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04/06/2020 | FRANCE | N°16/20279

France | France, Cour d'appel d'Aix-en-Provence, Chambre 3-4, 04 juin 2020, 16/20279


COUR D'APPEL D'AIX-EN-PROVENCE

Chambre 3-4



ARRÊT AU FOND

DU 04 JUIN 2020



N°2020/70













Rôle N° RG 16/20279 - N° Portalis DBVB-V-B7A-7RS2







SAS CABINET [L]





C/



[U] [W]

SARL PROVENCE LOCATION





































Copie exécutoire délivrée le :

à :



Me GRUGNARDI

Me P

REVOST





Décision déférée à la Cour :



Jugement du Tribunal de Commerce de MARSEILLE en date du 27 Octobre 2016 enregistré au répertoire général sous le n° 2016F01767.





APPELANTE



SAS CABINET [L],

Prise en la personne de son représentant légal en exercice,

Dont le siège est sis [Adresse 4]

[Localité 2]

représentée...

COUR D'APPEL D'AIX-EN-PROVENCE

Chambre 3-4

ARRÊT AU FOND

DU 04 JUIN 2020

N°2020/70

Rôle N° RG 16/20279 - N° Portalis DBVB-V-B7A-7RS2

SAS CABINET [L]

C/

[U] [W]

SARL PROVENCE LOCATION

Copie exécutoire délivrée le :

à :

Me GRUGNARDI

Me PREVOST

Décision déférée à la Cour :

Jugement du Tribunal de Commerce de MARSEILLE en date du 27 Octobre 2016 enregistré au répertoire général sous le n° 2016F01767.

APPELANTE

SAS CABINET [L],

Prise en la personne de son représentant légal en exercice,

Dont le siège est sis [Adresse 4]

[Localité 2]

représentée par Me Michèle GRUGNARDI, avocat au barreau de MARSEILLE

INTIMES

Monsieur [U] [W]

né le [Date naissance 1] 1972 à [Localité 6] ([Localité 6]),

demeurant [Adresse 8]

[Adresse 5]

représenté par Me Yann PREVOST de la SELARL PREVOST & ASSOCIES, avocat au barreau de MARSEILLE

SARL PROVENCE LOCATION

Agissant poursuites et diligences de ses représentants légaux,

Dont le siège est [Adresse 7]

[Localité 3]

représentée par Me Yann PREVOST de la SELARL PREVOST & ASSOCIES, avocat au barreau de MARSEILLE

*-*-*-*-*

COMPOSITION DE LA COUR

En application des dispositions des articles 804 et 805 du code de procédure civile, l'affaire a été débattue le 10 Mars 2020 en audience publique, les avocats ne s'y étant pas opposés, devant Madame Laure BOURREL, Président chargé du rapport et Mme Françoise FILLIOUX, Conseiller, .

Madame Laure BOURREL, Président, a fait un rapport oral à l'audience, avant les plaidoiries.

Ces magistrats ont rendu compte des plaidoiries dans le délibéré de la cour, composée de :

Madame Laure BOURREL, Président

Mme Françoise FILLIOUX, Conseiller

Mme Anne FARSSAC, Conseiller

Greffier lors des débats : Mme Rime GHORZI.

Le prononcé de la décision est prorogé suite aux dispositions de la Loi n°2020-290 du 23 mars 2020 relative à l'état d'urgence sanitaire à la date du 4 juin 2020.

Les parties ont été avisées que le prononcé de la décision aurait lieu par mise à disposition au greffe le 4 juin 2020.

ARRÊT

Contradictoire,

Prononcé par mise à disposition au greffe le 07 Mai 2020.

Signé par Madame Laure BOURREL, Président et Mme Rime GHORZI, greffier auquel la minute de la décision a été remise par le magistrat signataire.

******

FAITS, PROCÉDURE, MOYENS ET PRÉTENTIONS DES PARTIES

La SARL Provence Location est spécialisée dans la location de chapiteaux dans le domaine de l'événementiel, Monsieur [U] [W] en étant gérant et associé.

Le Cabinet [L] était l'expert-comptable de cette société notamment au cours des exercices de 2007 à 2010, pour lesquels a été effectuée une vérification de comptabilité par l'administration fiscale. Le 25 juillet 2011, l'administration a proposé une rectification. D'une part, elle a mis en recouvrement la somme de 471 635 € au titre de la TVA, pénalités comprises, du 1er janvier 2007 au 30 septembre 2010. D'autre part, considérant que des modifications étaient intervenues au sein du capital de la SARL Provence Location entraînant un changement de régime fiscal, la société n'ayant pas opté pour l'impôt sur les sociétés (IS) alors que M. [W] était devenu le seul associé, l'administration fiscale a redressé les bénéfices industriels et commerciaux (BIC) déclarés par Monsieur [U] [W] à hauteur de 219 830 € au titre de l'année 2008, de 235 625 € au titre de l'année 2009. Enfin, elle a réintégré dans les revenus imposables de M. [W] la somme de 294 265 € au titre de revenus de capitaux mobiliers pour l'année 2008.

Par ordonnance de référé du président du tribunal de commerce de Marseille du 19 mars 2013, M. [M] [B], expert-comptable de justice, a été désigné avec pour mission notamment d'examiner les déclarations fiscales de la SARL Provence Location et de M. [U] [W] pour les années 2007 à 2011, dire si les déclarations sont conformes à la réalité sociale et fiscale de la SARL Provence Location, dans la négative, procéder à la simulation des déclarations qui auraient dû être effectuées, chiffrer l'imposition relevant des déclarations ainsi effectuées, et déterminer le montant du surplus d'impôts appelés à raison des déclarations erronées du Cabinet [L].

L'expert a clôturé son rapport le 30 septembre 2014.

Après autorisation d'assigner à jour fixe, par exploit du 10 juin 2016, la SARL Provence Location et Monsieur [U] [W] ont fait assigner la SAS Cabinet [L] devant le tribunal de grande instance de Marseille afin qu'il soit dit que cette société avait commis des fautes de nature à engager sa responsabilité contractuelle, en paiement à la société Provence Location de la somme de 181 761 € correspondant aux pénalités au titre de la TVA pour les années 2007 à 2010, en paiement de la somme de 416 604 € au titre des redressements fiscaux subis par Monsieur [U] [W], en paiement à la SARL Provence Location de la somme de 139 769 € au titre des frais financiers, en paiement de la somme de 9674,56 euros hors-taxes au titre des honoraires, en paiement de la somme de 320 868 € au titre du préjudice financier subi par Monsieur [U] [W], en paiement de la somme de 30 000 € au titre du préjudice moral subi par Monsieur [U] [W]. Ils ont aussi sollicité l'organisation d'une expertise pour évaluer le préjudice résultant de la dévalorisation du fonds de commerce de la société Provence Location et des parts sociales détenues par Monsieur [U] [W].

La société Cabinet [L] a conclu à l'incompétence du tribunal de grande instance, et au fond, au débouté des demandeurs, subsidiairement, a dit que le préjudice subi ne pourrait être supérieur à la somme de 59 154,43 euros telle qu'il ressort de l'étude du Cabinet EQUAD, et dans l'hypothèse où serait ordonnée une expertise, que les frais soient mis à la charge des demandeurs.

Par jugement du 12 mai 2016, le tribunal de grande instance s'est déclaré incompétent au profit du tribunal de commerce de Marseille.

La procédure a été reprise devant cette juridiction par la SARL Provence Location et M. [W], après autorisation d'assigner à bref délai.

