COUR D'APPEL D'AIX-EN-PROVENCE
Chambre 3-4
ARRÊT AU FOND
DU 08 OCTOBRE 2020
N° 2020/114
Rôle N° RG 18/00307 - N° Portalis DBVB-V-B7C-BBXTK
[Y] [F]
[W] [E]
C/
SA LA CAISSE D'EPARGNE ET DE PREVOYANCE COTE D'AZUR
Copie exécutoire délivrée
le :
à :
Me CARLES DE CAUDEMBERG
Me ALLALI
Me ROUILLOT
Décision déférée à la Cour :
Jugement du Tribunal de Commerce de NICE en date du 20 Décembre 2017 enregistrée au répertoire général sous le n° 2016F00771.
APPELANTS
Monsieur [Y] [F]
né le [Date naissance 2] 1954 à [Localité 7], de nationalité Française,
demeurant [Adresse 4]
représenté par Me Ollivier CARLES DE CAUDEMBERG, avocat au barreau de NICE
Monsieur [W] [E]
né le [Date naissance 1] 1955 à [Localité 6], de nationalité Française,
demeurant [Adresse 8]
représenté par Me Valérie ALLALI, avocat au barreau de NICE
INTIMEE
SA LA CAISSE D'EPARGNE ET DE PREVOYANCE COTE D'AZUR Agissant poursuites et diligences de son représentant légal en exercice, Dont le siège est sis [Adresse 5]
représentée par Me Maxime ROUILLOT de la SELARL MAXIME ROUILLOT - FRANCK GAMBINI, avocat au barreau de NICE
*-*-*-*-*
COMPOSITION DE LA COUR
La Cour lors du délibéré était composée de :
Madame Laure BOURREL, Président
Mme Françoise FILLIOUX, Conseiller-rapporteur
Mme Anne FARSSAC, Conseiller
Statuant selon la procédure sans audience en application des dispositions de l'article 8 de l'ordonnance n°2020-304, modifiée, sans opposition des parties, après avis adressé le 26 mai 2020 précisant que le prononcé de la décision aurait lieu par mise à disposition au greffe le 08 Octobre 2020.
ARRÊT
Contradictoire,
Prononcé par mise à disposition au greffe le 08 Octobre 2020,
Signé par Madame Laure BOURREL, Président et Madame Rime GHORZI, greffier auquel la minute de la décision a été remise par le magistrat signataire.
******
Faits , procédure, moyens et prétentions des parties :
Suivant offre acceptée le 9 mars 2010, la société Caisse d'Epargne et de Prévoyance Côte d'azur a consenti à la société Equilibre un prêt professionnel de 460 000 euros au taux de 8 % remboursable en 147 mensualités de 4 348,25€ destiné à financer des travaux d'aménagement des locaux d'un restaurant situé à [Adresse 3] .
Par acte sous seing privé du 9 mars 2010, Messieurs [K] [S] [F] et [W] [E], dirigeants de la société Equilibre, s'en sont portés cautions solidaires à hauteur de 149 500 euros pour une durée de 110 mois .
Le 18 mars 2010, la banque a inscrit un nantissement sur le fonds de commerce appartenant à la société Equilibre .
Le 27 avril 2010, la société la Caisse d'épargne a consenti à la société Equilibre deux nouveaux prêts :
- un prêt de 31 800€ au taux de 4,20% remboursable en 147 mensualités de 300,60€ ,
- un prêt de 18 200€ au taux de 4,20% remboursable en 147 mensualités de 172,04€.
Le 27 avril 2010 Messieurs [K] [S] [F] et [W] [E] s'en sont portés cautions solidaires à hauteur de 65 000 euros .
La banque a, le 7 mai 2010, inscrit un nantissement sur le fonds de commerce précité .
Par jugement du 11 juin 2015, le tribunal de commerce de Nice a prononcé le redressement judiciaire de la société Equilibre , converti en liquidation judiciaire le 11 mai 2016 .
Le 3 juillet 2015 , la banque a régulièrement déclaré sa créance au titre des prêts impayés et par ordonnance du 7 juillet 2016, le juge commissaire a ordonné la cession du fonds de commerce moyennant un prix de 171 110€ .
Après les avoir vainement mis en demeure d'exécuter leur engagement par courrier recommandé du 4 juillet 2016, la banque a assigné en paiement Messieurs [F] et [E] en leur qualité de caution devant le tribunal de commerce de Nice par acte du 29 septembre 2016 .
Par jugement contradictoire du 20 décembre 2017, ce tribunal a'
- déclaré prescrite l'action de Messieurs [F] et [E] engagée au visa de l'article L341-4 du code de la consommation , dit que la créance de la banque a l'égard des cautions au titre du prêt du 9 mars 2010 d'un montant de 460 000€ est limitée à 25% du prêt soit 115 000€ par caution,
- condamné Monsieur [F] en sa qualité de caution a payé à La Caisse d'épargne 115 000€ au titre du prêt de 460 000€ compte tenu de la limitation de l'engagement de caution , augmentés des intérêts au taux légal à compter de la mise en demeure du 4 juillet 2016 jusqu'au parfait paiement ,
- condamné Monsieur [E] en sa qualité de caution a payé à La Caisse d'épargne 115 000€ au titre du prêt de 460 000€ compte tenu de la limitation de l'engagement de caution , augmentés des intérêts au taux légal à compter de la mise en demeure du 4 juillet 2016 jusqu'au parfait paiement ,
- condamné solidairement Messieurs [F] et [E] à payer à La Caisse d'épargne les sommes suivantes :
-24 655,37€ au titre du prêt de 31 800€ outre intérêt de retard au taux contractuel de 4,20% calculés sur la somme de 22 897,13€ à compter du 12 mai 2016 jusqu'au pafrait paiement ,
-13 846,62€ au titre du prêt de 18 200€ outre intérêts de retard au taux contractuel de 4,20% sur la somme de 12 857,93€ à compter du 12 mai 2016 jusqu'à parfait paiement
débouté les parties de toutes leurs autres demandes
dit n'y avoir lieu à exécution provisoire et condamné Messieurs [F] et [E] au paiement d'une somme de 1 000€ au titre de l'article 700 du code de procédure civile et aux entiers dépens.
