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26/11/2020 | FRANCE | N°19/03107

France | France, Cour d'appel d'Aix-en-Provence, Chambre 1-7, 26 novembre 2020, 19/03107


COUR D'APPEL D'AIX-EN-PROVENCE

Chambre 1-7



ARRÊT AU FOND

DU 26 NOVEMBRE 2020



N° 2020/ 310













Rôle N° RG 19/03107 - N° Portalis DBVB-V-B7D-BD2VG







SARL SOCIETE HOTELIERE DE SAINT JEAN





C/



[C] [X] épouse [R]





















Copie exécutoire délivrée

le :

à :



SELARL HAUTECOEUR - DUCRAY







SELARL CABI

NET [P] AVOCATS





Décision déférée à la Cour :



Jugement du Tribunal de Grande Instance de Nice en date du 18 Mars 2015 enregistrée au répertoire général sous le n° 14/00034.





Jugement du Tribunal de Grande Instance de Nice en date du 05 septembre 2018

enregistrée au répertoire général sous l...

COUR D'APPEL D'AIX-EN-PROVENCE

Chambre 1-7

ARRÊT AU FOND

DU 26 NOVEMBRE 2020

N° 2020/ 310

Rôle N° RG 19/03107 - N° Portalis DBVB-V-B7D-BD2VG

SARL SOCIETE HOTELIERE DE SAINT JEAN

C/

[C] [X] épouse [R]

Copie exécutoire délivrée

le :

à :

SELARL HAUTECOEUR - DUCRAY

SELARL CABINET [P] AVOCATS

Décision déférée à la Cour :

Jugement du Tribunal de Grande Instance de Nice en date du 18 Mars 2015 enregistrée au répertoire général sous le n° 14/00034.

Jugement du Tribunal de Grande Instance de Nice en date du 05 septembre 2018

enregistrée au répertoire général sous le n° 14/00034.

APPELANTE

SARL SOCIETE HOTELIERE DE SAINT JEAN Prise en la personne de son représentant légal en exercice Mme [I] [C] [V] [T] née le [Date naissance 3]/1942 domiciliée en cette qualité audit siège., demeurant [Adresse 7]

représentée par Me Marc DUCRAY de la SELARL HAUTECOEUR - DUCRAY, avocat au barreau de NICE, plaidant

INTIMEE

Madame [C] [X] épouse [R]

née le [Date naissance 5] 1967 à [Localité 8], demeurant [Adresse 4]

représentée par Me Jean-raphaël DEMARCHI de la SELARL CABINET DEMARCHI AVOCATS, avocat au barreau de NICE substituée par Me Safaa HOUMMADA, avocat au barreau de NICE, plaidant

*-*-*-*-*

COMPOSITION DE LA COUR

L'affaire a été débattue le 07 Octobre 2020 en audience publique. Conformément à l'article 804 du code de procédure civile, Carole MENDOZA, Conseillère, a fait un rapport oral de l'affaire à l'audience avant les plaidoiries.

La Cour était composée de :

Monsieur Yves BENHAMOU, Président de Chambre

Madame Carole MENDOZA, Conseillère

Madame Laurence DEPARIS, Conseillère

qui en ont délibéré.

Greffier lors des débats : Mme Natacha BARBE.

Les parties ont été avisées que le prononcé de la décision aurait lieu par mise à disposition au greffe le 26 Novembre 2020.

ARRÊT

Contradictoire,

Prononcé par mise à disposition au greffe le 26 Novembre 2020,

Signé par Monsieur Yves BENHAMOU, Président de Chambre et Mme Natacha BARBE, greffier auquel la minute de la décision a été remise par le magistrat signataire.

***

EXPOSÉ DU LITIGE

Par acte du 20 janvier 1976, Madame [S] [U] [P] a donné à bail commercial à la SARL HOTELIERE DE [Localité 9] des locaux à usage exclusif 'd'hôtel-bar-restaurant' sis [Adresse 1], pour une durée de neuf ans, à compter du premier juillet 1975.

Le bail a fait l'objet de plusieurs renouvellements, le dernier datant du 10 septembre 2008, à compter rétroactivement du premier juillet 2003, pour une durée de neuf années, moyennant un loyer annuel de 24.760 euros à compter de cette date.

Par acte d'huissier du 24 décembre 2012, Madame [P] a délivré à son preneur un congé avec offre de renouvellement à effet du premier juillet 2013, moyennant un loyer annuel de 45.000 euros.

Les parties ne se sont pas accordées sur le prix du bail renouvelé.

Par acte d'huissier du 09 septembre 2014, la bailleresse a saisi le juge des loyers commerciaux en fixation de son montant.