Par jugement du 27 octobre 2016, le tribunal de commerce de Marseille a :

-condamné la société Cabinet [L] SAS à payer à la société Provence Location SARL la somme de 181 761 € correspondant aux pénalités au titre de la TVA pour les années 2007 à 2010 et la sommes de 9674,56 euros hors-taxes au titre des honoraires supportés dans le cadre du contrôle fiscal,

-condamné la société Cabinet [L] SAS à payer à Monsieur [U] [W] la somme de 416 634 € au titre des redressements fiscaux dont il a fait l'objet et la somme de 3000 € à titre de dommages intérêts au titre du préjudice moral subi,

-donné acte à la société Cabinet [L] SAS de ce qu'elle ne s'est jamais opposée à la restitution des éléments comptables,

-enjoint à la société Cabinet [L] SAS de restituer à la société Provence Location l'ensemble des documents et pièces comptables qu'elle détient pour les exercices antérieurs à l'année 2011, dans le mois de la signification du jugement et passé ce délai, sous astreinte provisoire de 50 € par jour de retard, pendant un mois,

-condamné la société Cabinet [L] SAS à payer à la société Provence Location SARL et Monsieur [U] [W] la somme totale de 5000 € au titre des dispositions de l'article 700 du code de procédure civile,

avant dire droit au fond, sur les frais financiers hors emprunt, le préjudice financier de Monsieur [U] [W], la dévalorisation du fonds de commerce de la SARL Provence Location et des parts sociales détenues par Monsieur [U] [W], tous moyens des parties demeurant réservés de ces chefs,

-désigné Monsieur [M] [B], en qualité d'expert avec pour mission :

*de compléter son rapport rendu le 29 septembre 2014 en recueillant tout élément permettant au tribunal de se prononcer

*sur l'éventuelle perte de valeur du fonds de commerce de la SARL Provence Location,

*les frais financiers hors emprunt, en vérifiant les éléments comptables et financiers permettant de déterminer le quantum de ces frais se rattachant uniquement au redressement fiscal,

*le préjudice financier allégué par M. [U] [W] en vérifiant les éléments comptables et financiers corroborant les pertes avancées au titre de « l'abandon de compte courant et de la perte de salaire »

- dit que du tout, l'expert, dans les six mois à compter de la date du versement de la consignation devra adresser un rapport qui sera déposé au greffe, en un seul exemplaire,

- dit que la société Provence Location SARL devra consigner au greffe du tribunal de commerce de Marseille la somme de 3000 € destinée à garantir le paiement des frais et honoraires de l'expert, dans le délai d'un mois à compter de l'invitation à se faire qui sera adressée par le greffe,

- condamné la société Cabinet [L] SAS aux dépens de l'instance et réservé ceux à venir,

- ordonné l'exécution provisoire,

- rejeté pour le surplus toutes autres demandes, fins et conclusions contraires aux dispositions du présent jugement.

La SAS Cabinet [L] a relevé appel de cette décision par déclaration du 14 novembre 2016, procédure n° RG 16/20279.

Par ordonnance du 13 janvier 2017, le Premier Président de la Cour d'appel de céans a rejeté la demande de suspension de l'exécution provisoire sollicitée par la SAS Cabinet [L].

La SARL Provence Location et M. [U] [W] ont alors sollicité la radiation de l'affaire sur le fondement de l'article 526 du code de procédure civile dans sa rédaction antérieure au décret du 11 décembre 2019. La décision a été exécutée et par ordonnance d'incident du 27 avril 2017, le magistrat de la mise en état a constaté le désistement des demandeurs à l'incident et dit que chaque partie supportera la charge de ses dépens d'incident.

En première instance, l'expert judiciaire a déposé son rapport le 8 mars 2018 et l'instance a été reprise.

Par jugement du 9 mai 2019, le tribunal de commerce de Marseille a :

- dit n'y avoir lieu de surseoir à statuer,

- condamné la société Cabinet [L] SAS à payer à la société Provence Location SARL la somme de 34 160 € en réparation du préjudice lié aux frais financiers, majorations et pénalités de retard se rattachant directement au redressement fiscal et celle de 2000 € au titre des dispositions de l'article 700 du code de procédure civile,

- débouté la société Provence Location SARL de sa demande d'indemnisation au titre du redressement fiscal complémentaire,

- débouté Monsieur [U] [W] de toutes ses demandes, fins et conclusions au titre des pertes de rémunération et de valeur du fonds de commerce de la société Provence Location et abandon de compte courant,

- condamné la société Cabinet [L] SAS aux dépens y compris les frais d'expertise judiciaire,

- ordonné pour le tout l'exécution provisoire,

- rejeté pour les surplus toutes autres demandes, fins et conclusions contraires.

La SARL Provence Location et Monsieur [U] [W] ont relevé appel de cette décision par déclaration du 22 mai 2019, procédure n° RG 19/835.

Par ordonnance du 17 décembre 2019, le magistrat de la mise en état a ordonné la jonction des deux procédures qui se poursuivent sous le numéro RG 16/20279.

Par conclusions du 10 février 2020, qui sont tenues pour entièrement reprises, la SAS Cabinet [L] demande à la cour de :

« Sur la décision du 27 octobre 2016

Infirmer le jugement du tribunal de commerce de Marseille en ce qu'il a déclaré la SAS [L] responsable du redressement effectué par l'administration fiscale au titre de la TVA concernant les années 2007, 2009 et 2010 du 1er janvier 2010 au 30 septembre 2010.

Infirmer le jugement du tribunal de commerce de Marseille en ce qu'il a condamné la SAS [L] à payer à la société Provence Location la somme de 181 761 € correspondant aux pénalités au titre de ce redressement de TVA.

Infirmer le jugement du tribunal de commerce de Marseille en ce qu'il a condamné la SAS [L] à payer à la société Provence Location des honoraires d'avocat à hauteur de 9674,56 euros hors-taxes afférents aux procédures devant le tribunal administratif et la cour administrative d'appel.

Infirmer le jugement du tribunal de commerce en ce qu'il a déclaré la SAS [L] responsable des conséquences pécuniaires de redressement des bénéfices industriels et commerciaux de Monsieur [W] du fait de l'acquisition par ce dernier de 100 % des parts sociales de la société Provence Location et à l'absence d'option d'imposition sur les sociétés.

Infirmer le jugement du tribunal de commerce en ce qu'il a condamné la SAS [L] à régler à Monsieur [U] [W] la somme de 416 634 € au titre de ce redressement fiscal sur ses bénéfices industriels et commerciaux.

Infirmer la décision du tribunal de commerce en ce qu'elle a condamné la SAS [L] à payer à Monsieur [U] [W] la somme de 3000 € à titre de dommages intérêts pour préjudice moral.

Infirmer le jugement du tribunal de commerce en ce qu'après avoir donné acte à la SAS [L] qu'elle ne s'était jamais opposée à la restitution des éléments comptables, lui a enjoint de restituer à la société Provence Location l'ensemble des documents et pièces comptables qu'elle détenait pour les exercices antérieurs à l'année 2011 dans le mois de la signification du jugement, et passé ce délai, sous astreinte provisoire de 50 € de retard pendant un mois.

Infirmer le jugement du tribunal de commerce en ce qu'il a condamné la SAS [L] à payer à Monsieur [U] [W] et à la société Provence Location une somme de 5000 € au titre des dispositions de l'article 700 du CPC.

Statuant à nouveau,

Au principal

Dire et juger que le montant des pénalités découlant de redressement de la TVA prise en compte par le tribunal de commerce de Marseille est erroné et qu'il s'est élevé, compte tenu du dégrèvement consenti par le Trésor public, à la somme de 130 801 € et non à celle de 181 761 €.

Dire et juger que le montant des conséquences fiscales découlant de l'imposition sur les bénéfices industriels et commerciaux de Monsieur [W], pris en compte par le tribunal de commerce de Marseille, est erroné et qu'il s'est élevé à la somme de 346 098 € et non à celle de 416 634 € compte tenu de l'inclusion de sommes étrangères au redressement pour un montant de 70 536 € correspondant à des impositions sur le revenu des années 2012 et 2014 et à la taxe d'habitation 2014 de Monsieur [W], ce que ce dernier ne conteste pas.

Dire et juger que les intimés sont seuls responsables des conséquences pécuniaires de redressement de la TVA que sont les pénalités sur la TVA année 2007 et 2009 et 2010 du 1er janvier 2010.

Dire et juger en conséquence qu'aucune condamnation ne peut être prononcée à ce titre à l'encontre de la SAS [L].

Condamner la société Provence Location à restituer à la SAS [L] la somme de 181 761 € qu'elle a réglé à ce titre à la suite de l'exécution de la décision avec intérêts de droit à compter du 27 janvier 2007 date de la remise du chèque.

Dire et juger que la responsabilité incombant aux seuls intimés, la SAS [L] ne saurait être condamnée à régler à la société Provence Location les honoraires d'un montant de 9674,56 euros qu'elle a déboursés dans le cadre des procédures devant le tribunal administratif et la cour administrative d'appel.

Condamner la société Provence Location à restituer la somme de 9674,56 euros à la SAS [L] somme qui a été réglée à la suite de l'exécution de la décision, avec intérêts de droit à compter du 27 janvier 2017 date de la remise du chèque.

Dire et juger que Monsieur [U] [W] est seul responsable des conséquences de redressement fiscal de ses bénéfices industriels et commerciaux à la suite de son acquisition de 100 % des parts sociales de la société Provence Location et de l'absence d'option d'imposition à l'impôt sur les sociétés.

