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19/12/2019 | FRANCE | N°17/14372

France | France, Cour d'appel d'Aix-en-Provence, Chambre 4-5, 19 décembre 2019, 17/14372


COUR D'APPEL D'AIX-EN-PROVENCE

Chambre 4-5



ARRÊT AU FOND

DU 19 DECEMBRE 2019



N° 2019/

MS











Rôle N° RG 17/14372 - N° Portalis DBVB-V-B7B-BA7A5







[L] [C]





C/



SCS BARCLAY'S PATRIMOINE

























Copie exécutoire délivrée

le : 12 décembre 2019



à :



- Me Thierry DE SENA, avocat au barreau de NICE




- Me Marie-line BROM, avocat au barreau de GRASSE

























Décision déférée à la Cour :



Jugement du Conseil de Prud'hommes - Formation paritaire de CANNES en date du 23 Juin 2017 enregistré(e) au répertoire général sous le n° F 16/00587.





APPELANT



Monsieur [L] [C]

demeu...

COUR D'APPEL D'AIX-EN-PROVENCE

Chambre 4-5

ARRÊT AU FOND

DU 19 DECEMBRE 2019

N° 2019/

MS

Rôle N° RG 17/14372 - N° Portalis DBVB-V-B7B-BA7A5

[L] [C]

C/

SCS BARCLAY'S PATRIMOINE

Copie exécutoire délivrée

le : 12 décembre 2019

à :

- Me Thierry DE SENA, avocat au barreau de NICE

- Me Marie-line BROM, avocat au barreau de GRASSE

Décision déférée à la Cour :

Jugement du Conseil de Prud'hommes - Formation paritaire de CANNES en date du 23 Juin 2017 enregistré(e) au répertoire général sous le n° F 16/00587.

APPELANT

Monsieur [L] [C]

demeurant [Adresse 3]

représenté par Me Thierry DE SENA, avocat au barreau de NICE substitué par Me Lise KLINGUER, avocat au barreau de NICE

INTIMEE

SCS BARCLAY'S PATRIMOINE, demeurant [Adresse 1]

représentée par Me Marie-line BROM, avocat au barreau de GRASSE

*-*-*-*-*

COMPOSITION DE LA COUR

En application des dispositions des articles 785 et 786 du code de procédure civile, l'affaire a été débattue le 24 Septembre 2019, en audience publique, les avocats ne s'y étant pas opposés, devant Madame Michelle SALVAN, Président de Chambre, chargé du rapport, qui a fait un rapport oral à l'audience, avant les plaidoiries.

Ce magistrat a rendu compte des plaidoiries dans le délibéré de la cour, composée de :

Madame Michelle SALVAN, Président de Chambre

Madame Mariane ALVARADE, Conseiller

Madame Béatrice THEILLER, Conseiller

Greffier lors des débats : Mme Karen VANNUCCI.

Les parties ont été avisées que le prononcé de la décision aurait lieu par mise à disposition au greffe le 12 Décembre 2019, prorogé le 19 décembre 2019.

ARRÊT

contradictoire,

Prononcé par mise à disposition au greffe le 19 Décembre 2019

Signé par Madame Michelle SALVAN, Président de Chambre et Mme Karen VANNUCCI, auquel la minute de la décision a été remise par le magistrat signataire.

***

FAITS ET PROCEDURE

Monsieur [L] [C] a été engagé par la société Barclay's Patrimoine en qualité de conseiller financier, à compter du 1er mars 2010 suivant contrat à durée indéterminée, moyennant une rémunération brute mensuelle composée de commissions et d'une prime de participation, les frais professionnels demeurant à sa charge.

Par courrier du 12 août 2014, M. [C] dénonçait à son employeur une détérioration de ses conditions de travail en raison d'une rémunération arbitraire uniquement variable, d'une redistribution inéquitable des dossiers composant son portefeuille, d'objectifs irréalisables, d'un

harcèlement moral, du défaut de remboursement de ses frais professionnels et il demandait la

modification de son contrat de travail.

Il réclamait:

- 2.500 € net par mois + commissions et 13ème mois ainsi que remboursement des frais

exposés sur présentation de justificatifs, ou :

-1.500 € net par mois + un 13ème mois avec l'attribution de dossiers pour 10.000.000 €, prime

de participation maintenue, avance mensuelle forfaitaire pour remboursement des frais de 410 €, prime trimestrielle versée en cas de réalisation de l'objectif fixé.