Madame [C] [X] épouse [R] est venue aux droits de Madame [P].

Par jugement contradictoire du 18 mars 2015, le tribunal de grande instance de Nice (juge des loyers commerciaux) a, sous le bénéfice de l'exécution provisoire :

- constaté l'accord des parties sur le principe du renouvellement du bail à compter du premier juillet 2013 pour une durée de neuf années,

- indiqué 'vu le caractère monovalent (non contesté) des locaux à usage de hôtel-bar-restaurant,

- ordonné avant-dire droit une expertise, désigné Madame [K] et précisé la mission de l'expert.

Par jugement contradictoire du 05 septembre 2018, le tribunal de grande instance de Nice (juge des loyers commerciaux) a, sous le bénéfice de l'exécution provisoire :

- donné acte à Madame [C] [X] épouse [R] de son intervention volontaire à l'instance en sa qualité de seule héritière de sa mère décédée le [Date décès 6] 2017

- dit que les locaux à usage d'hôtel-bar-restaurant sis [Adresse 2] étant monovalents, leur loyer sur renouvellement au premier juillet 2013 n'est pas soumis à plafonnement et doit être fixé à leur valeur locative,

- fixé le loyer sur renouvellement à la somme de 44.595 euros par an, hors taxes et hors charges, à compter du premier juillet 2013,

- rejeté les demandes formulées au titre de l'article 700 du code de procédure civile,

- condamné la SARL HOTELIERE DE [Localité 9] aux entiers dépens, en ce compris les frais d'expertise judiciaire.

Le premier juge a retenu le caractère monovalents des locaux loués.

Il s'est appuyé sur le rapport d'expertise qui a utilisé la méthode hôtelière pour fixer la valeur locative du premier étage des locaux loués et noté que l'estimation expertale était approuvée par les parties.

Il a retenu la méthode expertale consistant à indiquer que le rez-de-chaussée, itinialement destiné à une activité de bar-restaurant, devait faire l'objet d'une évaluation séparée. Il a fait sienne la méthode de l'expert consistant à faire application des prix couramment pratiqués dans le voisinage pour évaluer cette partie des locaux. Contrairement à l'expert qui a retenu l'intégralité de la surface du rez-de-chaussée, il a estimé que la valeur locative de l'appartement du rez-de-chaussée ne devait pas être calculée sur la base d'une surface pondérée de 85,62 m² mais sur celle de 65,22 m² puisqu'une partie du rez-de-chaussée constituait l'accueil de l'hôtel et la salle des petits déjeuners.

Il a fixé la valeur locative du local en additionnant la valeur locative de l'hébergement (hôtel) et celle de la partie logement du rez-de-chaussée, en déduisant le montant de la taxe foncière mise à la charge de la locataire.

Le 21 février 2019, la SARL SOCIETE HOTELIERE DE SAINT JEAN a relevé appel du jugement du 18 mars 2015 en ce qu'il vise le caractère monovalent des locaux. Elle a également relevé appel du jugement du 05 septembre 2018 en ce qu'il a dit que les locaux étaient monovalents, que le loyer n'était pas soumis au plafonnement et devait être fixé à la valeur locative, en ce qu'il a fixé le loyer à la somme de 44.595 euros par an hors taxes et hors charges à compter du premier juillet 2013, en ce qu'il a ordonné l'exécution provisoire, en ce qu'il l'a déboutée de sa demande en fixation du loyer renouvelé à la somme de 28.550 euros et de sa demande d'exclure de la valeur locative les locaux anciennement exploités au rez-de-chaussée en bar restaurant.

Madame [C] [X] épouse [R] a constitué avocat et formé un appel incident.

Par conclusions notifiées le 21 mai 2019 sur le RPVA auxquelles il convient de se référer pour un plus ample exposé, la SARL HOTELIERE DE [Localité 9] demande à la cour :

- de confirmer l'accord des parties sur le principe du renouvellement du bail au premier juillet 2013,

- de confirmer le jugement déféré en ce qu'il a reconnu le caractère monovalent des locaux,

- d'infirmer le jugement déféré

*en ce qu'il a fixé le loyer sur renouvellement à la somme de 44 595 € par an, hors taxes et hors charges à compter du 1er juillet 2013.

* en ce qu'il a condamné la SARL HOTELIERE DE [Localité 9] aux entiers dépens en ce compris les frais d'expertise.

