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26/11/2020 | FRANCE | N°18/06599

France | France, Cour d'appel d'Aix-en-Provence, Chambre 1-9, 26 novembre 2020, 18/06599


COUR D'APPEL D'AIX-EN-PROVENCE


Chambre 1-9





ARRÊT AU FOND


DU 26 NOVEMBRE 2020





N° 2020/686




















Rôle N° RG 18/06599 N° Portalis DBVB-V-B7C-BCJKR











SAS ADREXO








C/





U... T...











Copie exécutoire délivrée


le :


à :





Me Jonathan LAUNE





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Me Dominique DANIEL














Décision déférée à la Cour :





Jugement du Juge de l'exécution d'AIX-EN-PROVENCE en date du 05 Avril 2018 enregistré au répertoire général sous le n° 17/06582.








APPELANTE





SAS ADREXO


prise en la personne de son Président Monsieur X... D...,


siège social [...]





représentée par Me Jon...

COUR D'APPEL D'AIX-EN-PROVENCE

Chambre 1-9

ARRÊT AU FOND

DU 26 NOVEMBRE 2020

N° 2020/686

Rôle N° RG 18/06599 N° Portalis DBVB-V-B7C-BCJKR

SAS ADREXO

C/

U... T...

Copie exécutoire délivrée

le :

à :

Me Jonathan LAUNE

Me Dominique DANIEL

Décision déférée à la Cour :

Jugement du Juge de l'exécution d'AIX-EN-PROVENCE en date du 05 Avril 2018 enregistré au répertoire général sous le n° 17/06582.

APPELANTE

SAS ADREXO

prise en la personne de son Président Monsieur X... D...,

siège social [...]

représentée par Me Jonathan LAUNE de la SCP CHABAS & ASSOCIES, avocat au barreau D'AIX-EN-PROVENCE

assistée de Me Dimitri PINCENT de la SCP MARGULIS, avocat au barreau de PARIS, substitué par Me Axelle TESTINI de la SCP CHABAS & ASSOCIES, avocat au barreau D'AIX-EN-PROVENCE

INTIME

Monsieur U... T...

né le [...] à RENNES (35000),

demeurant [...]

représenté et assisté par Me Dominique DANIEL, avocat au barreau D'AIX-EN-PROVENCE

*-*-*-*-*

COMPOSITION DE LA COUR

L'affaire a été débattue le 14 Octobre 2020 en audience publique. Conformément à l'article 785 du code de procédure civile, Madame Sophie TARIN-TESTOT, Conseiller, a fait un rapport oral de l'affaire à l'audience avant les plaidoiries.

La Cour était composée de :

Madame Evelyne THOMASSIN, Président

Madame Pascale POCHIC, Conseiller

Madame Sophie TARIN-TESTOT, Conseiller

qui en ont délibéré.

Greffier lors des débats : Mme Josiane BOMEA.

Les parties ont été avisées que le prononcé de la décision aurait lieu par mise à disposition au greffe le 26 Novembre 2020.

ARRÊT

Contradictoire,

Prononcé par mise à disposition au greffe le 26 Novembre 2020.

Signé par Madame Evelyne THOMASSIN, Président et Mme Josiane BOMEA, greffier auquel la minute de la décision a été remise par le magistrat signataire.

***

Faits, procédure et prétentions des parties :

Par arrêt en date du 22 février 2017, la chambre sociale de la cour d'appel de Rennes a notamment requalifié en contrat de travail à temps complet les contrats du 14 janvier 2002 et du 20 septembre 2004 qui liaient la société Adrexo et monsieur U... T..., condamné la société Adrexo à payer à ce dernier la somme de 31 661 € à titre de rappel de salaires sur les périodes de février 2002 à juin 2004 et d'octobre 2004 à juin 2005, outre 3166,10 € de congés payés afférents, avec l'obligation pour la société Adrexo, de remettre à monsieur T... des bulletins de salaires rectifiés.

Monsieur U... T... a saisi le juge de l'exécution du tribunal de grande instance d'Aix-en-Provence d'une demande d'assortir l'obligation de remise des bulletins de paie rectifiés d'une astreinte.

Par jugement du 5 avril 2018, le juge de l'exécution du tribunal de grande instance d'Aix-en-Provence a :

-rejeté l'exception d'incompétence soulevée par la société Adrexo,

-ordonné l'exécution de l'obligation mise à la charge de la société Adrexo par l'arrêt rendu par la cour d'appel de Rennes en date du 22 février 2017 consistant dans le fait de "remettre à U... T... des bulletins de salaires rectifiés',

-assorti l'obligation de remettre des bulletins de salaires rectifiés sous astreinte de 50 euros par jour de retard à compter à compter du 30ème jour suivant la signification du présent jugement et pour une durée de 90 jours à l'issue de laquelle il pourra à nouveau être statué,

-débouté monsieur U... T... de sa demande de dommages et intérêts,

-débouté monsieur U... T... de ses demandes plus amples ou contraires,

-débouté la société Adrexo de l'ensemble de ses demandes,

-condamné la société Adrexo à payer à monsieur U... T... la somme de 800 euros sur le fondement des dispositions de l'article 700 du Code de procédure civile, outre les entiers dépens.

