COUR D'APPEL D'AIX-EN-PROVENCE
Chambre 1-4
ARRÊT AU FOND
DU 25 JUIN 2020
N° 2020/ 100
RG 16/02673 - N° Portalis DBVB-V-B7A-6DMN
[E] [T]
[W] [F] épouse [T]
C/
[X] [O] épouse [C]
[I] [U]
Entreprise STEMOKAT
SA MAAF
Copie exécutoire délivrée
le :
à :
Me Frédéric CHOLLET
Me Jérôme BRUNET-DEBAINES
Me Fanny TURPAUD
Me Florence ADAGAS-CAOU
Décision déférée à la Cour :
Jugement du Tribunal de Grande Instance de DRAGUIGNAN en date du 07 Janvier 2016 enregistrée au répertoire général sous le n° 13/01771.
APPELANTS
Monsieur [E] [T] né le [Date naissance 1] 1968 à [Localité 2], demeurant [Adresse 2]
représenté par Me Frédéric CHOLLET de la SCP SCP BRAUNSTEIN & ASSOCIES, avocat au barreau de DRAGUIGNAN
Madame [W] [F] épouse [T] née le [Date naissance 2] 1976 à [Localité 3], demeurant [Adresse 2]
représentée par Me Frédéric CHOLLET de la SCP SCP BRAUNSTEIN & ASSOCIES, avocat au barreau de DRAGUIGNAN
INTIMES
Madame [X] [O] épouse [C], demeurant [Adresse 5]
représentée par Me Jérôme BRUNET-DEBAINES de la SCP BRUNET-DEBAINES, avocat au barreau de DRAGUIGNAN et Me Layla TEBIEL, avocat au barreau d'AIX-EN-PROVENCE
Monsieur [I] [U] né le [Date naissance 3] 1972 à [Localité 4], agissant sous l'enseigne STEMOKAT
demeurant [Adresse 1]
représenté par Me Fanny TURPAUD, avocat au barreau de TOULON
Entreprise STEMOKAT,
sise [Adresse 1]
représentée par Me Fanny TURPAUD, avocat au barreau de TOULON
MAAF ASSURANCES, agissant poursuites et diligences de ses représentants légaux domiciliés audit siège,, Société Anonyme inscrite au Registre du Commerce et des Sociétés de NIORT sous le n° 542 073 580 B ,
dont le siège social est [Adresse 3],
représentée par Me Florence ADAGAS-CAOU de la SCP DUHAMEL ASSOCIES, avocat au barreau de DRAGUIGNAN
*-*-*-*-*
COMPOSITION DE LA COUR
Par avis du 02.06.2020 les parties ont été avisées de ce que l'affaire serait jugée selon la procédure sans audience de l'article 8 de l'ordonnance n°2020-304 du 25.03 et ne s'y sont pas opposées dans le délai de quinze jours.
Mme LEYDIER Sophie conseillère chargée du rapport, a rendu compte de l'affaire dans le délibéré de la cour, composé de :
M. Jean-François BANCAL, président
Mme Patricia TOURNIER, conseillère
Mme Sophie LEYDIER, conseillère
Les parties ont été avisées que le prononcé de la décision aurait lieu par mise à disposition au greffe le 25.06.2020.
ARRÊT
contradictoire,
Prononcé par mise à disposition au greffe le 25 Juin 2020
Signé par M. Jean-François BANCAL, Président et Mme Priscille LAYE, greffier auquel la minute de la décision a été remise par le magistrat signataire.
***
Exposé du litige:
Par acte authentique du 21 janvier 2008, reçu par Maître [Y] [D], Notaire à [Localité 1], [E] [T] et [W] [F] ont acquis une maison, située [Adresse 4], d'[X] [O] épouse [C], marchand de biens, pour un prix de 220 000 euros.
Il est notamment précisé dans l'acte notarié:
- que ce bien a fait l'objet d'un permis de construire délivré le 02/04/1974 et d'un certificat de conformité du 24/04/1978,
- que des travaux de remise en état ont été effectués sur la maison, mais que cette remise en état n'a pas contribué à la création d'un immeuble neuf comme ne portant pas sur les 2/3 de l'ensemble des éléments de second oeuvre,
- que des travaux de réfection de la toiture sont en cours d'exécution et qu'ils ne sont pas terminés au jour de la vente,
- qu'en conséquence de l'exécution de ces travaux, une partie du prix (6 000 euros) sera séquestrée jusqu'à l'accomplissement total des travaux,
- que dans le cas où les travaux sus-indiqués ne seraient pas exécutés à la date du 15 février 2008, le vendeur s'oblige à régler à l'acquéreur qui I'accepte une indemnité forfaitaire de 100 euros par jour de retard à titre de clause pénale.
