elle affirme les griefs infondés et tout cas pas constitutifs d'une faute grave.
En réplique Me [P] conclut d'abord à l'absence d'irrégularité de la procédure de licenciement et réfute toute entrave, n'ayant fait que demander à prendre connaissance de la pièce d'identité, à faire une copie de la carte professionnelle du conseiller, la salariée et ce dernier ayant pris l'initiative de quitter l'entretien. Il affirme qu'aucune erreur de nunméro ne figure dans les justificatifs de l'envoi de la lettre de licenciement, adressée deux jours ouvrables après le 2ème entretien.
Sur le licenciement Me [P] fait valoir avoir été confronté au désintérêt de la salariée pour son travail ce qui l'a conduit à plusieurs rappels à l'ordre dont la lettre du 7 avril 2011. En toute hypothèses quelque soit la qualification qui pourrait être donnée à cette lettre, c'est sans conséquence sur le licenciement qui énonce six griefs nouveaux et distincts sur sept, dont il n'a pris connaissance qu'à compter de son absence pour maladie à compter du 7 avril 2011. Il souligne que contrairement à ce qu'elle affirme, elle disposait bien d'une autonomie dans son exercice, et qu'il lui était matériellement impossible de prendre connaissance de tous ses dossiers durant sa seule semaine de vacances. Il rappelle qu'elle n'a jamais contesté les faits énoncés dans ce courrier si ce n'est pour la première fois en appel le 22 février 2017.
Enfin il assure les griefs fondés sur chacun des dossiers dont le traitement est constitutif de fautes, l'ensemble en établissant le caractère de gravité, sans qu'elle ne puisse se prévaloir par ailleurs d'une surcharge de travail.
Sur les demandes subséquentes
Me [YB] réclame :
- une dommages et intérêts pour irrégularité de procédure cumulables avec ceux au titre de la rupture du contrat de travail en application de l'article L1235-5 du code du travail
- une indemnité compensatrice de préavis de 3 mois
- une indemnité de licenciement tenant compte d'une ancienneté comprenant les 3 mois de préavis, à savoir 8 ans et 5 mois
- des dommages et intérêts en application de l'article L1235-5 du code du travail compte tenu du préjudice moral et financier tenant compte de la période de chômage consécutive à la rupture
Mr [P] conclut au débouté de l'ensemble des demandes.
SUR CE
La péremption d'instance
L'intimé se prévaut de l'ancien article R1452-8 du code du travail, abrogé par l'article 8 du décret n° 2016-660 du 20 mai 2016 relatif à la justice prud'homale et au traitement judiciaire du contentieux du travail, selon lequel en matière prud'homale, l'instance n'est périmée que lorsque les parties s'abstiennent d'accomplir, pendant le délai de deux ans mentionné à l'article 386 du code de procédure civile, les diligences qui ont été expressément mises à leur charge par la juridiction.
Aux termes de l'article 45 du décret susvisé, l'article 8 n'est applicable qu'aux instances introduites devant le conseil des Prud'hommes devant les conseils de prud'hommes à compter du 1er août 2016.
Mme [YB] a initialement saisi le 5 décembre 2012 le Bâtonnier de l'Ordre des Avocat, statuant en qualité de juridiction prud'homale de premier degré, dont la décision rendue le 23 mai 2013 est l'objet du présent appel. L'ancien article R 1452-8 du code du travail est incontestablement applicable à la présente instance qui court depuis sa saisine initiale.
Aux termes de cet article l'instance n'est périmée en matière prud'homale que lorsque les parties s'abstiennent d'accomplir pendant le délai de deux ans mentionné à l'article 386 du code de procédure civile, les diligences qui ont été expressément mises à leur charge par la juridiction.
Par arrêt de radiation du 17 mars 2017 la cour d'appel d'Aix en Provence a ordonné la radiation de l'instance, dit que la procédure pourra être rétablie au rôle qu'après l'accomplissement par l'appelant et éventuellement l'intimé des diligences suivantes:
- dépôt des conclusions écrites au greffe avec bordereau de communication de pièces
- justificatif de la communication à la partie adverse de ses conclusions et pièces
- copie du présent arrêt
et dit que ces diligences devront être accomplies au plus tard dans les deux mois de la notification du présent arrêt et qu'à l'expiration d'un délai de deux ans suivant ce délai de deux mois la péremption de l'instance pourra être encourue si les diligences précitées n'ont pas été effectuées dans ce délai.
Cet arrêt est intervenu à la suite d'un précédent arrêt de radiation rendu le 7 février 2015 mentionnant que le rétablissement au rôle sera subordonné au dépôt par l'appelante de ses conclusions au greffe accompagné du bordereau de communication de pièces au plus tard le 1er avril et la péremption encourue à défaut de diligences dans un délai de deux ans après cette date.
Il était satisfait à cette obligation le 2 avril 2015.
Un avis était adressé par le greffe le 14 novembre 2016 à l'avocat de l'appelante portant le calendrier de procédure suivant : dépôt des conclusions au greffe pour le 20 décembre 2016 et pour l'intimé le 25 janvier 2017. Il n'était pas respecté, l'avocat de l'appelante ayant communiqué ses conclusions le 22 février 2017, ce qui donnait lieu à une demande de renvoi de l'intimé à l'audience du 7 mars 2017.
L'arrêt de radiation du 17 mars 2017 était régulièrement notifié le jour même, suivant lettre simple conformément aux dispositions de l'article 381 du code de procédure civile, aux parties.
Par courrier du 18 septembre 2017 l'avocat de l'appelante sollicitait le réenrôlement de l'affaire et déposait pour ce faire ses conclusions au greffe .
L'affaire était rétablie en l'état.
Il n'est pas contesté que l'avocat de l'appelante avait communiqué ses conclusions et pièces le 22 février 2017 à l'intimé et que la radiation n'a été prononcée qu'en raison de cette communication tardive, à laquelle l'intimé n'avait pu répondre en temps utile.
L'appelante qui a sollicité la réinscription au rôle dans le délai de deux ans et deux mois de l'arrêt de radiation avait d'ores et déjà accompli les exigences de communication de ses conclusions et pièces à l'intimé, et elle a, en sollicitant la réinscription, satisfait aux autres exigences posées par l'arrêt de radiation, à savoir le dépôt des conclusions écrites au greffe avec bordereau de communication de pièces et copie du présent arrêt. Par la suite, aucune autre diligence n'a été mise à la charge de l'appelante par la juridiction.
Il s'en suit que la péremption n'est pas acquise.
Les demandes de qualification de la lettre remise le 7 avril 2011 à la salariée en sanction disciplinaire et d'annulation subséquente
La salariée soutient la nature disciplinaire de la lettre que lui a remise l'employeur dès son retour de congés.
Aux termes de l'article L1331-1 du code du travail constitue une sanction toute mesure, autre que les observations verbales, prise par l'employeur à la suite d'un agissement du salarié considéré par l'employeur comme fautif, que cette mesure soit de nature à affecter immédiatement ou non la présence du salarié dans l'entreprise, sa fonction, sa carrière ou sa rémunération.
L'employeur a remis en mains propres à Mme [YB] contre signature la lette dans laquelle il énonce les éléments suivants :
' Comme suite de votre correspondance, par e-mail, en date du samedi 26 mars 2011, je me permets par la présente de vous apporter les éléments de réponse suivants.
Je ne suis nullement responsable du retard et de votre négligence dans le traitement des dossiers dont vous avez la charge.
Concernant les conclusions devant la cour d'appel d'Aix-en-Provence dans le dossier COVEA RISK, vous êtes en possession des conclusions adverses depuis le mois d'octobre 2010, vous êtes informée par notre avoué devant la cour qu'il convenait de conclure au plus tard le 19 avril 2011, et le 26 mars 2011 vous n'aviez toujours pas ouvert le dossier ...
Vous avez décidé votre intervention esthétique depuis plusieurs mois. Pour cela vous avez déposé une semaine de vacances (du 28 Mars au 5 Avril) et en votre qualité d'avocat collaborateur vous deviez assumer le traitement de vos dossiers.
Or, votre négligence, voire votre paresse dans ce dossier sont totalement inacceptables.
Aujourd'hui je suis contraint de conclure dans l'urgence afin de pallier donc votre manque de sérieux.
J'ai dû ranger personnellement tous les dossiers qui traînent dans votre armoire et qui étaient terminés depuis de nombreuses années ... (Dont notamment tous les dossiers Grands Moulin Storione contre la société marseillaise de production)
Je vous rappelle que je vous ai demandé à de multiples reprises de classer les dossiers qui étaient terminés dans des boîtes ... Visiblement ce travail vous importune.