Condamner Monsieur [U] [W] à restituer à la SAS [L] la somme de 416 634 € qu'elle a réglée à Monsieur [W] à la suite de l'exécution de la décision avec intérêts de droit à compter du 27 janvier 2017 date de la remise du chèque.

Dire et juger que Monsieur [W] ne peut se prévaloir d'un préjudice moral du fait des redressements de la société Provence Location et de ses bénéfices industriels et commerciaux.

Condamner Monsieur [U] [W] à restituer à la SAS [L] la somme de 3000 € qu'elle a réglée à la suite de l'exécution de la décision avec intérêts de droit à compter du 27 janvier 2017 date de la remise du chèque.

Dire et juger que ne s'étant jamais opposée à la restitution des éléments comptables que Monsieur [W] avait rapportés pour les besoins de l'expertise au Cabinet [L], il appartenait aux intimés de venir les récupérer et non à la SAS [L] de prendre en charge la restitution.

Condamner solidairement les intimés à payer à la SAS [L] la somme de 300 € qu'elle a réglée au titre des honoraires de l'huissier qui s'est chargé de la restitution.

Dire et juger que la SAS [L] n'étant pas responsable des redressements fiscaux subis par les intimés, il est inéquitable de la condamner au paiement d'une quelconque somme au titre des dispositions de l'article 700 du code de procédure.

Condamner solidairement les intimés à restituer à la SAS [L] la somme de 5000 € qu'elle a réglée à la suite de l'exécution de la décision avec intérêts de droit à compter du 27 janvier 2017 date de la remise du chèque.

Condamner solidairement Monsieur [W] et la société Provence Location au paiement au profit de la concluante d'une somme de 5000 € au titre des dispositions de l'article 700 du code de procédure civile concernant le premier jugement de première instance.

À titre subsidiaire

Dans l'hypothèse où la cour estimerait qu'il y a lieu à un partage de responsabilité entre les parties concernant la TVA,

Dire et juger que cette responsabilité ne saurait être engagée en ce qui concerne le redressement des charges liées à la signature du bail fictif, à l'utilisation du véhicule Audi appartenant à la société par le gérant, de la somme encaissée par ce dernier de la société [C] et qui revenait à la société Provence Location.

Désigner Monsieur [B] pour calculer la part dans le redressement de la TVA qui découle non de la TVA inscrite au bilan et non réglée mais du redressement des charges consécutifs à la signature du pacte commercial fictif, à l'utilisation du véhicule appartenant à la société par Monsieur [W], aux sommes remboursées par la société [C] à Monsieur [W] qui revenait à la société Provence Location.

Dans l'hypothèse où la cour estimait ne pas devoir désigner Monsieur [B],

Condamner la société Provence Location à rembourser à la SAS [L] la somme qui correspondra au trop-perçu par Monsieur [W] en fonction du pourcentage de responsabilité de chaque partie retenu par la cour.

Dans l'hypothèse où la cour estimerait qu'il y a lieu à un partage de responsabilité entre les parties concernant le redressement sur les bénéfices industriels et commerciaux de Monsieur [U] [W],

Dire et juger que ce partage de responsabilité se fera sur le montant réel du préjudice de Monsieur [W] évalué dans le rapport Equad à la somme de 59 154,43 euros, compte tenu des compensations reçues par Monsieur [U] [W] en sa qualité de propriétaire de 100 % des parts sociales de la société Provence Location, et ce, du fait de la non imposition au titre de l'impôt sur les sociétés de cette dernière.

À titre infiniment subsidiaire,

Dire et juger que le montant des conséquences fiscales découlant de l'imposition sur les bénéfices industriels et commerciaux qui se sont élevés à la somme de 346 098 € sera partagée à concurrence du pourcentage de responsabilité de chaque partie retenu par la cour.

Condamner Monsieur [W] à rembourser à la SAS [L] la somme qui correspondra au trop-perçu par Monsieur [W] en fonction du pourcentage de responsabilité de chaque partie retenu par la cour avec intérêts de droit à compter du 27 janvier 2017 date de la remise du chèque.

Sur la décision du 9 mai 2019

Confirmer le jugement du tribunal de commerce

*en ce qu'il a débouté la société Provence Location de sa demande d'indemnisation au titre du redressement fiscal complémentaire,

*en ce qu'il a débouté monsieur [U] [W] de ses demandes au titre des pertes de rémunération,

*en ce qu'il a débouté monsieur [U] [W] de ses demandes, fins et conclusions au titre des pertes de rémunération (sic),

*en ce qu'il a débouté monsieur [U] [W] de ses demandes, fins et conclusions au titre de la perte de valeur du fonds de commerce de la société Provence Location,

*en ce qu'il a débouté monsieur [U] [W] de ses demandes, fins et conclusions au titre de l'abandon de son compte courant.

Infirmer la décision :

*en ce qu'elle a condamné la société [L] au paiement de la somme de 34 272 € au profit de la société Provence Location en réparation du préjudice lié aux frais financiers, majorations et pénalités de retard se rattachant directement ou redressement fiscal,

*en ce qu'elle a condamné la société [L] au paiement de la somme de 2000 € au titre des dispositions de l'article 700 du code de procédure civile,

*en ce qu'elle a rejeté la demande de condamnation de la concluante envers la société Provence Location et Monsieur [W] au paiement de la somme de 5000 € au titre des dispositions de l'article 700 du code de procédure civile,

*en ce qu'elle a condamné la société [L] au paiement des entiers dépens d'instance comprenant les frais d'expertise.

Statuant à nouveau

Concernant les frais financiers, majorations et pénalités Urssaf et TVA

Au principal

Débouter la société Provence Location SARL de sa demande d'indemnisation concernant les frais financiers, majorations et pénalités Urssaf et TVA.

En l'état de l'exécution provisoire attachée au jugement du tribunal de commerce et du paiement de la somme de 34 172 €,

Ordonner le remboursement par la société Provence Location de cette somme à la concluante avec intérêts de droit à compter du règlement de cette dernière.

À titre subsidiaire

Dans l'hypothèse où le tribunal retiendrait une part de responsabilité de la concluante, limiter la condamnation de la concluante à une partie qu'elle appréciera de la somme de 34 172 € retenue par l'expert et par le tribunal de commerce.

Concernant l'article 700 du CPC

Débouter la société Provence Location SARL de sa demande de condamnation de la société Cabinet [L] au titre des dispositions de l'article 700 du code de procédure civile concernant la procédure de première instance.

En l'état de l'exécution provisoire attachée au jugement du tribunal de commerce du paiement intégral de l'article 700 d'un montant de 2000 €,

Ordonner le remboursement par la société Provence Location de cette somme à la concluante avec intérêts de droit à compter du règlement de cette dernière.

Condamner solidairement Monsieur [W] et la société Provence Location au paiement au profit de la concluante d'une somme de 5000 € au titre des dispositions de l'article 700 du code de procédure civile concernant le deuxième jugement de première instance.

Concernant les dépens

Au principal

Condamner la société Provence Location et Monsieur [U] [W] au paiement des entiers dépens d'instance comprenant les frais d'expertise.

En l'état de l'exécution provisoire attachée au jugement du tribunal de commerce et du paiement intégral des dépens d'un montant de 27 857,80 euros (dont 26 722,22 € de frais d'expertise),

Ordonner le remboursement par la société Provence Location de cette somme à la concluante avec intérêts de droit à compter du règlement de cette dernière.

À titre subsidiaire,

Partager les dépens de première instance.

Concernant les frais irrépétibles et les dépens d'appel

Condamner solidairement Monsieur [W] et la société Provence Location au paiement de la somme de 7000 € au titre des dispositions de l'article 700 du CPC ainsi qu'aux entiers dépens d'appel. »

Par conclusions récapitulatives du 10 février 2020, qui sont tenues pour entièrement reprises, Monsieur [U] [W] et la SARL Provence Location demandent à la cour de :

« Vu l'article 1147 du Code civil,

vu le rapport d'expertise,

vu la jurisprudence,

vu les pièces versées aux débats,

À titre principal

Dire et juger que la cour d'appel ne peut se prononcer que sur les points tranchés par le tribunal de commerce de Marseille.

Rejeter la demande d'évocation du Cabinet [L].

Débouter la société [L] de l'ensemble de ses demandes.

Confirmer le jugement du tribunal de commerce de Marseille du 27 octobre 2016 dans toutes ses dispositions à l'exception du montant du préjudice de Monsieur [W] au titre du redressement fiscal qui devra être ramené à la somme de 352 511 €.

