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27/11/2019 | FRANCE | N°17/10759

France | France, Cour d'appel d'Aix-en-Provence, Chambre 2-4, 27 novembre 2019, 17/10759


COUR D'APPEL D'AIX-EN-PROVENCE

Chambre 2-4



ARRÊT AU FOND

DU 27 NOVEMBRE 2019

A.R.

N° 2019/336













Rôle N° 17/10759 -

N° Portalis DBVB-V-B7B-BAVCO







[D] [U]





C/



[I] [G]





















Copie exécutoire délivrée

le :

à :



Me Olivier AVRAMO





Me Nicolas CASTELLAN








>Décision déférée à la Cour :



Jugement du Tribunal de Grande Instance de MARSEILLE en date du 25 Avril 2017 enregistré au répertoire général sous le n° 15/01880.





APPELANTE





Madame [D] [U]

née le [Date naissance 3] 1965 à [Localité 9] (TUNISIE)

de nationalité Française,

demeurant [Adresse 6]



représentée par Me Ol...

COUR D'APPEL D'AIX-EN-PROVENCE

Chambre 2-4

ARRÊT AU FOND

DU 27 NOVEMBRE 2019

A.R.

N° 2019/336

Rôle N° 17/10759 -

N° Portalis DBVB-V-B7B-BAVCO

[D] [U]

C/

[I] [G]

Copie exécutoire délivrée

le :

à :

Me Olivier AVRAMO

Me Nicolas CASTELLAN

Décision déférée à la Cour :

Jugement du Tribunal de Grande Instance de MARSEILLE en date du 25 Avril 2017 enregistré au répertoire général sous le n° 15/01880.

APPELANTE

Madame [D] [U]

née le [Date naissance 3] 1965 à [Localité 9] (TUNISIE)

de nationalité Française,

demeurant [Adresse 6]

représentée par Me Olivier AVRAMO, avocat au barreau de TOULON

INTIME

Monsieur [I] [G]

né le [Date naissance 4] 1967 à [Localité 10],

demeurant [Adresse 5]

représenté et assisté par Me Nicolas CASTELLAN, avocat au barreau de MARSEILLE substitué par Me Isabelle BENETTI, avocat au barreau de MARSEILLE

COMPOSITION DE LA COUR

L'affaire a été débattue le 02 Octobre 2019 en audience publique. Conformément à l'article 785 du code de procédure civile, Mme Annie RENOU, Conseiller , a fait un rapport oral de l'affaire à l'audience avant les plaidoiries.

La Cour était composée de :

M. Jean-Baptiste COLOMBANI, Premier président de chambre

Mme Annie RENOU, Conseiller

Mme Annaick LE GOFF, Conseiller

qui en ont délibéré.

Greffier lors des débats : Mme Dominique COSTE.

Les parties ont été avisées que le prononcé de la décision aurait lieu par mise à disposition au greffe le 27 Novembre 2019.

ARRÊT

Contradictoire,

Prononcé par mise à disposition au greffe le 27 Novembre 2019,

Signé par M. Jean-Baptiste COLOMBANI, Premier président de chambre et Mme Dominique COSTE, greffier auquel la minute de la décision a été remise par le magistrat signataire.

***

Monsieur [I] [G] et madame [D] [U] ont vécu ensemble de 1988 à 2010.

Deux enfants sont issus de leur union : [Z] , née le [Date naissance 2] 1994à [Localité 11] , et [A] , née le [Date naissance 1] 2004 à [Localité 7].

Selon acte notarié établi par maître [E] [T] , notaire à [Localité 7] , en date du 13 novembre 2001 , le couple a fait l'acquisition en indivision à hauteur de moitié chacun d'un appartement sis dans un ensemble immobilier dénommé 'Groupe Provence' , sur la commune d'[Adresse 6] , pour le prix de 76 986,75 euros payé comptant et quittancé dans l'acte partie de leurs deniers respectifs et partie à hauteur de 21 400 euros au moyen d'un prêt consenti par le crédit mutuel d'[Localité 7].