De plus j'ai découvert une multitude de courriers en vrac dans votre armoire.
Vous n'avez même pas pris le soin et la peine de placer ces courriers dans les dossiers correspondants. De sorte qu l'on ne doit pas s'étonner si dans certains dossiers on ne trouve pas les correspondances échangées avec les avocats ou les juridictions.
Il suffit de quelques minutes par jour de travail pour ranger ses dossiers.
Au lieu de cela vous laissez s'entasser des dizaines de lettres, de conclusions, de décisions de justice, dans des dossiers dont certains sont toujours en cours. (APPETIT DE FRANCE)
J'ai attiré votre attention sur le fait qu'un avocat ne doit pas « économiser» ses heures de travail. Je vous ai demandé, avec insistance et à de nombreuses reprises, de débuter votre travail à 8:30 ... Peine perdue, vous continuez à "arriver vers 9:15 voir 9:30 et vous terminez immuablement à 18:30.
Lors du rendez-vous avec Monsieur et Madame [X] le 23 novembre à 18:30 vous êtes partie avant la fin du rendez-vous ... Visiblement pressée d'en finir.
Dès 18:00 vous m'avez appelé à deux reprises pour m'informer que Monsieur et Madame [X] n'étaient pas encore arrivés... Qu'ils étaient visiblement en retard. Vous n'attendiez qu'une seule chose.... Que je vous dispense d'être présente au rendez-vous.
Que dire du dossier de M. [L]. Je vous avais demandé avec insistance d'être tôt au bureau, vers 8:00 du matin, car le lendemain la partie adverse allait s'opposer à toute demande de renvoi. Le dossier de plaidoiries n'était pas terminé et il fallait être prêt pour le cas où.
Non seulement vous n'étiez pas là à 8 heures mais lorsque je suis revenu de l'audience à 9:00, vous n'étiez toujours pas présente.
Vous m'avez laissé seul gérer ce dossier et j'ai dû vous rappeler à plusieurs reprises du tribunal pour m'apporter les pièces complémentaires qui me faisaient défaut.
Alors précisément que nos conclusions récapitulatives n'avaient pas été déposées devant le juge en temps et en heure.
Cette façon de travailler n'est absolument pas conforme à l'éthique des cabinets d'avocats.
Dans le dossier de M. [S] vous avez communiqué à la partie adverse nos conclusions avec du retard. De sorte que le jour de l'audience l'avocat adverse a eu beau jeu en demandant au juge d'écarter nos dernières pièces et conclusions.
Vous connaissez la teneur de la décision qui a été rendue.
Le métier d'avocat nécessite un investissement en temps de travail particulièrement important. Il convient d'être rigoureux et de ne pas attendre la dernière minute pour conclure devant une cour d'appel. Vous savez que je prends le soin de vérifier et contrôler l'ensemble de vos conclusions. Il s'agit en effet d'un travail d'équipe.
Pour ce faire faut-il encore me laisser le temps nécessaire à la réflexion. Vous m'informez, dans votre correspondance précitée du 26 mars 2011, que vous seriez venue travailler le samedi afin de terminer le dossier [B].
Je note que les conclusions récapitulatives que vous m'avez remises ne comportent que quelques lignes supplémentaires par comparaison aux conclusions initiales. Je doute que ce travail ait nécessité une journée complète.
Mais surtout, vous avez une nouvelle fois attendue le dernier jour pour établir des conclusions récapitulatives.
Depuis combien de temps, notre postulant vous a informé de la date de mise en état du 6 avril 2011 '
Vous auriez dû conclure ce dossier depuis bien longtemps, il est tout aussi inacceptable d'attendre le dernier jour de présence avant votre départ en congé pour remettre des conclusions qu'il faut précipitamment communiquer à notre postulant.
Concernant votre absence le lundi 28 mars au bureau, je vous rappelle que vous m'aviez dans un premier temps annoncé votre présence. Pour m'envoyer le samedi 26 mars un e-mail dans lequel vous m'informez pour la première fois que vous ne pourriez être présente au bureau.
Alors que nous devions faire le point sur de nombreux dossiers LE LUNDI MATIN.
À l'évidence vous vous souciez peu de l'organisation du cabinet.
Est-il normal que vous m'annonciez par téléphone le lundi 4 avril à 17:00 que vous ne pourriez être présente le lendemain mardi 5 avril et que je devais assurer une audience de mise en état dans le dossier Land Bike M.hadjaj '
Non seulement il s'agit d'un comportement peu respectueux de la personne de votre employeur, car vous auriez pu avoir la délicatesse de me prévenir dès le matin, mais vous désorganisez complètement mon planning de travail.
Le retard que vous avez accumulé dans le traitement de certains dossiers est considérable. Les assignations au fond dans les dossiers JEPHA et DELICES D ISABELLE ne sont toujours pas délivrées.
Je vous ai demandé avec insistance de me remettre chaque semaine votre temps de travail dans les dossiers que vous traitez.
Or bien souvent vous remettez les pièces justificatives avec plusieurs semaines de retard ...
À l'évidence les temps de travail que vous mentionnez sont totalement fantaisistes :
5:30 de travail dans le dossier [V] pour rédiger un protocole d'accord de quatre pages
3:30 de travail dans le dossier de Mme [O] pour relire un projet de dissolution établi par un notaire pour lequel vous n'apportez pas la moindre remarque
32 heures de travail dans le dossier de M. [S] du 3 janvier au 21 janvier 2011
30 minutes de travail pour rédiger un courrier de 10 lignes par e-mail à M. [T] ..... Que je vous ai intégralement dicté.
À l'avenir, je vous informe officiellement que je ne saurai tolérer l'établissement de feuilles de travail totalement incongrues.
Pour conclure, Mademoiselle, je vous demande de modifier radicalement votre comportement au sein du cabinet.
- de ranger soigneusement tous les dossiers dont vous avez la charge
- de ne pas laisser s'accumuler les correspondances dans un placard du bureau
- de respecter les horaires minimum de travail en débutant votre journée à 8:30
- de veiller au respect du planning concernant les échéances judiciaires
- de rattraper le retard accumulé dans nombreux dossiers en évitant de les bâcler.
Je reste bien évidemment votre entière disposition si vous souhaitez converser des sujets abordés dans le présent courrier.'
Il résulte de ces énonciations écrites par lesquelles l'employeur adresse à la salariée plusieurs reproches avec insistance et l'intentionalité qui s'évince même de la forme, en recourant à des formules manifestement critiques et en l'exhortant à un changement de pratique radical, qu'elles dépassent le simple recadrage dont l'objet est d'attirer le salarié sur un certain nombre d'insuffisances et de l'inviter à se ressaisir. En l'espèce la lettre traduit ainsi l'expression de véritables griefs, l'enjoint à remédier aux manquements allégués ainsi qu'à modifier son exercice professionnel en l'avisant même officiellement de l'absence de toute tolérance future.
La lettre présente dès lors le caractère de sanction disciplinaire qui ouvre droit pour la salariée d'en demander l'annulation.
En application des articles L1333-1 et L1333-2 du code du travail l'annulation d'une sanction irrégulière en la forme ou injustifiée ou disproportionnée à la faute commise, s'apprécie au vu des éléments que doit fournir l'employeur et de ceux que peut fournir le salarié. Si un doute subsiste, il profite au salarié.
Il convient d'examiner successivement les reproches énoncés et les éléments produits au soutien de leur matérialité.
Sur le premier grief, l'employeur justifie du déroulé procédural avancé avec réception des conclusions adverses communiquées par son confrère avoué 11 octobre 2010, la fixation de l'audience au 2 mai 2011 avec clôture devant intervenir le 19 avril 2011, l'absence d'avancée du dossier au 26 mars 2011 comme cela résulte du mail de Mme [YB] invitant au besoin M. [P] le 27 mars à récupérer pendant son absence les conclusions de première instance sur son ordinateur, finalement l'établissement des conclusions par M. [P], lesquelles étaient déposées et notifiées le 6 avril 2011.
La salariée ne se défend pas d'avoir été en charge de la préparation des conclusions mais fait valoir qu'à la date initialement prévue de son retour à l'étude après ses congés, il lui laissait encore 13 jours pour conclure. Si l'employeur invoque un fonctionnement de dernière minute, à défaut de toute consigne expresse de l'employeur sur une date pour finaliser les dites conclusions et de toute justification de pratiques en usage à l'étude sur l'anticipation des délais de procédure, le caractère fautif n'est pas rapporté.