Par déclaration notifiée par le RPVA le 16 avril 2018, la SAS Adrexo a interjeté appel du jugement du juge de l'exécution notifié par lettre recommandée du greffe dont l'avis de réception est revenu avec l'apposition d'un tampon le 10 avril 2018.

Par conclusions notifiées par le RPVA le 3 janvier 2020, auxquelles il est renvoyé pour un exposé complet de ses moyens et prétentions, la SAS Adrexo demande à la cour de :

-infirmer le jugement rendu par le juge de l'exécution du 5 avril 2018 en ce qu'il a ordonné l'exécution de l'obligation mise à la charge de la société Adrexo sous astreinte ,

Et, statuant à nouveau,

-dire n'y avoir lieu à la fixation d'une astreinte,

-condamner monsieur U... T... à lui verser la somme de 3 000 € au titre des frais irrépétibles de première instance et d'appel,

-condamner monsieur U... T... aux dépens.

La société Adrexo indique avoir remis le 18 avril 2017 à monsieur U... T... un bulletin de salaire unique, lequel satisfait à son obligation en vertu de l'article L. 3243-2 du Code du travail et conformément à la jurisprudence de la Cour de cassation, le dispositif de la décision de la cour d'appel de Rennes n'ayant pas pour objet de la condamner à remettre autant de bulletins de paie que de mois concernés par les rappels de salaires, mais simplement de lui enjoindre de respecter son obligation de soumettre le rappel de salaires aux obligations déclaratives et aux cotisations sociales au moyen d'un bulletin de paie.

Elle ajoute qu'il lui est impossible, en pratique, de procéder autrement que par l'édition d'un bulletin de paie unique pour les années 2002 à 2005 dans la mesure où :

-en droit, l'intégralité d'un rappel de salaire doit être mentionnée sur la déclaration annuelle des données sociales (DADS) de l'année au cours de laquelle ce rappel de salaires a été effectivement payé,

-l'édition de nouveaux bulletins de salaires se rapportant à des années antérieures à la date du versement et ne correspondant pas au montant du salaire déclaré à l'époque aux organismes sociaux et fiscaux pourrait être considéré comme une déclaration insincère,

-les logiciels de paie interdisent l'établissement de bulletins de paie « rétroactifs » à plus d'une décennie, précisément pour respecter les règles déclaratives précitées.

Elle fait valoir qu'en vertu d'un arrêt de la Cour de Cassation du 3 mai 2018 (n° 16-17317), c'est la date de paiement des salaires qui importe et détermine l'assujettissement à cotisations sociales, les dates d'exigibilité des salaires n'ayant aucune incidence ; ainsi, le bulletin de paie d'avril 2017 recèle nécessairement les bulletins de paie des mois concernés par les rappels de salaires, auxquels s'applique le régime social applicable en avril 2017. L'édition de bulletins de paie mois par mois, constituerait selon elle, une violation de la règle selon laquelle le fait générateur des cotisations sociales constitue la date de paiement. La date de paiement de l'exécution du titre exécutoire étant unique, le bulletin de paie doit être unique.

La SAS Adrexo conclut à l'absence de nécessité de fixer une astreinte dans la mesure où elle a mis en 'uvre son obligation tirée de l'article L. 3243-2 du Code du travail.

Aucune résistance abusive ne pouvant lui être reprochée, elle sollicite le rejet de la demande en paiement de dommages et intérêts de l'intimé.

Par conclusions notifiées par le RPVA le 07 septembre 2020, auxquelles il est renvoyé pour un exposé complet de ses moyens et prétentions, monsieur U... T... demande à la cour de :

-le recevoir en son appel incident, le dire régulier et bien fondé,

-donner acte à la société Adrexo qu'elle a renoncé à soulever une exception d'incompétence,

-confirmer le jugement rendu par le juge de l'exécution le 05 avril 2018 sauf en ce qu'il l'a débouté de sa demande de dommages et intérêts,

Y ajoutant,

-condamner la société Adrexo à lui verser la somme de 5 000 € de dommages et intérêts pour résistance abusive,

-condamner la société Adrexo au paiement de la somme de 3 000 € au titre de l'article 700 du code de procédure civile outre les entiers dépens.

A l'appui de ses prétentions et faisant sienne la motivation du premier juge, monsieur U... T... soutient que la remise d'un seul bulletin de paie revient à dénaturer le titre exécutoire définitif, contestant l'application des jurisprudences évoquées par l'appelante au présent litige.

Il souligne au surplus que le bulletin de paie remis pour un montant net de 27 074,59 €, pour la période du 1er avril 2017 au 30 avril 2017 témoigne de l'absence de référence aux périodes concernées.

Il estime ainsi que la société Adrexo résiste, de manière abusive, à l'obligation de délivrer les bulletins de paie rectifiés, ne justifiant d'aucune cause étrangère rendant impossible la délivrance des bulletins rectifiés et contestant les difficultés pratiques et juridiques alléguées pour délivrer des bulletins de salaire rectifiés mensuels.