Par jugement rendu le 11 février 2014 , rectifié le 21 janvier 2016 , le juge aux affaires familiales du tribunal de grande instance de Marseille a ordonné l'ouverture des opérations de comptes , liquidation et partage de l'indivision existant entre les concubins , désigné le président de la chambre des notaires des Bouches du Rhône avec faculté de délégation pour y procéder et ordonné une mesure d'expertise financière confiée à monsieur [E] [X].

L'expert a rendu son rapport le 28 juillet 2015 .

Le 19 avril 2016 , le président de la chambre des notaires a désigné maître [C] [M], notaire à [Localité 8] , pour procéder aux opérations de liquidation .

Le 19 juillet 2016 , maître [M] a établi un procès-verbal d'ouverture des opérations de liquidation et partage de l'indivision conventionnelle existant entre monsieur [G] et mademoiselle [U] et un procès-verbal de non conciliation.

Sur saisine de monsieur [G] , le juge aux affaires familiales du tribunal de grande instance de Marseille , par jugement du 25 avril 2017 , a :

- dit que monsieur [I] [G] a financé 82 ,43 % du bien indivis soit 32,43 % au-delà de sa quote-part de 50 % dans l'indivision ;

- dit que madame [D] [U] a financé pour sa part 17,75 % du bien ;

- évalué le bien indivis situé [Adresse 6] à la somme de 162 000 euros et les meubles meublants à celle de 1 250 euros ;

- dit que madame [D] [U] est redevable d'une indemnité d'occupation à compter du 1° juin 2010 et jusqu'à son départ effectif ;

- fixé l'indemnité d'occupation à la somme de 655 euros par mois affectée d'un abattement de 20 % ;

- fixé les droits de monsieur [I] [G] à la somme de 148 089,91 euros à parfaire ;

- fixé les droits de madame [D] [U] à la somme de 15 160,09 euros à parfaire ;

- attribué à monsieur [G] le bien immeuble indivis à charge pour celui-ci de s'acquitter de la somme de 15 160,09 euros à parfaire ;

- renvoyé pour le surplus les parties devant maître [C] [M] , notaire liquidateur ;

- rejeté toutes autres demandes contraires ;

- dit n'y avoir lieu à application de l'article 700 du code de procédure civile ;

- condamné monsieur [I] [G] et madame [D] [U] à supporter chacun la moitié des dépens.

Le Tribunal a retenu la valeur de l'immeuble estimé par l'expert , soit 162 000 euros , estimant que les pièces apportées par madame [U] pour la contester étaient insuffisantes .

Il a retenu l'estimation du mobilier à 1 250 euros tel que fixée par l'expert , tout en retenant comme exacts les dires de madame [U] aux termes desquels elle justifiait de l'achat , en 2011 , du réfrigérateur (en fait un lave-linge) et du fait que le canapé lui appartenait.

Il a fixé l'indemnité d'occupation sur le fondement de l'article 815-9 au regard de l'occupation privative du bien par celle-ci depuis juin 2010 , en écartant son argumentation tendant à dire que la jouissance pouvait être concurrente , puisqu'elle avait déposé des plaintes et des mains courantes , pour dire que monsieur pénétrait chez elle quand il le voulait pour voir ses filles , lui interdisait que son compagnon vive au domicile et avait pénétré dans le logement pour prendre des affaires .

Sur la masse passive , le tribunal a indiqué que le texte applicable était l'article 815-13 du code civil et a retenu aussi les calculs de l'expert , soit :

- financement du bien par monsieur à hauteur de 68 764,59 euros soit 47 364,59 euros d'apports financiers et 21 400 euros de remboursement du prêt , soit 82,43 % du financement ;

- dépassement des 50 % de sa part à hauteur de 32,43 % ;

Il a établi le compte comme suit :

- droits de monsieur à hauteur de 82,43 % de 162 000 euros , soit 133 537 euros

- outre 50 % du mobilier , soit 625 euros ;

- à recevoir de madame [U] :

* au titre de l' indemnité d'occupation : 26 000 euros X 50 % soit 13 000 euros à la date du 1° juillet 2015 (date de fin du compte de l'expert) et à parfaire à la date du partage sur la base d'une valeur locative de 655 euros affecté d'un coefficient de précarité de 20 % ;

* au titre des accessoires du prêt : 927,91 euros (intérêts plus prime d'assurance divisés par deux) ;

- droits nets : 148 089,91 euros à parfaire en tenant compte de l'indemnité d'occupation définitive ;

- droits de madame [U] :

* 162 000 euros X 17,57 % soit 28 463 euros ;

* 50 % du mobilier soit 625 euros ;

- à charge de payer à monsieur [G] 50 % des accessoires du prêt et son indemnité d'occupation ,

de sorte que ses droits sont de 15 160,09 euros à parfaire en tenant compte de l' indemnité d'occupation.