Aucun élément matériel n'est produit au soutien de la réitération du grief tenant aux retards dans le traitement des dossiers, qu'il s'agisse de la tardiveté du dépôt ou de la communication des conclusions dans les dossiers de M. [L] et de M. [S], de ses conséquences dans ce dernier dossier alors même que l'employeur produit une attestation de ce client ou qu'il s'agisse de l'absence d'assignation au fond dans les dossiers JEPHA et Délices d'Isabelle. S'agissant du dossier [B] évoqué dans le mail de la salariée le 27 mars 2011 par lequel elle lui indiquait être venue le samedi pour finaliser les derniers dossiers avant ses congés, dont le dit dossier, encore une fois l'employeur procède par affirmation sur la tardiveté des conclusions et par appréciation non vérifiable sur son contenu.
L'absence de classement des dossiers clos, de rangement des courriers dans les dossiers correspondants n'est étayée par aucune pièce.
Le reproche tenant à l'arrivée tardive le matin ne l'est pas davantage, pas plus que celui relatif à son horaire de départ ou les illustrations qu'il en donne par référence au rendez-vous avec les clients M. et Mme [X], alors même que l'employeur produit une attestation de M. [X] ou au dossier de M. [L]. Il sera rappelé par ailleurs qu'aux termes de l'article 6.1 de la convention collective applicable, l'avocat salarié dispose dans l'exercice de sa profession d'une réelle autonomie dans l'organisation de son temps de travail, afin d'assumer les missions qui lui sont confiées et qu'en l'espèce l'employeur ne justifie pas de demandes expresses touchant à l'organisation du cabinet. De surcroît comme le souligne la salariée le rendez-vous avec les consorts [X] s'est déroulé le 23 novembre 2010, soit plus de deux mois avant le reproche qui lui en est fait et qui présente les caractéristiques d'une sanction disciplinaire, sans que l'employeur ne démontre qu'il en aurait eu connaissance dans les limites de la prescription.
Il n'est encore pas fourni de pièces justificatives au soutien de la désorganisation que l'employeur lui impute. Le reproche relatif à l'annonce de dernière minute et sans accord préalable de son absence le lundi 28 mars 2011 n'est pas corroboré par le mail qu'il produit de salariée du 27 mars par lequel elle lui indiquait avoir travaillé le samedi pour pouvoir prendre ses congés 'comme prévu' dès lundi, sans que l'employeur n'apporte de contradiction tangible. Aucune pièce ne vérifie l'annonce par téléphone le 4 avril à 17h de son absence le 5 avril et de la nécessité pour son employeur d'assurer une audience de mise en état dans le dossier Land Bike M. [R].
Enfin le grief tenant au caractère 'fantaisiste' 'incongru' des temps de travail qu'elle reportait à sa demande pour chaque dossier sur un document hebdomadaire n'est objectivé par aucun élément et les illustrations qu'il énonce constituent des appréciations invérifiables.
Il résulte en définitive que l'employeur n'établit pas la matérialité des griefs énoncés.
Pour l'essentiel il s'en tient en substance d'une part à faire valoir que la lettre traduit son 'ras le bol' face au désintérêt et au manque de rigueur persistants de la salariée, qui fait suite à de précédents rappels à l'ordre, qu'aucun élément ne vient confirmer et d'autre part à invoquer l'absence de toute contestation de la teneur de la lettre jusqu'aux conclusions d'appel du 22 février 2017.
En conséquence faute pour l'employeur d'étayer la matérialité des faits que la salariée conteste ou à laquelle elle oppose la prescription, tels qu'énoncés dans la lettre du 7 avril 2011 qui revêt les caractéristiques d'une mesure disciplinaire, celle-ci est injustifiée. Il en sera prononcé l'annulation par voir d'infirmation de la décision déférée.
La contestation de la régularité de la procédure de licenciement
Au premier soutien de sa contestation, la salariée invoque l'entrave de l'employeur au bon déroulement du premier entretien pour avoir manifesté de l'animosité et de la suspicion à l'égard du conseiller du salarié.
Dans la lettre de licenciement l'employeur reprenait le déroulé de la procédure en ces termes :
' Vous avez été convoquée pour un entretien préalable le 11 mai à 18:00 et vous vous êtes présentée au cabinet accompagnée d'une personne se présentant comme votre conseiller.
J'ai demandé à cette personne de prendre copie de sa carte professionnelle, cette dernière a refusé. Vous êtes alors entrées toutes les deux dans mon bureau et vous vous êtes assises pour commencer l'entretien. J'ai demandé à la personne qui vous accompagnait de bien vouloir me justifier de son identité par la communication d'une pièce d'identité (permis de conduire, carte d'identité ...) Cette dernière a refusé catégoriquement.
II est légitime que l'employeur puisse demander au conseiller du salarié de justifier de sa qualité (via la fourniture d'une attestation individuelle délivrée par la Direccte et d'une copie de l'arrêté préfectoral mentionnant sur la liste.)
Le refus catégorique de la personne qui vous accompagnait de me justifier de son identité m'a laissé perplexe pendant quelques minutes ... Pour quelles raisons cette personne refusait que je puisse prendre copie de sa carte professionnelle ou simplement vérifier son identité ...
Sans me laisser le temps de la réflexion, cette personne a décidé de sortir de mon bureau.
J'ai donc décidé de vous convoquer pour un nouvel entretien préalable.
Le lendemain vous avez à nouveau été convoquée pour un entretien préalable le 24 mai à 18:00. Vous avez refusé de vous présenter à cet entretien'.
Il produit également un procès-verbal d'huissier par lequel ce dernier dresse le constat suivant :
' Certifions et attestons nous être ce jour ONZE MAI à 18 heures 10, rendu à [Localité 2], au-devant du cabinet de Maître [P].
Nous avons alors rencontré dans le hall d'entrée de l'immeuble Madame [YB] qui est accompagnée de Madame [N] [W] que nous connaissons.
Madame [N] nous déclare spontanément qu'elle a quitté le bureau de Maître [P], accompagnée de Madame [YB] car elle n'a pas voulu remettre sa carte de délégué aux fins de copie. Elle nous a également indiqué qu'elle sera convoquée ultérieurement pour un autre entretien auquel elle n'assistera pas personnellement'
Pour sa part la salariée produit l'attestation de Mme [N] qui affirme 'J'ai justifié ma qualité de Conseiller Salarié en présentant ma carte professionnelle à Me [P] qui s'éloigna pour en faire une photocopie, ce dont je me suis opposée catégoriquement.
Contrarié Me [P] me demanda alors ma Carte d'Identité pour vérifier si c'était bien moi sur ma Carte Professionnelle, la liste des Conseillers salariés et si j'en faisais bien partie.
Surprise de ce comportement, j'ai répondu à M. [P] que sur ma carte professionnelle il y avait ma photo, quant à la liste des Conseillers salariés je n'en avais pas, et que je trouvais étonnant cette demande étant donné que sur la lettre de convocation à l'entretien préalable, il avait lui-même mentionné les adresses ou Mlle [YB] [G] pouvait trouver cette liste.
L'ambiance devenait de plus en plus tendue, quand Mlle [YB] a fait la remarque de la présence d'un dictaphone pausé sur le bureau de M.[P] en marche ou non ' Je l'ignore, ainsi que du portable dont il s'est servi.
J'ai dit à M. [P] que cela était interdit et que l'entretien n'allait pas durer des heures.
M. [P] me rétorqua aussitôt, qu'il y a beaucoup de choses à dire et que j'avais le rapport de l'entretien à faire avant de partir.
J'ai répondu à ce Monsieur, que le rapport sera fait par mes soins dans les jours prochains, comme cela c'est toujours fait pour les entretiens, chose qu'il a très mal pris et a fait un résumé, de ce qui venait de se passer, à savoir:
Je ne peux pas avoir la copie de votre carte professionnelle
Je ne peux pas avoir la copie de votre carte d'identité
Je ne peux pas avoir la liste des conseillers salariés
Vous refusez de faire votre compte rendu à la fin de l'entretien
Alors, je re-convoquerai Mlle [YB] à un autre entretien ultérieurement
Face à ses questions, j'ai demandé à M. [P] s'il ne voulait pas que je lui fasse ma biographie et que son comportement était une entrave au bon déroulement des fonctions de Conseillers salariés.
