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19/12/2019 | FRANCE | N°15/19854

France | France, Cour d'appel d'Aix-en-Provence, Chambre 3-4, 19 décembre 2019, 15/19854


COUR D'APPEL D'AIX-EN-PROVENCE

Chambre 3-4



ARRÊT AU FOND

DU 19 DECEMBRE 2019



N° 2019/ 313













Rôle N° RG 15/19854 - N° Portalis DBVB-V-B67-5UOJ







[C] [M]

[N] [Q] épouse [M]





C/



SA CAISSE D'EPARGNE ET DE PREVOYANCE PROVENCE ALPES CORSE





















Copie exécutoire délivrée

le :

à :



Me WEILL



Me JACQUIE

R Mathieu













Décision déférée à la Cour :



Jugement du Tribunal de Grande Instance de MARSEILLE en date du 10 Septembre 2015 enregistré au répertoire général sous le n° 14/02246.





APPELANTS



Monsieur [C] [M]

né le [Date naissance 1] 1961 à [Localité 1] (13), demeurant [Adresse ...

COUR D'APPEL D'AIX-EN-PROVENCE

Chambre 3-4

ARRÊT AU FOND

DU 19 DECEMBRE 2019

N° 2019/ 313

Rôle N° RG 15/19854 - N° Portalis DBVB-V-B67-5UOJ

[C] [M]

[N] [Q] épouse [M]

C/

SA CAISSE D'EPARGNE ET DE PREVOYANCE PROVENCE ALPES CORSE

Copie exécutoire délivrée

le :

à :

Me WEILL

Me JACQUIER Mathieu

Décision déférée à la Cour :

Jugement du Tribunal de Grande Instance de MARSEILLE en date du 10 Septembre 2015 enregistré au répertoire général sous le n° 14/02246.

APPELANTS

Monsieur [C] [M]

né le [Date naissance 1] 1961 à [Localité 1] (13), demeurant [Adresse 1]

représenté et assisté de Me Jean-david WEILL, avocat au barreau de MARSEILLE

Madame [N] [Q] épouse [M]

née le [Date naissance 2] 1967 à [Localité 1] (13), demeurant [Adresse 1]

représentée et assistée de Me Jean-david WEILL, avocat au barreau de MARSEILLE

INTIMEE

La société CAISSE D'EPARGNE CEPAC anciennement CAISSE D'EPARGNE ET DE PREVOYANCE PROVENCE ALPES CORSE, agissant poursuites et diligences de son représentant légal, dont le siège est sis [Adresse 2]6

représentée par Me Mathieu JACQUIER de la SCP SCP JACQUIER & ASSOCIES, avocat au barreau de MARSEILLE et assistée de Me PERRIMOND, avocat au barreau de MARSEILLE substituant Me JACQUIER, avocat

*-*-*-*-*

COMPOSITION DE LA COUR

L'affaire a été débattue le 05 Novembre 2019 en audience publique. Conformément à l'article 785 du code de procédure civile, Madame Anne FARSSAC, Conseiller a fait un rapport oral de l'affaire à l'audience avant les plaidoiries.

La Cour était composée de :

Madame Laure BOURREL, Président

Madame Bernadette MALGRAS, Conseiller

Madame Anne FARSSAC, Conseiller

qui en ont délibéré.

Greffier lors des débats : Madame Valérie VIOLET.

Les parties ont été avisées que le prononcé de la décision aurait lieu par mise à disposition au greffe le 19 Décembre 2019.

ARRÊT

Contradictoire,

Prononcé par mise à disposition au greffe le 19 Décembre 2019,

Signé par Madame Laure BOURREL, Président et Madame Valérie VIOLET, greffier auquel la minute de la décision a été remise par le magistrat signataire.

***

FAITS, PROCÉDURE, MOYENS ET PRÉTENTIONS DES PARTIES

M. [C] [M] et Mme [N] [Q] épouse [M] ont fait l'acquisition de biens et droits immobiliers, sis [Adresse 3], constituant leur résidence principale, le 18 février 1992, et consistant en un bien F3 3ème étage (lot 244 de cet immeuble en copropriété) et un terrain (lot 261) au moyen d'un prêt de 53 357,16 euros (350 000 francs) consenti par la Caisse d'épargne.

Le 10 mai 2005, ils ont fait l'acquisition d'un bien F3 au 4ème étage du même immeuble, au moyen d'un prêt de 195 300 euros, consenti par la même banque et qui constituait un investissement locatif.