Par courrier du 1er/02/2008, [E] [T] et [W] [F] ont informé le notaire de ce que les travaux étaient terminés et ont sollicité la levée du séquestre.
Les travaux ont été réalisés par [I] [U], artisan exerçant sous l'enseigne 'STEMOKAT', assuré auprès de la MAAF pour les activités de maçonnerie/béton armé et couverture/travaux d'étanchéité.
En novembre 2011, [E] [T] et [W] [F] ont constaté des infiltrations d'eau dans leur maison.
Par ordonnance du 06/11/2012, le juge des référés du Tribunal de Grande Instance de DRAGUIGNAN a rejeté la demande de [E] [T] et de [W] [F]
tendant à voir ordonner une mesure d'expertise.
Par acte du 21/02/2013, [E] [T] et [W] [F] ont assigné [X] [O] épouse [C] devant le Tribunal de Grande Instance de DRAGUIGNAN aux fins d'obtenir l'indemnisation des dommages causés par les désordres affectant la toiture de leur habitation.
Par acte du 18/03/2013, [X] [O] épouse [C] a appelé en cause [I] [U] exerçant sous l'enseigne 'STEMOKAT'.
Par acte du 25/07/2013, 'l'entreprise STEMOKAT' a appelé en cause son assureur la MAAF et par conclusions du 22/10/2013, [I] [U] est intervenu volontairement à l'instance.
Ces instances ont été jointes par ordonnances du juge de la mise en état des 31/05/2013 et 25/10/2013.
Par jugement contradictoire du 07 janvier 2016, le tribunal de grande instance de DRAGUIGNAN, a:
- débouté les époux [T] de leurs demandes,
- dit que la demande de relevé et garantie de Mme [O] est sans objet,
- déclaré recevables les demandes à l'encontre de la MAAF mais dit qu'elles sont sans objet,
- condamné [E] [T] et [W] [F] épouse [T] in solidum à payer à [X] [O] une indemnité de 2 000 euros au titre de l'article 700 du code de procédure civile,
- rejeté les demandes des époux [T], de Mr [U] et de la MAAF au titre de l'article 700 du code de procédure civile,
- condamné [E] [T] et [W] [F] épouse [T] in solidum aux dépens,
- rejeté la demande d'exécution provisoire.
Les époux [T] ont interjeté appel par déclaration reçue au greffe le 16/02/2016, intimant la 'société STEMOKAT', la MAAF, [X] [O] épouse [C] et [I] [U].
Par arrêt avant dire droit rendu le 29/03/2018, la présente cour a :
- ordonné une expertise confiée à [P] [H],
- renvoyé l'affaire à la mise en état du 07/06/2018,
- réservé les dépens.
L'expert [H] a clôturé son rapport le 31/07/2018.
Par dernières conclusions récapitulatives et en réponse n°3 après expertise avec bordereau de pièces communiquées notifiées par le RPVA le 22/03/2019, les appelants demandent à la Cour:
Vu les articles 1792 et suivants du code civil,
Vu les articles 1103, 1104 du code civil (ancien article 1134), les articles 1217, 1231-1 du code civil (ancien 1147 du même code),
Vu les articles 15 et 16 du code de procédure civile,
- de REFORMER le jugement déféré,
Et, statuant à nouveau:
- de CONDAMNER [X] [O] épouse [C] à leur payer les sommes suivantes:
* 37 606,80 euros au titre des travaux de réfection de la toiture suivant devis de la société ABRIBAT' SUD en date du 29 juin 2018 annexé au rapport de Mr [H],
* 3 000 euros en remboursement des frais d'expertise judiciaire de Mr [H],
* 47 880 euros à titre de dommages et intérêts en indemnisation de leur préjudice de jouissance subi depuis 7 ans du fait des infiltrations par la toiture,
* 6 000 euros en réparation du préjudice à venir pendant la durée des travaux estimée à un mois par l'expert judiciaire,
- de CONDAMNER [X] [O] épouse [C] au principal ou toute partie succombante, à titre subsidiaire, à leur payer la somme de 5 000 € en application de l'article 700 du code de procédure civile,
- de CONDAMNER [X] [O] épouse [C] au principal ou toute partie succombante, à titre subsidiaire, aux entiers dépens de première instance et d'appel, en ceux compris les frais d'expertise judiciaire de Mr [H].