Le 5 janvier 2018, Messieurs [F] et [E] ont interjeté appel de cette décision .
Dans ses dernières conclusions déposées et notifiées le 21 mai 2020 et tenues pour intégralement reprises, Monsieur [E] demande à la cour, au visa des articles 803 et 907 du code de procédure civile , 1104,1163,2289, 2290 et 2313 du code civil et L332-1, l333-2 et 343-6 du code de commerce , de :
*infirmer le jugement du 20 décembre 2017 ,
*ordonner le rabat de l'ordonnance de clôture du 23 mai 2020 ,
* déclarer recevables les présentes écritures ,
* dire le cautionnement nul et de nul effet en l'absence d'information sur la garantie OSEO, et débouter la Caisse d'épargne de ses demandes,
A titre subsidiaire : * confirmer la décision du jugement attaqué en ce qu'elle a dit et jugé que la créance invoquée au titre du prêt du 9 mars 2010 était limitée à 25% de l'encours du prêt soit la somme maximum de 115 000€ par caution ,
*dire nul et de nul effet les engagements de caution en raison de leur caractère indéterminé et non causé et en conséquence débouter la banque de ses demandes ,
A titre subsidiaire :* dire que la prescription n'est pas applicable au moyen de défense invoqué par Monsieur [E] au visa de l'article L332-1 du code de la consommation
*dire que la prescription n'est pas encourue ,
En conséquence : débouter la banque de ses demandes ,
En outre : dire et juger que la banque a engagé sa responsabilité pour ne pas l'avoir mis en garde sur la disproportion de ses engagements , dire que les engagements du 9 mars 2010 et du 27 avril 2010 étaient lors de leur conclusion manifestement disproportionnés par rapport aux biens et revenus de Monsieur [E],
* dire que la banque sera déchue de son droit de se prévaloir des dits cautionnements par défaut de proportionnalité ,
En conséquence : *décharger Monsieur [E] de ses engagements ou tout le moins dire et juger que les cautionnements lui sont inopposables ,
A titre infiniment subsidiairement :* dire que la banque a engagé sa responsabilité en soutenant abusivement par plusieurs concours la société Equilibre et en conséquence décharger Monsieur [E] de ses engagements ou tout le moins dire et juger que les cautionnements lui sont inopposables,
* condamner la Caisse d'épargne à lui payer la somme de 188 001,99€ à titre de dommages et intérêts , somme qui viendra en compensation avec la créance alléguée par la banque ,
A titre infiniment subsidiairement : prononcer la déchéance du droit aux intérêts, faute de délivrance de l'information annuelle à la caution
En tout état de cause : dire et juger que la banque ne prouve pas sa créance actuelle , faute de produire un décompte actualisé et un certificat d'irrécouvrabilité , alors que le fonds de commerce a été vendu dans le cadre de la liquidation judiciaire de la société Equilibre ,
En toute hypothèse : * condamner la Caisse d'épargne à lui payer la somme de 4 000€ au titre de l'article 700 du code de procédure civile et aux entiers dépens , distraits au profit de Maître Allali , avocat sur son affirmation de droit .
Il expose que la banque a accordé ce prêt en faisant garantir son risque à hauteur de 40% par l'OSEO, et que l'acte de prêt prévoyait qu'en applicatin de la garantie OSEO les cautions personnelles et solidaires sont limitées à 25% du crédit , soit la somme de 115 000€ par caution que de surcroît , le défaut d'information sur les conditions de l'OSEO justifie la prononcé de l'annulation du cautionnement pour dol .
Il soutient à titre subsidiaire , que le jugement en ce qu'il a limité à 25% l'encours du prêt doit être confirmé .
Il fait également valoir que le cautionnement du 27 avril 2010 est nul en raison de son caractère indéterminé , l'acte de prêt n'y est pas annexé .
A titre subsidiaire , il souligne que la prescription est sans incidence sur un moyen de défense, que tel est le cas du moyen selon lequel l'engagement de caution disproportionné se trouve privé d'effet , qu'en l'espèce , la banque ne produit aucun formulaire de renseignement complet sur la situation financière et patrimoniale de la caution, de sorte qu'elle a manqué à son devoir de mise en garde et devra être condamnée à lui verser des dommages et intérêts équivalent au montant de la créance .
Il indique également que la fiche de renseignements produite révèle des anomalies qui auraient dû alerter la banque et que la réalité de sa situation financière ne lui permettait pas de faire face à ses engagements lors de la souscription mais également au jour où la caution était appelée .
A titre infiniment subsidiairement, il sollicite la déchéance du droit aux intérêts faute d'information annuelle .