Il affirme enfin avoir un intérêt légitime à solliciter des bulletins de salaire mensuels afin de pouvoir distinguer les sommes qui lui sont payées par périodes, lui permettant de rectifier si nécessaire, ses droits à la retraite, et de façon générale de lire et connaître le paiement des cotisations sociales et les taux applicables.

L'ordonnance de clôture est intervenue le 14 septembre 2020.

MOTIVATION DE LA DÉCISION :

A titre liminaire, la cour n'est pas tenue de répondre aux demandes de constat et de "donner acte" qui constituent des analyses purement factuelles, dénuées de toutes conséquences juridiques.

* Sur la décision d'assortir l'obligation d'une astreinte :

Aux termes de l'article L.131-1 du Code des procédures civiles d'exécution, "le juge de l'exécution peut assortir d'une astreinte une décision rendue par un autre juge si les circonstances en font apparaître la nécessité.".

Lorsque le juge de l'exécution est amené à assortir d'une astreinte la décision prononcée par une autre juridiction, il dispose alors d'un pouvoir souverain et doit en conséquence motiver sa décision.

En l'espèce, le juge de l'exécution a assorti d'une astreinte la condamnation prononcée par l'arrêt de la cour d'appel de Rennes du 22 février 2017 " de remettre des bulletins de salaires rectifiés", alors que l'entreprise Adrexo justifiait de l'envoi à monsieur U... T... d'un bulletin de salaire rectificatif daté du 30 avril 2017, reportant le montant des sommes au paiement desquelles elle avait été condamnée par cette même décision, au titre des rappels de salaire et des indemnités de congés payés pour la période de février 2002 à juin 2004 et d'octobre 2004 à juin 2005.

Pour justifier du prononcé d'une astreinte, le juge de l'exécution retient que la délivrance d'un seul bulletin de paie rectificatif ne répond pas aux exigences de la cour, le pluriel exigeant l'établissement de plusieurs bulletins de paie mensuels, et que la société Adrexo ne souhaite pas se conformer à la décision de justice.

Cependant les dispositions de l'article L.3243-2 du code du travail n'interdisent pas à un employeur condamné au versement d'un rappel de salaire dû sur plusieurs mois, de faire figurer ce rappel sur un seul bulletin de paie, établi lors de son paiement. (chambre sociale arrêt 27 janvier 2016 n°14-19.210).

En outre, la cour avait expressément écarté la remise sous astreinte, des bulletins de paie rectifiés, estimant celle-ci non justifiée.

Enfin, le refus de la société Adrexo d'exécuter la décision n'est pas caractérisée, celle-ci s'étant exécutée par la remise d'un bulletin rectificatif, le paiement des sommes correspondantes, et faisant valoir, par ailleurs, l'impossibilité technique d'émettre l'ensemble des bulletins de paie sur la période considérée, compte tenu de la configuration des logiciels de paie interdisant l'établissement de bulletins rétroactifs de plus d'une décennie et du risque comptable d'insincérité tenant à l'édition de nouveaux bulletins de salaires se rapportant à des années très antérieures à la date du versement et ne correspondant pas au montant de salaire déclaré à l'époque aux organismes sociaux et fiscaux.

Dès lors, la nécessité d'assortir la condamnation prononcée par la cour d'appel de Rennes le 22 février 2017 d'une astreinte n'est pas établie et il convient d'infirmer le jugement de ce chef.

* Sur la demande de condamnation pour résistance abusive :

Il résulte des précédentes observations que la résistance abusive invoquée n'est pas caractérisée. C'est à bon droit que le juge a rejeté cette demande en première instance, et la demande présentée à nouveau de ce chef sera rejetée.

* Sur les demandes accessoires :

Il convient d'accorder à l'appelant contraint d'exposer des frais, une indemnité sur le fondement de l'article 700 du Code de procédure civile dans les conditions précisées au dispositif ci-après.

Partie perdante, monsieur U... T... sera tenu aux entiers dépens.

PAR CES MOTIFS,

La Cour, statuant après en avoir délibéré, par décision contradictoire, mise à la disposition du greffe,

INFIRME le jugement entrepris, en ce qu'il a assorti d'une astreinte l'obligation mise à la charge de la société Adrexo par l'arrêt rendu par la cour d'appel de Rennes en date du 22 février 2017,

Statuant à nouveau,

DIT n'y avoir lieu à astreinte,

CONDAMNE monsieur U... T... à payer à la société Adrexo la somme de 3000 euros en application des dispositions de l'article 700 du Code de procédure civile,

DEBOUTE les parties de leurs demandes autres ou plus amples,

CONDAMNE monsieur U... T... aux dépens,

LA GREFFIÈRE LA PRÉSIDENTE


Synthèse
Tribunal : Cour d'appel d'Aix-en-Provence
Formation : Chambre 1-9
Numéro d'arrêt : 18/06599
Date de la décision : 26/11/2020

Références :

Cour d'appel d'Aix-en-Provence 5A, arrêt n°18/06599 : Infirme partiellement, réforme ou modifie certaines dispositions de la décision déférée


Origine de la décision
Date de l'import : 27/03/2024
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.appel;arret;2020-11-26;18.06599 ?
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