Madame [U] a relevé appel le 7 juin 2017.

Dans ses dernières conclusions du 5 septembre 2019 , elle demande à la cour :

- de réformer le jugement déféré ;

- statuant à nouveau :

- de dire et juger impossible la prise en compte des deniers personnels apportés pour l'achat immobilier et donner tous les effets à la clause contenue dans l'acte authentique d'achat ayant mentionné une division à part égale ;

- de dire et juger que la convention d'indivision emporte la prise en charge des frais indivis sur l'immeuble à frais commun à part égale entre chacun des coïndivisaires ;

- de retrancher des meubles meublants la somme de 250 euros , contrepartie en valeur des propres de madame [U] ;

- de supprimer toute indemnité d'occupation à la charge de madame [U] , ou , à titre subsidiaire , la réduire ou la limiter à la période où madame [U] n'était pas ennuyée par le comportement de monsieur [G] ou à compter de la délivrance de l'assignation en partage, soit le 15 février 2012 ;

- de dire que la masse active est de 106 250 euros et la masse passive de 5 761,70 euros ;

- de dire et juger que la part respective des indivisaires après imputation des récompenses et dettes personnelles de madame [U] envers monsieur [G] et vice et versa est de :

* pour madame [A] [U] : 49 619,30 euros ;

* pour monsieur [I] [G] : 50 869,00 euros ;

- à titre subsidiaire , avant-dire-droit , d'ordonner une nouvelle expertise judiciaire avec mission:

* d'isoler les règlements effectués pour le règlement du crédit immobilier à la lumière du fonctionnement de la famille d'alors et de la lecture de la totalité des comptes communs du couple et de leurs comptes nominatifs et ce du 13 novembre 2001 au 31 mai 2010 ;

- d'attribuer au titre de modalités de partage à madame [U] de manière préférentielle l'immeuble indivis ;

- d'ordonner la publication de l'arrêt au service de la publicité foncière ;

- de désigner maître [M] à l'effet de procéder aux opérations de liquidation et de partage;

- de débouter monsieur [G] de toutes ses demandes plus amples ou contraires ;

- de condamner monsieur [G] à lui payer la somme de 3 000 euros sur le fondement de l'article 700 du code de procédure civile.

Elle conteste l'estimation du bien immobilier faite par l'expert.

Elle indique de surcroît concernant les meubles meublants être propriétaire du lave-linge et du canapé.

Sur l'indemnité d'occupation , elle indique que les deux enfants du couple sont restés avec elle; qu'il n'y a donc pas lieu à indemnité d'occupation , ou qu'elle doit être réduite ;

que , de plus, c'est contre son gré qu'elle est demeurée dans le logement , puisqu'elle s'est vue refuser ses demandes d'un logement social .

Elle ajoute que l'occupation par elle du bien n'excluait pas la même occupation par monsieur [G] , et en veut pour preuves les plaintes et mains courantes par elle déposées se plaignant des incursions fréquentes de son ex- concubin pour voir ses filles ou prendre du courrier et des affaires sous couvert de ses droits dans l'indivision .

Elle en déduit qu'au moins pendant les deux premières années de leur séparation , elle n'a pu jouir du bien de manière exclusive.

Sur la masse passive , elle fait valoir que , selon l'expert , monsieur [G] aurait payé le bien à hauteur de 82,43 %.

Elle conteste les affirmations de l'expert aux termes desquelles le compte commun au crédit mutuel à partir duquel les paiement ont été faits aurait été alimenté seulement par les avoirs de monsieur [G] puisqu'ils avaient épargné ensemble et réglé les premiers frais et acomptes et que les fonds provenant des apports ont été prélevés sur les assurances-vie abondées par le couple depuis 18 années.