Liquider l'astreinte ayant assorti la production des pièces comptables à la somme de 650 €.

Condamner le Cabinet [L] à régler à la SARL Provence Location la somme de 650 € à ce titre.

Dire et juger que le préjudice indemnisable de la société Provence Location doit porter sur l'intégralité des frais financiers engendrés par le paiement en une seule fois du principal de la TVA ainsi que des majorations et pénalités.

En conséquence,

Condamner le Cabinet [L] à verser à la société Provence Location au titre des frais financiers et majorations et pénalités URSSAF et TVA :

*soit la somme de 127 271 € si elle considère que l'année 2011 doit être inclue dans l'assiette du préjudice subi par la société Provence Location,

*soit la somme de 102 516 € si elle considère que l'année 2011 doit être exclue de l'assiette du préjudice subi par la société Provence Location.

Dire et juger que le préjudice indemnisable de Monsieur [U] [W] relatif à sa perte de rémunération doit contenir la perte de rémunération induite par le décaissement du rappel de TVA en principal, ainsi que des majorations et pénalités.

En conséquence,

Condamner le Cabinet [L] à verser à Monsieur [U] [W] la somme de 74 843 €.

À titre subsidiaire : si la cour considérait que le préjudice indemnisable inclut uniquement les frais financiers et perte de rémunération inhérents à la quote-part de 1/3 :

Condamner le Cabinet [L] à verser à la société Provence Location au titre des frais financiers et des majorations et pénalités Urssaf et TVA :

*soit la somme de 42 423 € si elle considère que l'année 2011 doit être inclue dans l'assiette du préjudice subi par la société Provence Location,

*soit la somme de 34 160 € si elle considère que l'année 2011 doit être exclue de l'assiette du préjudice subi par la société Provence Location.

Condamner le Cabinet [L] à verser à Monsieur [U] [W] la somme de 24 950 € au titre de la perte de rémunération.

En tout état de cause :

Condamner le Cabinet [L] à verser à la société Provence Location la somme de 46 250 € au titre du redressement fiscal complémentaire.

Condamner le Cabinet [L] à verser à Monsieur [W] la somme de 285 214,75 euros au titre du préjudice résultant de la perte de valeur du fonds de commerce de la société Provence Location.

Condamner le Cabinet [L] à verser à Monsieur [W] la somme de 184 963 euros au titre de l'abandon de son compte courant d'associé.

Condamner le Cabinet [L] à verser à Monsieur [W] la somme de 6413 € au titre des majorations qu'il a subies sur son imposition personnelle suite aux fautes du Cabinet [L].

En tout état de cause :

Rejeter toutes les demandes du Cabinet [L].

Condamner le Cabinet [L] aux entiers dépens.

Condamner le Cabinet [L] à verser à la société Provence Location et à Monsieur [U] [W] la somme de 15 000 € au titre des frais irrépétibles relatifs à la procédure d'appel en application des dispositions de l'article 700 du code de procédure civile. »

L'instruction de l'affaire a été close le 11 février 2020.

MOTIFS

Eu égard à la jonction des deux dossiers, la cour est saisie de l'entier litige et statuera sur le tout.

Obligations de l'expert comptable

L'expert-comptable est soumis au respect d'un certains nombres de règles qui ont été codifiées par le décret n° 2012-432 du 30 mars 2012 relatif à l'exercice de l'activité d'expertise comptable, comportant le code de déontologie des professionnels de l'expertise comptable, dont notamment, l'article 151 qui lui fait obligation de passer un contrat écrit avec son client définissant sa mission et précisant les droits et obligations de chacunes des parties.

Antérieurement, l'expert-comptable était soumis aux régles professionnelles élaborées par le Conseil supérieur de l'ordre des experts-comptables en 1990 puis en 2003, la norme n° 122 étant relative à la lettre de mission. Le référentiel normatif de 2003 n'est donc plus applicable depuis le 1er avril 2012, date d'entrée en vigueur du décret n° 2012-432 du 30 mars 2012.

Cependant, l'article 11 du décret n° 2007-1387 du 27 septembre 2007 portant code de déontologie des professionnels de l'expertise comptable avait donné un caractère réglementaire à la lettre de mission. Or, dans son article 3, il était précisé que ce texte entrait en vigueur le 1er jour du troisième mois de sa publication, soit le 1er décembre 2007, et que toutefois, pour les missions en cours à la date d'entrée en vigueur qui n'auraient pas fait l'objet d'un contrat écrit, les experts-comptables disposaient d'un délai d'un an pour se mettre en conformité avec ces dispositions, soit jusqu'au 1er décembre 2008.

La SAS Cabinet [L] a été l'expert-comptable de la SARL Provence Location de 2003 à 2011 et a établi notamment les comptes au titre des exercices 2007 à 2010. Certes en 2003, un contrat écrit était préconisé par les instances ordinales nationales, mais n'était pas obligatoire. Néanmoins, à compter du 1er décembre 2008,le Cabinet [L] avait l'obligation de formaliser une lettre de mission avec sa cliente, ce qu'il n'a pas fait.

Cette faute déontologique est sans incidence dans la mesure où dans la présente instance, le Cabinet [L] ne conteste pas l'étendue de sa mission, laquelle était compléte incluant outre l'établissement des comptes sociaux, la tenue de la comptabilité et les déclarations fiscales et sociales.

Des normes établies par le Conseil supérieur de l'ordre des expert-comptable, puis par décret n° 2007-1387 du 27 septembre 2007, il résulte que la SAS Cabinet [L], expert-comptable, avait à l'égard de la société Provence Location outre le devoir évident de respecter les normes comptables, un devoir d'information et de conseil, qu'elle devait remplir dans le respect des textes en vigueur. A ce titre, elle devait donner à toutes questions qui se présentaient le soin nécessaire avant de faire une proposition conforme aux textes législatifs. Dans l'hypothèse où elle constatait des anomalies, elle devait faire des réserves, un écrit étant nécessaire pour en justifier, et dans celle où elle estimait ne pas pouvoir travailler en conformité avec les régles comptables ou ses devoirs déontologique, envisager de mettre fin à sa mission.

Dans la présente instance, alors qu'elle souligne et justifie par la production de plusieurs courriels, des difficultés qu'elle a rencontrées avec la société Provence Location pour obtenir les pièces et renseignements nécessaires à l'établissement des comptes sociaux, tel que les relevés de banque ou les remises de chèques, la SAS Cabinet [L] n'a jamais formalisé par écrit de réserve lors de l'établissement des comptes annuels, soutenant l'avoir fait oralement, ce qui est déjà une première faute au regard de ses obligations d'expert-comptable, et a continué sa mission.

Sur la TVA

La vérification de comptabilité, pour la TVA, a porté sur la période du 1er janvier 2007 au 30 septembre 2010.

Pour l'année 2007, il y a eu une proposition de rectification du 20 décembre 2010, pour un rappel de TVA de 28 152 €, notamment parce que les encaissements de l'association Art Tension qui était soumis à TVA n'ont pas été déclarés.

Pour la période du 1er janvier 2008 au 30 septembre 2010, la proposition de rectification est en date du 25 juillet 2011.

Pour l'année 2008, le rappel de TVA a été de 65 931 € pour insuffisance de déclaration sur les encaissements, et de 127 400 € pour la vente de matériel à la société Provence Location Holding qui devait être soumise à la TVA, de 3062 € pour charges non justifiées, de 147 € pour facture non reçue.

Pour l'année 2009, le rappel de TVA a été de 61 128 € pour insuffisance de déclaration des encaissements.

Pour la période du 1er janvier au 30 septembre 2010, le rappel de TVA au titre de l'insuffisance de déclaration a été de 42 397 €, mais il y a eu aussi une insuffisance de déduction de -491978 €, soit un crédit de TVA de 6801 €.

Au total, la TVA éludée du 1er janvier 2007 au 30 septembre 2010 s'est élevée à 285 820 € et les pénalités ont été fixées à hauteur de 185 815 €, d'après l'avis de mise en recouvrement du 7 novembre 2011.

L'administration fiscale a majoré de 40 % les intérêts de retard aux motifs que le contrôle a révélé une insuffisance de déclaration pour chaque année contrôlée, attestée par l'existence de cette dette de TVA au passif du bilan, dette contenue dans le compte de TVA collectée et non isolée, que cette minoration systématique du chiffre d'affaires avait déjà été relevée par le service gestionnaire pour l'année 2006, que malgré l'intervention du service, aucune régularisation ou contrôle n'avait été effectué pour les années suivantes, que la dette de TVA ne pouvait qu'augmenter, et que la société Provence Location ne pouvait ignorer cette minoration systématique des déclarations de TVA.

