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08/07/2020 | FRANCE | N°17/19292

France | France, Cour d'appel d'Aix-en-Provence, Chambre 2-4, 08 juillet 2020, 17/19292


COUR D'APPEL D'AIX-EN-PROVENCE

Chambre 2-4



ARRÊT AU FOND

DU 08 JUILLET 2020

A-R

N° 2020/ 131













Rôle N° RG 17/19292 - N° Portalis DBVB-V-B7B-BBMC2







[M] [S]





C/



[C] [Z]





















Copie exécutoire délivrée

le :

à :

Maître Houria BOULFIZA-CHABOUB

Maître Marie-Paule VERDIER











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Décision déférée à la Cour :



Jugement du Tribunal de Grande Instance de TARASCON en date du 08 Septembre 2017 enregistrée au répertoire général sous le n° 12/01520.





APPELANT



Monsieur [M] [S]

né le [Date naissance 2] 1939 à [Localité 8]

de nationalité Française, demeurant [Adresse 3] - [Localité 6]

Rep...

COUR D'APPEL D'AIX-EN-PROVENCE

Chambre 2-4

ARRÊT AU FOND

DU 08 JUILLET 2020

A-R

N° 2020/ 131

Rôle N° RG 17/19292 - N° Portalis DBVB-V-B7B-BBMC2

[M] [S]

C/

[C] [Z]

Copie exécutoire délivrée

le :

à :

Maître Houria BOULFIZA-CHABOUB

Maître Marie-Paule VERDIER

Décision déférée à la Cour :

Jugement du Tribunal de Grande Instance de TARASCON en date du 08 Septembre 2017 enregistrée au répertoire général sous le n° 12/01520.

APPELANT

Monsieur [M] [S]

né le [Date naissance 2] 1939 à [Localité 8]

de nationalité Française, demeurant [Adresse 3] - [Localité 6]

Représenté par Maître Houria BOULFIZA-CHABOUB, avocat au barreau d'AIX-EN-PROVENCE

INTIMEE

Madame [C] [Z] divorcée [S]

(bénéficie d'une aide juridictionnelle Totale numéro 2017/013245 du 08/12/2017 accordée par le bureau d'aide juridictionnelle de AIX-EN-PROVENCE)

née le [Date naissance 4] 1943 à [Localité 8], demeurant [Adresse 5] - [Localité 1]

Représentée par Maître Marie-Paule VERDIER, avocat au barreau de TARASCON

PARTIE(S) INTERVENANTE(S)

*-*-*-*-*

COMPOSITION DE LA COUR

Statuant selon la procédure sans audience en application des dispositions de l'article 8 de l'ordonnance n°2020-304 du 25 mars 2020, au visa de l'accord des parties.

La Cour lors du délibéré était composée de :

M. Jean-Baptiste COLOMBANI, Premier président de chambre

Mme Annie RENOU, Conseiller

Mme Annaick LE GOFF, Conseiller

qui en ont délibéré.

Les parties ont été avisées que le prononcé de la décision aurait lieu par mise à disposition au greffe le 08 Juillet 2020.

ARRÊT

Contradictoire,

Prononcé par mise à disposition au greffe le 08 Juillet 2020,

Signé par M. Jean-Baptiste COLOMBANI, Premier président de chambre et Madame Céline LITTERI, greffier auquel la minute de la décision a été remise par le magistrat signataire.

***

Monsieur [M] [S] et madame [C] [Z] ont contracté mariage en 1960 par devant l'officier d'état-civil de [Localité 8] (Algérie) sans contrat préalable.

Ils ont eu sept enfants.

Par jugement du 7 avril 1993 , le tribunal de grande instance de Tarascon a prononcé leur divorce.

Par arrêt du 25 avril 1995 , la cour d'appel d'Aix en Provence a infirmé ce jugement et débouté les époux de la demande en divorce.

Suivant requête en divorce du 4 septembre 2002, une ordonnance de non conciliation a été rendue le 4 mars 2003, qui a accordé la jouissance du domicile conjugal sis [Adresse 9] à [Localité 12] à l'épouse.

Par jugement du 19 septembre 2008, confirmé par arrêt du 26 novembre 2009, le divorce des époux a été prononcé.

