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14/02/2020 | FRANCE | N°17/16687

France | France, Cour d'appel d'Aix-en-Provence, Chambre 4-3, 14 février 2020, 17/16687


COUR D'APPEL D'AIX EN PROVENCE

Chambre 4-3



ARRÊT AU FOND



DU 14 FEVRIER 2020



N°2020/ 63





RG 17/16687

N° Portalis DBVB-V-B7B-BBFGZ







[I] [M]





C/



Société REGIE DES TRANSPORTS DE MARSEILLE - RTM









Copie exécutoire délivrée le :



à :



- Me Emilie MILLION-

ROUSSEAU, avocat au barreau de MARSEILLE



- Me Béatrice DUPUY, avocat au barreau de MARSEILLE

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Décision déférée à la Cour :



Jugement du Conseil de Prud'hommes - Formation paritaire de MARSEILLE - section C - en date du 20 Février 2014, enregistré au répertoire général sous le n° 12/3809.





APPELANT



Monsieur [I] [M], demeurant [Adresse 2]...

COUR D'APPEL D'AIX EN PROVENCE

Chambre 4-3

ARRÊT AU FOND

DU 14 FEVRIER 2020

N°2020/ 63

RG 17/16687

N° Portalis DBVB-V-B7B-BBFGZ

[I] [M]

C/

Société REGIE DES TRANSPORTS DE MARSEILLE - RTM

Copie exécutoire délivrée le :

à :

- Me Emilie MILLION-

ROUSSEAU, avocat au barreau de MARSEILLE

- Me Béatrice DUPUY, avocat au barreau de MARSEILLE

Décision déférée à la Cour :

Jugement du Conseil de Prud'hommes - Formation paritaire de MARSEILLE - section C - en date du 20 Février 2014, enregistré au répertoire général sous le n° 12/3809.

APPELANT

Monsieur [I] [M], demeurant [Adresse 2]

représenté par Me Emilie MILLION-ROUSSEAU, avocat au barreau de MARSEILLE substituée par Me Lou KONITZ, avocat au barreau de MARSEILLE

INTIMEE

Société REGIE DES TRANSPORTS DE MARSEILLE - RTM, demeurant [Adresse 1]

représentée par Me Béatrice DUPUY, avocat au barreau de MARSEILLE substituée par Me Marine ALBRAND, avocat au barreau de MARSEILLE

*-*-*-*-*

COMPOSITION DE LA COUR

En application des dispositions de l'article 945-1 du Code de Procédure Civile, l'affaire a été débattue le 10 Décembre 2019, en audience publique, les parties ne s'y étant pas opposées, devant Madame Erika BROCHE, Conseiller, chargée d'instruire l'affaire.

Ce magistrat a rendu compte des plaidoiries dans le délibéré de la Cour composée de :

Madame Dominique DUBOIS, Président de Chambre

Madame Frédérique BEAUSSART, Conseiller

Madame Erika BROCHE, Conseiller

Greffier lors des débats : Mme Nadège LAVIGNASSE.

Les parties ont été avisées que le prononcé de la décision aurait lieu par mise à disposition au greffe le 14 Février 2020.

ARRÊT

CONTRADICTOIRE

Prononcé par mise à disposition au greffe le 14 Février 2020

Signé par Madame Dominique DUBOIS, Président de Chambre et Madame Florence ALLEMANN-FAGNI, greffier auquel la minute de la décision a été remise par le magistrat signataire.

***

FAITS, PROCÉDURE ET PRÉTENTIONS DES PARTIES

M. [M], salarié de la RTM, a saisi , ainsi que plusieurs de ses collègues ouvrier mécanicien, carrossier, peintre, électricien au sein du garage RTM Arene intervenant sur les autobus de la Régie, le conseil de prud'hommes de Marseille aux fins de voir juger notamment que le temps qu'il consacre à l'habillage et au déshabillage de sa tenue de travail doit être assimilé à du temps de travail effectif et, d'autre part, que les frais d'entretien de ces tenues doivent être à la charge de l'employeur.

Par jugement du 20 février 2014, le conseil de prud'hommes de Marseille l'a débouté de toutes ses demandes et condamné aux dépens.

M. [M] a interjeté appel de cette décision le 18 mars 2014.

Dans un arrêt du 18 mars 2016, la cour d'appel d'Aix en Provence a donné raison aux collègues de travail de M. [M], placés dans la même situation que lui.

Par arrêt du 5 juillet 2017, la cour de cassation a rejeté le pourvoi formé par la RTM sur l'indemnité d'habillage.