Je suis repartie avec Mlle [G] [YB] à 18 h 05 - Fin de l'entretien'
De principe lorsque l'assistant choisi par le salarié est un conseiller extérieur, celui-ci doit justifier de son identité et de sa qualité à la demande de l'employeur. A défaut ce dernier peut s'opposer à sa présence au cours de l'entretien.
En l'espèce il est constant que lors du premier entretien prévu le 11 mai 2011 Mme [YB] s'est présentée, assistée de [W] [N] dont la qualité de conseiller inscrit sur la liste dressée par le Préfet n'est à posteriori pas remise en cause.
Il n'est pas contesté que celle-ci a présenté sa carte professionnelle, dont l'employeur a voulu faire copie, ce qui n'était pas exigible.
L'employeur ne pouvait pas non plus exiger qu'elle produise la liste des conseillers du salarié dressée par le préfet, ni qu'elle établisse un compte rendu à la fin de l'entretien dès lors que compte rendu n'est pas prévu par les textes.
Mais s'agissant de justifier de son identité comme l'employeur le demandait, il est opposé que la carte professionnelle la dispensait de le faire. Néanmoins il n'est pas précisément établi si Mme [N] a présenté l'attestation individuelle supportant la photo de l'intéressée délivrée par la Direccte qui effectivement tient lieu de justificatif tant de la qualité que de l'identité.
En tout état, l'employeur n'a pas refusé la présence de Mme [N], l'entretien a été interrompu dans des circonstances contestées que les pièces versées par l'une et l'autre partie ne permettent de déterminer objectivement et l'employeur a procédé à une nouvelle convocation à entretien préalable de sorte qu'aucune irrégularité ne peut être retenue de ce chef.
Au second soutien de sa contestation la salariée invoque le non respect du délai de réflexion de deux jours entre l'entretien du 24 mai 2011 et l'envoi de la lettre de licenciement le 26 mai 2011.
En application de l'article L1232-6 du code du travail, la lettre de licenciement ne peut être expédiée moins de deux jours ouvrables après la date de l'entretien préalable auquel la salariée doit être convoquée.
Ainsi c'est à la seule date d'expédition que le respect des dispositions précitées doit être examiné.
En l'espèce la salariée a été convoquée à un entretien préalable fixé le 24 mai 2011 et la lettre de licenciement, certes datée du 26 mai 2011, lui a été adressée par lettre recommandée postée le 27 mai 2011 comme suffit à en attester le bordereau de dépôt portant la mention lettre de licenciement.
Si la salariée se prévaut de l'absence de correspondance avec le n° du recommandé inscrit manuscritement sur la lettre de licenciement tandis que M. [P] invoque deux envois successifs sous plis recommandés de cette lettre outre l'envoi d'un courrier réponse relatif au déroulé de l'entretient préalable du 11 mai 2011, il est justifié par les bordereaux de dépôt que les trois recommandés ont été expédiés le 27 mai 2011, soit à l'expiration du délai des deux jours ouvrables.
En conséquence la décision déférée sera confirmée en ce qu'elle n'a retenu aucune irrégularité de la procédure de licenciement et a débouté Mme [YB] de sa demande de dommages et intérêts de ce chef.
La contestation du bien fondé licenciement
Dès lors que l'employeur, pour donner un effet immédiat à sa décision de rompre la relation de travail et se dispenser des obligations de délai-congé et d'indemnisation, a invoqué une faute grave de la salariée, il lui incombe d'en apporter la preuve dans les termes énoncés dans la lettre de licenciement qui fixe les limites du litige.
Les motifs de faute doivent contenir des griefs précis, objectifs et matériellement vérifiables.
Il conviendra d'examiner successivement les motifs articulés dans la lettre de licenciement et que la salariée conteste.
Par ailleurs celle-ci oppose l'épuisement du pouvoir disciplinaire de l'employeur pour des faits connus de l'employeur antérieurement à la sanction disciplinaire par lettre du 7 avril 2011, en application du principe 'non bis in idem'.
De principe en effet, l'employeur qui bien qu'informé d'un ensemble de faits choisit de prononcer une sanction disciplinaire pour certains d'entre eux, a épuisé son pouvoir disciplinaire et ne peut prononcer ultérieurement un licenciement pour les autres faits connus avant la date de notification de la première sanction.
Il conviendra d'examiner également si les faits énoncés étaient ou non connus de l'employeur avant cette date au vu des éléments qu'il se doit de fournir, dès lors que la charge de la preuve lui incombe.
En préambule la lettre de licenciement énonçait :
'J'ai eu à déplorer de votre part des agissements répétitifs et récurrents constitutifs d'une faute grave..... En conséquence je vous notifie par la présente les griefs reprochés qui sont relatifs au traitement des dossiers dont vous aviez la charge.
En ma qualité d'ancien conseil juridique et fiscal, je maîtrise le droit des sociétés et la fiscalité mais j'ai besoin d'un avocat spécialisé en procédure judiciaire pour traiter les dossiers de contentieux en matière commerciale. Telle est votre fonction d'avocat salarié au sein du cabinet.
Du fait de votre absence depuis le 28 mars 2011 (en vacances du 28 mars au 6 avril 2011, puis en arrêt maladie renouvelé par votre médecin traitant) j'ai été contraint de reprendre les dossiers dont vous aviez la charge. J'ai découvert de nombreuses fautes professionnelles particulièrement graves pour un avocat ayant 8 ANS d'expérience professionnelle'
L'absence de la salariée à compter du 28 mars 2011 est avérée et implique l'intervention de l'employeur dans les dossiers de sa salariée, en particulier dès lors que son absence s'est prolongée au delà des congés initialement prévus jusqu'au 5 avril 2011. Cette logique n'en demeure pas moins insuffisante à démontrer précisément quand l'employeur a eu connaissance des faits reprochés.
Par ailleurs la salariée fait valoir les limites de son autonomie de fonctionnement en se référant justement aux énonciations de la lettre du 7 avril 2011 par laquelle M. [P] indique que 'vous savez que je prends soin de vérifier et de contrôler l'ensemble de vos conclusions. Il s'agit en effet d'un travail d'équipe' et en produisant les attestations de deux anciennes salariées du cabinet, Mme [J] juriste et Mme [K], secrétaire, selon lesquelles l'employeur encadrait et suivait le travail de sa salariée. Ces déclarations tout aussi générales ne peuvent valoir pour les dossiers qui sont précisément l'objet des griefs énoncés dans la lettre de licenciement. Ces attestations ne sont pas contredites par les propres attestations de l'employeur selon lesquelles ces témoins, M. [X], M. [S] et M. [BD] affirment que Mme [YB] était leur seul interlocuteur, ce qui ne préjuge en rien des modalités de travail suivies en interne.
Le premier motif a été rédigé comme suit :
1°) Dossier De Mr [A].
Ce client est venu me consulter pour constituer une société civile immobilière « familiale ».
Je lui ai conseillé une société civile immobilière semi-transparente fiscalement (Art. 8 du code général des impôts) dans laquelle il serait judicieux d'associer ses enfants mineurs. J'ai
procédé à la rédaction du projet de statuts et vous ai demandé en janvier 2011 de solliciter du juge compétent l'autorisation nécessaire à la présence d'enfants mineurs dans une société civile.
Le client a téléphoné à plusieurs reprises au cabinet dans le courant du mois d'avril 2011 pour savoir où en était son dossier. Je lui répondais que la requête avait bien été déposée.
Par sécurité, compte tenu de l'absence de toute ordonnance rendue par le juge, j'ai vérifié votre dossier. Par chance, j'ai pu retrouver sur votre bureau une pochette intitulée de votre main « A TRAITER ».
A l'intérieur se trouvait la réponse au problème. Le tribunal d'instance d'Aubagne vous avait répondu le 22 février 2011 qu'il n'était plus compétent en matière de tutelle pour les mineurs.
« Désormais le juge des affaires familiales, statuant en matière de tutelles mineures près le tribunal de grande instance est seul compétent ».
Le tribunal d'instance d'Aubagne a donc pris le soin de vous renvoyer l'intégralité des pièces du dossier constitué de la requête, du projet d'ordonnance, ainsi que le projet des statuts de la société civile immobilière dénommée «SCI LES 4 [A] ».
II suffisait de prendre cinq minutes de votre temps pour corriger votre erreur, vous déplacer au tribunal de Grande instance de Marseille et remettre au bureau situé au rez-de-chaussée la requête, le projet d'ordonnance, et le projet de statuts qui vous avaient été renvoyés par le tribunal d'instance d'Aubagne.
