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21/11/2019 | FRANCE | N°18/13058

France | France, Cour d'appel d'Aix-en-Provence, Chambre 1-6, 21 novembre 2019, 18/13058


COUR D'APPEL D'AIX-EN-PROVENCE

Chambre 1-6

(anciennement dénommée la 10ème chambre).

ARRÊT AU FOND

DU 21 NOVEMBRE 2019



N° 2019/443













N° RG 18/13058



N° Portalis DBVB-V-B7C-BC4MJ







[H] [J]





C/



Société CPAM DU VAR

SA AXA FRANCE IARD

Organisme CAISSE PRIMAIRE D'ASSURANCES MALADIE DES ALPES MAR ITIMES (CPAM 06)

















Copie exécutoire

délivrée

le :

à :



- SCP TOLLINCHI PERRET VIGNERON



-Me Pascal AUBRY









Décision déférée à la Cour :



Jugement du Tribunal de Grande Instance de GRASSE en date du 21 Février 2018 enregistré au répertoire général sous le n° 16/01613.



APPELANT



Mon...

COUR D'APPEL D'AIX-EN-PROVENCE

Chambre 1-6

(anciennement dénommée la 10ème chambre).

ARRÊT AU FOND

DU 21 NOVEMBRE 2019

N° 2019/443

N° RG 18/13058

N° Portalis DBVB-V-B7C-BC4MJ

[H] [J]

C/

Société CPAM DU VAR

SA AXA FRANCE IARD

Organisme CAISSE PRIMAIRE D'ASSURANCES MALADIE DES ALPES MAR ITIMES (CPAM 06)

Copie exécutoire délivrée

le :

à :

- SCP TOLLINCHI PERRET VIGNERON

-Me Pascal AUBRY

Décision déférée à la Cour :

Jugement du Tribunal de Grande Instance de GRASSE en date du 21 Février 2018 enregistré au répertoire général sous le n° 16/01613.

APPELANT

Monsieur [H] [J]

Assuré social auprès de la CPAM des Alpes-Maritimes sous le n° [XXXXXXXXXXX01].

né le [Date naissance 1] 1974 à [Localité 2],

demeurant [Adresse 1]

représenté par Me Charles TOLLINCHI de la SCP TOLLINCHI PERRET VIGNERON, avocat au barreau d'AIX-EN-PROVENCE, postulant et assisté par Me Aurélie HUERTAS, avocat au barreau de NICE substitué par Me Jean-pierre MIR, avocat au barreau de NICE, plaidant.

INTIMEES

LA CPAM DU VAR

Intervient pour le compte de la CPAM DES ALPES- MARITIMES,

demeurant [Adresse 4]

Défaillante.

SA AXA FRANCE IARD,

demeurant [Adresse 2]

représentée et assistée par Me Pascal AUBRY, avocat au barreau de GRASSE, postulant et plaidant.

CAISSE PRIMAIRE D'ASSURANCES MALADIE DES ALPES MARITIMES

Assignée le 05/11/2018,

demeurant [Adresse 3]

Défaillante.

*-*-*-*-*

COMPOSITION DE LA COUR

En application des dispositions des articles 785,786 et 907 du code de procédure civile, l'affaire a été débattue le 09 Octobre 2019, en audience publique, les avocats ne s'y étant pas opposés, devant Monsieur Jean-Wilfrid NOEL, Président, et Madame Françoise GILLY-ESCOFFIER, Conseiller.

Madame Françoise GILLY-ESCOFFIER, Conseiller, chargé du rapport, qui a fait un rapport oral à l'audience, avant les plaidoiries.

Ces magistrat ont rendu compte des plaidoiries dans le délibéré de la Cour, composée de :

Monsieur Jean-Wilfrid NOEL, Président

Madame Françoise GILLY-ESCOFFIER, Conseiller

Madame Anne VELLA, Conseiller

Greffier lors des débats : Madame Charlotte COMBARET.