Dans ses dernières conclusions en date du 25 novembre 2019 , auxquelles il est expressément référé pour un plus ample exposé des prétentions et des moyens, M. [M] demande à la cour de :

Vu l'article L. 3121-3 du Code du travail,

Vu la Convention collective applicable,

Vu les pièces versées au débat,

Vu les articles 700, 381, 385 et 386 du CPC,

- dire et juger que la péremption de l'instance ne pourra être retenue,

- condamner la RTM à payer à Monsieur [M] la somme de 5 287,38 euros bruts à titre d'indemnité d'habillage pour la période du 17 décembre 2007 au 4 août 2017 ;

- ordonner à la RTM de verser chaque mois à Monsieur [M] à l'avenir une indemnité correspondant à un temps d'habillage de 10 minutes par jour ;

- condamner la société RTM à payer à Monsieur [M] la somme de 200 euros nets de CSG-CRDS à titre d'indemnité pour violation de l'exécution de bonne foi du contrat de travail ;

- condamner la société RTM à payer à Monsieur [M] la somme de 1 500 € sur le fondement de l'article 700 du Code de Procédure Civile ;

- dire et juger que les sommes porteront intérêts à compter du jour de la demande en justice et que les intérêts de ces sommes seront capitalisés.

Dans ses dernières conclusions en date du 29 octobre 2019, auxquelles il est expressément référé pour un plus ample exposé des prétentions et des moyens, la RÉGIE DES TRANSPORTS MÉTROPOLITAINS (RTM) demande à la cour de :

Vu l'arrêt de radiation rendu le 14 octobre 2016 par la cour d'appel d'Aix en Provence mettant des diligences à la charge de l'appelant ;

Vu l'article 381 du CPC,

- constater que M. [M] n'a remis son affaire au rôle et n'a donc accompli les diligences mises à sa charge qu'au mois de juillet 2019, alors que la péremption était acquise au 14 décembre 2018 ;

- au principal, constater la péremption de l'action et débouter en conséquence M. [M] de l'ensemble de ses demandes, fins et prétentions ;

Subsidiairement,

Vu l'arrêt rendu par la cour d'appel d'Aix en Provence le 18 mars 2016 ;

- dire et juger que M. [M] ne pourrait prétendre qu'au paiement d'une somme de 4232,35 € au titre du temps d'habillage impayé entre le mois de décembre 2007 et le mois d'avril 2016 ; si son action n'était pas prescrite.

- débouter plus particulièrement de sa demande formulée au titre de l'article 700 du code de procédure civile puisqu'il a initié sa procédure en 2012 pour la suspendre jusqu'en 2019.

SUR CE

- Sur la péremption :

La RTM soutient que l'instance est périmée car par arrêt du 14 octobre 2016 ordonnant la radiation de l'affaire, la cour d'appel de céans a mis à la charge de M. [M] des diligences à accomplir et indiqué expressément qu'à défaut d'exécution dans un délai de 2 ans courant à l'expiration d'un délai de deux mois après la notification de l'arrêt, la péremption d'instance sera encourue en application de l'article 386 du code de procédure civile.

Or , selon la RTM, alors que l'arrêt a été notifié aux parties le 14 octobre 2016 et que le délai de deux mois expirait donc le 14 décembre 2016, que par conséquent le délai de péremption de deux ans expirait le 14 décembre 2018, M. [M] n'aurait remis l'affaire au rôle qu'en juillet 2019.

Mais M. [M] démontre que le 21 août 2017, il a communiqué à la cour par lettre recommandée avec accusé de réception ses conclusions aux fins de réenrôlement, le bordereau de pièces, la justification de la communication à la partie adverse de ses conclusions et pièces ainsi que la copie de l'arrêt de radiation de la cour.

Il s'en suit que M. [M] a accompli dans le délai imparti les diligences qui lui étaient imposées et que la péremption d'instance n'est pas encourue.

- Sur la rémunération du temps d'habillage

En application de l'article L 3121-3 du code du travail, le temps nécessaire aux opérations d'habillage et de déshabillage fait l'objet de contreparties. Ces contreparties sont accordées soit sous forme de repos, soit sous forme financière, lorsque le port d'une tenue de travail est imposé par des dispositions légales, par des stipulations conventionnelles, le règlement intérieur ou le contrat de travail et que l'habillage et le déshabillage doivent être réalisés dans l'entreprise ou sur le lieu de travail.

Ces contreparties sont déterminées par convention ou accord collectif de travail ou, à défaut, par le contrat de travail, sans préjudice des clauses des conventions collectives, de branche, d'entreprise ou d'établissement, des usages ou des stipulations du contrat de travail assimilant ces temps d'habillage et de déshabillage à du temps de travail effectif.

M. [M] , au vu du caractère obligatoire du port d'une tenue de travail, de l'obligation de s'habiller et de se déshabiller sur le lieu de travail, réclame l'indemnisation de ce temps d'habillage et de déshabillage.