Suivant acte authentique du 8 février 2007, les époux [M] ont acquis un appartement de type 5 destiné à devenir leur résidence familiale situé dans le même immeuble en copropriété [Adresse 3].

Ils ont, pour financer ce bien, accepté le 2 janvier 2007 une offre de prêts de la Caisse d'épargne en date du 15 décembre 2006 portant sur une somme totale de 255 000 euros se décomposant en :

- un prêt relais habitat n°1353435 pour un montant de 106 000 euros au taux de 4,91 % d'une durée de 24 mois recouvrable en une seule fois à l'issue du crédit, par le versement d'une échéance de 116 664,74 euros,

- un prêt primo écureuil modulable n° 135436 pour un montant de 149 000 euros au taux de 4,51 % remboursable en 300 mensualités de 829,04 euros hors assurance.

Le prêt a été réitéré par acte authentique du 8 février 2007 et la première échéance fixée au 5 mars 2007.

M. et Mme [M] ont vendu au mois d'avril 2007 l'appartement de type 3 situé au 4ème étage acquis en 2005 et au mois de juin 2007 l'appartement de type 3 situé au 3ème étage acquis en 1992. M. [M] a été licencié pour motif économique au mois de juin 2008.

Le prêt primo écureuil modulable a fait l'objet d'un avenant selon offre du 3 mars 2009 acceptée le 14 mars 2009.

Plusieurs échéances étant impayées, la banque a, à la suite d'une mise en demeure du 18 juin 2010 infructueuse, prononcé la déchéance du terme du prêt modulable le 29 septembre 2010, puis a successivement engagé plusieurs mesures de saisie immobilière pour le recouvrement de sa créance.

Par acte du 8 janvier 2014 les époux [M] ont fait assigner la banque en responsabilité et en nullité de l'avenant du 14 mars 2009, pour voir juger injustifiée et inopérante la résiliation du prêt intervenue le 5 septembre 2010 et obtenir la condamnation de la Caisse d'épargne à leur payer la somme de 80 000 euros au titre des préjudices nés de l'affectation irrégulière du solde du prix du T3 du 4ème étage, à l'apurement du solde du prêt du T3, 3ème étage et de son manquement à son obligation de loyauté, de mise en garde et de conseil.

Par jugement en date du 10 septembre 2015 le tribunal de grande instance de Marseille a :

- débouté les époux [C] et [N] [M] de leurs demandes, fins et prétentions,

- dit que la Caisse d'épargne de prévoyance Provence Alpes Corse a prononcé valablement la déchéance du terme concernant le contrat de prêt souscrit le 8 février 2007,

- dit qu'aucune faute contractuelle n'est établie envers la Caisse d'épargne de prévoyance Provence Alpes Corse,

- débouté les époux [M] de leur demande d'expertise,

- condamné les époux [C] et [N] [M] à payer la somme de 2 000 euros au titre

de l'article 700 du code de procédure civile à la Caisse d'épargne de prévoyance Provence Alpes

Corse,

- condamné les époux [C] et [N] [M] aux dépens qui pourront être recouvrés

par Me Jacquier.

M. et Mme [M] ont relevé appel de cette décision par déclaration du 10 septembre 2015.

En cause d'appel, ils ont sollicité un sursis à statuer dans l'attente d'un arrêt à venir sur l'appel interjeté par la Caisse d'épargne à l'encontre d'un jugement du juge de l'exécution du tribunal de grande instance de Marseille en date du 7 février 2017.

Par arrêt contradictoire en date du 21 décembre 2017 à la lecture duquel il est expressément renvoyé, cette cour a :

- ordonné le sursis à statuer dans l'attente de l'arrêt qui sera rendu par la 15e chambre section A

de la cour d'appel d'Aix-en-Provence statuant sur appel du jugement en date du 7 février 2017,

- dit qu'il appartiendra à la partie la plus diligente de saisir à nouveau la cour.

Par arrêt en date du 29 novembre 2018 la 15e chambre section A de la cour d'appel d'Aix-en-Provence a confirmé en toutes ses dispositions le jugement aux termes duquel le commandement aux fins de saisie vente signifié le 11 août 2016 avait été annulé, la caisse d'épargne avait été déboutée de ses demandes de dommages et intérêts et de frais irrépétibles et condamnée au paiement d'une indemnité sur le fondement de l'article 700 du code de procédure civile.