Cette demande était renouvelée par courriers des 30 septembre 2014 et 17 juin 2015,

relevant en outre des dysfonctionnements du système informatique, en particulier

l'indisponibilité ou la mauvaise application de Outlook, pénalisant le travail du conseiller.

Par lettre recommandée avec demande d'avis de réception du 15 juillet 2015, le salarié

a, pour ces motifs, pris acte de la rupture du contrat de travail.

Le 5 décembre 2016, le salarié a saisi la juridiction prud'homale sollicitant, dans le

dernier état de ses écritures, la requalification de la prise d'acte en licenciement dépourvu de

cause réelle et sérieuse ainsi que la condamnation de l'employeur à lui payer diverses sommes

tant en exécution qu'au titre de la rupture du contrat de travail.

Par jugement rendu le 23 juin 2017, le conseil de prud'hommes de Cannes a débouté M.

[C] de ses demandes, a débouté la société Barclay's Patrimoine de sa demande

reconventionnelle en remboursement de l'indemnité de préavis, a condamné M. [C] aux

dépens ainsi qu'au paiement d'une somme de 500 euros en application de l'article 700 du code

de procédure civile.

M. [C] a interjeté appel de cette décision dans des conditions de forme et de délai

qui ne sont pas critiquées.

MOYENS ET PRÉTENTIONS DES PARTIES

Aux termes de ses dernières écritures transmises par la voie électronique le 24 octobre

2017, M. [C], appelant invoque divers manquements de l'employeur à ses obligations

justifiant la prise d'acte :

- une inégalité de traitement à l'occasion de l'attribution des clients dits « orphelins »,

- l'illicéité de la déduction des frais professionnels,

- des problèmes informatiques récurrents signalés à de nombreuses reprises à la direction, et

notamment en mars 2014 perturbant l'ensemble des conseillers de la société Barclay 's

Patrimoine et qui n'étaient toujours pas solutionnés un an après, ces problèmes perdurant

jusqu'à le conduire à. délivrer une mise en demeure le 16 juin 2015 alors que la direction avait

promis un plan d'action,

- un harcèlement moral et le développement de situations de stress au travail.

Il sollicite une indemnité pour licenciement sans cause réelle et sérieuse de 12 mois de

salaire en fonction d'une ancienneté de 5 ans et 3 mois et d'une rémunération mensuelle

moyenne de 2.692,77 €.

Il réclame un rappel de salaire sur la base d'un manque à gagner de 20.000 € par an,

résultant d'un défaut d'attribution des dossiers orphelins.

L'appelant demande de réformer le jugement sauf en ce qu'il le déboute de sa demande

reconventionnelle et, statuant à nouveau, de dire que la prise d'acte s'analyse en un

licenciement dépourvu de cause réelle et sérieuse et de condamner la société Barclay' s

Patrimoine au paiement des sommes suivantes :

-8.078,31 € au titre de l'indemnité de préavis et 807,83 € au titre des congés payés sur préavis;

-2.827,40 € au titre de l'indemnité légale de licenciement ;

-32.313,24 € à titre de dommages et intérêts pour licenciement sans cause réelle et sérieuse ;

- 30.000 € à titre de dommages et intérêts pour harcèlement moral ;

- 10.000 € à titre de dommages et intérêts au titre de la violation d'une obligation de prévention

de harcèlement moral ;

- 30.000 € à titre de dommages et intérêts pour exécution déloyale du contrat de travail ;

- 18.350,99 €, outre 1.835,10 € au titre des congés payés y afférents remboursement des frais

professionnels ;

- 60.000 € à titre de rappel de salaire ;

- 6.000 € à titre d'indemnité de congés payés sur rappel de salaire ;

Il sollicite la condamnation de la société Barclay's Patrimoine au paiement de la somme de

10.000€ en application de l'article 700 du du code de procédure civile pour ses frais de première

instance et d'appel.

