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10/12/2020 | FRANCE | N°19/19931

France | France, Cour d'appel d'Aix-en-Provence, Chambre 1-2, 10 décembre 2020, 19/19931


COUR D'APPEL D'AIX-EN-PROVENCE

Chambre 1-2



ARRÊT

DU 10 DECEMBRE 2020



N° 2020/683













N° RG 19/19931



N° Portalis DBVB-V-B7D-BFLVG







Société INTERNATIONAL STYLE FASHION





C/



[X] [J]





















Copie exécutoire délivrée

le :

à :



Me DAVAL-GUEDJ



Me LAYANI









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DÉCISION DÉFÉRÉE À LA COUR :



Ordonnance de référé rendue par le président du tribunal de grande instance de MARSEILLE en date du 18 Décembre 2019 enregistrée au répertoire général sous le n° 19/04228.





APPELANTE



Société INTERNATIONAL STYLE FASHION

dont le siège social est [Adresse 2]



représentée par Me Maud DAVAL-G...

COUR D'APPEL D'AIX-EN-PROVENCE

Chambre 1-2

ARRÊT

DU 10 DECEMBRE 2020

N° 2020/683

N° RG 19/19931

N° Portalis DBVB-V-B7D-BFLVG

Société INTERNATIONAL STYLE FASHION

C/

[X] [J]

Copie exécutoire délivrée

le :

à :

Me DAVAL-GUEDJ

Me LAYANI

DÉCISION DÉFÉRÉE À LA COUR :

Ordonnance de référé rendue par le président du tribunal de grande instance de MARSEILLE en date du 18 Décembre 2019 enregistrée au répertoire général sous le n° 19/04228.

APPELANTE

Société INTERNATIONAL STYLE FASHION

dont le siège social est [Adresse 2]

représentée par Me Maud DAVAL-GUEDJ de la SCP COHEN GUEDJ MONTERO DAVAL GUEDJ, avocat au barreau d'AIX-EN-PROVENCE assistée par Me Patrick BERREBI, avocat au barreau de MARSEILLE, plaidant

INTIME

Monsieur [X] [J]

né le [Date naissance 1] 1966 à [Localité 7] (TUNISIE)

demeurant [Adresse 4]

représenté et assisté par Me Steven LAYANI, avocat au barreau de MARSEILLE, plaidant

*-*-*-*-*

COMPOSITION DE LA COUR

L'affaire a été débattue le 03 Novembre 2020 en audience publique. Conformément à l'article 804 du code de procédure civile, madame Sylvie PEREZ, conseillère, a fait un rapport oral de l'affaire à l'audience avant les plaidoiries.

La Cour était composée de :

Madame Geneviève TOUVIER, Présidente

Monsieur Gilles PACAUD, Président

Madame Sylvie PEREZ, Conseillère

qui en ont délibéré.

Greffier lors des débats : madame Caroline BURON.

Les parties ont été avisées que le prononcé de la décision aurait lieu par mise à disposition au greffe le 10 Décembre 2020.

ARRÊT

Contradictoire,

Prononcé par mise à disposition au greffe le 10 Décembre 2020,

Signé par madame Geneviève TOUVIER, présidente, et madame Caroline BURON, greffière, à laquelle la minute de la décision a été remise par le magistrat signataire.

***

EXPOSÉ DU LITIGE :

M. [J] est propriétaire d'un immeuble situé [Adresse 3].

Par acte sous seing privé en date du 27 septembre 1996, Monsieur [J] a consenti à la SARL ZVITEX, devenue International Style Fashion, la location de locaux commerciaux en rez-de-chaussée de cet immeuble, moyennant un loyer trimestriel de 1.234,83 euros.

La SARL International Style Fashion a sous loué ce local commercial à la SARL Global Cosmétique selon bail à compter du 1er novembre 2015.

Le 13 mai 2019, un arrêté de péril grave et imminent a été pris par le [Localité 5] de [Localité 6] relativement à l'immeuble dans lequel est exploité le fonds de commerce, avec interdiction de toute occupation et utilisation et prescrivant la neutralisation des fluides (eau, gaz, électricité).

Le 7 août 2019, Monsieur [J] a fait signifier à sa locataire un commandement de payer visant la clause résolutoire et aux fins de justification d'une attestation d'assurance.

Le 4 septembre 2019, le maire de [Localité 6] a pris un arrêté de péril simple concernant le même immeuble après avoir constaté que les travaux réalisés ne permettaient pas la réintégration de l'immeuble.

Par acte d'huissier en date du 6 septembre 2019, Monsieur [J] a fait assigner en référé la société International Style Fashion aux fins de voir constater la résiliation du bail, ordonner l'expulsion de la locataire, et en paiement de provisions.