Elle ajoute que les fonds ne peuvent faire partie du compte d'indivision puisqu'ils ont été apportés pour l'indivision naissante en vue de l'achat de l'immeuble , dans des proportions que l'acte authentique a précisées , et qu'il ne s'agissait par suite pas de dépenses en vue de conserver ou d'améliorer un bien indivis au sens de l'article 815,13 ; que cet acte authentique fait foi jusqu'à inscription de faux ; que les parties y ont indiqué que l'achat était effectué à raison de la moitié indivise chacun ; que les apports personnels , qu'ils proviennent de sa part ou de celle de monsieur [G] ne peuvent par suite être pris en considération.

Concernant l'emprunt , elle rappelle que le compte au crédit mutuel était un compte commun, et qu'il n'est pas démontré qu'il ait été alimenté par le seul monsieur [G].

Subsidiairement , elle demande une expertise pour déterminer le fonctionnement financier des parties pendant la vie commune.

Elle fait valoir :

- qu'il y a eu des transfert du compte à la société générale sur le LEP de monsieur [G] pour 5 000 Frs (762,50 euros ) par un chèque du 12 septembre 2000 ;

- des retraits de monsieur [G] du compte joint à la Banque Postale pour son propre compte de 2 000 à 2009 ;

- des prélèvements de monsieur [G] sur le livret bleu de madame [U] du 12 octobre 2007 au 10 juin 2010 ;

- des prélèvements de monsieur [G] sur les comptes communs pour l'achat de véhicules et que monsieur [G] doit à l'indivision le montant du prix exact du dernier véhicule break audi A4 acheté en 2009 pour 4 091,40 euros ;

- la carte accord de monsieur était débitée sur le compte joint ;

- il contractait des crédits à la consommation avec le compte à la banque postale.

- elle payait les charges de copropriété

Elle invoque aussi quatre échéances pour le remplacement de l'extracteur de gaz , qu'elle aurait prises en charge , soit 4 X 100,66 euros.

Elle invoque donc une liste des sommes qu'elle a apportées par le biais de transferts de ses comptes sur les comptes communs de 49 458,40 euros.

Elle fonde sa demande d'attribution préférentielle sur l'article 1476 du code civil .

Dans ses dernières conclusions du 9 septembre 2019 , monsieur [I] [G] demande à la cour :

- de confirmer le jugement déféré ;

- ce faisant :

- de dire qu'il a financé 82,43 % du bien indivis soit 32,43 % au-delà de sa quote-part de 50 % dans l'indivision ;

- de dire que madame [D] [U] a financé 17,75 % du bien ;

- d'évaluer le bien indivis à 162 000 euros et les meubles meublants à 1 250 euros ;

- de dire que madame [U] n'établit pas que monsieur [G] aurait fait preuve d'une intention libérale à son égard lors de l'acquisition ;

- de fixer les droits de monsieur [G] à 163 244,91 euros à parfaire ;

- de fixer les droits de madame [U] à -921,91 euros à parfaire ;

- d'attribuer à monsieur [G] le bien indivis ;

- de dire que madame [U] devra régler une soulte de 921,91 euros ;

- subsidiairement :

* de dire que monsieur [G] a remboursé l'emprunt de 21 400 euros et a exposé par suite une dépense nécessaire à la conservation du bien , puisqu'à défaut de paiement , le bien aurait pu faire l'objet d'une saisie par la banque ;

* de dire qu'il est en droit de demander à sa co indivisaire le paiement de 21 400 euros;

- en tout état de cause :

* de dire que madame [U] est redevable d'une indemnité d'occupation à compter du 1° juin 2010 et ce jusqu'à la cessation de l'occupation de l'appartement ;

* de fixer l'indemnité d'occupation à la somme de 655 euros affectée d'un abattement de 20 % ;

* de renvoyer pour le surplus les parties devant le notaire ;

* de débouter madame [U] de sa demande de réformation ;

- de la condamner au paiement de 3 000 euros sur le fondement de l'article 700 et aux dépens.

Il demande la confirmation des évaluations de l'expert.