Aux termes de leurs dernières conclusions remises au greffe et notifiées le 18 décembre 2018 M. et Mme [M] demandent à la cour de :

- infirmer en toutes ses dispositions le jugement du tribunal de grande instance de Marseille du 10 septembre 2015,

Statuant à nouveau,

- dire prescrite l'action en recouvrement de la banque CEPAC à l'encontre des époux [M],

- constater que la banque Caisse d'épargne a manqué à son obligation de loyauté de mise en garde et de conseil,

- dire nul l'avenant du 14 mars 2009 ainsi que le prêt du 8 février 2007,

- dire injustifiée et inopérante la résiliation du prêt par la Banque Caisse d'épargne intervenue

le 5 septembre 2010 ; en l'état de la rétention sans droit ni titre de la somme de 26 811 euros imputée à tort et sans autorisation sur le solde du prêt afférent au F3 sis au 4ème étage,

- condamner la Caisse d'épargne et de prévoyance Alpes Corse au paiement de la somme de 97 871,49 euros au titre des préjudices nés de l'affectation irrégulière du solde du prix du T3 4ème étage à l'apurement du solde du prêt du T3 3ème étage et au titre du manquement à l'obligation de loyauté de mise en garde et de conseil,

- condamner la Caisse d'épargne et de prévoyance Alpes Corse au paiement de la somme de 15 000 euros au titre du préjudice moral.

Si la Cour de céans ne s'estimait pas suffisamment informé pour ce qui concerne l'évaluation du préjudice, nommer tel expert qu'il plaira afin d'établir les éléments de faits permettant de le quantifier,

- condamner la banque Caisse d'épargne au paiement de la somme de 5000 euros au titre de l'article 700 du Code de procédure civile outre les entiers dépens d'instance.

Par ses dernières conclusions déposées et notifiées le 4 octobre 2019 la Caisse d'épargne demande à la cour de :

A titre liminaire,

Vu l'article 564 du code de procédure civile :

Déclarer irrecevable la demande des époux [M] tendant à entendre déclarer prescrite l'action en recouvrement de la banque CEPAC à l'encontre des époux [M],

Subsidiairement,

Vu les dispositions de l'article 480 du Code de procédure civile et de l'article 1351 devenu 1355 du code civil,

Vu les dispositions des articles 2240 et suivants du code civil,

Vu les pièces produites et notamment la lettre des époux [M] du 16 mars 2012,

Débouter les époux [M] de leur demande visant à entendre déclarer prescrite l'action en recouvrement de la concluante à leur encontre,

A titre principal,

Vu les articles 1128 et 1129 du Code civil (anciennement 1108), 1103 du code civil (anciennement 1134 du code civil), 1315, 1231-1 du code civil (anciennement 1147), et 2224 du code civil,

Vu les articles 1240 et suivants du code civil (anciennement 1382 et suivants du code civil),

Vu les articles 146 alinéa 2, 559 et 564 du code de procédure civile,

Vu l'article 56 du code de procédure civile,

Vu la jurisprudence de la Cour de cassation,

Confirmer en toutes ses dispositions le jugement rendu par le tribunal de grande instance de Marseille le 10 septembre 2015,

Débouter M. et Mme [M] de l'ensemble de leurs demandes, fins et conclusions comme irrecevables et mal fondées,

Condamner M. et Mme [M] à payer à la Caisse d'épargne la somme de 10 000 euros au titre des dispositions de l'article 700 du code de procédure civile,

Condamner M. et Mme [M] aux entiers dépens lesquels seront distraits au profit de Me Mathieu Jacquier, avocat associé de la SCP d'avocats Jacquier et associés qui en a fait l'avance sur son affirmation de droit.

Il est renvoyé, pour l'exposé complet des moyens et prétentions des parties, aux conclusions susvisées, conformément aux dispositions de l'article 455 du code de procédure civile.

L'ordonnance de clôture a été rendue le 8 octobre 2019.

MOTIFS

Sur la recevabilité de la demande tendant à faire déclarer prescrite l'action en recouvrement de la CEPAC à l'encontre de M. et Mme [M]

Aux termes de l'article 564 du code de procédure civile, à peine d'irrecevabilité relevée d'office, les parties ne peuvent soumettre à la cour de nouvelles prétentions si ce n'est pour opposer compensation, faire écarter les prétentions adverses ou faire juger les questions nées de l'intervention d'un tiers, ou de la survenance ou de la révélation d'un fait.