Les parties ont été avisées que le prononcé de la décision aurait lieu par mise à disposition au greffe le 21 Novembre 2019.

ARRÊT

Réputé contradictoire,

Prononcé par mise à disposition au greffe le 21 Novembre 2019,

Signé par Monsieur Jean-Wilfrid NOEL, Président et Madame Charlotte COMBARET, Greffier, auquel la minute de la décision a été remise par le magistrat signataire.

***

FAITS ET PROCÉDURE

Le 1er août 2013, M. [H] [J] a été victime d'un accident de la circulation impliquant un véhicule poids lourd conduit par M. [V] [T], appartenant à la société Provence distribution logistique et assuré auprès de la SA Axa France IARD.

M. [J] a saisi le juge des référés qui par ordonnance du 23 avril 2014 lui a alloué une indemnité de 20'000 euros à valoir sur son indemnisation.

Une expertise amiable a été mise en place confiée au docteur [R] qui a établi son rapport le 15 décembre 2014.

Par acte d'huissier en date du 15 mars 2016, M. [J] a fait assigner devant le tribunal de grande instance de Grasse la SA Axa France IARD et la caisse primaire d'assurances maladie du Var (CPAM) pour obtenir la réparation de son préjudice corporel.

Par ordonnance du 17 mars 2017, le juge de la mise en état a alloué à M. [J] une provision complémentaire de 200'000 € sur sa réparation.

Par jugement du 21 février 2018, le tribunal de grande instance de Grasse a :

- dit entier le droit à indemnisation de M. [J] à la suite de l'accident du 1er août 2013,

- dit n'y avoir lieu à homologuer le rapport d'expertise et rejeté la demande formée en ce sens,

- déclaré le jugement commun et opposable à la CPAM,

- fixe le préjudice corporel de M. [J] à la somme de 344'125,21 euros,

- fixé la créance de la CPAM à la somme de 895,78 euros,

- dit que l'indemnité revenant à la victime s'établit à la somme de 275'560 euros,

- condamné la SA Axa France IARD à payer à M. [J] la somme de 2 500 euros sur le fondement de l'article 700 du code de procédure civile,

- condamné la SA Axa France IARD aux dépens avec application de l'article 699 du code de procédure civile,

- ordonné l'exécution provisoire.

Le tribunal a détaillé ainsi qu'il suit le préjudice corporel de M. [J] :

- dépenses de santé actuelles : 29'678,79 euros dont 28'352,49 euros au titre de la créance de la CPAM et 1 326,63 euros revenant à la victime,

- frais divers (honoraires d'assistance à expertise) : 550 euros,

- frais d'assistance par tierce personne avant consolidation : 3 450 euros selon un tarif horaire de 15 euros,

- perte de gains professionnels actuels : 28'326,92 euros pour la période du 2 août 2013 au 10 juin 2014, en fonction d'un revenu mensuel moyen de 2 757,85 euros au vu des avis d'imposition 2012 et 2013 dont à déduire les indemnités journalières versées par la CPAM de 36'656,92 euros, de sorte qu'aucun solde ne revient à la victime,

- perte de gains professionnels futurs : eu égard au licenciement intervenu le 10 juin 2004, 22'306 euros pour la période échue au jour de la décision et 142'993 euros pour la période à échoir sur la base d'un différentiel de 409,15 euros entre le salaire initial et le salaire actuel de 2 368 euros et par capitalisation en fonction d'un euro de rente viagère, afin de tenir compte du déficit de pension ou de retraite que va subir M. [J], selon le barème publié par la Gazette du palais le 26 avril 2016, pour un homme âgé de 43 ans au jour de la décision, dont à déduire la créance de la CPAM au titre de la rente accident du travail soit 11'886,37 euros,

- incidence professionnelle : 30'000 euros au titre de la fatigabilité et de la pénibilité accrues et de la dévalorisation consécutive sur le marché du travail,

- déficit fonctionnel temporaire : 3 821 euros sur la base journalière de 27 euros,

- souffrances endurées : 12'000 euros,

- préjudice esthétique temporaire : 3000 euros,

- déficit fonctionnel permanent : 60'000 euros,

- préjudice d'agrément : 8 000 euros au titre de la pratique antérieure du football, du ski et de la course.

