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21/01/2021 | FRANCE | N°18/19331

France | France, Cour d'appel d'Aix-en-Provence, Chambre 3-3, 21 janvier 2021, 18/19331


COUR D'APPEL D'AIX-EN-PROVENCE

Chambre 3-3



ARRÊT AU FOND

DU 21 JANVIER 2021



N° 2021/22













Rôle N° RG 18/19331 - N° Portalis DBVB-V-B7C-BDOLW







[G] [J]





C/



SA SOCIETE MARSEILLAISE DE CREDIT





















Copie exécutoire délivrée

le :

à :



Me Charles TOLLINCHI

Me Marc AUTHAMAYOU








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Décision déférée à la Cour :



Jugement du Tribunal de Commerce de CANNES en date du 22 Novembre 2018 enregistrée au répertoire général sous le n° 2017F00263.





APPELANT



Monsieur [G] [J]

né le [Date naissance 1] 1968 à [Localité 6]

de nationalité Française,

demeurant [Adresse 3]

représenté par Me ...

COUR D'APPEL D'AIX-EN-PROVENCE

Chambre 3-3

ARRÊT AU FOND

DU 21 JANVIER 2021

N° 2021/22

Rôle N° RG 18/19331 - N° Portalis DBVB-V-B7C-BDOLW

[G] [J]

C/

SA SOCIETE MARSEILLAISE DE CREDIT

Copie exécutoire délivrée

le :

à :

Me Charles TOLLINCHI

Me Marc AUTHAMAYOU

Décision déférée à la Cour :

Jugement du Tribunal de Commerce de CANNES en date du 22 Novembre 2018 enregistrée au répertoire général sous le n° 2017F00263.

APPELANT

Monsieur [G] [J]

né le [Date naissance 1] 1968 à [Localité 6]

de nationalité Française,

demeurant [Adresse 3]

représenté par Me Charles TOLLINCHI de la SCP TOLLINCHI PERRET VIGNERON, avocat au barreau d'AIX-EN-PROVENCE,

assisté de Me Pierre MANGIAPANE, avocat au barreau de GRASSE, substituant Me Christiane FENOUD, avocat au barreau de GRASSE

INTIMEE

SA SOCIETE MARSEILLAISE DE CREDIT, agissant poursuites et diligences de son représentant légal,

dont le siège social est sis [Adresse 2]

représentée par Me Marc AUTHAMAYOU de la SELARL SELARL AUTHAMAYOU, AVOCATS, avocat au barreau de NICE substituée

assistée de Me Muriel MANENT, avocat au barreau d'AIX-EN-PROVENCE, substituant Me Michel DRAILLARD, avocat au barreau de GRASSE

*-*-*-*-*

COMPOSITION DE LA COUR

L'affaire a été débattue le 24 Novembre 2020 en audience publique. Conformément à l'article 804 du code de procédure civile, Mme DUBOIS, conseiller, a fait un rapport oral de l'affaire à l'audience avant les plaidoiries.

La Cour était composée de :

Madame Valérie GERARD, Président de chambre

Madame Françoise PETEL, Conseiller

Madame Anne DUBOIS, Conseillère

qui en ont délibéré.

Greffier lors des débats : Madame Laure METGE.

Les parties ont été avisées que le prononcé de la décision aurait lieu par mise à disposition au greffe le 21 Janvier 2021.

ARRÊT

Contradictoire,

Prononcé par mise à disposition au greffe le 21 Janvier 2021,

Signé par Madame Valérie GERARD, Président de chambre et Madame Laure METGE, greffier auquel la minute de la décision a été remise par le magistrat signataire.

***

EXPOSE DES FAITS :

La société Tecnoyachts a commencé son activité de vente d'accastillage, équipements pour bateaux et de travaux d'aménagement intérieur et d'équipement des bateaux de plaisance et commerciaux en juin 2014.

le 18 décembre 2015, son gérant, [G] [J] s'est porté caution à hauteur de 26.000 euros en garantie de la facilité de trésorerie consentie par la Société Marseillaise de crédit (SMC) à la société Tecnoyachts.