Par ordonnance en date du 18 décembre 2019, le juge des référés du tribunal de grande instance de Marseille a.

- constaté la résiliation du bail,

- ordonné l'expulsion de la société International Style Fashion, et celle de tous occupants de son chef, avec le concours de la force publique et d'un serrurier si nécessaire, et ce dès la signification de l'ordonnance,

- autorisé en cas d'expulsion, Monsieur [J] à transporter les meubles et objets se trouvant dans les lieux et à les séquestrer aux frais, risques et périls de la société International Style Fashion,

- condamné la société International Style Fashion à payer à titre provisionnel à Monsieur [J], la somme de 33'574,16 euros au titre de la dette locative arrêtée au 13 mai 2019,

- rejeté la demande de la société International Style Fashion tendant à être autorisée à consigner auprès d'un séquestre le montant des loyers et charges dus,

- condamné la société International Style Fashion à payer à titre provisionnel à Monsieur [J] une indemnité mensuelle d'occupation égale au montant du dernier loyer pratiqué majoré des charges et ce jusqu'à parfaite libération des lieux,

- rejeté la demande en paiement de Monsieur [J] d'une provision à valoir sur des dommages et intérêts,

- condamné la société International Style Fashion au paiement de la somme de 800 euros en application de l'article 700 du Code de procédure civile ainsi que les entiers dépens qui comprendront le coût du commandement de payer.

Par déclaration au greffe du 31 décembre 2019, la société International Style Fashion a relevé appel de cette ordonnance.

Par conclusions déposées et notifiées le 19 octobre 2020, la société International Style Fashion a conclu comme suit :

- réformer l'ordonnance déférée à la cour en ce qu'elle a constaté la résiliation du bail, ordonné son expulsion, l'a condamnée au paiement de provisions, a rejeté sa demande de consignation des loyers auprès d'un séquestre, l'a condamnée sur le fondement de l'article 700 du Code de procédure civile ainsi qu'aux dépens,

En conséquence,

- dire que les demandes formulées par le bailleur se heurtent à une contestation sérieuse et débouter Monsieur [J] de l'ensemble de ses demandes,

A titre subsidiaire,

- condamner Monsieur [J] à procéder à la consignation des sommes versées par elle en exécution de la décision dont appel, jusqu'à ce que la juridiction du fond, saisi par la partie la plus diligente ait statué quant à la responsabilité de la résolution du bail liant les parties ainsi que sur les demandes de dommages intérêts qui seront formulés,

- ordonner la désignation de tel séquestre qu'il plaira afin de recevoir la restitution des sommes payées en exécution de la décision dont appel,

- dire que le montant des loyers restant à courir après le 31 novembre 2016 ne saurait excéder la somme totale de 16'464,18 euros correspondant aux loyers jusqu'au mois de mai 2019, date de l'arrêté de péril,

En toute hypothèse,

- condamner Monsieur [J] à lui payer la somme de 1500 euros au titre des frais irrépétibles ainsi qu'aux entiers dépens de première instance et d'appel, ces derniers distraits en application de l'article 699 du code de procédure civile.

L'appelante fait grief au premier juge de n'avoir pas retenu, au titre des contestations sérieuses, l'impossibilité absolue, avérée et non contestée d'exploiter le local commercial, ce depuis la fin de l'année 2015 et donc l'impossibilité de s'acquitter de ses loyers.

La SARL International Style Fashion expose que M. [K], le responsable de l'hôtel exploité au-dessus de son local à l'enseigne 'Hôtel des Familles', également locataire de Monsieur [J], a effectué des travaux de plomberie sans aucune autorisation afin d'organiser la descente des eaux usées et des eaux vannes depuis son hôtel jusqu'au local commercial dans lequel il s'est introduit pendant son absence, se rendant coupable d'une véritable voie de fait, ces canalisations ayant occasionné des inondations récurrentes et quotidiennes depuis lors.

Elle explique qu'en raison de ces inondations, la sous-locataire, Global Cosmétique, n'a pas été en mesure d'exploiter le local commercial loué et a cessé de lui régler ses loyers.

Rappelant avoir vainement adressé un courrier recommandé avec accusé de réception à son bailleur le 27 décembre 2016, la SARL International Style Fashion expose que par ordonnance de référé en date du 6 décembre 2018, Monsieur [K], exploitant en nom personnel, a été condamné sous astreinte de 1 000 euros par jour de retard pendant un mois à remettre en état le local commercial et que par décision du 2 mai 2019, le juge de l'exécution a condamné M. [K] à lui payer la somme de 30'000 euros à titre de la liquidation de l'astreinte prononcée et a fixé une nouvelle astreinte définitive de 1500 euros pendant trois mois.