L'administration fiscale a aussi majoré de 80 % les intérêts de retard relatifs à la vente de matériel à la société Provence Location Holding en soulignant que l'ensemble des opérations comptables et fiscales a été traité par les mêmes personnes dans les deux sociétés soeurs, et qu'elles ne pouvaient ignorer que dans le même temps la société Provence Location Holding avait demandé et obtenu un remboursement de TVA, et qu'il ne pouvait s'agir de simples erreurs comptables.

M. [B], expert judiciaire, rappelle dans son rapport du 30 septembre 2014 que la société Provence Location réalisant des prestations de services, la TVA est exigible sur l'ensemble des encaissements et compensations intervenues entre clients et fournisseurs.

Il résulte de ce rapport tout d'abord que du 1er janvier 2007 au 30 septembre 2010, l'ensemble des encaissements n'a pas été déclaré, ce qui constitue une faute de la part de l'expert-comptable qui était chargé d'établir les déclarations de TVA.

Ensuite, la SAS Cabinet [L] n'a pas respecté les normes comptables à la clôture des bilans. Au lieu d'utiliser les deux comptes « TVA collectée » et « TVA collectée à régulariser », elle a fait figurer la TVA collectée à régulariser au passif dans le même compte que la TVA sur clients dus, sans distinction. Outre que cette façon de faire est fautive, cela signifie aussi que l'expert-comptable n'a pas procéder à un contrôle de cohérence et de vraisemblance, comme il en a l'obligation.

Sur les exercices 2007, 2008 et 2009, les encaissements du client Art Vision n'ont pas été soumis à la TVA. Or l'administration fiscale a expliqué que ceux sont les prestations de l'association à but non lucratif qui ne sont pas soumises à la TVA selon l'article 261-7b du code général des impôts, et non celle de ses fournisseurs. En ne vérifiant pas ce point de droit, la SAS Cabinet [L] a failli à son obligation d'information et de conseil.

Au titre de la rectification de TVA 2008, M. [W] explique qu'il avait voulu créer une société holding, la société Provence Location Holding, afin de bénéficier notamment des avantages fiscaux que peut procurer ce montage. Cependant, par défaut de participation de la société Provence Location au capital de la société Provence Location Holding, cette dernière société est une société « soeur » et non une société holding. Dès lors, la vente de matériel à hauteur de 777 400 € à la société Provence Location Holding était soumise à la TVA. L'expert-comptable aurait dû connaître les dispositions légales applicables et a donc commis une faute en ne créant pas une entité juridique conforme aux attentes de sa cliente, puis en ne l'informant pas de la nécessité de soumettre la vente de matériel à la TVA.

Toujours au titre de la rectification de la TVA 2008, l'administration fiscale a refusé la déduction de TVA pour 3 factures d'achat manquantes. Certes la société Provence Location aurait pu demander à ses fournisseurs les duplicatas de ces factures, ce qu'elle n'a pas fait, mais surtout cela démontre que le Cabinet [L] a établi les comptes sans les pièces supports.

Au titre de 2009, M. [B] a noté en outre que le report des encaissements de la page 1 à la page 2 est inexact. Il souligne la même erreur grossière de report pour 2010, le contrôle de TVA faisant apparaître des encaissements inférieurs pour la période du 1er janvier au 31 octobre 2010 par rapport à la période du 1er janvier au 30 septembre 2010, ce qui est impossible.

Pour la rectification de TVA 2009, M. [B] souligne aussi que le Cabinet [L] qui avait le solde des fournisseurs dus, pouvait procéder à un contrôle de la TVA déductible, ce qu'elle n'a pas fait puisqu'il y a eu une insuffisance de déduction de 49 198 €.

M. [B] a conclu que les déclarations de TVA ne sont pas conformes à la réalité fiscale de la société Provence Location et que l'expert-comptable aurait dû formaliser par écrit les anomalies relevées lors de la remise des comptes annuels à sa cliente.

La SAS Cabinet [L] a ainsi commis plusieurs fautes qui sont à l'origine du redressement de la société Provence Location au titre de la TVA due pour la période du 1er janvier 2007 au 30 septembre 2010.

La société Provence Location qui n'a pas contesté ce redressement de TVA, reconnaît devoir la TVA, et sollicite la condamnation de la SAS Cabinet [L] au paiement des seules pénalités, soit la somme de 181 761 €, en commettant une erreur puisque cette somme ne correspond pas à la totalité des pénalités appliquées.

Cependant la société Provence Location a sollicité un dégrèvement qui a été partiellement accepté par une admission partielle de réclamation du 9 juillet 2012, à hauteur de 50 960 € sur les pénalités afférentes à la TVA. Ainsi les pénalités payées au titre du redressement de TVA pour la période du 1er janvier 2007 au 30 septembre 2010 s'élèvent à la somme de 134 855 € (4054 € de pénalités au titre de 2007, + 181 761 € de pénalités au titre du 01/01/2008 au 30/09/2010, - 50 960 € de dégrèvement).

Alors qu'en première instance, la société Provence Location avait déjà obtenu ce dégrèvement, elle n'en a pas moins sollicité la somme de 181 761 €.

La SAS Cabinet [L] dont les fautes sont la cause du redressement au titre de la TVA, sera condamnée à payer à la société Provence Location les pénalités y afférentes.

La lecture de la proposition de rectification du 25 juillet 2011démontre que le dossier [C], qui sera explicité ci-dessous, n'a pas donné lieu à une réintégration de TVA. Il n'y a donc lieu de déduire les pénalités de TVA correspondantes, puisqu'il n'y a pas eu de rectification de TVA à ce titre.

En conséquence, le jugement du 27 octobre 2016 sera réformé au quantum sur ce chef de demande, et la SAS Cabinet [L] sera condamnée à payer à la société Provence Location de ce chef la somme de 134 855 €.

Sur l'impôt sur le revenu de M. [W]

Pour les années 2008 et 2009, d'une part, l'administration fiscale a supprimé l'assujettissement à l'impôt sur les sociétés de la SARL Provence Location et a redressé corrélativement M. [W] au titre des bénéfices industriels et commerciaux sur les exercices de 2008 et 2009, et au titre des revenus de capitaux mobiliers sur l'exercice 2008, et d'autre part à rectifier l'assiette des revenus déclarés.

1. L'administration fiscale explique dans la proposition de rectification du 25 juillet 2011, que la réunion des parts d'une SARL entre les mains d'un seul associé personne physique entraîne un changement de régime fiscal, l'associé unique étant imposé à l'impôt sur les revenus pour les résultats de la société, sauf si la société opte expressément pour l'impôt sur les sociétés.

Au regard du procès-verbal de l'assemblée générale de la société Provence Location du 30 juin 2008 qui révèle que M. [W] est devenu le seul associé de la société Provence Location à compter du 2 novembre 2007, des liasses fiscales déposées au titre de l'exercice 2007, 2008 et 2009 desquelles il résulte qu'à compter de 2008 M. [W] était le seul associé de cette société, de ses déclarations le 16 février 2011 à l'inspecteur principal des impôts auquel il a confirmé que fin 2007, il avait acquis la part sociale que possédait Mme [Y] [P] sans que cette cession ne soit ni enregistrée, ni déclarée aux services fiscaux, l'administration fiscale a retenu que nonobstant l'absence de publication, devait être prise en compte la situation réelle de la société, soit une société constituée par un seul associé à compter de 2008.

Soutenant que la cession de la part sociale ne devait être prise en compte qu'à son enregistrement le 7 août 2012, soit postérieurement au contrôle, M. [W] a formé un recours. Mais par arrêt du 7 avril 2016, la cour administrative d'appel de Marseille a rejeté sa requête aux motifs que la réunion des parts sociales constitue le fait générateur de l'imposition immédiate des résultats à l'impôt sur le revenu du seul associé et est réalisé à la date à laquelle s'opère entre les parties le transfert de propriété des parts sociales, que ce transfert est réalisé, sauf dispositions contractuelles contraires, à la date où un accord intervient sur la chose et le prix, même si ce transfert n'est opposable aux tiers qu'à compter de son inscription au registre de la société, et que la demande d'assujettissement à l'impôt sur les société du 19 octobre 2012, ne peut modifier la situation fiscale de la société Provence Location pour les exercices clos au 31 décembre 2008 et au 31 décembre 2009.