Par dernières conclusions avec bordereau de pièces communiquées notifiées par le RPVA le 15/01/2019, [X] [O] épouse [C], intimée, demande à la Cour:
Vu les dispositions de l'acte du 21/01/2008,
Vu le protocole d'accord du 29/03/2012,
- de prononcer l'annulation du rapport d'expertise de Mr [H] avec toutes ses conséquences,
Subsidiairement,
- de déclarer irrecevables les demandes des époux [T] à son encontre,
En toute hypothèse,
- de débouter les époux [T] de leurs demandes à son encontre,
- de réduire à de plus justes proportions l'indemnisation de leurs préjudices,
- de dire n'y avoir lieu à réfection totale de la toiture,
- de condamner Mr [U] et son assureur, la MAAF, à la relever et garantir de toute condamnation,
- de condamner les époux [T], Mr [U] et la MAAF à lui payer une indemnité de 2 000 € sur le fondement de l'article 700 du code de procédure civile et
aux dépens.
Par dernières conclusions récapitulatives après expertise avec bordereau de pièces communiquées notifiées par le RPVA le 18/01/2019, [I] [U], exerçant à l'enseigne 'STEMOKAT', intimé, demande à la Cour:
- de CONFIRMER en son entier le jugement déféré,
En conséquence,
- de DEBOUTER Madame [C] de sa demande tendant à être relevée et garantie par [U] [I],
- de DEBOUTER l'ensemble des parties de tous moyens, fins et conclusions visant à voir condamner Monsieur [U] à réparer les préjudices subis,
Subsidiairement,
- de DIRE ET JUGER que la MAAF devra relever et garantir 'l'entreprise STEMOKAT', de toutes condamnations susceptibles d'être prononcées à son encontre,
- de CONDAMNER la requise au paiement de la somme de 3 000 € sur le fondement des dispositions de l'article 700 du code de procédure civile, outre les entiers dépens distraits au profit de Me TURPAUD, avocat sur sa due affirmation de droit.
Par dernières conclusions après expertise avec bordereau de pièces communiquées notifiées par le RPVA le 15/01/2019, la SA MAAF ASSURANCES, intimée, demande à la Cour:
Vu l'article 1792 du code civil,
- de CONSTATER que les époux [T] ne formulent aucune demande devant la COUR à son encontre,
- de DEBOUTER en conséquence Mr [U] de I'ensemble de ses demandes,
fins et conclusions dirigées à l'encontre de la MAAF, et LE CONDAMNER à lui payer une indemnité de 5 000 euros au titre de l'article 700 du code de procédure civile,
- de DEBOUTER Mme [C] de l'ensemble de ses demandes, fins et conclusions dirigées à son encontre,
- de DEBOUTER les parties de l'ensemble de leurs demandes, fins et conclusions en ce qu'elles sont dirigées à son encontre,
- de la mettre purement et simplement hors de cause,
- de CONDAMNER qui il appartiendra aux entiers dépens, distraits au profit de la
SCP DUHAMEL- AGRINIER, avocats associés, sur ses offres et affirmations de droit et ce en application de l'article 699 du code de procédure civile.
Par avis du 02/06/2020, les parties ont été informées que l'affaire serait jugée selon la procédure sans audience de l'article 8 de l'ordonnance n° 2020-304 du 25/03/2020.
Par courriers des 02, 04 et 09/06/2020, les appelants, Mme [C] et la MAAF ont indiqué expressément qu'elles acceptaient que l'affaire soit jugée selon la procédure sans audience de l'article 8 de l'ordonnance n° 2020-304 du 25/03/2020.
***ATTENTION VERIFIER si Me TURPAUD a écrit avant l'expiration du délai (au 17 juin) si pas de courrier ajouter
[I] [U] et la société STEMOKAT n'ont pas manifesté d'opposition à ce que l'affaire soit jugée selon la procédure sans audience, avant l'expiration du délai de 15 jours, soit le 17/06/2020.