Non seulement vous ne m'avez nullement informé que le tribunal d'instance avait retourné l'intégralité du dossier mais vous n'avez pas pris le soin de redéposer immédiatement la requête et les pièces auprès du tribunal de Grande instance de Marseille seul compétent.
Cela ne nécessitait aucun travail particulier mais simplement le bon suivi du dossier et la volonté de corriger votre erreur initiale.
Le traitement du dossier a donc pris deux mois de retard dont vous êtes responsable. Je vous informe que le client a téléphoné le 23 mai 2011 pour connaître l'état d'avancement de son dossier qui avait pris selon ses dires beaucoup de retard.
De plus vous m'avez précisé que le travail de recherche et de rédaction de la requête avait nécessité précisément 4:40 heures de travail (voir votre fiche de temps de travail pour la période) ce qui est totalement fantaisiste et dénote un manque de sérieux évident dans le traitement de ce dossier.
En 4:40 travail vous n'avez même pas vérifié que depuis la loi n° 2009. 526 du 12 mai 2009, le juge d'instance, juge des tutelles, est dessaisi au profit du juge aux affaires familiales, juge du tribunal de Grande instance.
II est évident que la seule rédaction de la requête sur une page, ne peut nécessiter 4:40 travail pour un avocat ayant huit ans d'expérience'.
L'employeur justifie de la matérialité de l'erreur d'aiguillage et des délais avancés, à savoir requête adressée le 17 février 2011 au tribunal d'instance d'Aubagne, réponse de la juridiction par lettre du 22 février et nouvelle requête adressée le 28 avril 2011 au juge aux affaires familiales de Marseille.
La lettre d'accompagnement de la requête du 17 février 2011 signée P/O de M. [P] porte manifestement la signature de Mme [YB] pour être en tout point comparable à celle qui figure sur son contrat de travail. La salariée était donc bien en charge de ce dossier dans lequel c'est finalement M. [P] qui adresse le 28 avril 2011 la requête rectifiée à la juridiction compétente, sans que la salariée n'ait elle-même procédé au dépôt d'une nouvelle requête durant le mois qui a précédé sa prise de congés. Cependant en l'absence de toute mention d'urgence ou d'échéance précise à obtenir l'autorisation de constituer la SCI avec les enfants mineurs, rien ne permet d'apprécier ce délai.
Par ailleurs les énonciations relatives à l'erreur initiale et au temps travail déclaré sur ce dossier relèveraient pour l'un de l'insuffisance professionnelle, non du disciplinaire et constituent pour l'autre d'une appréciation non vérifiable.
Par ailleurs selon la salariée l'employeur ne justifie pas de la date ni des circonstances dans lesquelles il aurait eu connaissance de la nécessité de procéder au dépôt d'une nouvelle requête devant la juridiction compétente et de l'absence de suivi entre le 22 février et le 28 avril 2011, ce faisant de l'absence de prescription du manquement allégué à la date d'engagement du licenciement et du non épuisement du pouvoir disciplinaire.
Aucune prescription ne valablement être opposée sur la négligence alléguée dès lors que l'information donnée par le tribunal d'instance est du 22 février et que l'engagement de la procédure de licenciement est en date du 28 avril 2011.
Sur sa connaissance de l'absence de nouvelle requête déposée, l'employeur affirme avoir découvert une pochette intitulée 'à traiter' à une date indéterminée mais postérieure au 28 mars 2001, contenant notamment les actes et courriers précités et produit copie d'un document portant cette mention manuscrite. Cependant il rien ne permet de le vérifier et rien ne vient non plus démontrer le contenu allégué.
Ainsi dès lors que l'employeur ne démontre pas alors que cette preuve lui incombe, qu'il n'en avait pas connaissance avant la mesure du 7 avril 2011, ce grief ne peut encore être retenu à l'appui du licenciement.
Dans le deuxième motif l'employeur a énoncé le grief suivant :
'2°) Dossier de Mme [I].
Ce client est la secrétaire d'une personne que je connais personnellement (MR [H]).Ce dernier m'a sollicité pour me confier le dossier de son ancienne collaboratrice dans la mesure où il me faisait totalement confiance. J'ai plaidé la première partie de cette procédure judiciaire devant Monsieur le juge des référés du tribunal de Grande instance d'Aix-en-Provence (17 mars 2009). La décision rendue a été favorable à Madame [I].
Vous vous êtes déplacée le 4 janvier 2011 pour plaider ce dossier devant le tribunal de Grande instance d'Aix-en-Provence statuant sur le fond. Le jugement rendu a été particulièrement défavorable Madame [I]. En votre absence, j'ai convoqué le client afin d'analyser précisément les chances d'un éventuel appel. (Entretien du 13 avril 2011)
Or, j'ai été stupéfait d'apprendre de l'aveu même de Madame [I], que vous n'aviez pas plaidé le dossier, laissant le soin à l'avocat adverse de l'accabler sans réaction de votre part. Ses propos méritent d'être littéralement cités: (courrier du 15 avril 2011 )
« Me [YB]» qui nous représente, arrive en retard au tribunal de Grande instance d'Aix-en-Provence, je téléphone deux fois à votre bureau pour savoir où est Me [YB].
Quand elle arrive, elle nous explique qu'elle est en panne de voiture. Entre-temps l'audience commence et Me [YB] nous explique qu'il n' y a pas de plaidoirie mais uniquement un jugement sur les conclusions. Nous sommes très déçus. Me. [BS], plaide et informe le juge que nos baies vitrées ressemblent à une verrue sur le milieu de la façade. Me. [YB] ne répond pas et ne justifie en aucun cas que nous avons une autorisation de l'assemblée générale et que nos vitres sont très sobres ...
Me. [BS] donne au juge des photos et à ce moment-là seulement Me. [YB] donne également des photos. Elle revient à sa place, Me. [BS] continue à parler avec le juge à voix basse, puis nous demande s'il y a d'autres baies posées dans la copropriété. Nous n 'avons même pas le temps de répondre que le juge annonce que le délibéré sera le 1er mars 2011. Vous comprendrez notre désarroi et notre grande déception. »
Je vous rappelle que vous n'avez jamais eu de voiture ... Que la veille de l'audience vous m'avez demandé si vous pouviez louer une voiture ... Je vous ai répondu que la navette par bus fonctionnait très bien et que vous pourriez prendre un taxi une fois arrivée à [Localité 4]. (Ce que vous avez fait)
Je vous rappelle aussi que ce comportement porte gravement atteinte au devoir d'assistance que tout avocat doit respecter envers son client.
« La mission d'assistance en justice emporte pouvoir et devoir de conseiller la partie et de présenter sa défense sans l'obliger. D'autre part, et surtout, elle porte sur la plaidoirie à l'audience qui constitue son objet essentiel auquel elle est souvent assimilée. » (Code de procédure civile)
Madame [I] est de condition modeste, elle m'a vu la défendre devant Monsieur le juge des référés et elle attendait la même chose de votre part.
Je vous rappelle enfin que vous n'avez pas respecté mes instructions, vous vous êtes déplacé pour plaider le dossier à [Localité 4]. Vous avez appelé Madame [I] pour lui confirmer la date et l'heure de l'audience de plaidoirie et vous avez convenu de vous retrouver directement au tribunal de Grande instance.
Si j'avais souhaité que notre postulant régularise un simple dépôt, vous ne vous seriez pas déplacé l'après-midi à [Localité 4] en dépensant des débours inutiles pour le cabinet.
De retour vers 17:00 vous m'avez annoncé « tout s'est très bien passé » ... En oubliant de préciser que vous n'aviez pas plaidé votre dossier. Vous m'avez menti avec une certaine assurance ...
II est évident que vous n'avez pas travaillé ce dossier en vue de l'audience de plaidoirie du 4 janvier 2011. II est plus facile de déposer un dossier que de l'argumenter, expliquer les motifs de droit et de fait, et de le plaider.
Votre mensonge sur la soi-disant panne de votre voiture n'a pas convaincu Madame [I].
De même que votre affirmation selon laquelle « on ne plaide par devant le tribunal de Grande instance» alors précisément que Madame [I] a vu et entendu d'autres avocats qui plaidaient les dossiers dont ils avaient la charge.
Votre comportement porte atteinte à l'image du cabinet. Madame [I] m'a dit avoir téléphoné le soir même à Monsieur [H] pour l'informer de sa déception et de son désarroi.
J'ai dû m'excuser de votre comportement auprès de cette dernière en lui promettant que devant la cour d'appel d'Aix-en-Provence je plaiderai son dossier. J'ai donc interjeté appel'.