En tout état de cause, il soutient qu'il appartient à la banque d'actualiser son décompte
Dans ses dernières écritures déposées et notifiées le 20 mai 2020 et tenues pour intégralement reprises, Monsieur [F] demande à la cour au visa des articles L333-2, L343-6 du code de la consommation , L 313-22 du code monétaire et financier et 1103, 1130, 1353 et 2288 du code civil de :
* réformer le jugement entrepris ,
*dire et juger que la fiche de renseignements a été altérée en ce qu'elle a été modifiée par la banque, Monsieur [F] n'ayant jamais établi de tableau à annexer à sa fiche de renseignement ni indiqué de sa main , la mention 'CF tableau récapitulatif' sur la pièce 19 produite par la banque ,
*ordonner si besoin la vérification d'écriture prévue par les articles 287 et suivants du code de procédure civile ,
*dire et juger que la banque ne peut se prévaloir des actes de cautionnement disproportionnés signés par Monsieur [F] en l'état de la déchéance dont elle est frappée en application de l'article L332-1 du code de la consommation et à tout le moins , annuler les actes de cautionnement pour vice du consentement en l'absence d'information sur la garantie et en tout état de cause :
*dire et juger que la banque ne prouve pas que sa créance est toujours actuelle , faute de produire un décompte actualisé et un certificat d'irrecouvrabilité alors que le fonds de commerce a été vendu dans le cadre de la liquidation judiciaire de la société Equilibre
En conséquence :
* débouter la Banque de l'ensemble de ses demandes ,
En tout état de cause : *condamner la banque à payer à Monsieur [F] la somme de 188 001,99€ au titre de dommages et intérêts en réparation du préjudice subi
*dire que cette somme viendra en compensation de la créance alléguée
A titre infiniment subsidiairement : *prononcer la déchéance du droit aux intérêts , faute de délivrance de l'information annuelle de la caution ,
En toute hypothèse : *condamner la banque à lui verser la somme de 3 000€ sur le fondement de l'article 700 du code de procédure civile et aux entiers dépens avec distraction au profit de Maître Carles de Caudemberg.
Il soutient que son moyen de défense au fond relatif à la proportionnalité de ses revenus et ressources par rapport à son engagement de caution n'est pas soumis à la prescription retenue en première instance , que la banque ne s'est pas informée sur la réalité de ses ressources et de sa situation patrimoniale et que les anomalies apparentes de la fiche produite auraient dû alerter la banque, que la pièce 19 n'émane pas de lui et que ni ses revenus ni son patrimoine ne lui permettaient de faire face à ses engagements , qu'actuellement au chômage , il ne peut s'acquitter de la dette .
Il fait valoir que la banque ne l'a pas informé valablement sur le mécanisme relatif à la garantie OSEO de sorte que son consentement a été vicié .
Il conteste le caractère averti le concernant faute de compétences particulières en matière de gestion .
Enfin , il conclut à la déchéance du droit aux intérêts faute d'information annuelle et la nécessité pour la banque de produire un décompte actualisé de la créance .
Dans ses dernières écritures déposées et notifiées le 2 juin 2020 et tenues pour intégralement reprises, l'intimée demande à la cour au visa des articles 1134 et 2288 du code civil de :
* confirmer le jugement entrepris en ce qu'il a condamné solidairement Messieurs [F] et [E] à payer à La Caisse d'épargne les sommes suivantes :
-24 655,37€ au titre du prêt de 31 800€ outre intérêts de retard au taux contractuel de 4,20% calculés sur la somme de 22 897,13€ à compter du 12 mai 2016 jusqu'au parfait paiement ,
-13 846,62€ au titre du prêt de 18 200€ outre intérêts de retard au taux contractuel de 4,20% sur la somme de 12 857,93€ à compter du 12 mai 2016 jusqu'à parfait paiement
et les a condamné à lui payer la somme de 1 000€ au titre de l'article 700 du code de procédure civile .
*sur l'appel incident de infirmer le jugement en ce qu'il a limité la créance au titre du prêt du 9 mars 2010 à la somme de 115 000€ ,
* statuer à nouveau et juger que les engagemnts de Messieurs [F] et [E] au titre du prêt de 460 000€ sont limités à la somme de 149 500€
En conséquence :
*condamner Monsieur [F] à payer à la Caisse d'épargne la somme de 149 500€ au titre du prêt de 46000 € augmentés des intérêts au taux légal à compter de la mise en demeure du 4 juillet 2016 et jusqu'à parfait paiement
*condamner Monsieur [E] à payer à la Caisse d'épargne la somme de 149 500€ au titre du prêt de 460 000 € augmentés des intérêts au taux légal à compter de la mise en demeure du 4 juillet 2016 et jusqu'à parfait paiement
condamner solidairement Messieurs [F] et [E] à lui payer la somme de 5 000€ au titre de l'article 700 du code de procédure civile et aux entiers dépens d'appel .
Elle s'oppose à la nullité de l'engagement de caution fondée sur l'absence d'information sur le fonctionnement de l'OSEO , au motif que l'acte de prêt est clair et explicite et que les cautions qui ne sont pas profanes, ont été parfaitement informées , que l'engagement des cautions représente 25% du crédit soit 50% en totalité ce qui est conforme au règlement de OSEO en tenant compte des intérêts et frais qui viennent en sus de la somme prêtée soit 34 500€ , et que de surcroît , la garantie OSEO ne bénéficie pas aux cautions qui sont tiers à cette garantie.