Aux termes de ses dernières écritures transmises par la voie électronique le 21 octobre

2017, la société Barclay's Patrimoine, intimée fait valoir :

- que l'attribution des dossiers orphelins par le directeur du bureau supposait que le conseiller

financier exploite déjà pleinement son portefeuille de clients et atteigne les objectifs fixés, que

l' inégalité de traitement n'est pas démontrée ;

- que le dispositif appliqué par la société pour le calcul des frais professionnels est légal, a été

accepté par M. [C] ; que le salarié ne rapporte pas la preuve des dépenses dont il demande

remboursement, que le système très favorable aux salariés est bien connu de M. [C] qui en

a toujours bénéficié enapplication de l'accord collectif intitulé "Accord relatif à la déduction

forfaitaire pour frais professionnels applicable aux Conseillers Financiers de Barclays

Finance" signé le 22 février 2007, que la licéité de ce dispositif a été validée par la

jurisprudence dans des litiges opposant la société à d'autres conseillers financiers ; qu'à titre

subsidiaire, M. [C] n'apporte aucun élément au soutien de sa demande de remboursement

de frais professionnels,

- que les problèmes informatiques rencontrés par certains conseillers financiers ont été pris très

au sérieux par la société qui a tout mis en oeuvre pour les résoudre,

- que la prise d'acte repose sur des faits prétendument fautifs, en tout état de cause très anciens,

non concomitants à la rupture, n'empêchant pas la poursuite du contrat de travail,

- qu' en application d'une jurisprudence constante le salarié prenant acte de la rupture du contrat

de travail est redevable de l'indemnité de préavis qu'il n'a pas exécuté lorsque la prise d'acte

produit les effets d'une démission.

L'initmée demande en conséquence de confirmer le jugement en ce qu'il a débouté le

salarié de l'intégralité de ses demandes, et formant appel incident elle demande de l'infirmer en

ce qu'il a débouté la société de sa demande reconventionnelle en remboursement de la somme

de 8.886,14 euros bruts au titre du préavis qu'il n'a pas effectué, statuant à nouveau de débouter

M. [C] de l'ensemble de ses demandes, fins et conclusions, de le condamner à rembourser

à la société Barclays Patrimoine la somme de 8.886,14 euros bruts au titre du préavis qu'il n'a

pas effectué, celle de 3.000 euros au titre de l'article 700 du code de procédure civile, et de

condamner M. [C] aux dépens de l'instance.

L'ordonnance de clôture a été prononcée le 12 septembre 2019.

Pour un plus ample exposé des faits, de la procédure, des prétentions et moyens et de

l'argumentation des parties, il est expressément renvoyé aux conclusions des parties et au

jugement déféré.

MOTIFS DE LA DECISION

Sur les demandes relatives à l'exécution du contrat de travail

Sur l'inégalité de traitement

M. [C] dénonce une inégalité de traitement dans la redistribution des dossiers dits

«orphelins», correspondant à des clients qui se retrouvent sans suivi du fait du départ de

l'entreprise d'un conseiller financier, et il soutient que cette inégalité qui excluait ainsi toute

possibilité d'entretenir une clientèle haut de gamme, avait des conséquences sur sa

rémunération, les objectifs étant totalement irréalisables.

Il expose que cette distribution se faisait de manière arbitraire au mépris des dispositions de la

Charte du conseiller financier établie par le groupe Barclay 's définissant les règles et principes

pour permettre à chaque conseiller d'exercer au mieux son métier, les managers s'attribuant

prioritairement les dossiers orphelins en très grande quantité afin de faire grossir leur

portefeuille, et donc leur prime de participation, laissant ainsi aux conseillers un nombre réduit

de dossiers de surcroît les moins rentables.

Il explique n'avoir reçu que 2.400KF alors qu'il exploitait pleinement son porte feuille clients

et alors qu'il aurait dû recevoir, au départ des différents conseillers, la somme totale de 10.129

K€ décomposée comme suit :

- ler départ : [D] [A], licencié : titulaire d'un portefeuille de 1.639 K € divisé par 4

conseillers restants = 409 K€

- 2ème départ : [U] [E], démission : titulaire d'un portefeuille de 5.367 Ke que I 'on

divise par 4, soit 1.789 K€

- 3ème départ : [Z] [T], licencié + arrivée nouvelle manager [S] [G] : titulaire

d'un portefeuille de 9.175 K €, divisé par 3 conseillers restants = 3.058 K€

4ème départ : [Y] [H], titulaire d'un portefeuille de 6.816 K€, divisé par deux

conseillers restants = 3.408 K€

- 5ème départ : une partie du portefeuille de Monsieur [M] [I], titulaire d'un

portefeuille de 29.317 KE divisé à 50 % entre l'équipe de [Localité 4] et celle de [Localité 2], ce

portefeuille lui-même divisé par 2 au sein même de l'équipe de [Localité 2], ce chiffre devant être

divisé par 5 conseillers restants = 1.465 K€ devant.