Au soutien du grief, l'employeur produit la lettre des époux [I] datée du 15 avril 2011. Selon ses propres affirmations cette lettre intervient à la suite d'un rendez-vous avec ces clients à la suite du délibéré intervenu le 28 mars 2011, au cours duquel il prenait connaissance des faits qui fondent le grief énoncé dans la lettre de licenciement .
Or il procède par affirmation sur la date du rendez-vous le 13 avril 2011. Il ne produit aucun élément venant corroborer cette affirmation. La lettre des époux [I] n'y fait pas référence, il ne produit pas de copie de son agenda alors qu'il le fait pour ceux de Mme [YB] et il ne justifie pas avoir procédé à des vérifications.
Ce faisant encore une fois l'employeur ne démontre pas qu'il n'en avait pas connaissance avant la lettre du 7 avril 2011.
Par ailleurs sur le fond la seule attestation de clients mécontents et contredite par le mail de Me [IK] en réponse à la demande de Mme [YB] sur le déroulé de l'audience et selon lequel 'de mémoire, vous aviez plaidé normalement ce dossier dans l'instance au fond, toutefois sans me souvenir de vous avoir complimenté en particulier. Je m'étonnais seulement de cette réclamation des époux [I] que vous évoquiez lors de l'échange téléphonique ultérieur dont vous me parlez et m'en étonnes encore alors que mon confrère Maître [Y] [P], pour qui vous interveniez de mémoire, ne m'a rien demandé. Je reste à sa disposition si besoin est ou du bâtonnier pour en attester si vous êtes personnellement mis en cause par ces personnes' ainsi que le mail de Me [C] qui indiquait 'Je vous confirme votre présence à l'audience du Tribunal de Grande Instance d'Aix en Provence du 4 janvier 2011 dans le dossier [I] / SDC Le Hameau, affaire dans laquelle j'étais le Postulant de Maître [P]. Je vous confirme également que vous avez bien plaidé ce dossier contre Maître [IK] au cours de cette audience où nous nous étions rencontré', n'objective pas que la salariée ait manqué à ses obligations professionnelles, ni contrevenu à des consignes expresses. Par ailleurs il ne peut s'évincer d'une plaidoirie à l'audience de conséquences sur la décision prise dans une procédure écrite.
Quant au retard et au prétexte invoqué par la salariée, qui ne sont au demeurant pas contredits, il n'est pas soutenu que le retard à l'audience ait entravé le déroulement du dossier et il ne peut être tiré une faute professionnelle d'une excuse, même mensongère, dès lors qu'elle a pour objet de tenter de s'excusez auprès des clients.
Dans le troisième motif, l'employeur reproche les faits suivants :
'3) Dossier de Mr [U].
Le client, la société GRANDS MOULINS STORIONE, dont vous connaissez l'importance pour le cabinet, nous a confié le 8 octobre 2010 un dossier relatif au recouvrement d'une créance d'un débiteur situé dans les Alpes-Maritimes. (Artisan boulanger)
Vous avez été immédiatement informée que le fonds de commerce exploité par le commerçant était fermé depuis le mois d'avril 2010.
Or, en reprenant ce dossier, afin de le plaider devant le tribunal de Commerce d'Antibes, j'ai découvert que vous avez attendu cinq mois pour délivrer une assignation en liquidation judiciaire.
Plus précisément, vous avez attendu le dernier jour soit le 15 mars 2011 pour demander à l'huissier de délivrer une assignation à comparaître pour le 1er avril 2011. La correspondance que vous avez rédigée mentionne le caractère « urgent » de votre demande.
Vous n'êtes pas sans ignorer qu'en vertu de l'article L 631-5 du code de commerce une assignation en liquidation judiciaire d'un commerçant doit être délivrée dans le délai d'un an à compter de la cessation d'activité.
Votre dossier mentionne expressément une attestation aux termes de laquelle le fonds de commerce est précisément fermé depuis le 6 avril 2010. Si d'aventure l'huissier que vous avez mandaté rencontrait la moindre difficulté, ou ne pouvait délivrer l'assignation pour raisons personnelles, toute la procédure devenait caduque.
C'est d'ailleurs précisément ce qui failli arriver puisque le 16 mars vous demandez à nouveau à l'huissier de signifier dans l'urgence absolue. Vous saviez que le fonds de commerce était fermé, et vous ne pouvez ignorer que ce dernier devra établir un procès-verbal de recherches infructueuses.
Ce comportement professionnel est inacceptable. II convenait de ne pas attendre cinq mois pour traiter ce dossier (au demeurant fort simple ...) Et d'éviter de prendre le risque de la caducité de la procédure engagée.
Je relève d'ailleurs que vous aviez pris conscience de votre faute puisque dans le dossier vous aviez préparé une première assignation à comparaître pour « le vendredi 8 avril 2011 à 8:30»...
Pour modifier, le même jour soit le 15 mars, la date d'audience et demander à l'huissier de délivrer l'assignation pour le « vendredi 1er avril 2011 »...
Ayant sans doute pris conscience qu'une audience prévue pour le vendredi 8 avril 2011 rendait caduque toute la procédure puisque le fonds de commerce était fermé depuis le 6 avril 2010. (Attestation que vous versez aux débats.)
En ayant attendu cinq mois, pour délivrer l'assignation, vous avez grandement compromis les chances de notre client de recouvrer sa créance sur le montant de l'actif encore disponible du débiteur'.
L'employeur justifie par les pièces qu'il produit de la précipitation en limite d'échéance avec laquelle Mme [YB] a fait assigner en liquidation judiciaire le débiteur du client alors que le dossier avait été confié le 8 octobre 2010 et qu'elle n'ignorait pas la date de cessation d'activité du débiteur qu'elle mentionne expressément dans l'assignation qu'elle a rédigé.
La salariée ne se défend d'ailleurs pas sérieusement de sa passivité durant cinq mois mais soutient avoir fait le nécessaire avant son départ en congés dès lors que seule compte la date de délivrance de l'assignation.
Il ne peut être néanmoins soutenu une négligence grave présentant un caractère fautif alors que l'assignation n'a pas été délivrée hors délai.
Sur la connaissance de la situation avant le 7 avril 2011, la salariée se réfère à son mail au client du 15 mars 2011 accompagné de son projet d'assignation dont M. [P] est en copie jointe et à la date d'audience du 1er avril figurant dans l'assignation.
Mais l'employeur qui ne se fonde que sur la mention figurant dans le jugement du tribunal de commerce d'Antibes selon laquelle l'audience a été finalement tenue en chambre du conseil le 25 mai 2011 et qui mentionne lui-même dans la lettre de licenciement avoir eu connaissance de ces faits lors de la préparation du dossier à plaider, ne rapporte pas la preuve que cette connaissance est postérieure à la lettre du 7 avril 2011.
Dans le quatrième motif, l'employeur énonce le reproche suivant :
'4°) Dossier de la société MCM
Le client vous a remis le 2 mars 2011 une assignation à comparaître devant le conseil des prud'hommes de [Localité 5]. L'audience est prévue pour le 8 avril. Vous partez en vacances le 28 mars et vous n'avez rien préparé.
Le client s'est plaint ouvertement de la façon dont vous avez traité son dossier. Les termes de son mécontentement méritent une nouvelle fois d'être retranscrits.(Courrier du 1er avril 2011)
« Je tiens à vous informer que je ne suis absolument pas satisfaite du travail de votre collaboratrice Me. [YB]. Lorsque j'ai rencontré des problèmes avec l'une de mes salariés, vous m'avez dirigé vers Me. [YB], en expliquant qu'il s'agissait d'une avocate averti ayant une connaissance des problèmes du droit du travail et dont je pouvais avoir totalement confiance.
Pourtant à chaque fois que mon mari lui téléphonait il avait l'impression de la déranger, elle ne l'écoutait pas, poursuivant un monologue à sens unique. Une fois mon mari lui a répondu Me, je vais raccrocher car vous ne tenez pas compte de mes explications. J'ai donc été contrainte de reprendre sur plusieurs pages l'ensemble des faits et pièces pour être certaine d'être entendu. Mon comptable vous a communiqué lui aussi des informations précises. Nous sommes à huit jours de l'audience et je ne sais toujours pas ce que fera Me [YB].
En conséquence je vous demande de plaider personnellement mon dossier et de me tenir informée sur vos conclusions par rapport aux pièces communiquées. »
En reprenant le dossier, j'ai effectivement constaté que le client avait communiqué toutes les pièces nécessaires à sa défense ainsi qu'un mémorandum précis de l'historique du dossier. II suffisait de rédiger des conclusions en synthèse ... Vous n'avez rien fait'.