Le 14 septembre 2016, la SMC a accordé à cette dernière une augmentation de son autorisation de découvert à hauteur de 50.000 euros.

Le même jour son gérant, s'est porté caution des engagements de la société Tecnoyachts dans la limite de 65.000 euros.

Le 11 avril 2017, la société Tecnoyachts a été mise en liquidation judiciaire par le tribunal de commerce d'Antibes qui a fixé la date de cessation des paiements au 11 octobre 2015.

La SMC a déclaré ses créances par lettre recommandée avec accusé de réception du 15 mai 2017 pour un montant de 48.398.81 euros au titre du solde débiteur.

Le même jour, elle a vainement mis la caution en demeure d'honorer son engagement de caution.

Elle l'a donc assignée en paiement devant le tribunal de commerce de Cannes par acte du 19 Septembre 2017.

Par jugement du 22 novembre 2019, ce tribunal a :

- condamné [G] [J] à payer à la SMC la somme de 48.398,81 euros augmentée des intérêts au taux légal à compter de la date de la mise en demeure du 15 mai 2017 ;

- débouté [G] [J] de ses demandes de caution non avertie et de défaillance d'obligation d'information de la caution ;

- ordonné la capitalisation des intérêts conformément aux dispositions de l'article 1154 du code civil ;

- dit que le remboursement de la somme de 48.398,81 euros s'effectuera en 24 mensualités égales, à partir du 30e jour à compter du présent jugement et, qu'en cas de non-paiement d'une seule échéance, la totalité de la somme sera exigée sans que les échéances produisent des intérêts et s'imputeront d'abord sur le capital ;

- condamné [G] [J] aux dépens et à payer la somme de 2.000 euros à la SMC au titre de l'article 700 du code de procédure civile ;

- dit n'y avoir lieu à exécution provisoire.

[G] [J] a interjeté appel le 7 décembre 2018.

Dans ses dernières conclusions déposées et notifiées le 26 octobre 2020 et tenues pour intégralement reprises, il demande à la cour de :

- in'rmer le jugement entrepris,

- et statuant à nouveau,

- vu que la SARL Tecnoyachts était en état de cessation des paiements depuis plus de onze mois, au jour de l'octroi du découvert supplémentaire consenti par la SMC,

- vu que le découvert supplémentaire consenti par la SMC à la SARL Tecnoyachts était inadapté aux capacités financières de ladite société, et n'a été accordé qu'au regard de la situation économique et patrimoniale de la caution,

- juger que [G] [J] a la qualité de caution non-avertie,

- juger que la SMC a été défaillante dans son obligation d'information et de mise en garde envers lui,

- juger que la faute de la SMC est en relation directe avec le préjudice subi par [G] [J] qui s'élève à la somme de 48.398,8l euros, outre intérêts au taux légal,

- en conséquence,

- déclarer nul et de nul effet l'engagement de caution souscrit par [G] [J],

- condamner la SMC à lui payer à titre de dommages et intérêts une somme égale à la somme réclamée sur le fondement de l'engagement de caution, soit 48.398,8l euros, outre intérêts au taux légal,

- à titre subsidiaire, si par extraordinaire la condamnation de [G] [J] au paiement de la créance de la SMC était confirmée,

- vu que [G] [J] est titulaire d'un compte courant d'associé d'un montant 211.724 euros dans les comptes de la SCI Manhattan, propriétaire d'un immeuble sis à [Adresse 4], section [Cadastre 5], copropriété dénommée « le manoir d'[Adresse 4] » mis à la vente au prix de 1.295.000 euros, qui permettra le remboursement de la SMC,

- lui accorder un délai de deux années à compter de l'arrêt à intervenir pour le paiement de la somme de 48.398,81 euros à la SMC,