MOTIFS:
Sur la validité du rapport d'expertise
En application des articles 16, 160 et 276 du code de procédure civile, il appartient à l'expert de respecter le principe de la contradiction, notamment en convoquant les parties à toutes les réunions d'expertise, en leur communiquant les pièces et documents utilisés par lui, les déclarations recueillies auprès des sachants et il «doit prendre en considération les observations ou réclamations des parties, et, lorsqu'elles sont écrites, les joindre à son avis si les parties le demandent et faire mention, dans son avis, de la suite qu'il aura donnée aux observations ou aux réclamations présentées ».
L'inobservation des formalités prescrites à l'article 276 précité ayant un caractère substantiel n'entraîne la nullité de l'expertise qu'à charge pour la partie qui l'invoque de prouver le grief que lui cause cette irrégularité.
S'il est exact qu'en application de l'article 238 du code de procédure civile, le technicien commis doit donner son avis sur les points pour l'examen desquels il a été commis, sans répondre à d'autres questions, sauf accord écrit des parties, et ne doit jamais porter d'appréciations d'ordre juridique, l'inobservation des dispositions de ce texte n'est pas sanctionnée par la nullité.
En l'espèce, il n'est pas contesté que l'expert [H] a organisé un accédit sur les lieux en présence de toutes les parties le 18/06/2018, puis qu'il leur a adressé un
compte-rendu valant pré-conclusions le 25/06/2018 et qu'il a répondu à l'unique dire de Maître CHOLLET du 06/07/2018, de sorte qu'il a scrupuleusement respecté les dispositions des articles 16, 160 et 276 du code de procédure civile susvisées.
Si [X] [O] épouse [C] fait valoir que 'les conclusions de l'expert ne sont pas exemptes de critiques' que l'expert s'est permis de formuler des réponses ne relevant pas de sa mission, ni de sa compétence, et qu'il a porté des appréciations d'ordre juridique, ces griefs n'entraînent nullement la nullité du rapport d'expertise, étant rappelé que ce dernier constitue une pièce du dossier soumise à la libre discussion des parties, dont la juridiction apprécie la portée.
En conséquence, la demande formée par [X] [O] épouse [C] tendant à voir prononcer l'annulation du rapport d'expertise doit être rejetée.
Sur la responsabilité de la venderesse
Recevabilité de l'action:
Si [X] [O] épouse [C] conclut à l'irrecevabilité de l'action engagée par les acquéreurs à son encontre, la cour constate qu'elle ne soulève aucune fin de non-recevoir, notamment celles énumérées à l'article 122 du code de procédure civile.
En l'espèce, les époux [T] ont qualité et intérêt à agir à l'encontre d'[X] [O] épouse [C], leur venderesse, sans que cette dernière soit fondée à invoquer la signature d'un protocole d'accord intervenue le 29/03/2012 entre [I] [U] et les époux [T], alors qu'elle est tiers à ce protocole.
En conséquence, l'action des époux [T] dirigée contre [X] [O] épouse [C] doit être déclarée recevable.
Bien fondé de l'action:
En vertu de l'article 1792 du code civil: 'tout constructeur d'un ouvrage est responsable de plein droit, envers le maître ou l'acquéreur de l'ouvrage, des dommages, même résultant d'un vice du sol, qui compromettent la solidité de l'ouvrage ou qui, l'affectant dans l'un de ses éléments constitutifs ou l'un de ses éléments d'équipement, le rendent impropre à sa destination. Une telle responsabilité n'a point lieu si le constructeur prouve que les dommages proviennent d'une cause étrangère.'
Selon l'article 1792-1 du même code en son aliné 2 'est réputé constructeur de l'ouvrage toute personne qui vend, après achèvement, un ouvrage qu'elle a construit ou fait construire'.
Ainsi, le vendeur d'un immeuble, dans lequel il a été procédé à des travaux de rénovation, peut être déclaré responsable sur le fondement de ces dispositions, dès lors que l'importance des travaux réalisés les assimile à des travaux de construction d'un ouvrage. Il est cependant nécessaire que la réception des travaux ait eu lieu.