Il rappelle que les déclarations contenues dans l'acte authentique peuvent être arguées de simulation et renversées par la preuve contraire.

La clause de répartition 50/50 selon lui ne comportait pas renonciation des parties à se prévaloir de leurs créances réciproques , d'où , pour ces deux arguments , la confirmation demandée.

Il fait valoir dans les motifs que sa créance est de 32,43 % de 162 000 euros comme l'a dit l'expert , soit la part excédant 50 % de 52 536,60 euros .

Il rappelle que le compte crédit mutuel a été alimenté par ses avoirs personnels .

Il demande l'homologation du rapport de l'expert sur les accessoires du prêt à savoir les intérêts et primes d'assurances qui , selon lui , constituent une créance entre époux.

Il formule par suite le calcul suivant :

1°) ses droits :

133 537 euros , soit 82,43 % de 162 000 euros ;

625 euros soit 50 % des meubles meublants ;

à recevoir de madame [U] :

* accessoires du prêt : 927,91 euros ;

* indemnité d'occupation : 29 082 euros à parfaire .

- total 163 244,91 euros ;

2°) droits de madame :

28 643 euros soit 17,57 % du profit subsistant ;

625 euros 50 % des meubles meublants ;

elle lui doit 921,91 euros car le solde est de -921,91 euros ;

Il demande l'attribution préférentielle et une soulte de 921,91 euros ;

Subsidiairement , si on ne tient pas compte des apports , il demande une créance égale au montant du prêt sur le fondement de l'article 815-13 du code civil.

Il rappelle que les comptes joints Société Générale , résiliés pour alimenter et ouvrir le compte au Crédit Mutuel , joint également , n'ont été alimentés que par ses revenus.

Il conteste les prétendus apports de madame [U] à l'indivision , sauf le prêt de 1 % ASTRIA déjà pris en compte.

Il conteste aussi les prélèvements qui lui sont reprochés sur le compte joint Banque Postale et prétend l'avoir abondé à hauteur de 2 000 euros et de 8 837 euros.

Sur les véhicules , il fait valoir que le véhicule Wokswagen était aux deux noms ; que le prêt a été prélevé sur le compte Banque Postale mais qu'il a déposé sur ce compte 10 837 euros ; que , concernant les véhicules Peugeot et Audi , madame ne rapporte pas la preuve de ce qu'elle les aient financés puisqu'elle produit de simples devis CDISCOUNT AUTO.

L'ordonnance de clôture a été rendue le 11 septembre 2019.

MOTIFS DE LA DECISION

Attendu que le litige concerne les opérations de compte , liquidation et partage de l'indivision ayant été constituée pour l'acquisition d'un immeuble entre deux concubins ;

Attendu qu'il s'agit tout d'abord de déterminer l'actif de l'indivision ;

Attendu qu'il est composé essentiellement d'un bien immobilier consistant en un appartement de type 3/4 situé au 4° étage du bâtiment 51 , bloc 12 côté droit du groupe Provence , [Adresse 6] ;

Attendu que ce bien a été évalué par l'expert monsieur [X] , dans son rapport du 28 juillet 2015 , à la somme de 162 000 euros ;

Que l'expert , pour ce faire , s'est fondé sur une comparaison avec une palette de produits en vente dans la résidence à l'époque de son rapport ; qu'en examinant la référence du marché local, il a adopté un prix au m² de 2280 euros , de sorte que le bien des parties présentant une surface de 71,30 m² outre une cave , il l'a évalué à 162 000 euros ;

Attendu que madame [U] conteste cette valeur en se fondant sur des attestations d'agence immobilière qui ont évalué l'appartement dans une fourchette située entre 130 000 et 140 000 euros net vendeur (agence SOLVIMO 1° septembre 2016) , entre 110 000 euros et 120 000 euros hors frais d'agence (agence du sud le 31 août 2017) et entre 125 000 et 135 000 euros net vendeur (agence SOLVIMO le 1° septembre 2017) ;

Attendu que les estimations de l'agence SOLVIMO ne tiennent pas compte de l'existence de la cave , alors qu'elles retiennent une valeur supérieure à celle de l'agence du sud qui , pourtant, retient une valeur plus basse que celle de SOLVIMO ;