- en tout état de cause,

- condamner la SMC à lui payer la somme de 5.000 euros sur le fondement de l'article 700 du code de procédure civile, outre les entiers dépens, ceux d'appel distraits au profit de la SCP Tollinchi Perret-Vigneron Bujoli-Tollinchi

Dans ses dernières écritures déposées et notifiées le 8 avril 2019 et tenues pour intégralement repr ises, l'intimée, qui forme appel incident, demande à la cour de :

- confirmer le jugement du 22 novembre 2018 en ce qu'il a condamné [G] [J] au paiement de la somme de 48.398,81 euros outre intérêts au taux légal avec capitalisation depuis le 15 mai 2017,

- confirmer également le jugement en ce qu'il a débouté [G] [J] de l'ensemble de ses demandes,

- réformant partiellement le jugement, dire et juger que [G] [J] ne pourra bénéficier d'aucun délai pour s'acquitter de sa dette,

- en tant que de besoin et conformément aux termes de l'assignation et les présentes conclusions, condamner [G] [J] au paiement d'une somme de 48.398,81 euros, outre intérêts au taux légal depuis la mise en demeure du 15 mai 2017,

- ordonner la capitalisation des intérêts échus pour une année entière, conformément aux dispositions de l'article 1154 du code civil,

- condamner [G] [J] au paiement d'une somme de 10.000 euros sur le fondement des dispositions de l'article 700 du code de procédure civile, et en tous les dépens, distraits au profit de la SELARL Authamayou.

L'ordonnance de clôture est intervenue le 17 novembre 2020.

***

*

SUR CE :

Sur les demandes principales :

[G] [J] soutient d'une part, que la facilité de trésorerie consentie à la société Tecnoyachts était manifestement disproportionnée à sa situation financière et n'a été accordée qu'au regard de la situation économique et patrimoniale de la caution et, d'autre part, que la banque n'a pas respecté son devoir d'information et de mise en garde à l'égard de la caution.

Il sollicite en conséquence la nullité de l'engagement de caution et la condamnation de l'intimée au paiement de la somme de 48.398,81 euros de dommages-intérêts au titre de sa responsabilité.

Il n'a recherché ni en première instance ni devant la présente cour, la responsabilité de la SMC sur le fondement de l'article L650-1 du code de commerce et c'est donc à tort que le premier juge a fait application de cet article.

Cela étant, le caractère disproportionné d'un engagement ne peut être invoqué qu'au regard de la situation de la caution et non de celle de l'emprunteur, et en tout état de cause ne saurait justifier l'annulation du cautionnement.

Les capacités financières de la société Tecnoyachts doivent ainsi s'analyser à l'aune du devoir de mise en garde du banquier dispensateur de crédit.

Ce dernier n'est tenu, au moment de la souscription du contrat litigieux, d'un devoir, non d'ailleurs de conseil, mais de mise en garde, qu'à la double condition que son cocontractant soit une personne non avertie et qu'il existe un risque d'endettement né de l'octroi du prêt.

Lorsque le prêt a été contracté par une société, le caractère averti de la personne morale doit être apprécié à travers la personne de son dirigeant, c'est-à-dire en l'espèce, [G] [J], également caution.

Celui-ci objecte valablement que sa seule qualité de gérant de la société Tecnoyachts, l'importance de son patrimoine personnel, ses revenus conséquents qui lui permettraient de s'entourer des meilleurs conseils, et la tenue de la comptabilité de la société emprunteuse par un expert-comptable, mis en avant par l'intimée, ne sauraient en eux-même justifier le caractère averti du dirigeant et de la caution.

En revanche, sont versés aux débats :

*la fiche de renseignement certifiée exacte par l'appelant qui démontre qu'en plus de ses fonctions de gérant de la société Tecnoyachts, ce dernier était gérant d'une société Sunseeker Cannes Service depuis 1998,

*un courrier du 26 mai 2017 adressé à la banque dans lequel [G] [J] fait état de la liquidation judiciaire de ses sociétés,

*un extrait du BODACC établissant que l'intéressé est également le président de la SAS Hugos créée en 2004, laquelle a pour activité le conseil en investissement et en gestion d'entreprise.