En l'espèce, il résulte des pièces communiquées et des écritures des parties:
- que l'acte de vente du 21/01/2008 stipule notamment que le vendeur, [X] [O] épouse [C], marchand de biens, a acquis la maison, située [Adresse 4] par acte du 06/12/2007 au prix de 135 000 euros (pages 1 et 16) et que ' le vendeur déclare et l'acquéreur reconnaît que divers travaux sont en cours d'exécution savoir: réfection de la toiture, ces travaux n'étant pas terminés au jour de la vente' (page 3),
- qu'un devis estimatif daté du 09/01/2008 et intitulé 'réparation complète de la toiture' a été établi par l'entreprise STEMOKAT pour un montant total de 12 600 euros TTC comprenant les prestations suivantes :
démontage du faîtage avec évacuation du frachas,
démontage de l'ancienne toiture avec évacuation du frachas,
changement des plombs autour des deux cheminées y compris évacuation du frachas,
solin en plomb sur l'acrotère sur une longueur de 5 mètres,
repose de tuiles rondes collées en remplacement des anciennes tuiles,
construction d'un nouveau faîtage en tuiles rondes similaire existant (enduit sous tuiles avec incorporation d'hydrofuge) (pièce 2 des appelants),
- qu'une facture datée du 19/12/2007 intitulée 'réparation de la toiture' a été établie par l'entreprise STEMOKAT pour un montant total de 6 180 euros TTC comprenant les prestations suivantes:
démontage d'une partie de la toiture,
démolition des génoises correspondantes,
pose et fourniture des éverites, chevrons et collage des tuiles,
construction d'une génoise sous la partie restaurée,
reprise des enduits sous la génoise entre la poutre et la tuile,
rebouchage des trous sur tout le devant de la maison (pièce 3 des appelants),
- que selon l'expert [H]:
* ' la couverture litigieuse était défaillante lors de la vente (...) Cet état de fait est validé par les parties',
* Mme [O]-[C] a réglé la somme de 8 000 euros TTC correspondant à une facture datée du 19/01/2008 intitulée 'réparation complète de la toiture' établie par l'entreprise STEMOKAT comprenant exactement les prestations détaillées au devis du 09/01/2008 susvisé, mais en réalité, ces travaux n'ont pas été réalisés,
* suite à l'inspection complète de la couverture litigieuse, les travaux effectués par STEMOKAT n'ont pas consisté en une réfection complète de la toiture, mais en une 'réparation' partielle de la partie basse du versant Nord,
* la qualité des travaux réellement réalisés par STEMOKAT est extrèmement médiocre, de sorte que la valeur réelle de ces travaux est nulle,
* en aucun cas, les travaux réalisés par STEMOKAT n'étaient en mesure de pallier la défaillance initiale de la couverture litigieuse,
* les dommages déclarés par les époux [T] consistent en des infiltrations en provenance de la couverture (les photographies illustrant diverses traces de coulures au droit des poutres et sur les murs), l'expert précisant que le hors d'eau du bâtiment n'est pas convenablement assuré et que seule une réfection complète de la toiture aurait permis d'assurer le 'hors d'eau' de l'immeuble de manière pérenne,
* les travaux n'ont pas été réceptionnés,
- que selon Mme [O]-[C] 'en acceptant la libération du séquestre, les époux [T] ont procédé à une réception et acceptation des travaux; ils ne peuvent pas prétendre plus tard qu'ils n'ont pas été réalisés' (page 3 des écritures).
La cour rappelle que la réception des travaux est un acte qui intervient entre le maître d'ouvrage et le constructeur.
En l'espèce, il est constant que Mme [O]-[C], maître d'ouvrage, a commandé et réglé les travaux de réfection de la toiture réalisés par Mr [U] et qu'aucun procès-verbal de réception des travaux n'a été établi entre ces parties.
Alors que les appelants n'invoquent pas l'existence d'une réception tacite des travaux, et ne sollicitent pas davantage que la réception judiciaire des travaux soit prononcée, les conditions d'application de la mise en oeuvre de la responsabilité décennale de Mme [O]-[C] ne sont pas réunies, en l'absence de réception des travaux de réfection de la toiture.
En conséquence, seule la responsabilité contractuelle de Mme [O]-[C] peut être recherchée.
En vendant le 21/01/2008 aux époux [T] la maison, située [Adresse 4], qu'elle avait acquis le 06/12/2007, en sa qualité de marchand de biens, [X] [O] épouse [C] s'est notamment engagée, aux termes de l'acte de vente, à terminer 'les travaux de réfection de la toiture qui étaient en cours d'exécution au jour de la vente'.