Le premier juge n'a, comme le fait valoir à juste titre la CEPAC, été saisi d'aucune action en recouvrement de la créance de la banque, pas davantage que ne l'est la cour.

La prétention de M. et Mme [M] à voir déclarer prescrite une demande non formée, ne tend ni à la compensation ni au rejet des prétentions adverses. Aucun fait en lien avec le litige initial n'est survenu ni n'a été révélé depuis le jugement entrepris. En effet, il résulte de la décision de cette cour en date du 21 décembre 2017 que le sursis à statuer avait été ordonné parce que M. et Mme [M] avaient fait valoir que si le jugement du juge de l'exécution était confirmé leur action n'aurait plus d'objet, de sorte que l'arrêt statuant sur appel du jugement du 7 février 2017 était susceptible d'avoir une incidence sur le litige. Malgré la confirmation de cette décision les appelants n'ont pas abandonné leurs prétentions.

La demande de voir déclarer prescrite l'action en recouvrement de la banque qui ne tend pas aux mêmes fins que celles soumises au tribunal, n'en est pas davantage l'accessoire, la conséquence ou le complément nécessaire. Elle n'est en conséquence pas recevable.

Sur l'affectation des fonds issus de la vente intervenue en 2007

L'article 2224 du code civil dispose : 'les actions personnelles ou mobilières se prescrivent par cinq ans à compter du jour où le titulaire d'un droit a connu ou aurait dû connaître les faits lui permettant de l'exercer.' Ce texte issu de la loi du 17 juin 2008, est applicable dès son entrée en vigueur le 19 juin 2008, aux prescriptions dont il a réduit la durée, comme c'est le cas en l'espèce, la prescription étant antérieurement trentenaire.

Comme les appelant le relèvent eux-même, ils étaient en sus des prêts qui leur ont été consentis, liés à la banque par une convention de compte, la CEPAC étant tenue à leur égard en qualité de déposant, des obligations résultant d'un contrat de dépôt. L'opération querellée consistant en l'affectation du solde du prix de vente d'un bien - porté au crédit de leur compte, au remboursement d'un autre emprunt consenti en 2005 par la même banque, s'inscrit, tout comme l'exigibilité anticipée de ce prêt qu'ils prétendent irrégulière, dans le cadre de leurs relations contractuelles.

C'est à juste titre que la CEPAC fait valoir que l'action exercée par les époux [M] ne peut être qualifiée d'action en revendication. La théorie de l'imprescriptibilité du droit de propriété est inapplicable s'agissant d'une action mobilière.

L'affectation des fonds déposés par M. et Mme [M] sur leur compte, au remboursement du solde d'un prêt est intervenue le 1er juillet 2007. Les faits allégués de fautifs ont été commis à cette date, ce qu'ils n'ont pu ignorer.

M. et Mme [M] disposaient en conséquence d'un délai expirant le 18 juin 2013 à minuit pour agir. N'ayant introduit leur action que par acte en date du 8 janvier 2014, c'est à juste titre que le premier juge a déclaré leur demande de ce chef irrecevable.

Sur le bien fondé de la résiliation du prêt amortissable consenti en 2007

Les époux [M] soutiennent que la résiliation du prêt pour défaut de paiement d'une somme de 4 784,88 euros est irrégulière, compte tenu de leur revendication de la somme de 26 811 euros injustement appréhendée et affectée au solde d'un autre prêt. Le seul moyen soulevé au soutien de leur contestation de la résiliation ne peut cependant produire effet, au vu du paragraphe qui précède.

Le défaut de paiement de la somme de 4 784,88 euros n'est pas contesté et les mises en demeure adressées à chacun des emprunteurs le 8 juin 2010 sont demeurées infructueuses, de sorte que la Caisse d'épargne était fondée à se prévaloir de l'exigibilité anticipée du prêt le 29 septembre 2010.

Sur la nullité de l'avenant au contrat de prêt contenu dans l'acte de vente du 8 février 2007

L'article L 312-10 du code de la consommation dispose : 'L'envoi de l'offre oblige le prêteur à maintenir les conditions qu'elle indique pendant une durée minimale de trente jours à compter de sa réception par l'emprunteur.