C'est donc en vain que M. [W] et la société Provence Location soutiennent que la SAS Cabinet [L] a commis une faute en tenant pour acquise la cession de la part sociale de Mme [P] sur les seules déclarations de M. [W], et en ne vérifiant pas que la cession de parts sociales avait été formalisée, et enregistrée et/ou publiée.

Par contre, la SAS Cabinet [L] a failli à son obligation d'information et de conseil en ne prévenant pas la société Provence Location des conséquences de la réunion de toutes les parts sociales entre les mains d'une seule personne physique, soit le changement du régime fiscal, et a fortiori, de la possibilité d'opter pour l'impôt sur les sociétés.

2.Selon l'article 111 bis du code général des impôts, lorsqu'une personne morale soumise à l'impôt sur les sociétés cesse d'y être assujettie, ses bénéfices et réserves, capitalisés ou non, sont réputés distribués aux associés en proportion de leurs droits.

C'est ainsi que les réserves existant au 31 décembre 2007 et la dotation à la réserve décidée par l'assemblée générale du 30 juin 2008 ont été réintégrées aux revenus imposables de M. [W] soit la somme de 294 265 € au titre de revenus de capitaux déclarés.

3.L'administration fiscale a aussi redressé le résultat de la société sur plusieurs points.

Au titre de la minoration des recettes, l'administration fiscales a réintroduit le paiement des prestations qui auraient dû être facturées à la société Provence Location Holding, des recettes espèces, des charges injustifiées au profit du dirigeant soit le bail avec la SCI La

Queirade dont M. [W] est le gérant, des charges non justifiées, des avantages en nature non comptabilisés pour l'utilisation d'un véhicule Audi, des déductions sur factures non reçues, des passifs non justifiés constitués par des apports en compte courant indus tels des annulations de chèque, l'appréhension du remboursement du fournisseur [C], des régularisations sur sorties d'immobilier, des factures diverses à recevoir non comptabilisées.

Il y a eu aussi réintégration des salaires de M. [W] qui avaient été passés en charges, ce qui n'avait pas lieu d'être dès lors que le régime fiscal à appliquer était l'impôt sur le revenu du seul associé personne physique, et le profit sur le Trésor au titre de la TVA collectée conservée par la société.

C'est ainsi que le résultat est passé pour l'année 2008 de 110 014 € à 416 370 € , et pour l'année 2009, de 198 447 € à 296 351 €.

Sur les 19 points donnant lieu à rectification des résultats, la SAS Cabinet [L] en conteste 3 comme n'étant pas de son fait.

En premier lieu, la société Provence Location a conclu un bail avec la SCI La Queirade, pour l'entreposage de matériel, d'un terrain nu de 200 m² au loyer annuel de 24 000 € HT en 2008, surface réduite à 145 m² en 2009 pour un loyer de 17 500 € HT, sur lequel les camions de livraison ne peuvent pas man'uvrer. L'administration fiscale a considéré ce bail comme un acte anormal de gestion et donc constituant une charge non déductible des résultats. La rectification au titre de 2008 a été 24 000 € et pour 2009 de 17 500 €.

Monsieur [B] indique que le Cabinet [L] a comptabilisé les factures de loyers sur pièces justificatives. L'expert-comptable n'ayant pas à se prononcer sur le bien-fondé du bail, aucune faute ne peut lui être imputée.

En deuxième lieu, les dépenses liés à l'utilisation d'un véhicule de tourisme Audi par M. [W] ont été comptabilisées sans qu'aucune part pour usage privatif ne soit déduite. Après contrôle du planning des déplacements de M. [W], l'administration fiscale a réintroduit dans les résultats la somme de 4108 €.

Le Cabinet [L] explique que M. [W] lui avait assuré avoir un autre véhicule et qu'il n'utilisait l'Audi que pour son activité professionnelle. Cependant, compte-tenu de la difficulté matérielle de changer de véhicule selon la nature du trajet à effectuer dans la vie d'un chef d'entreprise, l'expert-comptable aurait dû attirer l'attention de sa cliente sur l'impossibilité de déduire la totalité des charges afférentes à ce véhicule. Sur ce point, la SAS Cabinet [L] a failli à son obligation d'information et de conseil qui est à l'origine de cette rectification.

En troisième lieu, la société [C] a livré du matériel à la société Provence Location mais a facturé deux fois la marchandise, soit 2 factures de 79 230 €, qui ont été payées. La société [C] a effectué le remboursement de la somme trop payée de 79 230 € sur le compte personnel de M. [W] en juillet 2009. M. [W] a alors reversé une partie de cette somme, soit 75 000 € en 2 versements en juillet 2009 de 30 000 € et août 2009 de 45 000 € sur son compte courant d'associé.

L'administration fiscale souligne qu'il n'y a pas eu remboursement de la société Provence Location puisqu'il a été créé une dette de la société à l'égard de M. [W], lequel a en outre conservé le solde de 4230 €. Elle a analysé cette man'uvre comme un prélèvement sur les résultats et a réintégré la somme de 79 230 € dans les résultats de la société Provence Location de 2009.

La SAS Cabinet [L] fait valoir avec raison que la société [C] a effectué les 2 virements de remboursement sur le compte bancaire personnel de M. [W] parce que celui-ci lui avait nécessairement communiqué ses coordonnées bancaires privées, que les montants n'étant pas exactement les mêmes et les virements provenant du compte personnel de M. [W], elle ne pouvait savoir que les versements en compte courant d'associé étaient irréguliers.

En effet, dès lors que les fonds provenaient du compte bancaire personnel de M. [W], l'expert-comptable n'avait pas à demander d'autres explications à sa cliente sur la provenance de ces sommes.

Aucune faute du Cabinet [L] n'est à l'origine de cette rectification.

Ainsi, l'administration fiscale a retenu pour 2008, un résultat rectifié avant cascade de la somme de 416 370 € et des revenus industriels et commerciaux à déclarer par M. [W] de 219 830 € pour 2008, et pour 2009, un résultat rectifié de 296 351€ et des revenus industriels et commerciaux à déclarer de 236 223 €.

Préjudice de M. [W]

Dans la mesure où les revenus de la société Provence Location ont été imposés au titre de l'impôt sur le revenu de M. [W], celui-ci a subi un préjudice qui est égal à la différence entre l'IR qu'il a payé après le contrôle et la somme de l'IS payé par la société Provence Location et l'IR payé par M. [W] avant le contrôle, avec déduction de la part de l'IR et des pénalités payées par M. [W] au titre du bail fictif avec la SCI La Queirade et du remboursement de la facture [C].

Monsieur [W] a sollicité en première instance la somme de 416 634 € au regard d'un courrier incomplet en date du 7 septembre 2015 de l'administration fiscale. En appel la SAS Cabinet [L] indique que le redressement portant sur les années 2008 et 2009 est à hauteur de 346 098 € et M. [W] reconnaît que la somme qui lui a été alloué en première instance de ce chef doit être réduite à 352 511 €. En effet, la somme de 416 634 € englobe des impôts sur le revenu dus par M. [W] au titre de l'année 2013 et 2014, sa taxe d'habitation 2014, et des contributions sociales 2008 qui ne sont pas l'objet du redressement de l'IR au titre des années 2007 et 2008.

Alors que M. [W] sollicite une indemnisation au titre du contrôle fiscal qu'il a subi ensuite de la vérification de comptabilité de la société Provence Location, il ne produit pas ce document reçu de l'administration fiscale, lequel n'est pas non plus annexé aux 2 rapports de M. [B].

Seront donc retenus les chiffres communiqués à M. [B] au cours de la première expertise, qui n'ont pas été contestés et qui sont confirmés par le bordereau de situation édité par l'administration fiscale le 8 septembre 2015, soit la pièce 30 de la SAS Cabinet [L].

Il résulte ainsi du rapport de M. [B], page 30, qu'avant le redressement, M. [W] a payé au titre de l'IR en 2008 la somme de 23 342 €, et en 2009 la somme de 28 856 €.

Après le redressement, il a dû payer en 2008 la somme 155 926 € avec une pénalité de 25 376 €, et en 2009, une somme 83 993 € avec une pénalité de 796 €.

La différence est à ce stade de 213 893 €.

De cette somme doit être déduite la somme remboursée à la société Provence Location au titre de l'impôt sur les sociétés, soit d'après l'admission partielle de réclamation du 9 juillet 2012, la somme de 88 843 € (29 683 pour 2008 et 59 160 € pour 2009).