L'appelante fait valoir que le bailleur, en s'abstenant de toute action contre M. [K], a commis une négligence fautive génératrice de l'impossibilité totale d'exploiter le local, rappelant qu'elle a averti à plusieurs reprises le bailleur du fait que les inondations permanentes des locaux commerciaux étaient de nature à fragiliser la structure de l'immeuble.

Elle rappelle que l'immeuble a fait l'objet d'un arrêté de péril daté du 13 mai 2019, un second arrêté étant pris le 4 septembre 2019, sans que les travaux aient été à ce jour effectués et que l'immeuble doit faire l'objet d'un arrêté d'expropriation pris dans le cadre de la lutte contre l'habitat indigne et dégradé.

Concernant l'attestation d'assurance, elle rappelle que la société Global Cosmétique est l'occupant effectif du local loué, régulièrement assuré.

L'appelante indique que le premier juge, sans même motiver sa décision sur ce point, a rejeté sa demande tendant à la consignation des loyers, expliquant avoir exécuté la décision en s'acquittant du montant de sa condamnation.

Par conclusions déposées et notifiées le 16 juin 2020, Monsieur [J] a conclu comme suit :

- confirmer l'ordonnance déférée à la cour en toutes ses dispositions,

En tout état de cause,

- rejeter l'ensemble des demandes de la société International Style Fashion,

- condamner la société International Style Fashion au paiement de la somme de 3 000 euros en application de l'article 700 du Code de procédure civile ainsi qu'aux entiers dépens.

L'intimé expose que parmi les 18 pièces par l'appelante, aucune ne permet de justifier que les locaux loués sont bien assurés par le locataire défaillant, seule étant communiquée une attestation d'assurance au nom de la société Global Cosmétique, société tierce qui n'a aucun lien contractuel avec lui, de sorte qu'il conviendra de constater la résiliation du bail.

Concernant les loyers impayés, il fait valoir que les constats d'huissier transmis font état d'un dégât des eaux et que nul doute qu'après une remise en état classique après ce type de sinistre, et l'intervention des différents assureurs, le local devait être parfaitement exploitable.

Monsieur [J] fait observer que la locataire ne conteste aucunement ne pas s'être acquittée des sommes dues, se retranchant simplement derrière une situation de voisinage complexe ne lui permettant pas de s'affranchir du paiement des loyers.

Il fait observer que la locataire soutient sans en justifier s'être acquitté des loyers et charges jusqu'en novembre 2016.

MOTIFS DE LA DÉCISION :

Le 17 août 2019, M. [J] a fait signifier à la SARL International Style Fashion un commandement de payer visant la clause résolutoire du bail, pour paiement de la somme en principal de 33'574,16 euros représentant les loyers et provisions sur charges pour la période du 1er janvier 2015 au 13 mai 2019.

Bien que le bailleur indique que ce commandement enjoignait à la société requise d'avoir à justifier de son attestation d'assurance, l'acte d'huissier produit à son dossier ne vise pas cette demande de justification, la SARL International Style Fashion rappelant en tout état de cause que les lieux loués sont assurés par son sous-locataire, la SARL Global Cosmétique dont l'attestation d'assurance est versée au dossier de M. [J], au rappel en l'espèce que le bail commercial dont s'agit autorise la sous-location sans autorisation du bailleur.

Concernant la provision, la SARL International Style Fashion expose que le local commercial loué est inexploitable depuis la fin de l'année 2015.

Elle explique, sur la base d'un procès-verbal de constat d'huissier en date du 4 janvier 2016, que des branchements et canalisations sauvages ont été installés clandestinement dans le local commercial par M. [K], propriétaire du fonds de commerce à usage d'hôtel meublé exploité à l'enseigne « Hôtel des Familles » au premier, deuxième et troisième étage de l'immeuble, lequel locataire a pénétré à l'intérieur du local sans autorisation et alors que ce dernier était fermé.

Il résulte de ce procès-verbal de constat que d'importants dégâts ont été occasionnés au local et dénoncés à M. [J] par lettre recommandée avec l'église de réception datée du 27 décembre 2016, la SARL International Style Fashion informant le bailleur de l'existence d'inondations tenant à la présence de ces canalisations et attirant son attention sur un risque d'effondrement de l'immeuble.

Un jugement du tribunal de commerce de Marseille en date du 6 décembre 2018, a, sur requête de la SARL International Style Fashion ordonné à M. [K], exploitant sous l'enseigne « Hôtel des Familles », de remettre en état le local donné à bail à la requérante, sous astreinte de 1 000 euros par jour de retard, astreinte liquidée à la somme de 30'000 euros par un jugement du juge de l'exécution du tribunal de grande instance de Marseille en date du 2 mai 2019, une astreinte définitive de 1 500 euros par jour de retard étant fixée.