Elle soutient que les cautions ont reconnus avoir eu copie de l'acte de prêt de sorte que la demande pour indétermination de la cause du cautionnement doit être rejetée , que les prêts sont parfaitement causés et que la durée du cautionnement est mentionnée à l'acte .
Elle relève que la demande relative à la disproportion est prescrite car soulevée plus de 5 ans après l'engagement , que s'agissant de caution avertie , la banque n'avait pas de devoir de mise en garde .
De surcroît, elle fait valoir que l'engagement n'était pas disproportionné eu égard à la situation financière des parties , tant lors de l'engagement que lors de son appel .
Elle indique justifier de l'information annuelle .
Enfin , elle conclut à l'absence de nécessité d'actualiser sa créance en l'absence de fonds versé nonobstant la vente du fonds de commerce .
L'ordonnance de clôture initialement prévue le 26 mai 2020 n'est intervenue que le 9 juin 2020.
Conformément aux dispositions de l'article 8 de l'ordonnance 2020-304 du 25 mars 2020, l'affaire a été jugée selon la procédure sans audience .
Motifs :
Sur la nullité de l'engagement de caution du 9 mars 2010 :
La Caisse d'épargne a accordé un prêt de 460 000€ à la société Equilibre pour financer des travaux d'aménagement d'un local commercial , en faisant garantir son risque à hauteur de 40% par l'organisme public OSEO . La garantie de la société OSEO consiste à supporter après épuisement des recours contre le débiteur principal et la caution, la perte finale de l'établissement bancaire au prorata de sa part de risque . 'En cas de cumul du cautionnement et de la garantie OSEO, le créancier est tenu d'une obligation d'information envers l'emprunteur et la caution non avertie' ainsi que le retient la juris prudence .
Messieurs [F] et [E] soutiennent être restés dans l'ignorance des conditions de mise en oeuvre de la garantie Oséo, découvrant qu'il ne s'agissait que d'une garantie subsidiaire lors des poursuites engagées à leur encontre. Ils affirment qu'au moment de la souscription de leur cautionnement, aucune note d'information sur les conditions générales d'application de cette garantie ne leur a été communiquée par la Banque.
S'il est mentionné en page 4 de l'acte du 9 mars 2010 constatant l'octroi du crédit et les garanties apportées, à l'article 2 intitulé ' Garantie ' 'garantie par acte séparé OSEO Garantie à hauteur de 40% du prêt ...' la banque n'établit pas que cet acte séparé ait été porté à la connaissance des cautions . La carence de la banque dans l'information des cautions sur l'objet exact et le fonctionnement de la garantie OSEO est flagrante de par le caractère pour le moins succinct des mentions relatives aux garanties et l'absence de la convention en question en annexe du contrat de prêt. Cette faute peut être à l'origine d'un préjudice consistant dans la perte d'une chance de ne pas consentir l'engagement de caution.
Cependant, d'une part Monsieur [E] , conseiller fiscal âgée de 55 ans expérimenté dans le monde des affaires peut être qualifié de caution avertie et d'autre part , même si les cautions n'ont pas toutes les informations utiles sur les conditions d'intervention de l'organisme Oseo dont ils ont pu penser qu'il pouvait être actionné par le créancier concurremment avec les cautions et non à titre subsidiaire après recours à leur encontre, aucun élément du dossier ne permet de retenir qu'ils aient fait de l'existence même de la garantie OSEO une condition de leur engagement.
En effet , il n'est pas démontré que, s'ils avaient été informés plus amplement sur le fonctionnement de la garantie , ils auraient renoncé à se porter caution ou auraient limité leur engagement, alors qu'ils ont renoncé au bénéfice de discussion comme au bénéfice de division,
qu'ils avait limité leurs engagements à une somme déterminée et qu'ils expriment expressément dans l'acte de caution ne pas faire de l'existence d'autres cautions la condition déterminante de leur cautionnement et que les éventuelles autres garanties ne pouvaient avoir aucune incidence sur leur propre engagement .Ainsi , ils ne peuvent soutenir que les caractéristiques de la garantie OSEO auraient constituées une condition déterminante de leur engagement et ne sont pas davantage fondés à se prévaloir de ce chef de la nullité de leur engagement de caution pour dol ou erreur , faute de démontrer que leur consentement aurait été vicié de quelque manière que ce soit.
Ils font aussi valoir qu'en ne respectant pas les prescriptions du guide d'utilisation de la garantie OSEO qui limite les cautions à la moitié de l'encours du crédit , la banque leur aurait portés préjudice en les obligeant à souscrire un engagement supérieur à celui préconisé par Oséo. La banque, qui ne conteste pas l'application de cette dispositions , indique que le montant du crédit étant de 460 000€ , les cautions personnelles et solidaires sont effectivement limitées à 25% du montant du crédit soit 115 000€ mais que toutefois , elle peut solliciter, ainsi qu'elle le fait en l'espèce, une somme supplémentaire de 34 500€ au titre des frais , pénalités et accessoires divers.
Il convient toutefois d' observer que le cautionnement de chaque intimé ne peut porter que sur un montant maximum garanti de 115 000euros, correspondant bien, comme préconisé par Oséo, à 25% de l'encours du crédit au moment de sa souscription. La banque fait référence à un cautionnement d'une somme de 34 500€ en sus qui n'apparaît ni dans le cautionnement initial ni dans le décompte produit daté du 5 mai 2015 . Elle doit être déboutée d'une telle demande .
Il convient de confirmer la décision de première instance à ce titre .