Si le détail de ces travaux n'est pas précisé dans l'acte de vente, l'engagement de la venderesse implique que les travaux de réfection de la toiture remplissent effectivement leur fonction, soit permettre à l'immeuble d'être hors-d'eau et hors d'air.
En l'espèce, il résulte des constatations de l'expert [H] que les travaux réalisés sous la maîtrise d'ouvrage d'[X] [O] épouse [C] n'ont pas été effectués dans les règles de l'art et n'ont pas consisté à refaire la totalité de la toiture, les infiltrations dont se plaignent les acquéreurs étant directement liées à la mauvaise exécution des travaux.
La libération du solde du prix séquestré à la demande des époux [T] fait suite à l'achèvement des travaux de réfection de la toiture, et [X] [O] épouse [C] ne peut utilement en déduire que les acquéreurs ont manifesté par ce paiement leur satisfaction quant à la qualité des travaux.
Et elle ne peut davantage soutenir n'avoir pas pu imaginer que la toiture ne serait pas refaite et que les travaux réalisés par Mr [U] étaient insuffisants puisqu'elle ne fournit aucune explication sur les raisons pour lesquelles elle n'a pas accepté le devis relatif à la réparation complète de la toiture du 09/01/2008 tout en payant la facture du 19/01/2008 intitulée 'réparation complète de la toiture', comprenant les mêmes prestations que dans le devis susvisé mais pour un montant total de 8 000 euros TTC au lieu de 12 600 euros TTC, après avoir reçu une première facture émise par STEMOKAT le 19/12/2007 correspondant au démontage d'une partie de la toiture pour un montant total de 6 180 euros TTC, et qu'elle n'a pas réceptionné les travaux, alors qu'il lui incombait, en sa qualité de venderesse professionnelle ayant pris l'engagement à l'égard des acquéreurs de refaire la toiture de l'immeuble, de commander des travaux permettant de parvenir à cet objectif et de les accepter, avec ou sans réserve, après leur réalisation.
Il s'ensuit qu'[X] [O] épouse [C], en sa qualité de venderesse, a manqué à son obligation de livrer la maison vendue avec une toiture refaite remplissant sa fonction, et que sa responsabilité contractuelle est engagée.
En conséquence, le jugement déféré doit être ici infirmé.
Sur les appels en garantie
L'entrepreneur: [I] [U]:
Si les appelants ont intimé la 'société STEMOKAT' et [I] [U], la cour constate qu'il résulte des pièces produites qu'[I] [U] exerçe à l'enseigne 'STEMOKAT' et qu'[X] [O] épouse [C] a appelé Mr [U] et son assureur, la MAAF, à la relever et garantir des condamnations prononcées à son encontre, de sorte qu'aucune demande n'est formée à l'encontre de la 'société STEMOKAT'.
Contrairement à ce que soutient [I] [U], l'expert a précisé au point 5.2 'causes des infiltrations':
- que d'un point de vue technique, seule une réfection complète de la toiture litigieuse aurait permis d'assurer le 'hors d'eau' de l'immeuble de manière pérenne,
- qu'au simple stade de leur définition, les réparations proposées par STEMOKAT n'étaient pas en mesure de donner satisfaction,
- que du fait de l'extrême médiocrité des réparations effectuées par STEMOKAT, une mise hors d'eau pérenne de la villa était impossible à obtenir.
En sa qualité de locateur d'ouvrage professionnel, [I] [U]
avait une obligation de résultat à l'égard du maître d'ouvrage consistant à exécuter des travaux exempts de vices.
Or, il résulte des constatations de l'expert d'une part, que les travaux réellement effectués n'ont consisté qu'en une réparation partielle de la partie basse du versant Nord de la toiture alors qu'[I] [U] a facturé 'une réparation complète de la toiture' et, d'autre part, que la qualité des travaux exécutés est extrêmement médiocre, comme le montrent de manière évidente les photographies annexées au rapport (pages 15 et 16).
Il s'ensuit qu'[I] [U] a manqué à son obligation de résultat de réaliser des travaux conformément aux règles de l'art et sa responsabilité est engagée.