Monsieur [S] a été condamné à verser à madame [Z] une prestation compensatoire de 75 000 euros.

Monsieur et madame [S] ont vendu le 20 février 2008 le domicile conjugal pour la somme de 150 000 euros consignée entre les mains du notaire après paiement de différentes sommes et de la prestation compensatoire.

Maître [F], notaire commis pour procéder à la liquidation du régime matrimonial des époux , a dressé le 8 novembre 2010 un procès-verbal de difficultés.

Par requête en date du 19 juillet 2012, monsieur [S] a saisi le juge commis qui a constaté selon procès-verbal de comparution en date du 20 septembre 2012 qu'aucune conciliation ne s'avérait possible et a renvoyé les parties devant le juge aux affaires familiales du tribunal de grande instance de Tarascon.

Par jugement du 4 septembre 2014 , cette juridiction a ordonné une expertise judiciaire afin de déterminer l'origine des fonds ayant servi à l'acquisition des immeubles en cours de mariage.

L'expert a déposé son rapport le 30 mai 2016.

Par jugement contradictoire du 8 septembre 2017, le juge aux affaires familiales du tribunal de Tarascon a :

- dit que le régime matrimonial applicable à l'union de monsieur [M] [S] et de madame [C] [Z] est la séparation de biens ;

- renvoyé les parties devant maître [F], notaire à [Localité 11], afin de poursuivre les opérations de liquidation partage et d'établir l'acte liquidatif en intégrant les éléments suivants :

Sur les créances de monsieur [M] et de madame [Z] envers l'indivision :

- dit que monsieur [M] [S] est redevable d'une indemnité d'occupation envers l'indivision entre la date de l'ordonnance de non conciliation du 4 mars 2003 et le 20 février 2008 ;

- dit que monsieur [M] [S] et madame [C] [Z] devront s'entendre sur le montant de l'indemnité mais qu'elle ne saurait cependant être moindre que la somme de 625 euros correspondant à un rendement locatif de 5 % par an;

- dit que madame [C] [Z] est redevable du montant envers l'indivision de sa part correspondant à sa taxe foncière entre la date de l'ordonnance de non conciliation du 4 mars 2003 et le 20 février 2008 ;

Sur les créances de l'indivision envers madame [Z] et monsieur [S]

- dit que l'indivision est redevable d'une créance envers monsieur [M] [S] correspondant au montant des taxes foncières réglées entre le 4 mars 2003 et le 20 février 2008 au-delà de sa quaote-part ;

- dit que l'indivision est redevable d'une créance envers monsieur [M] [S] de la somme de 63 915 euros correspondant au financement du domicile conjugal sis [Adresse 9] à [Localité 7] au-delà de sa quote-part ;

Sur les créances entre monsieur [M] [S] et madame [C] [Z]

- dit que monsieur [M] [S] est redevable envers madame [C] [Z] d'une créance au titre des intérêts perçus entre 1993 et 2017 pour la somme de 25 557,91 euros, somme à parfaire à la date de jouissance divise ;

- dit que monsieur [S] est redevable envers madame [Z] d'une créance de 58 467,25 euros (383 520 Frs) au titre du financement de l'immeuble de [Localité 12] ;

- débouté madame [C] [Z] de sa demande au titre d'une créance envers monsieur [S] s'agissant d'un prêt pour le père de ce dernier ;

- dit que le juge aux affaires familiales n'est pas compétent pour statuer sur le calcul des intérêts de retard du paiement de la prestation compensatoire ;

- ordonné l'exécution provisoire de la décision ;

- commis Aude VENTURINI, juge chargé de la liquidation des régimes matrimoniaux de ce siège comme juge commis pour surveiller les opérations et faire rapport en cas de difficultés ;

- dit qu'en cas d'empêchement du notaire ou du juge commis, il sera pourvu à leur remplacement sur simple requête ;

- condamné monsieur [M] [S] et madame [C] [Z] à régler les dépens par moitié.

Le premier juge a considéré que le régime matrimonial applicable était celui de la séparation de biens.

Il a analysé les actes d'acquisition successifs entre les parties , savoir :

1°) l'acquisition les 7 et 11 février 1969 des parcelles sises [Localité 10] pour la somme de 240 000 Frs :

Le juge a considéré que ce bien était indivis, madame [Z], ne savant pas signer, étant représentée par un notaire.