Le principe de l'égalité de traitement implique en matière de rémunération pour un travail de

même nature, de traiter de façon identique les travailleurs placés dans une même situation au

regard de l'avantage en cause. L'employeur peut ainsi démontrer que les salariés ne sont pas

placés dans une même situation.

Le 21 août 2014, la société Barclay's Patrimoine écrivait à M. [C] que l'attribution des

clients orphelins était de la responsabilité du Directeur du bureau, qu'il appartenait à celui-ci

d'attribuer à chaque collaborateur, en fonction de ses compétences, de son potentiel de

développement, de ses résultats actuels, les clients qui se retrouvent sans suivi du fait du départ

de l'entreprise d'un conseiller financier. (...)que cette attribution de clients supplémentaires était

également corrélée à la pleine exploitation du portefeuille déjà confié et qu'il convenait donc

d'atteindre d'abord les objectifs commerciaux fixés sur le portefeuille existant. (...).

L'employeur poursuivait : bien que vous n'ayez pas atteint vos objectifs commerciaux de

l'année 2013 et que l'exploitation de votre portefeuille n'était pas optimale, le directeur (...) a

pris la décision de vous attribuer non pas 20 comme initialement avec lui, mais 29 clients avec

des encours de plus de 800 KF sur le portefeuille de Monsieur [H]. Vous l'en avez d'ailleurs

vivement remercié par mail le 5 février. Monsieur [H] a quitté l'entreprise le 23 novembre

2013 et les clients issus de son portefeuille vous ont été attribués au mois de février 2014, soit

un délai d'un plus de deux mois ce qui est tout àfait raisonnable . Nous attirons votre attention

sur le fait que depuis 2012, vous avez fait l'objet de transferts réguliers de portefeuille pour un

montant de 2 400 KF d'avoirs et 97 clients. »

Il est constant que les représentants du personnel de Barclay' s Patrimoine saisissaient la

direction à ce sujet le 16 avril 2015, lui demandant d'ouvrir sans préalable des discussions sur

le thème de la répartition des clients orphelins et que la direction a alors admis la nécessité « à

l'avenir de fixer des critères de répartition objectifs ».

Cependant, la société Barclay' s Patrimoine fait valoir que les éléments de comparaison choisis

par M. [C] pour expliquer l'inégalité de traitement, ne sont pas pertinents. Elle explique que

les salariés auxquels il se compare avaient plus d'expérience et plus de responsabilités que le

salarié. Ces explications ne sont pas infirmées par les éléments produits par M. [C].

Surtout, la « charte du conseiller financier » énonce qu'est orphelin le client dont le conseiller

financier de rattachement a été radié (retraite, démission, licenciement , décès) et que ce client

devient orphelin réaffecté lorsqu'il est confié par délégation à un nouveau conseiller financier.

Cette charte est muette sur les critères de réaffectation des dossiers dits orphelins.

Il en résulte que le moyen tiré de l'existence d'une inégalité de traitement n'est pas fondé.

Par voie de conséquence, M. [C] doit être débouté de sa demande en paiement d'un rappel

de salaire sur la base d'un manque à gagner résultant d'un défaut d'attribution des dossiers

orphelins.

Sur les frais professionnels

M. [C] affirme ne pas contester le principe de la déduction forfaitaire mais sa licéité à son

égard en ce qu'il était conseiller financier et que sa fonction ne lui permettait pas de bénéficier

de l'abattement de 30 % pratiqué, lequel l'a été de façon illicite, au vu de l'arrêté du 20

décembre 2002 relatif aux frais professionnels et de la liste des professions prévues à l'article

5 de l'annexe IV du Code Général des Impôts en vigueur au 31 décembre 2000. Il détaille dans

ses écritures, page 15, le montant des frais professionnels indûment perçus par l'employeur entre

le mois d'août 2012 et le mois de juillet 2015, soit la somme de18.350,99 €.