S'il résulte des pièces produites qu'[X] [O] épouse [C] n'a pas souhaité faire exécuter l'ensemble des travaux proposés selon devis estimatif du 09/01/2008 intitulé 'réparation complète de la toiture', [I] [U] avait néanmoins l'obligation, en tant que professionnel, d'attirer l'attention du maître d'ouvrage sur les conséquences liées à la mise en oeuvre de travaux partiels, notamment quant à leur pérennité et à leur efficacité.
En conséquence, [X] [O] épouse [C] doit être relevée et garantie par [I] [U], étant observé que ce dernier n'a pas conclu à un
éventuel partage de responsabilité et n'articule aucun moyen de défense tendant à voir juger qu'il pourrait relever et garantir seulement partiellement le maître d'ouvrage.
L'assureur: la MAAF:
Alors que les travaux réalisés par [I] [U] n'ont pas été réceptionnés, la MAAF fait valoir à juste titre que la garantie décennale souscrite auprès d'elle n'est pas mobilisable.
La garantie 'responsabilité civile professionnelle' souscrite n'est pas davantage mobilisable dès lors que les conditions générales produites, dont il n'est pas contesté qu'elles ont été portées à la connaissance de l'assuré et qu'elles sont applicables, stipulent que sont exclus les dommages matériels ou immatériels résultant de l'inexécution des obligations de faire (article 1142 et suivants du code civil) ou de délivrance (article 1604 et suivants du code civil) de l'assuré et les dommages résultant de la reprise de l'ouvrage réalisé (pages 29 à 31 pièce 3 de l'assureur).
En conséquence, [I] [U] doit être débouté de son appel en garantie à l'encontre de la MAAF.
Sur l'indemnisation
Préjudice matériel:
Il résulte du rapport d'expertise et de l'acte de vente que, préalablement à la vente, [X] [O] épouse [C] avait fait établir un diagnostic amiante de l'intégralité de la construction, révélant la présence d'amiante dans les PST (plaques supports de tuiles) disposées en couverture.
L'expert a chiffré le coût des travaux de reprise de la toiture à environ 20 000 euros HT (hors prise en compte du traitement de l'amiante), et suite au dire du conseil des acquéreurs du 06/07/2018, il a indiqué que la valorisation des travaux mentionnés dans un devis du 29/06/2018 établi par la société ABRIBAT SUD pour un montant de 34 188 euros HT (y compris le traitement de l'amiante) était convenable.
En page 10 de l'acte de vente, il est notamment stipulé 'il est rappelé qu'aux termes des dispositions législatives et réglementaires en la matière, dès lors que le rapport révèle la présence d'amiante dans l'immeuble, le propriétaire procède:
- soit à un contrôle périodique de l'état de conservation des matériaux et produits, contrôle effectué dans un délai maximal de trois ans à compter de la date de remise au propriétaire des résultats du contrôle, ou à l'occasion de toute modification susbtantielle de l'ouvrage ou de son usage,
- soit à une surveillance du niveau d'empoussièrement dans l'atmosphère par un organisme agréé en mécroscopie électronique à transmission,
- soit à des travaux de confinement ou de retrait de l'amiante par une entreprise spécialisée.
L'acquéreur déclare avoir pris connaissance du rapport amiante sus-énoncé
(annexe 5 à l'acte), être informé de la réglementation en vigueur et faire son affaire personnelle de cette situation' (pièce 1 des appelants).
Alors que les acquéreurs, informés avant la vente de la présence d'amiante dans les PST, ont déclaré faire leur affaire personnelle de cette situation dans les conditions susvisées, et que les travaux de réfection de la toiture pris en charge par la venderesse ne comportaient aucune prestation relative au retrait des plaques amiantées, [X] [O] épouse [C] et [I] [U] sont fondés à soutenir que les travaux relatifs au retrait de l'amiante doivent rester à la charge des acquéreurs.
Les travaux de reprise de la toiture seront donc indemnisés à hauteur de 24 406 euros TTC, selon le calcul suivant:
22 188 euros HT (34 188 euros - 12 000 euros (dépose des PST effectuées par une entreprise certifiée sous section 3 amiante, la dépose des tuiles et des rives étant évaluée à 3 000 euros) + 2 218 euros (TVA 10%).