Il a jugé que monsieur [S] échouait à rapporter la preuve qu'il avait fait des apports personnels de 60 000 Frs et de 30 000 Frs , le bien ayant été financé grâce à ces apports et à un prêt au crédit agricole de 150 000 Frs ; que monsieur [S] ne produisait la preuve d'un paiement que pour les frais d'acte de 5 000 Frs correspondant au prêt du [O] [W] ;

Il a indiqué que les parcelles ont été vendues entre 1974 et 1979 pour un montant total de 957 525 Frs ; qu'avec le financement des frais d'acte de 5 000 euros, monsieur a pris en charge 52 % du prix du bien à reporter sur le prix de vente moins les dettes ce qui représentait 669 525 Frs ; que le profit subsistant était de 419 091 Frs ; que la part revenant à monsieur [S] était de 343 144,32 Frs et celle de madame [Z] de 326 380,68 Frs.

Le premier juge a conservé cette proportion (52 % pour monsieur , 48 % pour madame), pour dire que madame détenait une créance à l'égard de monsieur de 383 520 Frs pour l'achat de 1982 qu'il a considéré comme propre.

Sur le logement conjugal acquis en 1989 et revendu en 2008 , sis [Adresse 9], le juge a retenu un financement de 73 000 euros par des fonds personnels non identifiés, de 226 160 Frs provenant des aides perçues par madame , et de 213 840 Frs à l'aide d'un prêt au crédit foncier.

Il a considéré que les 226 160 Frs étaient des fonds propres à madame ; qu'après l'ONC, monsieur a payé seul le prêt au vu du plan de surendettement qui fait état d'un solde en 2001 de 143 687,97 + 68740,11 Frs d'impayés ;

Il prend pour base un investissement de monsieur de 474 093,08 euros, soit 96,61 % de l'immeuble, pour aboutir à une créance à l'égard de l'indivision de 63 915 euros.

Le juge a retenu une indemnité d'occupation due par monsieur pour l'occupation du domicile conjugal après l'ONC du 4 mars 2003 au 20 février 2005 à 5 % de la valeur du bien soit 625 euros.

Il a retenu le principe du paiement des taxes fncières à hauteur de sa part par madame.

Il a retenu aussi le fait que madame devait les intérêts de la somme de 1 350 000 Frs afférente à la vente du bien acheté en 1982 placée dans l'intérêt de monsieur pour la période de 1993 à 2017 à hauteur de 25 557,91 euros.

Par dernières conclusions notifiées par RPVA le 4 mars 2020, monsieur [M] [S] demande à la cour :

- de dire que son appel est recevable et fondé ;

- de réformer le jugement déféré en toutes ses dispositions ;

- de constater qu'il est seul propriétaire des biens immobiliers acquis et financés par ce dernier ;

- de débouter madame [Z] de l'ensemble de ses demandes ;

- de constater que l'actif net de l'état liquidatif s'élève à 150 423,65 euros ;

- de constater que madame [Z] a perçu sur cette somme 75 000 euros de prestation compensatoire tenant compte de l'absence de patrimoine personnel ;

- en conséquence :

* de constater que les sommes restante consignées entre les mains de maître [F] doivent revenir intégralement à monsieur [S] ;

* d'ordonner que les sommes consignées entre les mains de maître [F] soient intégralement versées à monsieur [S] ;

- de condamner madame [Z] à payer à monsieur [S] la somme de 3 600 euros sur le fondement de l'article 700 du code de procédure civile ainsi qu'aux entiers dépens.

Par dernières conclusions notifiées par RPVA le 8 avril 2020 , madame [C] [Z] demande à la cour :

- de confirmer le jugement déféré ;

- de débouter monsieur [S] de l'ensemble de ses demandes ;

- en cause d'appel, de condamner monsieur [S] à lui payer la somme de 2 000 euros sur le fondement de l'article 700 du code de procédure civile et les dépens.

La cour se rapporte aux conclusions des parties pour un plus ample exposé de leurs prétentions et de leurs moyens.

Les deux parties ont accepté le principe de la procédure sans audience par mail adressé à la cour à la suite de l'avis de celle-ci du 13 mai 2020.