Attendu que les valeurs retenues par les agences ne sont pas étayées et ne comportent pas d'explication sur les valeurs retenues ; que celle qui est datée le 1° septembre 2016 , donc la plus proche de l'expertise , retient une valeur maximale de 140 000 euros , mais sans la cave ;

Qu'il en ressort qu'elle n'est pas très éloignée de celle de l'expert qui repose sur des éléments précis de comparaison ;

Que , comme l'a fait le tribunal , la présente cour retiendra donc une valeur de 162 000 euros;

Que s'y ajoutera la valeur des meubles meublants , évalués par l'expert à 1 500 euros ; que toutefois , madame [U] rapportant la preuve de sa propriété exclusive sur le lave-linge et le canapé , c'est à bon droit que le tribunal a ramené le montant du mobilier commun à la somme de 1 250 euros ;

Attendu , sur l'indemnité d'occupation , que madame [U] vit seule dans l'appartement depuis 2010 , avec , semble-t-il l'un ou les deux enfants du couple ;

Attendu que l'article 815-9 du code civil dispose que 'l'indivisaire , qui use ou jouit privativement de la chose indivise est , sauf convention contraire , redevable d'une indemnité';

Attendu que le fait que madame [U] ait pu rechercher en vain un logement social est sans incidence sur l'indemnité d'occupation qu'elle est susceptible de devoir à l'indivision ;

Attendu que le fait que monsieur [G] ait pu pénétrer dans le logement pour reprendre des vêtements ou voir ses enfants ne retire rien au fait que , depuis la séparation du couple , madame [U] y ait vécu à l'exclusion de son ancien compagnon , lequel ne pouvait y exercer la même occupation ni y pénétrer librement , s'agissant désormais de domicile de madame [U] ; que c'est donc à bon droit que le tribunal a dit qu'une indemnité d'occupation était due par madame [U] , et ce à compter du mois de juin 2010 ;

Attendu que toute l'argumentation de madame [U] qui consiste à dire qu'elle pourrait ne pas devoir d'indemnité d'occupation au motif qu'elle s'occupait des deux enfants du couple est sans objet , alors même que le premier jugement rendu entre les parties , le 28 octobre 2011, s'il avait fixé la résidence de [A] chez sa mère , avait fixé la résidence de [Z] en alternance chez son père et chez sa mère , et que le jugement de divorce a fixé la résidence de [A] chez sa mère et celle de [Z] chez son père , de sorte que la pension alimentaire due par le père a essentiellement été fixée en fonction de cette charge partagée ;

Attendu qu'au vu de la valeur vénale retenue , l'expert a justement évalué la valeur locative à 655 euros par mois , avec un abattement de précarité de 20 % , sans qu'il appartienne à la juridiction de la fixer à une date déterminée , alors qu'elle courra jusqu'au partage ou à la libération des lieux par madame [U] ;

Attendu sur le passif de l'indivision , que l'acte d'achat en date du 13 novembre 2001 porte que monsieur [I] [G] et madame [D] [U] ont acquis le bien à raison de moitié indivise chacun , pour le prix de 76 986,75 euros payé comptant par l'acquéreur , à concurrence de 55 686,75 euros de ses deniers personnels et de 21 400 euros au moyen d'un prêt ;

Attendu qu'il ressort du rapport d'expertise qu'avec les frais et le coût de la publicité foncière, le coût total de l'acquisition doit être évalué à la somme de 83 418,75 euros ;

Attendu qu'il ressort de ce même rapport que monsieur [G] a apporté la somme de

47 364,59 euros et a pris en charge le prêt de 21 400 euros ; que madame [U] a quant à elle remboursé un prêt patronal de 14 654,16 euros ;

Attendu que le titre primant la finance , la façon dont le bien a été payé est sans incidence sur le fait que chaque indivisaire en est propriétaire à hauteur de moitié chacun ; qu'il ne s'agit pas, contrairement à ce que soutient monsieur [G] , d'une présomption simple de répartition qui peut être renversée ; qu'en revanche , il est constant que chaque indivisaire a droit à une créance à l' égard de l'indivision pour la part du prix qu'il a pu payer ;