Enfin doit être déduit l'impôt et les pénalités générés par la réintégration dans les résultats des charges au titre du bail fictif et du simulacre de remboursement de la société [C] qui ne sont pas imputables à la SAS Cabinet [L].

En 2008, cette réintégration s'est élevée à la somme de 24 000 € soit 5,76 % du résultat rectifié de la société Provence Location d'après les chiffres retenus par l'administration fiscale dans la proposition de rectification du 25 juillet 2011, et les BIC ont représenté 39,38 % des revenus de M. [W] d'après son avis d'impôt sur les revenus de 2008, (annexe 12 du 1er rapport de M. [B]).

L'impôt et les pénalités s'élevant à 181 302 €, il sera déduit la somme de 4112 € (5,76 % de 39,38 % de 181 302).

En 2009, la réintégration non imputable à une faute de l'expert-comptable s'est élevée à la somme de 96 730 € (17 500 + 79 230), soit 32,64 % du résultat rectifié, et les BIC ont représenté les seuls revenus de M. [W] d'après l'avis sur les revenus de 2009 (annexe 12 du rapport de M. [B]).

L'impôt et les pénalités s'élevant à 84 789 €, il sera déduit la somme de 27 675 € (32,64  % de 84 789).

Ainsi, sans qu'il y ait lieu de commettre à nouveau M. [B] en qualité d'expert, le préjudice de M. [W] est fixé à la somme de 93 263 € (213 893 - 88 843 - 4112 - 27 675).

Le jugement du 27 octobre 2016 sera réformé en son quantum au titre du préjudice de M. [W], et la SAS Cabinet [L] sera condamnée à lui payer la somme de 93 263 € de ce chef.

Sur les honoraires d'avocats

Les honoraires sont relatifs à l'assistance d'avocat au contrôle fiscal et à la procédure devant les juridictions administratives par laquelle M. [W] a tenté d'obtenir une réformation quant à la cession de la part sociale de Mme [P], et au changement de régime fiscal. Ils sont donc en lien avec les fautes retenues à l'encontre de la SAS Cabinet [L].

C'est pourquoi le jugement du 27 octobre 2016 qui a condamné l'expert-comptable au paiement de ces honoraires de 9 674, 56 € sera confirmé.

Sur le préjudice moral

Le contrôle fiscal de la société Provence Location qui est très majoritairement imputable aux fautes commises par la SAS Cabinet [L], a entraîné le redressement de M. [W], pour des sommes conséquentes, comme il vient d'être exposé. Ces 2 redressements conjoints ont perturbé la vie privée de M. [W], comme en atteste Mme [N], qui était sa compagne avant les contrôles fiscaux et jusqu'en décembre 2014.

Conformément à la demande de M. [W], le jugement du 27 octobre 2016 qui lui a alloué de ce chef la somme de 3000 € sera confirmé.

Sur la restitution des pièces comptables

La société Provence Location produit un courrier du 30 mai 2013 dans lequel elle demande à la SAS Cabinet [L] la restitution de ses dossiers. Mais ce courrier est antérieur aux premières opérations expertales de M. [B] qui se sont déroulées du 30 mai 2013 au 30 septembre 2014. Au demeurant, d'un commun accord, l'expertise s'est déroulée dans les locaux de l'expert-comptable jusqu'en 2014. La société Provence Location ne justifiant pas avoir demandé la restitution des pièces comptables après l'exécution de la mesure d'instruction, le jugement déféré, qui avait acté la volonté de la SAS Cabinet [L] de restituer les pièces, sera réformé en ce qu'il l'a condamnée à s'exécuter sous astreinte. En conséquence, la société Provence Location sera déboutée de sa demande de liquidation de l'astreinte à la somme de 650 €.

Compte tenu des relations conflictuelles existant entre les parties, le recours à un huissier s'imposait. Dès lors que la condamnation sous astreinte est réformée, la société Provence Location sera condamnée à payer à la SAS Cabinet [L] la somme de 300 € au titre du coût de l'intervention de l'officier ministériel.

Sur les frais financiers hors emprunt et les pénalités Urssaf et TVA

Un préjudice économique est indemnisable s'il est direct et certain, en lien avec la ou les fautes établies.

Aux motifs que le redressement de TVA a entraîné pour elle des frais financiers et des retards de paiement au titre de l'Urssaf et de la TVA, qui sont distincts des frais financiers générés par la souscription en 2012 d'un prêt auprès du Crédit Agricole à la suite de l'édification d'un entrepôt, la société Provence Location sollicite être indemnisée de ce préjudice qu'elle impute aux fautes de la SAS Cabinet [L] à hauteur de 121 271 € ou 106 516 € selon que sont prises en compte les difficultés financières à compter de 2011 ou 2012.

Dans sa deuxième mission, M. [B] a ainsi dû analyser les comptes sociaux qui ont été établis par le successeur de la SAS Cabinet [L]. L'expert a souligné en remarques liminaires que les documents communiqués par les demandeurs, soit M. [W] et la société Provence Location, étaient pour certains incomplets et qu'il n'a pu procéder à toutes les opérations de vérification comptable utiles à former son opinion, et que de manière générale, l'analyse de la comptabilité a été laborieuse , le libellé des écritures étant souvent peu explicite, les recoupements malaisés, ce qui affecte la lisibilité des opérations, dont certaines sont quelque peu opaques.

Monsieur [B] a examiné les comptes de la société de 2011 à 2016, soit depuis l'année de l'avis de mise en recouvrement, à l'année où la société Provence Location a obtenu un plan de sauvegarde. En effet, par jugement du 28 juillet 2016, le tribunal de commerce d'Aix en Provence a ouvert une procédure de sauvegarde au bénéfice de la société Provence Location, et par jugement du 15 novembre 2016 a adopté un plan de sauvegarde sur 8 ans avec un remboursement du passif à 100 %.

Les frais financiers liés à un paiement immédiat d'un rappel de TVA et des pénalités alors qu'il aurait dû être étalé dans le temps peut constituer un préjudice indemnisable en lien avec le contrôle fiscal.

Cependant, il résulte du rapport de M. [B] que la société Provence Location a commencé à payer en février 2013, et a obtenu de l'administration fiscale en 2013, puis en 2015 un étalement desdits paiements qui se sont terminés en 2016. Ces 2 pièces ne sont pas produites par la société Provence Location et n'ont pas été jointes en annexe du rapport de M. [B]. Il n'est donc pas possible de connaître ce qui a été accordé comme échéancier quant au principal et aux pénalités. En toute hypothése, la société Provence Location n'a pas payé les termes du redressemnt fiscal en une seule fois.

C'est pourquoi dans la présente instance, les difficultés de trésorerie liées au contrôle fiscal ont été compensées par l'avantage de trésorerie dont a bénéficié la société Provence Location par le non-paiement de la totalité de la TVA de 2007 à 2012, soit pendant 5 ans, et son paiement de 2013 à 2016.

En outre, M. [B] a démontré dans son rapport que les difficultés financières de la société Provence Location sont apparues dès 2011, soit 2 ans avant le début du paiement du redressement fiscal, ensuite de l'édification de l'entrepôt en 2011, et de la souscription tardive du prêt de 500 000 € souscrit notamment pour équilibrer la trésorerie, lequel prêt de ce fait n'a pas été obtenu à des conditions avantageuses. La réticence de la banque du fait du contrôle fiscal est donc aussi une hypothèse non démontrée.

En conséquence, les difficultés financière de la société Provence Location ne sont pas en lien avec le contrôle fiscal de 2011.

La société Provence Location sera déboutée de cette demande et le jugement déféré du 9 mai 2019 sera infirmé.

Sur le contrôle fiscal de 2016

Courant 2016, la société Provence Location a fait l'objet d'un contôle de comptabilité sur les année 2013 et 2014, que les parties nomment de façon erronnée contrôle fiscal complémentaire. La proposition de rectification du 31 mai 2016 a porté sur l'impôt sur les sociétés de l'année 2014 au motif que la société Provence Location a comptabilisé en charges exceptionnelles des créances sur des clients qui n'étaient pas justifiées ou qui ne se rapportaient pas à l'exercice de 2014. Ainsi le résultat fiscal de l'entreprise a été relevé

de la somme de + 245 277 €, soit de 13 483 € à 259 360 €.

Monsieur [W] a expliqué à l'inpectrice des finances que ses créances avaient été maintenues dans sa comptabilité suite aux erreurs commises par le Cabinet [L], et qu'il avait voulu ainsi régularisé sa comptabilité.