L'ordonnance de clôture a été fixée au 27 mai 2020.

MOTIFS DE LA DECISION

Attendu que monsieur [M] [S] conteste avoir été marié avec madame [Z] ;

Que toutefois, il ne reprend pas cet argument dans le dispositif de ses conclusions qui seul saisit la cour ;

Qu'il sera noté de manière superfétatoire que , devant le juge du divorce, il n'a pas contesté l'existence de son mariage ;

Attendu que les parties ne contestent pas que la loi applicable à leur régime matrimonial soit la séparation de biens de droit musulman ;

Qu' effectivement, leur mariage ayant eu lieu avant la convention de La Haye du 14 mars 1978, c'est le principe de l'autonomie de la volonté qui prévaut ; que c'est donc à bon droit que le tribunal a dit que le régime applicable à l'union de monsieur [S] et de madame [Z] est la séparation de biens ;

Attendu que la cour rappellera toutefois que, si la présente décision détermine l'existence de biens indivis , ce que conteste monsieur [S], ces biens ayant été acquis en France , c'est la loi française qui s'appliquera les concernant ;

1° Sur les parcelles acquises les 7 et 11 février 1969 sise [Localité 10]

Attendu que , curieusement , aucune des parties ne produit l'acte d'achat de ce bien , qui a aussi manifestement disparu des annexes du rapport d'expertise , de même que les trois actes de vente afférents aux parcelles de ce bien ;

Que monsieur [S] conteste le caractère indivis de cet immeuble, constitué de plusieurs parcelles ;

Attendu toutefois que l'expert, qui a eu la chance de voir ces actes, a relaté, dans son rapport, l'existence de la clause suivante figurant dans l'acte d'achat : 'et lecture faite, les parties ont signé avec le notaire, à l'exception de madame [S] qui, requise de signer, a déclaré ne savoir le faire, en conséquence, le présent acte sera soumis à la signature d'un second notaire. Signé : [Y] [L] [B] [I] [S] [H] [P] et [K] [T], ces deux derniers Notaires' ;

Attendu que les constatations de l'expert permettent de dire, en droit, que madame [S] n'a pas pu signé l'acte, mais qu'elle était représentée, pour ce faire, par un notaire ;

Que, compte tenu de la stricte séparation de biens prévue par leur régime matrimonial, la signature du notaire pour madame [Z] ne peut s'analyser en un simple consentement de l'achat fait par son époux , celui-ci n'en ayant pas besoin pour s'engager seul, mais signifier nécessairement qu'elle était co-acquéreur, et à hauteur de moitié, aucune répartition précise n'étant prévue dans l'acte ;

Que la cour en déduira le caractère indivis du bien à parts égales et l'application de la loi française le concernant ;

Attendu que ce bien, acquis pour la somme de 240 000 Frs , a été financé de la manière suivante :

- à concurrence de 60 000 Frs provenant des deniers personnels des époux ;

- à concurrence de 150 000 Frs au titre d'un prêt consenti par la caisse régionale de crédit agricole sur une durée de 30 ans ;

- paiement du solde de 30 000 Frs le 31 mars 1969 ;

Attendu que monsieur [S] soutient qu'il a seul réglé ce bien ;

Attendu, sur la somme de 60 000 Frs, qu'il prétend l'avoir payée grâce à un prêt de son père ; que l'expert a indiqué qu'il n'en justifiait pas ; que , devant la cour , il produit un acte de partage concernant la succession de son père [E] [S], mais qui , survenu en 2012, ne peut montrer que l'achat du bien indivis survenu en 1969 avait été financé à hauteur de 60 000 Frs par monsieur [E] [S] ; qu'il produit aussi une attestation de son frère [G] [S] qui indique que 'son père , [E] [S], a prêté de l'argent à son frère', et une attestation de la femme du précédent, madame [A] [S], qui indique que son 'beau-père , [E] [S], a prêté de l'argent à son fils [S] [M] afin d'acquérir le bien à Quartier Cabane' ;

Attendu que ces attestations sont imprécises sur la date et le montant de la somme prêtée, de sorte qu'elles sont insuffisantes pour permettre à monsieur [M] [S] de démontrer qu'il a financé cette somme de 60 000 Frs par des deniers personnels ;