Par déclaration du 1er août 2018, M. [J] a interjeté appel de cette décision sur l'évaluation des postes d'assistance à expertise, assistance par tierce personne, perte de gains professionnels futurs, incidence professionnelle, souffrances endurées, préjudice esthétique temporaire et préjudice d'agrément.

PRÉTENTIONS ET MOYENS DES PARTIES

M. [J] demande à la cour dans ses conclusions du 28 juin 2019, de :

- l'accueillir en son appel et l'en déclarer bien fondé,

vu la loi du 5 juillet 1985 :

- confirmer le jugement quant à l'indemnisation :

- des frais médicaux restés à charge,

- de la perte de gains professionnels actuels,

- du déficit fonctionnel temporaire,

- du déficit fonctionnel permanent,

- réformer le jugement quant à l'indemnisation

- des frais d'assistance à expertise,

- des frais d'assistance tierce personne,

- de la perte de gains professionnels futurs,

- de l'incidence professionnelle,

- des souffrances endurées,

- du préjudice esthétique temporaire,

- du préjudice d'agrément,

en conséquence :

- condamner la SA Axa France IARD à lui payer :

- au titre des préjudices patrimoniaux : 1'328'968,43 euros,

- au titre des préjudices extra-patrimoniaux : 97'821 euros,

- soit 1'426'789,43 euros,

- condamner la SA Axa France IARD à lui payer la somme de 3 500 euros au titre de l'article 700 du code de procédure civile,

- la condamner dépens avec distraction.

Il fait valoir que :

- sur les honoraires d'assistance à expertise : ceux-ci ont été facturés 1 200 hors taxes soient 1 440 euros toutes taxes comprises, dont à déduire l'avance de 550 € consentie par la SA Axa France IARD soit une somme de 890 euros restant due à ce titre,

- sur l'assistance par tierce personne : ce poste doit être évalué sur une base horaire de 18 euros conformément à la jurisprudence actuelle de la cour,

- sur la perte de gains professionnels futurs : il bénéficiait depuis le 8 février 2010, d'un contrat à durée indéterminée en qualité de préparateur fileteur auprès de la poissonnerie Deloye à [Localité 1] avec un salaire net mensuel de 3 637 € ; la médecine du travail après deux visites l'a déclaré définitivement inapte à son poste ce qui a été confirmé par l'expert médical qui a préconisé un emploi à temps partiel ; son licenciement est intervenu le 10 juin 2014 ; sa perte de gains doit être calculée sur la base de son salaire antérieur jusqu'au 4 août 2014 inclus, ce qui représente une indemnité de 11'638 euros, puis à compter du 5 août 2014 jusqu'au 5 décembre 2019, date prévisible de l'arrêt à intervenir, sur la base du différentiel entre son salaire antérieur et le salaire de 879,06 euros perçu dans le cadre de son reclassement à temps partiel, étant précisé que les sommes intitulées « autres revenus salariaux » figurant sur ses avis d'imposition correspondent aux allocations d'aide au retour à l'emploi qui n'ont pas à être prises en considération ; pour la période à échoir, il estime que son indemnisation doit se faire sur la base de son salaire au jour de l'accident, actualisé en fonction de l'inflation sur la base de la table d'érosion monétaire issue du bulletin officiel des finances publiques soit selon un indice de 1,019, ce qui représente une somme mensuelle de 3 706,10 euros dont à déduire le salaire de reclassement de 879,06 euros, le différentiel de 2 827,04 euros devant être capitalisé par un euro de rente viagère, afin de tenir compte de l'incidence sur la retraite, selon le barème publié par la Gazette du palais en novembre 2017, pour un homme âgé de 45 ans à la liquidation soit 31,433 dont à déduire la créance de la CPAM,