Il est de principe que les frais professionnels engagés par le salarié doivent être supportés par

l'employeur, les frais qu'un salarié justifie avoir exposés pour les besoins de son activité

professionnelle et dans l'intérêt de l'employeur, doivent être remboursés sans qu'ils puissent être

imputés sur la rémunération qui lui est due.

Toutefois, le contrat de travail peut prévoir le versement d'une somme forfaitaire en contrepartie

des frais professionnels exposés par le salarié sous certaines conditions.

Au cas d'espèce, il a été prévu au contrat de travail une déduction forfaitaire pour frais

professionnels égale à 30 % de la rémunération brute, plafonnée à 7.600 € par année civile.

Alors que le contrat de travail prévoit le versement d'une somme fixée à l'avance de manière

forfaitaire , il n'est pas démontré que cette somme est manifestement disproportionnée au regard

du montant réel des frais engagés, et, d'autre part, que la rémunération proprement dite du travail

n'était pas chaque mois au moins égale au SMIC.

M. [C] n'est pas fondé à se prévaloir de dispositions réglementaires autres dès lors qu'il a

librement consenti à des conditions contractuelles de prise en compte des frais professionnels

dans le salaire non contraires au principe ci-dessus rappelé.

Par voie de conséquence, M. [C] doit être débouté de sa demande en remboursement de

frais professionnels engagés.

Sur les dysfonctionnements de l'outil informatique

M. [C] invoque des problèmes informatiques récurrents signalés à de nombreuses reprises

à la direction, et notamment en mars 2014, perturbant l'ensemble des conseillers de la société

Barclay's Patrimoine, ces problèmes n'étant toujours pas solutionnés un an après.

Cette question a été évoquée le 19 février 2015, lors d'une réunion ordinaire du comité

d'entreprise. Le 28 avril 2015, M. [C] écrivait à l'employeur que depuis que celui-ci avait

fait le choix de transférer la totalité de son personnel administratif au sein de la structure de

Barclay 's Bank, il était confronté à des problèmes informatiques récurrents ( Wyse,

Ipad,Outlook, etc...) et qu'il serait souhaitable qu'une solution définitive soit ainsi trouvée par

la direction ; il adressait une mise en demeure le 16 juin 2015, sachant que la direction avait

promis un plan d'action.

Le 14 mars 2014, soit plus d'un an avant, l'employeur avait indiqué : «Nous sommes conscients

que plusieurs équipes rencontrent actuellement des problèmes opérationnels comme l'instabilité

de la nouvelle plateforme informatique d'assurance vie Solite, ou celle de Citrix ayant généré

entre autres de nouveaux problèmes de lenteur d'interrogation du CRM ou d'accès à certains

outils. Ces problèmes ne sont pas nouveaux et font l'objet d'une forte mobilisation des équipes

informatiques. Ils se sont toutefois cristallisés ces dernières semaines et doivent trouver des

solutions dans les semaines à venir. Je vous remercie des efforts déployés pour maintenir le

service clients et, pour les équipes en charge de ces outils, pour votre mobilisation pour

résoudre les problèmes identifiés. »

Alors qu'il a été indiqué aux élus lors d'une réunion du comité d'entreprise du 21 mai 2015 que

« suite à la communication du plan d'action, un point d'étape devait être fait au début du mois

de juillet 2015 » le manquement de l'employeur à ses obligations, pour n'avoir pas remédié aux

problèmes récurrents affectant l'outil informatique n'est pas caractérisé .

Sur le harcèlement moral

Selon l'article L.1152-1 du code du travail« aucun salarié ne doit subir les agissements répétés

de harcèlement moral qui ont pour objet ou pour effet une dégradation de ses conditions de

travail susceptible de porter atteinte à ses droits et à sa dignité, d'altérer sa santé physique ou

mentale ou de compromettre son avenir professionnel » ; en application du même article et de

l'article L.1154-1 du code du travail, applicable à la cause lorsque le salarié établit la matérialité

de faits précis et concordants constituant selon lui un harcèlement, il appartient au juge

d'apprécier si ces éléments, pris dans leur ensemble, permettent de présumer l'existence d'un

harcèlement moral et, dans l'affirmative, il incombe à l'employeur de prouver que ces

agissements ne sont pas constitutifs d'un tel harcèlement et que sa décision est justifiée par des

éléments objectifs étrangers à tout harcèlement.