Que, concernant la somme de 30 000 Frs, il prétend aussi l'avoir financée seul grâce à un prêt de 22 500 Frs sur lequel il a tiré un chèque de 15 000 Frs ; qu'il ne produit pas les reçus sur lesquels il appuie son argumentation , lesquels ne sont pas joints davantage au rapport de l'expert bien qu'il y fasse allusion ; que ce dernier indique par ailleurs qu'il n'est pas possible de savoir si la somme totale de 5 434 euros correspondant à ces reçus et tirée sur un compte crédit agricole l'a été sur un compte ouvert au nom de monsieur seulement ou de monsieur ou madame ;

Qu'il en résulte que, l'origine des fonds n'étant pas connue, il n'est pas possible de dire qu'ils étaient un apport personnel de monsieur [S] ;

Qu'il n'est pas possible non plus de savoir si le prêt de 22 500 euros a été versé ou non sur un compte commun ;

Qu'il ressort enfin des éléments de l'expertise que ces prêts n'ont pas été remboursés sur des fonds personnels de monsieur puisque si monsieur percevait des salaires, le couple percevait également des allocations familiales pour élever 14 enfants : leurs 7 enfants , et les sept enfants d'un frère prédécédé ;

Attendu que, comme l'a justement retenu le premier juge, la seule somme dont monsieur [S] justifie est l'apport de 5 000 Frs financé pour lui directement en l'étude d'huissier par le [O] [W] ;

Qu'il sera par ailleurs indiqué que madame [Z] affirme qu'elle travaillait pour le compte des époux [D], comme son époux, à l'époque de l'achat du bien , et qu'elle percevait donc un salaire lui permettant d'apporter sa part de financement ; que monsieur le nie en produisant une attestation de madame [J] [D] établie le 8 mars 2014 affirmant 'n'avoir jamais eu à son service madame [C] [Z]' ; que toutefois , cette attestation n'est pas régulière en la forme en ce qu'elle ne porte pas que sa signataire ait eu connaissance des peines encourues en cas de faux témoignage, et est à considérer avec recul en ce sens que madame [Z] n'était pas déclarée, ce qui peut expliquer la teneur de cette attestation ;

Que, faisant sienne l'argumentation et le calcul du tribunal, au demeurant non contestés par les parties quant au mode de calcul adopté , la cour , sur le fondement de l'article 815-13 du code civil , et non des articles 815-10 et 1469 du code civil non applicables aux faits de la cause, retiendra une part de financement du bien à hauteur de 48 % par madame et de 52 % par monsieur, pourcentage rapporté au prix de vente du bien moins les dettes payées sur ce prix, et confirmera le jugement déféré en ce qu'il a retenu une part de financement par monsieur de 343 144,32 Frs et par madame de 326 380,68 Frs ;

Que ce financement a une incidence sur la créance sollicitée par madame [Z] et contestée par monsieur [S] ;

2° Sur la parcelle [Localité 12] acquise le 22 août 1982

Attendu que cette parcelle a été acquise pour le prix de 600 000 Frs , auquel s'ajoutent les frais d'acte de 106 000 Frs , ce qui représente un investissement total de 706 000 Frs ;

Attendu qu'il n'est plus contesté par aucune des parties en cause d'appel que ce bien était la propriété de monsieur [S] , bien qu'il existe une discordance entre l'acte d'achat, signé par le seul monsieur [S], et l'acte de vente signé par les deux parties ;

Que la loi qui s'y applique est donc la séparation de biens de droit musulman , qui prévoit une séparation stricte des patrimoines des époux, et, en cas de divorce une répartition des biens auxquels les époux ont participé ensemble et ce dans la proportion de la participation de chacun d'eux ;

Que d'ailleurs , aucune des parties ne conteste l'application de la dette de valeur à laquelle le tribunal a procédé ;

Attendu que monsieur [S] prétend avoir financé intégralement ce bien ;

Attendu que l'acte d'achat, que l'expert a eu en mains à défaut de la cour , stipule qu'il a été payé comptant à concurrence de 400 000 Frs , et par une rente viagère à hauteur de 200 000 Frs ;

Attendu que l'expert explique que ce bien a été acquis grâce à la vente du [Localité 10] ;