La salariée ne conteste pas qu'aucunes conclusions dans ce dossier n'étaient rédigées en vue de l'audience de référé du conseil des Prud'hommes prévue le 8 avril 2011, au jour de son départ en congés le 28 mars 2011 pour une période initialement prévue jusqu'au 6 avril. Si elle en relativise la portée dans une procédure ne portant effectivement que sur la délivrance d'une attestation de salaire, elle n'était pas dispensée de procéder aux diligences, à la préparation de l'audience et à son devoir de conseil à l'égard des clients dans un dossier pour lequel elle intervenait pour le compte de son employeur et dont l'échéance était à proximité immédiate de son retour de congés.
Mme [YB] ne dénie pas avoir été en possession des éléments et du contexte conflictuel du dossier remis par le client tels que produits par l'employeur. La teneur des critiques émises par la cliente n'est pas non plus combattue.
La salariée oppose en revanche la date de la lettre, le 1er avril 2011, pour affirmer que l'employeur avait connaissance des griefs avant la lettre du 7 avril 2011.
L'employeur tente d'opposer les délais postaux habituels mais la cour ne peut raisonner par analogie à partir d'exemples concernant d'autres dossiers. Si comme il le souligne le courrier ne démontre pas que la cliente ait effectivement procédé à l'envoi le 1er avril, il était seul à pouvoir fournir l'enveloppe permettant de le vérifier, ce qu'il ne fait pas. Ses explications sur la nécessaire anticipation de la rédaction de la lettre du 7 avril sont inopérantes puisque seule compte la date de la mesure disciplinaire déjà prononcée. Quant aux vérifications dont il se prévaut auprès des clients il ne procède que par affirmation.
Ce faisant encore une fois il ne démontre pas quand il a eu connaissance du grief et si cette connaissance est bien postérieure au 7 avril 2011.
Le cinquième motif invoque les éléments suivants
'5°) Dossier GRANDS MOULINS STORIONE contre COVEA RISK.
II s'agit d'un dossier particulièrement délicat. A la demande de notre client, la société des GRANDS MOULINS STORIONE, nous sollicitons la condamnation d'un confrère pour une faute professionnelle et nous demandons le remboursement de notre préjudice à la compagnie d'assurance de l'ordre des avocats de Marseille.
L'assureur est représenté par un professeur d'université, brillant juriste et avocat de renom. II s'agit de Me [E].
La décision de première instance a été particulièrement mal rédigée et la solution que devra retenir la cour d'appel d'Aix-en-Provence est loin d'être acquise.
Le jour de l'audience le 2 mai 2011 notre confrère, Me. [E],s'est ouvertement étonné du retard que nous avions pris dans la production de nos écritures en défense.
II m'a, en effet, rappelé qu'il avait conclu le 8 octobre 2010 mais que nos conclusions en défense n'avaient été signifiée que le 6 avril 2011 (date de l'ordonnance de clôture fixée au 19 avril 2011).
J'ai répondu que j'avais repris ce dossier en dernière minute du fait de l'absence de l'avocat en charge de ce dossier au sein de mon cabinet. Que j'avais dû conclure ce dossier dans l'urgence absolue afin d'éviter le rejet pur et simple de nos conclusions en défense.
Par confraternité, il ne s'est pas opposé au rabat de l'ordonnance de clôture qui a finalement été fixée le jour même de l'audience.
Le non-respect du calendrier judiciaire, dont vous êtes seule responsable, a donc failli avoir des conséquences particulièrement graves pour notre client.
C'est d'ailleurs précisément ce qui s'est produit dans un autre dossier des GRANDS MOULINS STORIONE (dossier de Mme [Z]), le jour de l'audience (le 11 mai 2011) notre adversaire a sollicité le rejet de nos conclusions en réponse'.
En substance le grief est identique à celui déjà énoncé dans la lettre du 7 avril 2011 et ne peut être l'objet d'une nouvelle sanction. Et si l'employeur invoque à juste titre la validité de la référence à des sanctions précédemment prononcées au soutien du licenciement, tel n'est pas le cas en l'espèce.
Dans le sixième motif, l'employeur a énoncé le reproche suivant :
6°) Dossier GRAND MOULINS STORIONE contre Madame [Z]
II s'agit à nouveau d'un dossier au nom et pour le compte de notre client, la société des GRANDS MOULINS STORIONE, particulièrement délicat. La décision rendue en première instance par le tribunal de commerce de Marseille est particulièrement critiquable. La position de la Cour de Cassation en la matière ne nous est pas favorable.
Or, alors que la partie adverse a conclu et communiqué des pièces nouvelles le 25 février 2011, que l'ordonnance de clôture est fixée au 10 avril 2011, vous partez en vacances le 28 mars 2011 sans avoir pris le soin de préparer des conclusions en réponse.
Je suis contraint de reprendre votre dossier le 7 avril 2011 et solliciter de notre avoué près la cour d'appel d'Aix-en-Provence le rabat de l'ordonnance de clôture afin de pouvoir répliquer utilement aux pièces et conclusions adverses dûment signifiées le 25 février 2011.
II est une nouvelle fois inacceptable qu'avant votre départ en vacances le 28 mars 2011 vous n'ayez pas pris le soin de préparer des conclusions en réponse. En reprenant votre dossier le 7 avril 2011, je suis bien dans l'incapacité de pouvoir conclure avec efficacité.
Je vous précise au demeurant que le 10 avril 2011 était un dimanche.
II convenait donc de conclure pour le 8 avril au plus tard. Vous auriez dû rentrer de vacances le mardi 5 avril. .. vous avez prolongé de 48 heures vos vacances et vous êtes présentée au bureau le 7 avril à 10:15 précises.
À l'évidence vous n'aviez pas le temps nécessaire pour pouvoir traiter ce dossier en lui accordant toute l'attention nécessaire.
De plus, vous n'êtes pas sans ignorer, que des conclusions et des pièces produites très peu de temps avant l'ordonnance de clôture peuvent être écartées par le juge pour non-respect du principe du contradictoire. (Dossier COVEA RISKS)
Même si vous aviez préparé des conclusions en réponse le 7 avril 2011, il était déjà trop tard pour les communiquer et respecter le principe même du contradictoire.
Je vous informe que le jour de l'audience de plaidoirie, le 11 mai 2011, l'avocat adverse a sollicité le rejet de nos conclusions récapitulatives et du rabat de l'ordonnance de clôture.
Vous êtes entièrement responsable du non-respect du calendrier judiciaire.
Votre comportement porte à nouveau atteinte à la réputation du cabinet et aux intérêts de notre client.
Ce dernier, la société des GRANDS MOULINS STORIONE, ne pourra que s'interroger sur la raison pour laquelle le président de la cour d'appel d'Aix-en-Provence a refusé de joindre au dossier judiciaire nos conclusions récapitulatives.'
Selon les pièces produites par l'employeur, Mme [YB] avait conclu dans ce dossier le 15 novembre 2010, l'avoué avait informé dès le 16 décembre 2010 de la fixation du dossier à l'audience au 11 mai 2011 avec une clôture devant intervenir un mois avant, les dernières conclusions de l'adversaire ont été reçues le 25 février 2011, les conclusions récapitulatives du cabinet [P] ont été notifiées postérieurement à l'ordonnance de clôture intervenue le 15 avril 2011 et leur irrecevabilité a été prononcée par la Cour qui a refusé de faire droit à la demande de révocation en l'absence de justification d'une cause grave.
Il n'est pas contesté qu'à la date de son départ en congés, Mme [YB], qui avait la charge de ce dossier, n'avait pas reconclu en réponse aux dernières conclusions de l'appelante. Néanmoins comme il a déjà été dit ci-dessus, la salariée disposait encore au besoin d'un délai, certes restreint mais dans un dossier pour lequel elle avait déjà conclu, à la date initialement prévue de son retour et à défaut de toute consigne expresse de l'employeur sur une date pour finaliser de nouvelles conclusions comme de toute justification de pratiques en usage à l'étude sur l'anticipation des délais de procédure, le caractère fautif n'est pas rapporté. Par ailleurs comme la salariée le souligne en dépit de l'irrecevabilité des conclusions récapitulatives la cour d'appel, tenant compte des conclusions et pièces déjà notifiées par le cabinet, a fait droit à sa demande de confirmation du jugement déféré.