* en ce qu'il a débouté la STE HOTELIERE DE [Localité 9] de sa demande en fixation du loyer renouvelé à la somme de 28 .550 € et de sa demande d'exclure de la valeur locative les locaux anciennement exploités au rez-de-chaussée en bar -restaurant et loués à titre de magasin et d'arrière magasin

- statuant à nouveau :

- de fixer la valeur locative du bail renouvelé à la somme de 29 919.96 € de laquelle il faut déduire la valeur de la taxe foncière (1 363 €) soit à la somme de 28 550 € à compter du 1 er juillet 2003 ;

- de condamner le bailleur à restituer les sommes trop perçues (différence entre la somme fixée et le loyer effectivement payé par le preneur)

subsidiairement :

- de fixer la valeur locative de la partie restaurant en appliquant la méthode hôtelière

- de dire que « la valeur locative est déterminée selon un pourcentage d'une recette théorique » et appliquer cette méthode à la partie restaurant en retenant les recettes théoriques du petits déjeuners (seules activités de restauration aujourd'hui pratiquée).

- de désigner tel expert qu'il plaira à la Cour afin d'évaluer cette valeur, locative au regard de critère ;

à titre infiniment subsidiaire :

- de juger que la partie du rez-de-chaussée destinée à l'hébergement doit être valorisée « par comparaison avec les prix pratiqués pour les locaux d'habitation analogues faisant

l'objet d'une location nouvelle, majorés ou minorés, pour tenir compte des avantages ou des inconvénients présentés par leur intégration dans un tout commercial. »

- de désigner tel expert qu'il plaira à la Cour pour :

o Évaluer la valeur locative de la partie hébergement selon les critères de l'article R 145-4 alinéa 2 du code de commerce :

o Dire si la partie hébergement est conforme aux règles d'un logement décent

*en tout état de cause :

- de condamner Madame [R] à payer à la SARL STE HOTELIERE DE [Localité 9] la somme de 2 500 euros en application des dispositions de l'article 700 du Code de Procédure Civile, ainsi qu'aux entiers dépens en ce compris les frais d'expertise.

Elle fait état du caractère monovalent des locaux et souligne que le changement de destination d'une partie du rez-de-chaussée était connu et accepté par le bailleur.

Elle estime que le loyer du bail renouvelé doit être évalué selon la méthode hôtelière. Elle conteste le fait le premier juge ait valorisé distinctement la partie logement de la gérante. Elle estime que les locaux utilisés par la gérante, à savoir une chambre ouverte et une salle de bain peuvent être considérés comme des annexes de service.

Subsidiairement, elle demande l'application de la méthode hôtelière à la partie restaurant et à la partie logement de la gérante.

A titre infiniment subsidiaire, elle demande la désignation d'un expert afin d'évaluer la valeur locative de la partie logement et de dire si les locaux remplissent les conditions d'un logement décent.

Par conclusions notifiées le 21 août 2019 sur le RPVA auxquelles il convient de se référer pour un plus ample exposé, Madame [X] épouse [R] demande à la cour :

- de constater l'accord des parties sur le principe du renouvellement du bail à compter du 1 er juillet 2013, pour une durée de neuf ans,

- de constater que la destination des lieux telle que mentionnée au contrat de bail, à savoir Hôtel-Bar-Restaurant, n'a jamais fait l'objet d'une modification par les parties,

- de constater que le jugement du 05/09/2018 considère les locaux comme étant des locaux à

usage d'hôtel-bar-restaurant, monovalents dont le loyer n'est pas soumis à plafonnement ,

- de constater que le jugement du 05/09/2018 fixe le montant de la valeur locative à la somme

de 44.595 euros par an, hors taxes et hors charges à compter du 1 er juillet 2013.

En conséquence,

- de confirmer le jugement en ce qu'il fixe le montant de la valeur locative à la somme de 44.595 euros par an, hors taxes et hors charges à compter du 1 er juillet 2013,

- de confirmer le jugement en ce qu'il déboute la SARL HOTELIERE DE [Localité 9] de l'ensemble de ses demandes, fins, moyens et prétentions,

- d'infirmer le jugement en ce qu'il déboute Madame [R] de sa demande de condamnation de la SARL HOTELIERE DE [Localité 9] au paiement des frais irrépétibles,

- de condamner la SARL HOTELIERE DE [Localité 9] au paiement de la somme de 6.000 € au titre des dispositions de l'article 700 du Code de Procédure Civile (1 ère instance et appel) outre les entiers frais et dépens de l'instance, en ce compris les frais d'expertise.

Elle rappelle que nul ne conteste la monovalence des locaux et donc le déplafonnement du prix du loyer du bail renouvelé.