Il revient à la présente cour de rechercher:

- si M. [C] rapporte la preuve de faits qu'il dénonce au soutien de son allégation d'un

harcèlement moral,

- si les faits qu'il considère comme établis, appréhendés dans leur ensemble, permettent de

présumer l'existence d'un harcèlement moral,

- enfin, si cette présomption est retenue, si l'employeur justifie que les agissements ne sont pas

constitutifs d'un harcèlement et qu'ils sont justifiés par des éléments objectifs étrangers à tout

harcèlement.

Selon M. [C], l'inégalité de traitement dans la distribution des dossiers orphelins et les

dysfonctionnements informatiques ont créé un état de stress permanent qui procède d'un

harcèlement moral que l'employeur a été incapable de prévenir.

Le salarié produit :

Le procès verbal du CHSCT extraordinaire du 09.04.2015 dans lequel il est écrit :

-« 100 % des conseillers financiers étaient en stress et au bout du rouleau »

- quand un conseiller financier de BP ne pouvait pas travailler parce que les outils ne

fonctionnaient pas, obligatoirement, cela imputait sa rémunération, ce qui était loin d'être le

cas pour un conseiller de la Banque. Et le représentant de la direction M. [O] [N] a alors

répondu « qu'il en a conscience. »

Alors que la cour n'a reconnu aucun des manquements reprochés à l'employeur, ces faits

appréhendés dans leur ensemble, ne permettent pas de présumer l'existence d'un harcèlement

moral au sens du texte susvisé.

Le moyen tiré de l'existence d'un harcèlement n'est pas fondé et il n'est pas établi que

l'employeur n'a pas pris toutes dispositions nécessaires en vue de prévenir les agissements de

harcèlement moral.

Sur les demandes relatives à la rupture du contrat de travail

Sur la prise d'acte

Aucun des griefs reprochés à l'employeur n'étant caractérisé, la prise d' acte par M. [C] de

la rupture du contrat de travail faite le 15 juillet 2015, pour ces motifs, s'analyse en une

démission.

Sur le préavis

L' employeur est en conséquence fondé à réclamer à son salarié le paiement du préavis que celui-ci, démissionnaire, n'a pas effectué.

Infirmant sur ce point la décision déférée, la cour condamnera M. [C] à payer à la société

Barclay's Patrimoine une somme de 8.886,14 euros bruts au titre du préavis.

Sur les dépens et les frais non-répétibles

Succombant M. [C] supportera les dépens.

L'équité commande de faire application au bénéfice de la société Barclay's Patrimoine des

dispositions de l'article 700 du code de procédure civile.

PAR CES MOTIFS :

La Cour, après en avoir délibéré, statuant par arrêt contradictoire prononcé par mise à

disposition au greffe, en matière prud'homale,

Confirme le jugement déféré excepté en ce qu'il déboute la société Barclay's Patrimoine

de sa demande en paiement du préavis non effectué,

Statuant à nouveau du seul chef infirmé,

Condamne M. [C] à payer à la société Barclay's Patrimoine une somme de

8.886,14 euros bruts,

Y ajoutant,

Condamne M. [C] à payer à la société Barclay's Patrimoine une somme de 800

euros en application des dispositions de l'article 700 du code de procédure civile,

Déboute M. [C] de sa demande d'indemnité de procédure,

Condamne M. [C] aux dépens de la procédure d'appel,

Rejette toute autre demande.

LE GREFFIER LE PRESIDENT


Synthèse
Tribunal : Cour d'appel d'Aix-en-Provence
Formation : Chambre 4-5
Numéro d'arrêt : 17/14372
Date de la décision : 19/12/2019

Références :

Cour d'appel d'Aix-en-Provence 7B, arrêt n°17/14372 : Confirme la décision déférée dans toutes ses dispositions, à l'égard de toutes les parties au recours


Origine de la décision
Date de l'import : 27/03/2024
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.appel;arret;2019-12-19;17.14372 ?
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