Préjudice de jouissance:
Les époux [T] établissent que les infiltrations ont généré de l'humidité dans leur maison, qu'ils ont été contraint d'installer leurs trois enfants de 12 ans, 14 ans et 7 ans dans la même chambre un peu moins affectée, mais que leur fils a présenté des bronchites asthmatiformes majorées avec traitement tous les hivers, à cause de l'humidité excessive générée par les infiltrations (pièces 10, 11 et 22).
En l'état de ces éléments et des photographies annexées au rapport d'expertise, les époux [T] ont incontestablement subi un préjudice de jouissance depuis novembre 2011.
Compte tenu de la durée prévisible des travaux de reprise estimée à un mois par l'expert, de la localisation des infiltrations dans les pièces à vivre et de l'humidité affectant leur maison d'habitation, ce préjudice subi sera justement indemnisé par l'allocation d'une somme de 20 000 euros.
Remboursement des frais d'expertise judiciaire:
En vertu des dispositions de l'article 695 du code de procédure civile, les frais d'expertise sont compris dans les dépens.
Ils ne peuvent donc donner lieu à une indemnisation spécifique.
En conséquence, les époux [T] doivent être déboutés de leur demande tendant au remboursement de la somme de 3 000 euros au titre des frais d'expertise judiciaire de Mr [H].
Sur l'article 700 du code de procédure civile et les dépens
Succombant, [X] [O] épouse [C] et [I] [U] seront condamnés in solidum aux dépens de première instance et d'appel.
Dans leurs rapports, [X] [O] épouse [C] supportera 85% des dépens et [I] [U] en supportera 15%.
[X] [O] épouse [C] devra régler à [W] [F] épouse [T] et à [E] [T] une indemnité de 5 000 euros au titre de l'article 700 du code de procédure civile et sera déboutée de sa demande tendant à être intégralement relevée et garantie de cette condamnation.
Aucune considération d'équité ne justifie d'accorder une indemnité au titre de l'article 700 du code de procédure civile aux autres parties.
PAR CES MOTIFS
LA COUR :
Statuant publiquement et contradictoirement,
Après arrêt avant dire droit rendu le 29/03/2018,
Vu le rapport d'expertise de [P] [H] du 31/07/2018,
INFIRME le jugement déféré,
STATUANT A NOUVEAU et Y AJOUTANT,
DECLARE recevables les demandes formées par [W] [F] épouse [T] et [E] [T] à l'encontre d'[X] [O] épouse [C],
DEBOUTE [X] [O] épouse [C] de sa demande d'annulation du rapport d'expertise de Mr [H],
DIT que la responsabilité contractuelle d'[X] [O] épouse [C], venderesse, est engagée à l'égard de [W] [F] épouse [T] et de [E] [T], acquéreurs,
CONDAMNE [X] [O] épouse [C] à payer à [W] [F] épouse [T] et à [E] [T]:
- 24 406 euros TTC au titre des travaux de reprise de la toiture,
- 20 000 euros au titre du préjudice de jouissance,
CONDAMNE [I] [U] à relever et garantir [X] [O] épouse [C] de ces deux condamnations,
DEBOUTE [W] [F] épouse [T] et [E] [T] du surplus de leurs demandes,
DEBOUTE [I] [U] exerçant à l'enseigne 'STEMOKAT' de sa demande tendant à être relevé et garanti par son assureur la MAAF,
DEBOUTE [X] [O] épouse [C] de ses demandes formées à l'égard de la MAAF et de sa demande tendant à être relevée et garantie formée à l'égard d'[I] [U] au titre des frais irrépétibles,
DIT qu'une copie du présent arrêt sera adressée par le greffe à l'expert [P] [H],
CONDAMNE [X] [O] épouse [C] à payer à [W] [F] épouse [T] et à [E] [T], ensemble, une indemnité de 5 000 euros au titre de l'article 700 du code de procédure civile,
DÉBOUTE [I] [U], [X] [O] épouse [C] et la MAAF de leurs demandes d'indemnités au titre de l'article 700 du code de procédure civile,
CONDAMNE in solidum [X] [O] épouse [C] et [I] [U] aux dépens de première instance et d'appel, et en ordonne la distraction en application des dispositions de l'article 699 du code de procédure civile,
DIT que dans leurs rapports, [X] [O] épouse [C] supportera 85% des dépens et qu'[I] [U] en supportera 15%.
Le greffier, Le président,