Attendu qu'il ressort du rapport d'expertise que monsieur [G] a financé le bien à hauteur de 68 764,59 euros , soit 47 364,59 euros d'apport et 21 400 euros au titre de la prise en charge de l'emprunt contracté auprès du crédit mutuel ;

Attendu que madame [U] conteste le fait que l'apport doive être pris en compte , au motif qu'il est antérieur à l'indivision ; que toutefois, il est de jurisprudence constante que les

dépenses consacrées à l'acquisition d'un bien immobilier , tout comme l'emprunt , constituent des dépenses de conservation au sens de l'article 815-13 du code civil ;

Attendu que madame [U] conteste le fait que le compte Crédit Mutuel sur lequel étaient prélevées les échéances du prêt ait été alimenté exclusivement par des ressources propres de monsieur [G] ; que toutefois , celui-ci rapporte la preuve , par les extraits de compte qu'il produit , que ce compte a été alimenté au moment de la vente en novembre 2001, essentiellement par son indemnité de licenciement , d'abord versée sur un compte société générale puis virée sur le compte du crédit mutuel , par un contrat d'assurance-vie à son nom, par l'héritage de son grand-père et par ses revenus , à savoir une rente accident de travail versée par la CPAM ;

Que madame [U] ne rapporte pas la preuve qu'il aurait été alimenté par des assurances-vie alimentées par chaque concubin ; que les nombreux extraits de compte qu'elle produit , pour la plupart postérieurs à l'achat , annotés de sa main et non remis à l'expert , ne lui permettent pas de rapporter la preuve contraire ; qu'il est donc suffisamment démontré que la somme de 68 764,59 euros au titre de l'apport et du remboursement du prêt a bien été prise en charge par monsieur [G] ;

Attendu qu'en application de l'article 815-13 du code civil , la cour établira donc comme suit la créance de monsieur [G] à porter au passif de l'indivision à : 68 764,59 euros divisés par 83 418,75 euros multipliés par 162 000 euros , soit un total de 133 541,48 euros, ramené à

133 537 euros comme demandé ;

Attendu qu'il n'est pas contesté que madame [U] ait pris en charge le prêt de

14 654,16 euros ; qu'elle est donc créancière de la somme de 14 654,16 euros divisée par

83 418,75 euros multipliée par 162 000 euros , soit un montant de 28 458,51 euros ;

Attendu que monsieur [G] est créancier de l'indivision de la somme de 1 855,82 euros au titre des accessoires du prêt (soit 927,91 euros à l'égard de madame [U]) ; que cette somme de 1 855,82 euros sera donc inscrite au passif de l'indivision ;

Attendu que la répartition proposée par madame [U] en l'état des développements qui précèdent , à savoir 49 619,30 euros pour elle et 50 869,00 euros pour monsieur [G] ne peut être retenue ;

Attendu , sur les comptes bancaires , qu'elle explique qu'il y a eu des transferts de ses comptes personnels vers les comptes de son compagnon , et notamment vers le compte du crédit mutuel, et sollicite une expertise pour isoler les règlements effectués pour le règlement du crédit immobilier à la lumière du fonctionnement de la famille d'alors ;

Qu'outre le fait que les comptes qu'elle produit sont surchargés de sa main et disparates , de sorte qu'ils ne sont en l'état pas exploitables et qu'il n'est donc pas possible de dire qu'elle rapporte la preuve des transferts qu'elle invoque , elle ne fait pas état d' une volonté commune des anciens compagnons de se répartir l'emprunt d'une part et la prise en charge des charges de la vie courante d'autre part ;

Attendu qu'elle était par ailleurs régulièrement représentée lors de l'expertise et aurait eu l'occasion de produire ses relevés de compte devant l'expert précédemment désigné , puisque celui-ci fait état de ce que l' avocat alors constitué pour elle , maître [J] , lui a remis un certain nombre de pièces ; qu'elle n'a donc pas cru bon , alors , de communiquer ses extraits de compte , ce qu'elle aurait pu faire ;