L'offre est soumise à l'acceptation de l'emprunteur et des cautions, personnes physiques, déclarées. L'emprunteur et les cautions ne peuvent accepter l'offre que dix jours après qu'ils l'ont reçue. L'acceptation doit être donnée par lettre, le cachet de la poste faisant foi.'

L'offre d'avenant que les époux [M] ont acceptée est datée du 3 mars 2009. Ils ont cependant indiqué, dans un document séparé, l'avoir reçue à cette date. Leur acceptation est intervenue le 14 mars 2009, soit dix jours après la réception de l'offre. L'absence de justification que l'avenant ou son acceptation ait été adressée par lettre n'est pas sanctionnée par la nullité. L'inobservation des règles de forme relatives aux modalités d'acceptation n'est, comme le font valoir les appelants eux-même sanctionnée que par la déchéance du droit aux intérêts, qu'ils ne sollicitent pas.

Le délai de réflexion de dix jours ayant été respecté, il n'y a pas lieu de prononcer la nullité de l'avenant, laquelle n'aurait en tout état de cause pas été susceptible d'entraîner la nullité du prêt consenti en 2007 .

Sur le manquement de la banque à son obligation de mise en garde

La banque est tenue de mettre en garde l'emprunteur non averti au regard de ses capacités financières et des risques d'endettement nés de l'octroi du prêt.

C'est à l'emprunteur qu'incombe la preuve de l'inadaptation du prêt à ses capacités financières, ou du risque d'endettement né de l'octroi du prêt. L'inadaptation du prêt s'entend de son risque de non-remboursement. Tandis que le prêteur supporte la charge de la preuve du caractère averti de l'emprunteur.

Il sera liminairement observé que, contrairement aux allégations de M. et Mme [M], la reconnaissance de la responsabilité de la Caisse d'épargne par jugement du 11 mars 2014 du tribunal d'instance de Marseille a été retenue, non relativement au prêt en litige mais pour un prêt postérieur.

La CEPAC ne justifie pas que M. et Mme [M] avaient la qualité d'emprunteurs avertis, ce que la seule profession de comptable de l'époux est insuffisante à caractériser. Comme le relève à juste titre M. [M] le curriculum vitae qu'il a posté sur LinkedIn, dont elle se prévaut, est bien postérieur au prêt consenti en 2007, puisqu'il y est fait référence à un emploi occupé depuis le mois d'avril 2011. Le seul fait qu'ils aient acquis antérieurement deux biens immobiliers au moyen d'emprunts ne permet pas davantage d'établir qu'ils aient eu des compétences financières particulières.

M. et Mme [M] ne sauraient faire grief à la banque de n'avoir pas donné suite à la demande de prêt relais d'un montant de 280 000 euros et un prêt modulable de 165 000 euros remboursable en 300 mensualités de 917,72 euros qu'ils avaient formée le 22 août 2006, un établissement financier n'étant aucunement obligé d'accorder à un emprunteur le crédit qu'il demande et ce fait étant en tout état de cause antérieur de plusieurs mois à l'offre qu'ils ont acceptée.

Les époux [M], mariés sous le régime de la communauté légale, indiquent avoir déclaré à la banque un revenu mensuel professionnel de 2 500 euros et confirment ce montant dans la présente instance.

Ils étaient propriétaires de deux biens immobiliers qu'ils ont valorisés dans la fiche de situation familiale et patrimoniale qu'ils ont renseignée le 8 décembre 2006, à 180 000 euros s'agissant de leur habitation principale, intégralement payée, et à 165 000 euros s'agissant du bien locatif acquis en 2005. Ils ont fait état au titre de ce dernier d'un capital restant dû de 188 000 euros. Les remboursements mensuels au titre de ce prêt s'élevaient à 1 241,89 euros, le bien leur rapportant au vu de la quittance de loyer produite 819 euros, soit une différence de 422,89 euros.

Ils ont précisé dans la même fiche que ce prêt serait racheté avec la vente de l'appartement à 165 000 euros, 'compromis déjà signé', et 23 000 de prêt relais.

Le prêt primo écureuil modulable en litige était remboursable par mensualités de 829,04 euros, le prêt relais de 106 000 euros étant lui remboursable après la vente de la résidence principale des époux [M].