Elle soutient que le loyer doit être évalué selon la méthode hôtelière pour les chambres d'hôtel et selon les prix pratiqués dans le voisinage en ce qui concerne le bar et le restaurant, c'est-à-dire les pièces du rez-de-chaussée. Elle indique que ces dernières ne peuvent recevoir la qualification d'annexes de service.

L'ordonnance de clôture a été prononcée le 23 septembre 2020.

MOTIVATION

Le bail conclu entre les parties a pour usage exclusif celui 'd'hôtel-bar-restaurant'.

Il n'était pas prévu dans ce bail une partie affectée à l'habitation ; le logement situé au rez-de-chaussée des locaux a été réalisé à la seule initiative du preneur.

Le bail initial, qui a fait l'objet de plusieurs renouvellements, donne la description suivante du rez-de-chaussée: 'un magasin au rez-de-chaussée avec arrière magasin'.

Il ressort des plans mentionnés dans le rapport d'expertise que les locaux à l'origine se composait, au rez-de-chaussée, d'un bar, d'une salle à manger et d'une cuisine.

Il résulte également de l'expertise qu'il n'existe qu'une seule entrée de l'hôtel et que l'exploitant actuel n'a pas développé d'activités bar-restaurant.

Il ressort de la configuration des lieux que la salle dans laquelle pourrait être exercée l'activité de bar-restaurant au rez-de-chaussée n'est pas séparée de l'hôtel qui ne bénéficie que d'une seule entrée; à la lecture du bail d'origine, l'exploitation autonome des deux activités (bar-restaurant; hôtel) n'était pas envisagée. Ainsi, l'activité de bar-restaurant ne peut qu'être accessoire à celle de l'hôtel.

Les locaux, ce qui n'est contesté par aucune partie, sont monovalents; ne s'applique dès lors pas le principe du plafonnement, en application de l'article R 145-10 du code du commerce.

Il convient, compte tenu des précédentes explications, d'appliquer la méthode hôtelière sur l'ensemble des lieux loués.

Il y a lieu de s'appuyer pour ce faire sur les calculs non contestés de l'expert qui fixe à la somme de 29.919,96 euros la valeur locative des locaux selon cette méthode. Sera déduite de cette somme le montant de la taxe foncière à hauteur de 1369 euros.

En conséquence, il convient de fixer à la somme arrondie de 28.551 euros, le montant annuel du loyer du bail renouvelé au premier juillet 2013.

Madame [X] sera condamnée à restituer à son preneur les sommes trop perçues.

Le jugement déféré sera donc infirmé sur le montant du bail du loyer renouvelé.

Sur l'article 700 du code de procédure civile et sur les dépens

Pour des raisons liées à l'équité, il n'y a pas lieu de faire application des dispositions de l'article 700 du code de procédure civile.

Les dépens, comprenant le coût de l'expertise judiciaire, seront partagés par moitié entre les parties, qu'il s'agisse donc de ceux de première instance et de ceux de la présente procédure. Le jugement déféré sera infirmé s'agissant de la condamnation de la SARL HOTELIERE DE [Localité 9] aux entiers dépens, comprenant les frais d'expertise judiciaire.

PAR CES MOTIFS,

La cour, statuant publiquement, par arrêt contradictoire, par mise à disposition au greffe

INFIRME le jugement déféré, sauf en ce qu'il a rejeté les demandes formulées sur le fondement de l'article 700 du code de procédure civile,

STATUANT A NOUVEAU ET Y AJOUTANT,

FIXE le montant du loyer sur renouvellement au premier juillet 2013 à la somme annuelle de 28.551 euros (vingt huit mille cinq cent cinquante et un euros), hors taxes et hors charges,

CONDAMNE Madame [C] [X] épouse [R] à verser à la SARL HOTELIERE [Localité 9] le surplus des loyers versés par son preneur,

REJETTE les demandes formées par les parties sur le fondement de l'article 700 du code de procédure civile,

DIT que les dépens de première instance, comprenant les frais d'expertise judiciaire, ainsi que les dépens exposés à l'occasion de la présente procédure, seront partagés par moitié entre les parties.

LA GREFFIÈRE, LE PRÉSIDENT,


Synthèse
Tribunal : Cour d'appel d'Aix-en-Provence
Formation : Chambre 1-7
Numéro d'arrêt : 19/03107
Date de la décision : 26/11/2020

Références :

Cour d'appel d'Aix-en-Provence A1, arrêt n°19/03107 : Infirme partiellement, réforme ou modifie certaines dispositions de la décision déférée


Origine de la décision
Date de l'import : 27/03/2024
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.appel;arret;2020-11-26;19.03107 ?
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