Qu'il n'incombe par suite pas à la cour de pallier la carence de madame [U] dans l'administration de la preuve qui lui incombe en prononçant une nouvelle expertise pour isoler les versements effectués par l'un ou l'autre des concubins dans le financement du prêt immobilier au regard des charges courantes , alors même que madame [U] ne s'exprime pas clairement sur une éventuelle répartition entre elle et monsieur [G] ;

Attendu que , s'agissant des véhicules automobiles , les pièces produites par madame [U] sont également insuffisantes pour déterminer une éventuelle créance en sa faveur , alors même que le premier véhicule Wolkswagen était un véhicule commun , que , s'agissant du véhicule Peugeot , elle joint juste un bon de commande au nom de monsieur [G] et pour le véhicule Audi un devis CD DISCOUNT qui ne démontrent rien ;

Attendu que monsieur [G] demande à la cour de dire que madame [U] n'établit pas qu'il aurait fait preuve d'une intention libérale à son égard , mais qu'elle ne le soutient pas de sorte que la cour n'a pas à statuer sur ce point ;

Attendu qu'il appartiendra au notaire désigné de tenir compte , dans les comptes d'indivision respectifs , des charges et des travaux pris en charge par chacun des indivisaires (taxes foncières, d' assurances et autres) au vu des justificatifs produits par chacun d'eux ;

Qu'il lui appartiendra également de déterminer la masse active et passive de l'indivision et les droits respectifs des parties au vu de la présente décision ;

Attendu qu'il n'y a pas lieu à attribution préférentielle à l'une ou l'autre des parties , s'agissant d'une indivision conventionnelle ;

Attendu qu'il résulte des développements précédents que le jugement déféré sera confirmé sur la valeur de l'immeuble , des meubles meublants et de l'indemnité d'occupation à retenir comme éléments de l'actif d'indivision ; qu'il sera infirmé pour le surplus

Attendu que les dépens de l'instance d'appel seront employés en frais privilégiés de partage en fonction des droits respectifs des parties dans ledit partage ;

Attendu qu'il ne paraît pas inéquitable de laisser à la charge de chacune des parties ses propres dépens d'appel ;

PAR CES MOTIFS

LA COUR , statuant publiquement , contradictoirement et en dernier ressort :

CONFIRME le jugement déféré sur la fixation à l'actif de l'indivision du bien immobilier de

162 000 euros , du mobilier à hauteur de 1 250 euros par mois et de l'indemnité d'occupation due par madame [U] à hauteur de 655 euros par mois depuis juin 2010 ;

LE CONFIRME également sur l'article 700 du code de procédure civile et sur les dépens .

L' INFIRME pour le surplus , et statuant à nouveau :

DIT que monsieur [G] est créancier de l'indivision à hauteur des sommes de 133 537 euros et de 1 855,82 euros

DIT que madame [U] est créancière de l'indivision de 28 458,51 euros ;

Y AJOUTANT

DEBOUTE madame [U] de sa demande d'expertise ;

DIT n'y avoir lieu à attribution préférentielle du bien immobilier d'[Localité 7] à l'une ou l'autre des parties ;

DIT que le notaire liquidateur devra prendre en compte dans les comptes d'indivision respectifs, au vu des justificatifs produits par les parties , les charges et travaux respectivement pris en charge par monsieur [G] et madame [U] pour le compte de l'indivision ;

DIT qu'il appartiendra au notaire de déterminer la masse active et passive de l'indivision et les droits respectifs des parties au vu de la présente décision ;

DIT que dépens de l'instance d'appel seront employés en frais privilégiés de partage en fonction des droits respectifs des parties dans ledit partage ;

LAISSE à la charge de monsieur [G] et de madame [U] leurs frais irrépétibles d'appel respectifs.

LE GREFFIERLE PRÉSIDENT


Synthèse
Tribunal : Cour d'appel d'Aix-en-Provence
Formation : Chambre 2-4
Numéro d'arrêt : 17/10759
Date de la décision : 27/11/2019

Références :

Cour d'appel d'Aix-en-Provence 6D, arrêt n°17/10759 : Infirme partiellement, réforme ou modifie certaines dispositions de la décision déférée


Origine de la décision
Date de l'import : 27/03/2024
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.appel;arret;2019-11-27;17.10759 ?
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