Sur la nullité de l'engagement de caution du 27 avril 2010 :
Le 27 avril 2010, la Caisse d'épargne a consenti à la société Equilibre deux nouveaux prêts l'un de 31 800€ et un second de 18 200€ , le même jour Messieurs [K] [S] [F] et [W] [E] s'en sont portés cautions solidaires à hauteur de 65 000 euros par deux actes séparés.
Messieurs [F] et [E] arguent du caractère indéterminé de leur engagement qui n'était pas intégré dans l'acte de prêt . Toutefois , il convient de relever que les cautions ont approuvé l'acte de caution qui mentionne page 3 paragraphe 16 que ' les cautions reconnaissent expressément avoir reçue copie du présent acte et du contrat de crédit souscrit par le débiteur principal' de sorte qu'elles ne peuvent se prévaloir d'une absence d'information sur les caractéristiques du prêt qui sont de surcroît formulées à nouveau sur la première page de l'acte de caution pour les principales .
Contrairement aux allégations des cautions , l'acte de caution mentionne en page 1 que le prêt est souscrit pour financer des travaux supplémentaires dans le cadre de l'agrandissement du restaurant 'Aphrodite ' propriété de la société Equilibre et des frais de garantie OSEO. La cause objectif d'un contrat de cautionnement est l'obtention par le débiteur d'un crédit , que tel est le cas en l'espèce , il n'est nullement contesté que les fonds ont bien été délivrés à la société Equilibre.
Les mentions manuscrites rédigées par chacune des cautions sur son acte indique une durée de 171 mois . Le fait que l'acte de caution ne soit pas intégré dans l'acte de prêt ne constitue nullement un motif de nullité .
Il convient de confirmer le jugement de première instance à ce titre .
Sur la prescription :
La banque oppose aux demandes de décharge des engagements de cautionnement souscrits, au motif qu'ils seraient disproportionnés et à l'action en responsabilité pour manquement à son obligation de mise en garde , la prescription de ces demandes .
Selon elle , les consorts [F] et [E] ne pouvaient opposer l'exception de disproportion que dans un délai de 5 ans à compter de leur engagement puisque c'est à compter de cette date qu'ils connaissaient la disproportion prétendue, les actes de cautionnements datant respectivement du 9 mars 2010 et du 27 avril 2010, l'exception de disproportion devait être formulée au plus tard le 9 mars 2015 et le 27 avril 2015 et la demande formulée à travers les conclusions déposées à l'audience du 11 octobre 2017 serait prescrite .
Selon un raisonnement similaire , elle soutient que l'action en responsabilité pour manquement à l'obligation de mise en garde est également prescrite .
D'une part , il convient de relever que les prétentions, qui tentent seulement au rejet d'une demande formée contre une partie, constitue un simple moyen de défense au fond, au sens de l'article 71 du code de procédure civile, sur lequel la prescription est sans incidence . Ainsi, le moyen tiré de l'article L.341-4 devenu L.332-1 du code de la consommation, selon lequel l'engagement de caution d'une personne physique manifestement disproportionné à ses biens et revenus se trouve privé d'effet à l'égard du créancier professionnel est une défense au fond qui échappe à la prescription .
D'autre part en application de l'article L 110-4 du code de commerce, l'action en responsabilité exercée par l'emprunteur ou la caution à l'encontre de la banque pour manquement de cette dernière à son obligation de mise en garde est soumise à la prescription quinquennale depuis le 19 juin 2008. Le point de départ du délai de la prescription de cette action est fixé au jour où la caution a su, par la mise en demeure qui lui était adressée, que les obligations résultant de son engagement allaient être mises à exécution du fait de la défaillance du débiteur principal.
Les consorts [F] et [E] n'ont été mis en demeure que par lettre recommandée avec avis de réception du 4 juillet 2016 . De sorte que la demande reconventionnelle qu'ils ont formée par conclusions pour l'audience du 11 octobre 2017 , est recevable, le délai de prescription n'étant pas expiré .
Le jugement doit être infirmé en ce qu'il a déclaré prescrite les demandes des cautions .
Sur le devoir de mise en garde
les consorts [F] [E] font valoir que la banque ne les a pas mis en garde contre un cautionnement qui risquait d'entraîner une situation de surendettement, en raison de leur situation patrimoniale, que si l'établissement bancaire avait rempli son devoir, ils n'auraient jamais contracté et qu'ils sont fondés à demander à titre de dommages et intérêt une somme équivalent au montant de la créance sollicitée par la banque .
La banque argue du caractère averti des caution , l'exonérant de son devoir de mise en garde .
Le banquier dispensateur de crédit n'est tenu, au moment de la souscription du contrat litigieux, d'un devoir, non d'ailleurs de conseil, mais de mise en garde, qu'à la double condition que son cocontractant soit une personne non avertie et qu'il existe un risque d'endettement né de l'octroi du prêt.
Il appartient à la Caisse d'épargne, à qui incombe la charge de la preuve du caractère averti de la caution, de démontrer, par des critères tels que l'étendue et la diversification du patrimoine, ou la nature et le niveau d'études, ou encore l'expérience dans l'exercice d'une activité commerciale que les cautions disposaient d'une compétence qui lui permettait d'appréhender les risques, pour le débiteur principal, comme pour elle-même, de l'opération financière garantie.
En l'espèce , Monsieur [F] , âgé de 56 ans lors de la souscription des engagements , possède des parts à hauteur de 50% et 60% voir 100% dans quatre SCI dont le patrimoine est constitué de locaux professionnels , commerciaux et d'habitation et de parkings donnés en location à l'exception d'une villa servant de domicile conjugal et exerçait les fonctions de gérant de la société 'Equilibre' depuis le 24 mai 2005 soit 5 ans avant l'engagement de caution.