Ensuite de l'avis de la Commission départementale des impôts directs et des taxes sur le chiffre d'affaires du 7 juillet 2017, l'administration a notifié le 20 juillet 2017 à la société Provence Location un résultat fiscal rectifié ramené à la somme de 159 449 €, et des droits dus à hauteur de 44 139 € et des pénalités de 2119 €.

La Société Provence Location sollicite la somme de 46 258 € qu'elle estime imputable à la SAS Cabinet [L]. Cependant l'erreur de traitement des enregistrements comptables incorrects en vue de leur régularisation, qui n'aurait pas dues être mentionées en charges exceptionnelles, n'est pas imputable à la SAS Cabinet [L], qui n'était plus l'expert comptable de la SCI Provence Location.

C'est pourquoi la société Provence Location sera déboutée de ce chef de demande.

Le contrôle de comptabilité de 2016 a aussi porté sur la cotisation sur la valeur ajoutée des entreprises de 2014 qui n'a pas été contestée par la société Provence Location, et qui d'évidence n'est pas imputable à la SAS Cabinet [L].

Sur l'abandon de son compte courant par M. [W]

Monsieur [W] sollicite la somme de 184 963 € au titre du compte courant d'associé qu'il a abandonné en 2015 eu égard aux difficultés financières de la société Provence Location.

Dans la mesure où la cour ne retient pas que les difficultés financières de la société Provence Location sont en lien avec le contrôle fiscal ayant porté sur les années 2007 à 2010, M. [W] ne peut imputer sa décision d'abandon de son compte courant d'associé, au demeurant contesté dans son quantum, aux fautes commises par la société Cabinet [L]. Il sera débouté de ce chef de demande.

Sur la perte de rémunération

Monsieur [W] sollicite la somme de 24 950 € au titre de sa perte de rémunération en soutenant qu'il n'a pu percevoir la rémunération à laquelle il aurait pu prétendre en l'absence de redressement fiscal.

La rémunération du chef d'entreprise varie en fonction des résultats de l'entreprise, et des difficultés financières qu'elle peut avoir. Toutefois, comme il a été déjà explicité, les difficultés financières de la société Provence Location ne sont pas imputables aux fautes commises par la SAS Cabinet [L]. Monsieur [W] sera donc aussi débouté de cette demande.

Sur la perte de valeur du fonds de commerce

Monsieur [W] sollicite la somme de 285 214,75 € au titre de la perte de valeur du fonds de commerce de la société Provence Location qui serait imputable au redressement fiscal.

Le libellé de cette demande rappelle que le fonds de commerce est la propriété de la société Provence Location. M. [W] aurait pu à la rigueur solliciter la perte de valeur des parts sociales composant le capital social qui lui appartient en totalité, ce qu'il ne fait pas dans ses dernières écritures.

De plus, M. [W] a évalué la valeur du fond de commerce d'une part sur la valeur comptable par rapport aux pertes des réserves, chiffrage qui ne répond pas aux critères d'évaluation habituellement retenus en la matière, et en second lieu sur la perte d'activité à compter de 2011, laquelle ne peut être imputable aux fautes de la SAS Cabinet [L].

Monsieur [B] a conclu qu'il ne pouvait conclure à la réalité de ce préjudice, et encore moins le chiffrer.

Monsieur [W] sera donc débouté de ce chef de demande.

Sur les majorations subies par M. [W] sur son imposition personnelle

Monsieur [W] soutient qu'en raison des fautes commises par le Cabinet [L], il n'a pu régler son imposition sur le revenu 2013 et 2014 ce qui a entraîné des majorations de 6413 €. D'après le jugement du 9 mai 2009, cette demande n'apparaît pas avoir été présentée en première instance, ce qui n'est pas soulevé par la société Cabinet [L].

Cependant, il résulte du bordereau de situation du 8 septembre 2015 établi par l'administration fiscale, qu'à cette date, M. [W] n'avait pas non plus payé le redressement fiscal consécutif au changement de régime fiscal. Il n'y a donc pas de lien entre le redressement fiscal et le non-paiement de l'impôt sur le revenu de 2013 et 2014.

Monsieur [W] sera aussi débouté de cette demande.

Sur les autres demandes

Le présent arrêt qui réforme les 2 jugements déférés, emportent de droit obligation pour la société Provence Location et M. [W] de rembourser les sommes trop versées par la SAS Cabinet [L] en exécution provisoire des décisions attaquées. Il n'y a donc lieu d'ordonner le dit remboursement.

De plus, il est précisé que les paiements effectués l'ayant été par la société Cabinet [L] en exécution de décisions de justice, les sommes à rembourser par la société Provence Location et M. [W] ne sont assorties d'intérêts au taux légal qu'à compter du présent arrêt.

Au titre de l'article 700 du code de procédure civile, seule la décision du 27 octobre 2016 qui a alloué à M. [W] et à la SARL Provence Location la somme de 5000 € sera confirmée. En appel, l'équité ne commande pas de faire application des dispositions de l'article 700 du code de procédure civile.

La SAS Cabinet [L] sera condamnée aux entiers dépens qui comprendront les frais d'expertise, et sera déboutée de sa demande au titre de l'article 700 du code de procédure civile.

PAR CES MOTIFS

La Cour,

Statuant publiquement, par arrêt contradictoire,

Confirme le jugement du 27 octobre 2016 en ce qu'il a condamné la SAS Cabinet [L] à payer à la SARL Provence Location la somme de 9674,56 € aux titre des honoraires d'avocat, en ce qu'il a condamné la SAS Cabinet [L] à payer à M. [U] [W] la somme 3000 € au titre de son préjudice moral, en ce qu'il a donné acte à la SAS Cabinet [L] de ce qu'elle ne s'est jamais opposée à la restitution des pièces comptables, en ce qu'elle a condamné la SAS Cabinet [L] à payer à M. [U] [W] et la SARL Provence Location la somme de 5000 € au titre de l'article 700 du code de procédure civile, en ce que, avant dire droit, il a ordonné une expertise confiée à M. [M] [B], en ce qu'il a ordonné l'exécution provisoire pour le tout, et en ce qu'il a condamné la SAS Cabinet [L] aux dépens,

L'infirme pour le surplus,

Confirme le jugement du 9 mai 2019 en ce qu'il a débouté la SARL Provence Location de sa demande d'indemnisation au titre du redressement fiscal de 2016, en ce qu'il a débouté M. [U] [W] de ses demandes au titre de la perte de rémunération, de l'abandon de son compte courant d'associé, et de perte de la valeur du fonds de commerce, en ce qu'il a condamné la SAS Cabinet [L] aux dépens y compris les frais d'expertise, et en ce qu'il a ordonné pour le tout l'exécution provisoire,

L'infirme pour le surplus,

Y ajoutant,

Condamne la SAS Cabinet [L] à payer à la SARL Provence Location la sommes de 134 855 € correspondant aux pénalités dues au titre de la TVA redressée du 1er janvier 2017 au 30 septembre 2010,

Condamne la SAS Cabinet [L] à payer à M. [U] [W] la somme de 93 263 € au titre de son redressement fiscal sur l'impôt sur le revenu,

Condamne la SARL Provence Location et M. [U] [W] à payer à la SAS Cabinet [L] la somme de 300 € au titre des frais d'huissier engagés pour la restitution des pièces comptables,

Déboute la SARL Provence Location de sa demande d'indemnisation au titre des frais financiers hors frais d'emprunt et les pénalités Urssaf et TVA,

Déboute M. [U] [W] de sa demande d'indemnisation au titre des majorations sur son imposition personnelle,

Précise que les sommes à rembourser par la SARL Provence Location et M. [U] [W] sont assorties de l'intérêts au taux légal à compter du présent arrêt,

Déboute les parties de leurs autres demandes plus amples ou contraires,

Dit n'y avoir lieu à application de l'article 700 du code de procédure civile en cause d'appel,

Condamne la SAS Cabinet [L] aux entiers dépens d'appel.

LE GREFFIERLE PRÉSIDENT


Synthèse
Tribunal : Cour d'appel d'Aix-en-Provence
Formation : Chambre 3-4
Numéro d'arrêt : 16/20279
Date de la décision : 04/06/2020

Références :

Cour d'appel d'Aix-en-Provence 8C, arrêt n°16/20279 : Confirme la décision déférée dans toutes ses dispositions, à l'égard de toutes les parties au recours


Origine de la décision
Date de l'import : 27/03/2024
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.appel;arret;2020-06-04;16.20279 ?
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