Que monsieur [S] se prévaut quant à lui de deux reçus :

- l'un à son nom de 10 000 Frs tiré sur un chèque au crédit lyonnais 'en attente réalisation vente [V]' (= [Localité 10]) ;

- l'autre en date du 20 août 1982 de 496 000 Frs tiré sur le compte au crédit lyonnais ;

Attendu que la rente viagère a été payée par les revenus du couple (salaire de monsieur et allocations familiales ) ;

Que le bien a été revendu le 18 décembre 1990 , la somme de 1 350 000 Frs étant revenue aux époux après paiement de dettes et surtout de la rente viagère capitalisée ;

Attendu que la cour constatera que le tribunal se contredit en ce sens qu' après avoir dit que devait être reporté , pour le calcul de la créance de madame , le pourcentage 48 % 52 % appliqué pour la vente du [Localité 10] , il n'en a pas moins retenu un pourcentage plus important , de 71 % , en faveur de monsieur, en tenant compte des reçus par lui produits ;

Attendu que la cour ne peut toutefois que constater que l'expert a retenu un financement de la parcelle de [Localité 12] avec les fonds de [Localité 10], et que les pièces du dossier ne permettent pas de dire que le compte au crédit lyonnais, à partir duquel les reçus ont été effectués , était un compte au seul nom de monsieur ;

Attendu que la cour ne pourra que constater que madame [Z] sollicite la confirmation du jugement ; que la cour ne peut statuer ultra petita ; qu'elle confirmera donc le jugement déféré en ce ce qu'il a dit que monsieur [M] [S] est redevable envers madame [C] [Z] d'une créance de 58 467,25 euros au titre du financement de l'immeuble sis à [Localité 12] ;

3° Sur l'acquisition du domicile conjugal le 13 juin 1989 ([Adresse 9]) pour la somme de 450 000 Frs outre 63 000 Frs de frais notariés

Attendu que l'acte d'achat , signé par les deux parties , et pour une fois joint au dossier , permet de voir qu'il a été signé par monsieur [S] et par madame [Z], et qu'il doit donc être considéré qu'il est indivis chacun pour moitié ;

Que l'article 815-13 du code civil français trouve donc à s'appliquer ;

Attendu qu'il ressort de la lecture de l'acte d'achat que le bien a été financé à hauteur de 213 840 Frs par un prêt souscrit au crédit foncier de France pour une durée de 15 ans, et pour le surplus par une somme de 226 160 Frs provenant des deniers personnels des acquéreurs ;

Attendu que monsieur [S] prétend avoir financé ce bien par ses seuls deniers car :

- le prêt au crédit foncier , bien qu'il ait été souscrit par les deux époux , a été remboursé grâce à ses revenus ;

- une somme de 73 000 Frs provient partiellement d'un prêt de 50 000 Frs qui lui a été accordé par l 'IREPS, dont il était seul bénéficiaire ;

- la somme de 226,160 Frs provenait enfin d'une aide à l'accession dont il a aussi été seul bénéficiaire s'agissant de mesures instituées en faveur des anciens membres de formations supplétives ayant servi dans l'armée française en Algérie ;

Attendu toutefois que l'expert indique , en la page 28 de son rapport, qu'il n'est pas justifié que le prêt de 50 000 Frs ait été affecté à l'achat du bien de 1989 ;

Que la cour considérera que la somme de 226 160 euros est personnelle à monsieur, comme allouée en raison de ce qu'il avait servi dans l'armée française en Algérie ;

Que, concernant le prêt, l'expert indique qu'après le divorce, il a été pris en charge par monsieur, jusqu'à ce que soit saisie la commission de surendettement, en 1996, où un arriéré de 66 718,33 Frs était noté ;

Qu'il n'a pas respecté le plan et a bénéficié de diverses aides pour tenter de résorber la dette (familiales et IREPS) ;

Que trop d'incertitudes pèsent sur le remboursement de ce prêt, monsieur [S] ayant fait l'objet de pas moins de 3 plans de surendettement, pour considérer qu'il a remboursé le prêt sur des fonds personnels ;

Que la cour ne rejoindra donc pas sur ce point le tribunal et considérera que la somme apportée par monsieur consiste dans les 226 160 Frs de l'aide à l'accession ;