La vente de l'appartement locatif devait intervenir dans les semaines suivant l'offre de prêt, avant l'acquisition du F5, puisqu'ils avaient justifié à la banque que ce bien était sous compromis de vente depuis le 5 décembre 2006 au prix de 165 000 euros, la vente devant être réitérée le 22 janvier 2007 au plus tard.

L'offre de prêt en litige a été émise par la banque le 15 décembre 2006 et acceptée le 2 janvier 2007, soit antérieurement à l'expiration du délai de réitération de la vente de l'appartement à usage locatif. Les emprunteurs ne sont donc pas fondés à reprocher à la Caisse d'épargne d'avoir tenu compte de ce compromis lors de l'offre, alors qu'il n'aurait plus eu cours, ni davantage de les avoir contraints à une vente précipitée à des conditions défavorables. M. et Mme [M] n'exposent pas les raisons pour lesquelles ce bien n'a finalement été vendu, que trois mois plus tard, le 22 avril 2007, à l'acquéreur avec lequel le compromis avait été signé et pour un prix inférieur de 5 000 euros. Ils ne peuvent reprocher à la banque ni ce retard ni les conditions de cette vente, leur projet étant antérieur à la conclusion du prêt querellé. Or cette vente pour un montant certes inférieur au capital restant dû devait nécessairement conduire à une minoration des échéances eu égard au remboursement anticipé de 165 000 euros. La différence entre la valeur du bien objet du prêt relais et son montant était également de nature à permettre de le solder, ce qui a été le cas. Les deux appartements ont en effet été vendus, le bien locatif au prix de 160 000 euros le 20 avril 2007 et leur ancienne résidence principale 182 000 euros le 22 juin 2007.

Les difficultés de remboursement du prêt modulable sont en réalité la conséquence non d'une transaction immobilière défavorable mais du licenciement de M. [M] survenu en 2008, alors que l'endettement généré par le prêt amortissable remboursable par mensualités de 829,04 euros n'était pas excessif au regard des revenus professionnels de 2 500 euros déclarés par les emprunteurs lors de la demande de prêt et de leur patrimoine.

En conséquence de ce qui précède, la banque n'était pas tenue d'un devoir de mise en garde.

M. et Mme [M] seront déboutés de leurs demandes de dommages et intérêts et le jugement confirmé, la demande d'expertise étant sans objet.

Sur les dépens et l'article 700 du code de procédure civile

M. et Mme [M] qui succombent, seront in solidum condamnés aux dépens. Leurs prétentions sur le fondement de l'article 700 du code de procédure civile seront pour ce motif rejetées.

Il serait inéquitable que la Caisse d'épargne conserve la charge des frais non compris dans les dépens, exposés en cause d'appel. Les appelants seront condamnés à lui payer la somme de 3 000 euros en application de l'article 700 du code de procédure civile, en sus de l'indemnité accordée à la banque en première instance, les dispositions du jugement de ce chef étant confirmées.

PAR CES MOTIFS

La cour, statuant publiquement et contradictoirement

Confirme le jugement rendu le 10 septembre 2015 par le tribunal de grande instance de Marseille en toutes ses dispositions,

Y ajoutant,

Déclare irrecevable la prétention de M. [C] [M] et Mme [N] [Q] épouse [M] à voir déclarer prescrite l'action en recouvrement de la Caisse d'épargne CEPAC, anciennement dénommée Caisse d'épargne et de prévoyance Provence Alpes Corse,

Condamne M. [C] [M] et Mme [N] [Q] épouse [M] à payer à la Caisse d'épargne CEPAC la somme de 3 000 euros sur le fondement de l'article 700 du code de procédure civile,

Déboute M. [C] [M] et Mme [N] [Q] épouse [M] de leurs prétentions au même titre,

Condamne in solidum M. [C] [M] et Mme [N] [Q] épouse [M] aux dépens d'appel dont distraction au profit de Me Mathieu Jacquier, avocat associé de la SCP d'avocats Jacquier et associés.

LE GREFFIERLE PRESIDENT


Synthèse
Tribunal : Cour d'appel d'Aix-en-Provence
Formation : Chambre 3-4
Numéro d'arrêt : 15/19854
Date de la décision : 19/12/2019

Références :

Cour d'appel d'Aix-en-Provence 8C, arrêt n°15/19854 : Confirme la décision déférée dans toutes ses dispositions, à l'égard de toutes les parties au recours


Origine de la décision
Date de l'import : 27/03/2024
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.appel;arret;2019-12-19;15.19854 ?
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