De surcroît comme l'invoque la salariée, l'employeur indique lui-même avoir repris ce dossier le 7 avril 2011.
Dans le septième et dernier motif l'employeur énonce les griefs suivants :
6°) Dossier de Mr [F] et Mr [D]
Des correspondances essentielles au bon suivi et au déroulement d'autres dossiers se trouvaient également dans la pochette intitulée de votre main à traiter.
Dans le dossier [F], notre client, la société GRANDS MOULINS STORIONE, nous a demandé d'assurer le recouvrement de farine impayée à l'encontre d'un débiteur installé dans les Alpes-Maritimes.
Le 13 août 2010 vous avez obtenu une décision de justice du tribunal de commerce condamnant le débiteur à payer la somme de 3624 euros. Vous avez transmis le dossier pour exécution à l'huissier compétent le 28 octobre 2010.
Or, ce dernier vous a répondu le 4 février 2011 que les procédures engagées s'étaient révélées totalement infructueuses.
Aux termes d'une correspondance en date du 4 février 2011 il revenait vers vous pour vous informer:
« Le 9 novembre 2010 j'ai délivré un commandement de payer aux fins de saisie-vente.
Postérieurement, j'ai adressé au requis un dernier avis avant saisie-vente, lequel est resté lettre morte. Compte tenu de cette inertie, le 19janvier 2011 j'ai décidé de bloquer le compte bancaire auprès du crédit agricole de VENCE, sans succès les comptes étant débiteurs. Par ailleurs, j'ai appris que le requis faisait antérieurement l'objet d'un plan de redressement, lequel serait récemment venu à échéance.
Quid de vos instructions concernant les suites de cette affaire'
Dois-je vous retourner le dossier afin de vous permettre de l'assigner en redressement-liquidation judiciaire'»
Une nouvelle fois, vous avez laissé ce courrier sans réponse alors qu'il suffisait de quelques minutes pour répondre à l'huissier et lui donner de nouvelles instructions.
Que dois-je répondre, à Monsieur [M] [KR] (responsable administratif des GRANDS MOULINS STORIONE), sur l'état d'avancement de ce dossier'
Dans le dossier de Mr [D], je vous ai demandé de vous rapprocher du client pour tenter d'obtenir le remboursement d'une somme de 5000 € que ce dernier avait prêté à l'un de ses amis. Je vous ai remis les documents justificatifs prouvant du non remboursement de cette somme de 5000 € :
Il s'agit précisément d'une attestation de rejet de chèque accompagné d'un courrier de la banque.
Ces pièces vous ont été remises il y a plusieurs mois, et elles figurent toujours dans une pochette intitulée « à traiter»'
Sur le dossier de M. [F], l'employeur justifie de la matérialité de la demande d'instruction de l'huissier chargé de procéder au recouvrement de la créance du client du cabinet à l'encontre de ce débiteur en exécution d'une décision de justice.
Concernant le dossier de M. [D], il produit les pièces relatives au rejet du chèque que le créancier a tenté d'encaisser à plusieurs reprises.
L'absence de suite donnée à ces deux dossiers n'est pas contestée. Mais tant l'imputabilité à Mme [YB] que la date à laquelle l'employeur a eu connaissance de la situation, qui sont l'une et l'autre soulevées par la salariée, ne sont pas rapportées par l'employeur qui en a la charge de la preuve.
Enfin la lettre de licenciement conclut en ces termes :
'En conclusion il résulte des différents dossiers ci-dessus énumérés que votre comportement porte gravement atteinte aux intérêts des clients du cabinet, il perturbe son fonctionnement, il nuit à son image de marque. A l'évidence vous n'êtes plus concernée par votre métier d'avocat. Vous n'hésitez pas à mentir avec une certaine assurance pour vous soustraire à votre obligation de plaidoirie et ce en présence même du client.
Vous laissez des dossiers en souffrance sans vous soucier un seul instant des conséquences très préjudiciables pour le client. Vous ne respectez pas le calendrier judiciaire, condition sine qua non dans le traitement des dossiers.
En conséquence, je vous informe que j'ai décidé de vous licencier pour faute grave.'
Mais en définitive, bien que l'employeur justifie du mécontentement de trois clients et même de la perte de l'un d'eux, il résulte de l'ensemble de ces énonciations que non seulement n'est pas suffisamment caractérisée l'existence de négligences graves et répétées traduisant une mauvaise volonté délibérée dans le traitement des dossiers et un désintérêt manifeste de l'avocate salariée à l'égard de ses obligations professionnelles, notamment de défense des intérêts des clients rendant impossible la poursuite de la relation de travail, mais l'employeur qui avait dès le 7 avril 2011 notifié des griefs dans une lettre s'analysant comme une sanction disciplinaire, ne démontre pas de griefs nouveaux ou dont il a eu connaissance postérieurement.
En conséquence le licenciement prononcé s'en trouve privé de cause réelle et sérieuse et la décision déférée sera infirmée.
En conséquence et en application de l'article L1235-5 du code du travail la salariée appelante est fondée à obtenir l'indemnisation du préjudice que lui a fait subir la rupture de la relation de travail.
Au vu de son ancienneté, de son âge et des éléments qu'elle produit sur l'étendue de son préjudice jusqu'en février 2013 avec la perception d'un revenu de remplacement, une exacte appréciation conduit la Cour à fixer à 21 000€ le montant des dommages et intérêts qui l'indemniseront intégralement.
La salariée est également fondée à obtenir une indemnité compensatrice de préavis de 3 mois conformément à l'article 9.1 de la convention collective applicable, soit la somme non critiquée en son calcul de 10 054,98€ outre 1005,49€ de congés payés afférents.
Elle est encore fondée à obtenir une indemnité de licenciement en tenant compte d'une ancienneté qu'elle calcule à raison depuis la première embauche et en ce compris la durée du préavis conformément au mode de calcul prévu à l'article 9.2 de la convention collective applicable, à savoir la somme de 5641,95€ d'ailleurs non contestée par l'intimé.
Les créances indemnitaires porteront intérêt au taux légal à compter du jour de la présentation à l'employeur de la lettre le convoquant devant Monsieur le Bâtonnier de l'Ordre des Avocats et la créance indemnitaire à compter du présent arrêt.
Il convient d'ordonner la capitalisation des intérêts dans les conditions de l'article 1343-2 du code civil
Les demandes accessoires
En application de l'article 700 du code de procédure civile, il est équitable que l'employeur contribue aux frais irrépétibles que l'appelante a exposé en cause d'appel. M. [P] sera condamné à lui verser la somme de 1000€ et sera corrélativement débouté de sa demande à ce titre.
En application de l'article 696 du même code, M. [P] sera condamné à supporter les dépens d'appel.
PAR CES MOTIFS
La Cour,
Statuant par arrêt contradictoire, par mise à disposition au greffe, les parties en ayant été préalablement avisées dans les conditions prévues à l'article 450 du code de procédure civile, en matière prud'homale,
Déclare l'appel recevable
Rejette le moyen tiré de la péremption de l'instance
Infirme dans les limites de l'appel la décision du Bâtonnier de l'Ordre des Avocats de Marseille, statuant en qualité de juridiction prud'homale de premier degré, en date du 23 mai 2013 sauf en ce qu'elle dit la procédure de licenciement régulière et débouté Mme [YB] de sa demande de dommages et intérêts pour irrégularité de procédure
Statuant à nouveau dans cette limite, y ajoutant,
Dit que la lettre du 7 avril 2011 s'analyse en une sanction disciplinaire
Annule la sanction disciplinaire en date du 7 avril 2011
Déclare le licenciement dépourvu de cause réelle et sérieuse
Condamne [Y] [P] à verser à [G] [YB] les sommes de :
- 21 000€ en application de l'article L1235-5 du code du travail
- 10 054,98 € à titre d'indemnité de préavis et 1005,49 € de congés payés afférents
- 5 641,95€ à titre d'indemnité de licenciement
Dit que les créances salariales porteront intérêt au taux légale à compter du jour de la présentation à l'employeur de la lettre le convoquant devant Monsieur le Bâtonnier de l'Ordre des Avocats et la créance indemnitaire à compter du présent arrêt
Ordonne la capitalisation des intérêts dans les conditions de l'article 1343-2 du code civil.
Déboute les parties de leurs autres demandes
Condamne [Y] [P] à verser à [G] [YB] la somme de 1000€ à titre de contribution aux frais irrépétibles
Condamne [Y] [P] à supporter les dépens de première instance et d'appel.
LE GREFFIERLE PRESIDENT