Il était donc un dirigeant expérimenté connaissant bien la société 'Equilibre 'ainsi que ses facultés de remboursement et capable de mesurer les risques attachés aux emprunts litigieux, opérations dépourvues de tout élément de complexité.
Monsieur [E], âgé de 55 ans, exerce la profession de conseiller fiscal et possède des participation dans quatre SCI dont le patrimoine est constitué de locaux professionnels , d'habitation et commerciaux et de parkings donnés en location . Il disposait de connaissance en matière économique lui permettant d'apprécier la pertinence du crédit, comme la capacité d'une entreprise à générer des revenus nécessaires à son remboursement .
Ils possèdent tous deux les capacités intellectuelles et les compétences nécessaires pour leur permettre d'appréhender le contenu, la portée et les risques liés à l'opération cautionnée consistant à se porter garant du remboursement d'un prêt, opération dépourvue de tout caractère de complexité au regard de leurs aptitudes et leur expérience des affaires .
Eu égard à leur caractère averti , la banque est exonéré de son devoir de mise en garde, sa responsabilité ne peut donc être recherchée de ce chef et leur demande au titre d'un manquement de la banque à son obligation de mise en garde doit être rejetée .
Sur le caractère disproportionné de l'engagement:
En vertu de l'ancien article L. 341-4 du code de la consommation applicable au litige, devenu L. 332-1 et L. 343-3 du code de la consommation, un créancier professionnel ne peut se prévaloir d'un contrat de cautionnement conclu par une personne physique dont l'engagement était, lors de sa conclusion, manifestement disproportionné à ses biens et revenus, à moins que le patrimoine de la caution, au moment où celle-ci est appelée, ne lui permette de faire face à son obligation ;
Le caractère manifestement disproportionné du cautionnement s'apprécie au regard, d'une part, de l'ensemble des engagements souscrits par la caution et, d'autre part, de ses biens et revenus, sans tenir compte des revenus escomptés de l'opération garantie ;
Il incombe à la caution de rapporter la preuve de la disproportion qu'elle allègue, et au créancier qui entend se prévaloir d'un contrat de cautionnement manifestement disproportionné, d'établir qu'au moment où il appelle la caution, le patrimoine de celle-ci lui permet de faire face à son obligation ;
Au sens de ces dispositions, qui bénéficient tant aux cautions profanes qu'aux cautions averties, la disproportion s'apprécie à la date de conclusion du contrat de cautionnement au regard du montant de l'engagement ainsi souscrit et des biens et revenus de la caution, en prenant en considération son endettement global, y compris celui résultant d'autres engagements de caution, dès lors que le créancier avait ou pouvait avoir connaissance de cet endettement.
C'est à la caution qui se prévaut des dispositions de l'article L. 332-1 de rapporter la preuve de la disproportion qu'elle invoque.
Le code de la consommation n'impose pas au créancier professionnel de vérifier la situation financière de la caution lors de son engagement, mais s'il le fait, il est en droit de se fier aux renseignements communiqués par la caution, sauf existence d'anomalies apparentes
Une fiche patrimoniale n'étant pas obligatoire, l'existence d'un tel document certifié exact par son signataire permet simplement à la banque, sauf anomalies apparentes, de s'y fier et la dispense de vérifier l'exactitude des déclarations de son client, lequel ne peut ensuite se prévaloir de leur fausseté pour échapper à ses obligations.
En l'espèce, les consorts [F] et [E] se sont chacun portés cautions solidaires des engagements souscrits par la société Héritage le 9 mars et le 27 avril 2010 dans la limite d'une somme totale de 180 000€.
Pour Monsieur [E] :
La fiche de renseignement individuel signé par Monsieur [E] renvoie à un tableau récapitulatif qui fait état de sa participation dans quatre SCI ( Fiduciel, JCG, Miger et Poupée) à hauteur de 50% pour les 2 premières , puis de 40 % et enfin de 100% pour celle détenant son domicile , le patrimoine immobilier détenu par ces SCI s'élevant à 4 080 000€ est affecté de crédit immobilier avec un reste à devoir de 880 858€ .
Concernant la valeur des parts de SCI il est exact qu'elle ne peut être déterminée au regard de la valeur des biens immobiliers acquis par les dites sociétés, sans tenir compte du passif de ces sociétés, constitué des prêts qu'elles ont contractés pour financer l'acquisition des immeubles.
Il est acquis et non contesté que Monsieur [E], ainsi qu'il le soutient avec raison, ne possède pas de droits immobiliers mais des droits mobiliers consistant en parts sociales dans les SCI, la valeur de ces parts étant égale à la valeur de l' actif réel de la société diminué de son passif et la valeur d'une part de SCI étant égale au résultat de l'opération précédente divisé par le nombre de part .
Sur la valeur patrimoniale des SCI, les montants déclarés correspondent à la valeur des immeubles détenus par les SCI, diminuée des sommes restant à devoir au titre du prêt , ce dont il se déduit qu'en considération du nombre des parts qu'il détient dans les quatre SCI en cause, son patrimoine mobilier doit être évalué à 217 500€+138 000€+487 874€+1 512 393€=2 355 767€.