Dans un second procès-verbal de constat dressé le 20 décembre 2016, il est fait état d'infiltrations d'eau en abondance au sein du local commercial, en provenance des tuyaux d'évacuation des eaux usées de l'hôtel meublé exploité au-dessus.

Suite à une déclaration de sinistre effectuée le 21 novembre 2016 par la SARL Global Cosmétique, sous-locataire de la SARL International Style Fashion, le cabinet Cunningham Lindsey missionné par son assureur Generali assurances, a, notamment en présence de M. [J], relevé la présence d'écoulements d'eau en continu dans la partie principale de la boutique, provenant de l'étage supérieur occupé par l'Hôtel des Familles, consécutivement à la rupture du ballon d'eau chaude d'un cumulus à usage privatif de l'hôtel et constaté un effondrement du faux plafond, indiquant dans ses conclusions que la SARL Global Cosmétique n'est plus en mesure d'assurer son activité et que la boutique est fermée au public depuis le 21 novembre 2016.

A l'occasion de ces opérations d'expertise, Monsieur [J] a ainsi été en mesure de prendre connaissance des désordres affectant le local commercial et de la présence de canalisations sauvages pour le seul intérêt de l'hôtel meublé exploité par M. [K] à l'encontre duquel aucune démarche n'a cependant été effectuée.

Il est rappelé qu'un premier arrêté de péril grave et imminent va être pris par le maire de [Localité 6] le 13 mai 2019, décrivant, dans le commerce du rez-de-chaussée, un effondrement partiel du plancher haut, une destructuration de l'enfustage, des poutres en bois et des moisages de consolidation subséquents à des dégâts des eaux récurrents, une dégradation du bois par un développement fongique et infestation de larves d'insectes xylophages, des fissurations et décroûtage d'enduit générés par des dégâts des eaux dans les locaux.

La prise d'un second arrêté de péril, simple, le 4 septembre 2019, enseigne que M. [J] n'a pas effectué la totalité des travaux prescrits puisqu'il n'est toujours pas ordonné la réintégration de l'immeuble.

Au regard de ces éléments, la locataire, excipant de la mauvaise foi du bailleur, fait à bon droit valoir que les demandes de ce dernier se heurtent à des contestations sérieuses.

Il est rappelé en effet que la clause résolutoire doit être mise en oeuvre de bonne foi et qu'en l'espèce tel n'est pas le cas en ce que M. [J] s'est abstenu de toute action à l'encontre de son autre locataire, M. [K], pourtant condamné à la remise en état du local commercial loué à la SARL International Style Fashion qui n'a pu jouir paisiblement de ce local conformément à sa destination contractuellement prévue entre les parties.

En conséquence de quoi, les demandes tant de résiliation du bail par l'effet de la clause résolutoire que de réclamation d'une provision au titre de loyers et charges se heurtent à des contestations sérieuses, de sorte qu'il n'y a pas lieu à référé sur les demandes.

L'ordonnance déférée à la cour est dans ces conditions infirmée en toutes ses dispositions.

Il y a lieu enfin de condamner Monsieur [J] au paiement de la somme de 1 500 euros au titre de l'article 700 du Code de procédure civile.

PAR CES MOTIFS :

La Cour,

Infirme l'ordonnance du 18 décembre 2019 prononcée par le juge des référés du tribunal de grande instance de Marseille,

Statuant à nouveau et y ajoutant :

Dit n'y avoir lieu à référé sur les demandes de Monsieur [J] tendant à voir constater la résiliation du bail et en paiement de provisions à l'encontre de la SARL International Style Fashion ;

Condamne M. [J] à payer à la SARL International Style Fashion la somme de 1 500 euros au titre de l'article 700 du Code de procédure civile,

Rejette la demande de M. [J] sur ce fondement,

Condamne Monsieur [J] aux entiers dépens, ceux d'appel étant recouvrés conformément à l'article 699 du code de procédure civile.

Le greffier,La présidente,


Synthèse
Tribunal : Cour d'appel d'Aix-en-Provence
Formation : Chambre 1-2
Numéro d'arrêt : 19/19931
Date de la décision : 10/12/2020

Références :

Cour d'appel d'Aix-en-Provence 1C, arrêt n°19/19931 : Infirme la décision déférée dans toutes ses dispositions, à l'égard de toutes les parties au recours


Origine de la décision
Date de l'import : 27/03/2024
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.appel;arret;2020-12-10;19.19931 ?
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