*une attestation de l'expert-comptable [N] du 12 avril 2018 attestant que [G] [J] est titulaire d'un compte courant d'associés dans une SCI Manhattan, de 211.724 euros.

Il résulte de l'ensemble de ces éléments que l'appelant était gérant depuis de nombreuses années, de plusieurs sociétés, dont une spécialisée dans le conseil en investissement et en gestion d'entreprise, lors de l'octroi des concours querellés à la société Tecnoyachts.

Il disposait ainsi d'une expérience et d'une compétence en matière commerciale et économique lui permettant d'apprécier la pertinence de la facilité de caisse de 26.000 euros du 18 décembre 2015 et d'appréhender, pour la débitrice principale, comme pour lui-même, les risques attachés à cette autorisation de découvert, passée à 50.000 euros le 14 septembre 2016, cette opération étant dépourvue de tout élément de complexité.

Par ailleurs, il ne ressort d'aucun élément que la banque détenait, sur la situation de la société ou sur la situation personnelle de [G] [J], des informations dont ces derniers n'auraient pas eu connaissance.

L'intimée n'était dès lors pas tenue d'un devoir de mise en garde envers l'appelant, que ce soit en sa qualité de gérant de la société Tecnoyachts ou en sa qualité de caution, et sa responsabilité ne peut donc être recherchée de ce chef.

[G] [J] sera en conséquence débouté de ses demandes en nullité de son engagement de caution et en responsabilité contre la SMC.

Sur les délais :

L'appelant sollicite subsidiairement un délai de deux ans à compter de l'arrêt à intervenir pour le paiement de la somme de 48.398,81 euros réclamée par la banque et dont il ne conteste pas le montant, en faisant valoir qu'il est titulaire d'un compte courant d'associé de 211.724 euros dans les comptes de la SCI Manhattan, laquelle est propriétaire d'un immeuble mis à la vente au prix de 1.295.000 euros qui permettra le remboursement de sa dette.

Toutefois, nonobstant la mise en vente de ce bien depuis janvier 2018, sans résultat pour l'instant, l'intéressé ne fournit aucun renseignement sur sa situation financière personnelle.

En outre, il a déjà bénéficié depuis l'introduction de l'instance le 19 septembre 2017 des plus larges délais de paiement.

Sa demande fondée sur l'article L 1244-1 du code civil sera donc rejetée et le jugement infirmé de ce chef.

Sur les dépens et l'article 700 du code de procédure civile :

[G] [J] qui succombe, sera condamné aux dépens d'appel et à payer à la SMC la somme de 3.000 euros au titre de l'article 700 du code de procédure civile.

***

**

PAR CES MOTIFS

La cour, statuant par arrêt contradictoire, rendu par mise à disposition,

INFIRME le jugement entrepris en ce qu'il a accordé des délais de paiement à [G] [J],

Statuant à nouveau de ce chef,

DEBOUTE [G] [J] de sa demande tendant à obtenir un délai de paiement de deux ans,

CONFIRME le jugement pour le surplus,

Y ajoutant,

CONDAMNE [G] [J] à payer à la SMC la somme de 3.000 euros au titre de l'article 700 du code de procédure civile,

REJETTE le surplus des demandes,

CONDAMNE [G] [J] aux dépens d'appel qui seront recouvrés conformément aux dispositions de l'article 699 du code de procédure civile.

LE GREFFIERLE PRESIDENT


Synthèse
Tribunal : Cour d'appel d'Aix-en-Provence
Formation : Chambre 3-3
Numéro d'arrêt : 18/19331
Date de la décision : 21/01/2021

Références :

Cour d'appel d'Aix-en-Provence 8B, arrêt n°18/19331 : Infirme partiellement, réforme ou modifie certaines dispositions de la décision déférée


Origine de la décision
Date de l'import : 27/03/2024
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.appel;arret;2021-01-21;18.19331 ?
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