Monsieur [E] fait état de ses engagements de caution pour l'ensemble des crédits souscrits par les SCI dans lesquelles il détient des parts . Toutefois , faute d'information données lors de la souscription des engagements de mars et avril 2010, la Caisse d'épargne ignorait les garanties souscrites par Monsieur [E] à l'exception de celle souscrites en septembre 2006 et mai 2004 auprès d'elle même pour les SCI Miger et Poupée pour un montant total de 422 500€ ,250 000€ et 188 500€ soit un total de 861 000€ .
Monsieur [E] n'a nullement mentionné l'existence d'autres cautionnement sur la fiche de renseignement , de sorte que ces éléments ne doivent pas être pris en considération dans l'appréciation de la disproportion manifeste de son engagement.
En effet , s'agissant des engagements antérieurement conclus, il convient de rappeler que, tenu d'un devoir de loyauté à l'égard du créancier, Monsieur [E] ne peut se prévaloir d'engagements qu'il a omis de déclarer à la banque lorsqu'il a lui-même valorisé son patrimoine dans la fiche de renseignements, sauf à ce que ces engagements n'aient pu être ignorés par la banque. Le silence de Monsieur [E] lui interdit d'opposer les engagements ne figurant pas sur la fiche de renseignement si rien n'établit que la Caisse d'épargne aurait pu en avoir connaissance.
En revanche les cautionnements, que la Caisse d'épargne ne pouvait ignorer puisqu'ils avaient été pris à son profit, lui sont opposables pour l'appréciation du caractère éventuellement disproportionné des cautionnements litigieux
Il déclare être divorcé et ne fait état d'aucune charge autre que celle afférentes au remboursement des crédits sus visés et indique percevoir un revenu annuel de 75 671€ .
Il convient de rappeler que, sauf anomalies apparentes, le créancier peut se fier à ce qui est inscrit par la caution sur la fiche de renseignements. Cette fiche de renseignements telle qu'approuvée par Monsieur [E] ne comportait aucune anomalie de nature à alerter la banque sur la fausseté de la déclaration . De sorte que la production à la procédure par Monsieur [E] de son avis d'imposition pour l'année 2010 , outre qu'il est postérieur au cautionnement de mars 2010 qui s'appuyait nécessairement sur les revenus obtenus pendant l'année 2009 , est sans incidence sur le présent litige , la banque étant fondé à se limiter aux éléments communiqués par l'intéressé lors de l'engagement de caution , sans avoir à en vérifier la véracité .
Il résulte de ce qui précède qu'eu égard à des revenus annuels de 75 671euros, un patrimoine mobilier net de 2 355 767€ et un endettement , en ne retenant que les cautionnements et prêts antérieurs opposables à la la Caisse d'épargne pour apprécier la disproportion alléguée, à hauteur de 861 000€, la preuve, qui lui incombe, que les engagements de cautions à hauteur de 4 820,89€ par mois soit 180 000€ en totalité de Monsieur [E] aient été manifestement disproportionnés à ses biens et revenus et patrimoine n'est pas rapportée .
Monsieur [F] :
De son côté, Monsieur [F] a déclaré sur la fiche de renseignements percevoir un revenu annuel de 57 155€ , posséder un CEL d'un montant de 3400€ et être marié sous la régime de la séparation de bien . Aucune autre information n'a été consignée, notamment à la rubrique 'détail des emprunts contractés' est restée vierge. Il produit son avis d'imposition 2009 portant sur les revenus de 2008 faisant état d'un revenu annuel de 57 155€ soit l'exact montant déclaré par l'intéressé sur la fiche de renseignement et de 5 200€ au titre de la pension alimentaire versée à un enfant majeur et 3 900€ au titre d'un emploi à domicile . Toutefois ces sommes ouvrent droit à une déduction fiscale .Il a réglé en 2008 la somme de 1 088€ au titre de la taxe d'habitation et 3 305€ au titre des impôts sur le revenu en 2008 .
Monsieur [F], qui a certifié les informations fournies dans la fiche de renseignements comme exactes et sincères, ne peut aujourd'hui se prévaloir, pour établir le caractère disproportionné de son engagement de caution à l'égard de la Caisse d'épargne, de précédents engagements de caution donnés au crédit mutuel et à la banque CIC .
Il résulte de la lecture attentive de la fiche de renseignement établie lors de l'engagement de caution que la mention manuscrite ' voir tableau récapitulatif ' apposée dans la rubrique ' patrimoine immobilier ' n'a pas été écrite de la main de Monsieur [F] puisqu'elle présente des discordances importantes avec la mention manuscrite ' certifiée sincère et exacte ' dont ce dernier reconnaît être l'auteur . Cependant , en apposant cette mention au bas du document, il en a approuvé le contenu et de surcroît , il ne conteste pas la réalité de ce patrimoine mobilier dans ses conclusions puisqu'il en critique la valorisation en objectant notamment que l'une des SCI possède son domicile conjugal .
Il résulte des éléments du dossier que Monsieur [F] possède des parts sociales dans quatre SCI à 50% dans la SCI Fiduciel , 50% dans la SCI JCG, à 60% dans la SCI Fleurie , son épouse détenant les 40% restant et à 100% dans la SCI Emisand . En tenant compte de la valeur vénale des biens immobiliers detenus par ces SCI , du capital restant dû et du nombre de parts sociales, le capital mobilier de Monsieur [F] s'élève à 217 500€+138000+59000 +348000=762 500€.