Que, rapportée au prix de vente de 150 000 euros, la créance de monsieur sur l'indivision représente une somme de 66 128,68 euros ; que monsieur prétendant ne rien devoir et madame sollicitant la confirmation du jugement qui a accordé à monsieur la somme de 63 915 euros, la cour qui ne peut statuer ultra petita confirmera le jugement et dira que l'indivision est redevable à l'égard de Monsieur d'une créance de 63 915 € ;

Attendu que monsieur [S] fait valoir en substance, sans s'appuyer sur des termes juridiques ni sur aucun texte, que, si le bien est indivis, il doit y avoir un passif indivis correspondant, à la charge de madame, à la moitié du prêt ; que toutefois , il se contente de généralités sans préciser ce qu'il a pu payer au titre du prêt , ni sur ce qui peut rester dû, ni ne produit le moindre tableau d'amortissement ni compte bancaire ; que la cour le déboutera de ce chef de sa demande si demande il y a, le dispositif des conclusions n'en faisant pas état ;

Sur les autres points du jugement

Attendu, sur l'indemnité d'occupation , que , le bien acheté en 1989 étant un bien indivis , le tribunal a fait une juste application de l'article 815-9 du code civil en indiquant que l'indemnité d'occupation était due par monsieur entre la date de l'ordonnance de non conciliation et la date de la vente , à hauteur de 625 euros par mois, sauf à préciser que cette indemnité est fixée de façon ferme à la charge de monsieur ;

Attendu que, s'agissant des fruits des fonds placés , à hauteur de 25 557,91 euros, que , si monsieur ne conteste pas ce point de manière précise, la cour statuera malgré tout dans la mesure où il conclut au débouté des demandes et prétend ne rien devoir ;

Attendu que cette somme correspond au bien personnel de monsieur et à la créance de madame ; que, s'agissant d'un bien personnel à monsieur, madame n'a pas droit aux fruits des fonds placés, mais aux intérêts de sa créance à partir de l'aliénation de l'immeuble le 18 décembre 1990 ; que le jugement déféré sera donc infirmé sur ce point ;

Sur l'article 700 du code de procédure civile et sur les dépens

Attendu que chaque partie conservera à sa charge ses propres dépens d'appel ;

Attendu, sur l'article 700, qu'aucune des parties n'ayant fait un effort précis d'analyse des éléments du dossier ni des textes applicables , en prenant en compte des éléments circonstanciés d'actif et de passif pour présenter un projet sérieux de liquidation de leurs droits respectifs, et aucune d'elle n'ayant produit les pièces nécessaires (actes d'achat et de vente, éléments relatifs aux prêts et à leur prise en charge, comptes bancaires) , de sorte que la cour n'a pu trancher que sur le peu d'éléments qui lui étaient soumis et de façon nécessairement partielle, il ne paraît pas inéquitable de laisser à leur charge leurs frais irrépétibles respectifs d'appel ;

PAR CES MOTIFS

LA COUR , statuant publiquement , contradictoirement et en dernier ressort :

CONFIRME le jugement déféré sauf sur les intérêts des fruits perçus , et statuant à nouveau sur ce point :

DIT que la créance de madame [C] [Z] à l'égard de monsieur [S], de 58 467,25 euros , portera intérêts au taux légal à compter du 18 décembre 1990, et que la somme de 25 557,91 euros n'est pas due ;

Y JOUTANT

DIT que l'indemnité d'occupation de 625 euros à la charge de monsieur [M] [S] pour la période du 4 mars 2003 au 20 février 2008 est ferme ;

LAISSE à la charge de chacune des parties ses propres dépens d'appel et ses propres frais irrépétibles d'appel.

LE GREFFIERLE PRESIDENT


Synthèse
Tribunal : Cour d'appel d'Aix-en-Provence
Formation : Chambre 2-4
Numéro d'arrêt : 17/19292
Date de la décision : 08/07/2020

Références :

Cour d'appel d'Aix-en-Provence 6D, arrêt n°17/19292 : Infirme partiellement, réforme ou modifie certaines dispositions de la décision déférée


Origine de la décision
Date de l'import : 27/03/2024
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.appel;arret;2020-07-08;17.19292 ?
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