L'employeur, au vu de la décision de la cour d'appel de céans en date du 18 mars 2016 et de l'arrêt de la cour de cassation rejetant son pourvoi dans une affaire similaire, ne s'oppose pas au principe de la demande.

Il y a lieu de lui en donner acte.

Elle soutient seulement que le salarié ne peut prétendre à aucune somme pour la période postérieure au mois de mars 2016 au motif qu'à compter de cette date, une note de service a été établie pour définir le temps d'habillage et les conditions de son indemnisation pour ceux qui voulaient en profiter et que M. [M], qui n'a pas sollicité un paiement à ce titre entre le mois de mars 2016 et le mois de juillet 2019, ne peut aujourd'hui s'en plaindre.

Cette note de service dispose que 'pour les salariés qui choisissent de se changer sur le lieu de travail, ils bénéficient jusqu'à dix minutes d'un temps d'habillage à compter de leur heure de prise de service.'

Cependant, d'une part, cette note de service n'indique pas qu'il appartenait aux salariés de revendiquer ces 10 minutes de travail supplémentaires et , en tout état de cause , il appartient à l'employeur de payer le salaire dû et non au salarié de le réclamer.

Cette note ne saurait faire obstacle aux dispositions de l'article L 3121-3 du code du travail par ailleurs.

M. [M] est donc bien fondé à réclamer paiement de son temps d'habillage et de déshabillage à hauteur de 10 minutes par jour à compter de décembre 2017, le conseil de prud'hommes ayant été saisi le 17 décembre 2012 et jusqu'au 4 août 2017, soit la somme de 5287,38 € et d'ordonner le versement à compter de cette dernière date de la dite indemnité.

- Sur les dommages et intérêts pour violation de l'exécution de bonne foi du contrat de travail

M. [M] réclame la somme de 200 € net à titre de dommages et intérêts pour violation de l'exécution de bonne foi du contrat de travail résultant du refus intentionnel de l'employeur d'appliquer pendant de nombreuses années l'article L 3121-3 du code du travail.

Malgré la loi, les demandes des salariés, l'arrêt de la cour du 18 mars 2016 concernant une affaire exactement semblable , l'arrêt de la cour de cassation de 2017, l'employeur a persisté à ne pas accorder l'indemnisation de ce temps d'habillage et de déshabillage alors qu'il aurait pu mettre amiablement fin au litige.

M. [M] a de ce fait été privé pour partie de son salaire pendant de nombreuses années.

Il y a donc lieu de faire droit à sa demande.

- Sur les autres demandes

L'employeur qui succombe sera condamné aux entiers dépens ainsi qu'à payer la somme de 1500€ au titre de l'article 700 du code de procédure civile à M. [M];

PAR CES MOTIFS

La Cour,

Statuant par arrêt contradictoire, par mise à disposition au greffe, les parties en ayant été préalablement avisées dans les conditions prévues à l'article 450 du code de procédure civile, en matière prud'homale,

Infirme le jugement déféré en ce qu'il a débouté M. [M] de sa demande formée au titre du temps d'habillage et de déshabillage, de sa demande de dommages et intérêts , de sa demande formée au titre de l'article 700 du code de procédure civile, et en ce qu'il l'a condamné aux dépens.

Statuant à nouveau sur ces points, y ajoutant,

Dit que la péremption d'instance n'est pas acquise.

Condamne la RTM à payer à Monsieur [M] la somme de 5 287,38 euros bruts à titre d'indemnité d'habillage pour la période du 17 décembre 2007 au 4 août 2017 ;

Ordonne à la RTM de verser chaque mois à Monsieur [M] à compter du 4 août 2017 une indemnité correspondant à un temps d'habillage de 10 minutes par jour ;

Condamne la société RTM à payer à Monsieur [M] la somme de 200 euros nets de CSG-CRDS à titre d'indemnité pour violation de l'exécution de bonne foi du contrat de travail ;

Condamne la société RTM à payer à Monsieur [M] la somme de 1500 € sur le fondement de l'article 700 du Code de Procédure Civile ;

Dit que les sommes allouées au titre de l'indemnité d'habillage porteront intérêts à compter du jour de la demande en justice , que les sommes allouées à d'autres titres porteront intérêt au taux légal à compter du présent arrêt et que les intérêts de ces sommes seront capitalisés.

Condamne la société RTM aux entiers dépens.

LE GREFFIERLE PRESIDENT


Synthèse
Tribunal : Cour d'appel d'Aix-en-Provence
Formation : Chambre 4-3
Numéro d'arrêt : 17/16687
Date de la décision : 14/02/2020

Références :

Cour d'appel d'Aix-en-Provence 9C, arrêt n°17/16687 : Infirme partiellement, réforme ou modifie certaines dispositions de la décision déférée


Origine de la décision
Date de l'import : 27/03/2024
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.appel;arret;2020-02-14;17.16687 ?
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