En ne retenant aucun des cautionnements antérieurs qui n'ont pas été déclarés au créancier et lui sont inopposables, il apparaît que :
-le patrimoine mobilier de Monsieur [F] au jour de la conclusion du cautionnement pouvait être évalué à la somme de 762 500 €
- ses mensualités à payer pouvant être évaluées à 4 820,89€,
Compte tenu de ces éléments, étant rappelé que les revenus mensuels de Monsieur [F], étaient de l'ordre de 4 763€ €, et ses charges mensuelles justifiées, à savoir l'impôt sur le revenu, la taxe d'habitation, la pension alimentaire et le salaire de l'aide à domicile, de 1 124,42€ il n'apparaît pas que le cautionnement litigieux était manifestement disproportionné à ses revenus, charges et patrimoine au jour de sa souscription.
Il convient de rejeter la demande des appelants à ce titre .
Sur le soutien abusif à la société Equilibre :
Messieurs [E] et [F] sollicitent la condamnation de la banque sur le fondement de l'article 1104 du code civil , au motif que son concours apporté à la société Equilibre serait abusif eu égard à sa situation financière .
Il convient de relever que la Caisse d'Epargne a accordé trois prêts à la société Equilibre en mars et avril 2010 pour un montant total de 510 000€ destiné à financier des travaux de refection de l'établissment et que la procédure de redressement judiciaire n'a été prononcé par le tribunal de commerce de Nice que le 11 juin 2015 soit plus de 5 ans après l'octroi des prêts. L'obtention de ces deux prêts étaient sans lien avec la situation de la société Equilibre en 2015.
De surcroît, Monsieur [F] en sa qualité de gérant de la société Equilibre et Monsieur [E] en sa qualité de conseiller fiscal , avaient les capacités pour mesurer les risques pris en s'engageant .
Il convient de les débouter de leur demande à ce titre .
Sur l'actualisation de la créance :
La banque produit le courrier de Maître [H] du 2 décembre 2019 indiquant à la Caisse d'épargne qu'elle ne pouvait recevoir aucun réglement dans le cadre de la répartition à intervenir suite à la vente du fonds de commerce , sa créance étant primée par des créances superprivilègiées de salaire et les créance fiscales .
Sur la demande de déchéance des intérêts et le montant des créances dues au titre des engagements de caution
Les consorts [F] et [E] font valoir que la Caisse d'épargne ne justifie pas avoir satisfait aux obligations de l'article L.313-22 du code monétaire et financier alors qu'ils rappellent que l'obligation d'information persiste jusqu'à extinction de la dette et demandent que la banque soit déchue de tout droit aux intérêts conventionnels au titre de leurs engagements de caution.
En réponse, la Caisse d'épargne affirme verser aux débats les pièces démontrant le respect de l'obligation d'information envers eux pour les années visées .
L'article L313-22 du code monétaire et financier dans sa version en vigueur au moment du contrat dispose que les établissements de crédit ayant accordé un concours financier à une entreprise, sous la condition du cautionnement par une personne physique ou une personne morale, sont tenus au plus tard avant le 31 mars de chaque année de faire connaître à la caution le montant du principal et des intérêts, commissions, frais et accessoires restant à courir au 31 décembre de l'année précédente au titre de l'obligation bénéficiant de la caution, ainsi que le terme de cet engagement.
Le défaut d'accomplissement de la formalité prévue à l'alinéa précédent emporte, dans les rapports entre la caution et l'établissement tenu à cette formalité, déchéance des intérêts échus depuis la précédente information jusqu'à la date de communication de la nouvelle information. Les paiements effectués par le débiteur principal sont réputés, dans les rapports entre la caution et l'établissement, affectés prioritairement au règlement du principal de la dette .
La banque, tenue à cette obligation jusqu'à extinction de la dette, doit rapporter la double preuve de l'envoi et du contenu de l'information annuelle
Elle produit à cette fin les listes annuelles des lettres d'informations adressées aux cautions de 2011 à 2015 sur lesquelles figurent le nom de Messieurs [E] et [F] , ainsi que cinq constats d'huissier réalisés entre 2011 et 2015 , un par année , attestant de la réalité de l'envoi de lettres recommandées et de l'exactitude de leur contenue à des cautions tirées au sort par huissier .
La méthode par sondage adoptée par l'huissier opérant n'est pas de nature à lui ôter toute force probante, nonobstant le fait que ni le nom de Monsieur [F] ni celui de Monsieur [E] n'ait été désigné par le hasard . En conséquence, la banque ne doit pas être déchue des intérêts échus et pénalités de retard .
Les appelants, qui succombent, doivent être condamnés aux dépens sans qu'il soit fait application de l'article 700 du code de procédure civile.
PAR CES MOTIFS
la cour, statuant publiquement par arrêt contradictoire :
INFIRME le jugement entrepris en ce qu'il a déclaré prescrite l'action de Messieurs [F] [K] [S] et [E] [W] ,
DIT que la prescription n'est pas encourue ,
DIT que l'engagement de caution de Messieurs [F] et [E] est valide et non manifestement disproportionné à leurs biens et revenus,
DIT que la Caisse d'épargne n'a pas manqué à son devoir de mise en garde de la caution, eu égard à leur caractère averti ,
CONFIRME le jugement entrepris pour le surplus ,
DEBOUTE la Caisse d'épargne de sa demande fondée sur l'article 700 du code de procédure civile,
CONDAMNE les appelants aux entiers dépens distraits au profit des avocats de la cause conformément à l'article 699 du code de procédure civile.
LE GREFFIERLE PRÉSIDENT