- sur l'incidence professionnelle : il sollicite une somme de 80'000 euros afin de tenir compte de la pénibilité accrue, de l'abandon de sa profession et de sa dévalorisation sur le marché du travail,

- sur les souffrances endurées : elles doivent être réparées hauteur de la somme de 20'000 euros pour tenir compte de l'ostéosynthèse par plaque vissée, du séjour en service de réadaptation et de la rééducation,

- sur le préjudice esthétique temporaire : une indemnité de 4 000 euros est justifiée compte tenu des deux cicatrices,

- sur le préjudice d'agrément : il sollicite une somme de 10'000 euros car l'expert l'a retenu pour toutes les activités sportives nécessitant l'utilisation des membres inférieurs.

La SA Axa France IARD demande à la cour dans ses conclusions du 15 juillet 2019, de :

- réformer le jugement pour les postes de :

- perte de gains professionnels futurs,

- incidence professionnelle,

- déficit fonctionnel permanent,

statuant à nouveau :

- déclarer satisfactoires les offres d'indemnisation suivantes et débouter M. [J] de toutes prétentions supplémentaires :

- perte de gains professionnels futurs : 110'405 euros,

- incidence professionnelle : 10'000 euros,

- déficit fonctionnel permanent : 50'000 euros,

- le confirmer pour le surplus,

- fixer en conséquence, le préjudice corporel de M. [J] à la somme globale de 271'117,58 euros, dont 194'221,80 euros revenant à la victime, dont il conviendra de déduire les provisions versées à hauteur de 20'000 euros et 200'000 euros,

- fixer la créance de la CPAM à la somme de 76'895,78 euros,

- déclarer que chacune des parties conservera la charge de l'article 700 du code de procédure civile,

- statuer ce que de droit quant aux dépens.

Elle soutient que :

* sur la perte de gains professionnels futurs :

- le tribunal a surestimé le salaire net moyen au jour de l'accident : si l'on se réfère aux différents bulletins de paie et avis d'imposition de 2010 à 2013 produits, le salaire mensuel net moyen de M. [J] n'a jamais atteint la somme qu'il revendique ; en se fondant sur l'avis d'imposition 2013 puisque l'année 2014 n'est pas complète et en déduisant la CSG et la CRDS à hauteur de 3,5 % le revenu mensuel net moyen est de 2 763,91 euros ; même en scindant l'année 2004 la perte effective de revenus, pour la période du 10 juin 2014 au 4 août 2014, en retenant une rémunération théorique de 2 777,15 du 1er janvier 2014 jusqu'au 4 août 2014 et en soustrayant la rémunération effectivement perçue, est de 2 333,75 euros,

- la perte de gains du 5 août 2014 jusqu'à la décision à intervenir, ne peut être déterminée car les avis d'imposition 2017 et 2018 et les fiches de paie de l'année 2018 n'ont pas été communiqués,

- si M. [J] a retrouvé un emploi à temps partiel, sa rémunération horaire est inférieure de plus de la moitié, à celle qu'il percevait antérieurement et il n'est donc pas exclu, qu'il puisse exercer un emploi plus rémunérateur ; en outre, il perçoit d'autres revenus car l'avis d'imposition sur le revenu 2018 renvoie à d'autres revenus salariaux pour un montant de 9 620 euros,

- la cour ne peut faire application d'une rente viagère car le préjudice doit être calculé en distinguant une rente temporaire jusqu'à la date de départ prévisible à la retraite, 60 ans si M. [J] a commencé jeune à travailler et 62 ans dans le cas contraire, et sur la base d'une perte précise du montant de la pension de retraite par comparaison entre la pension de retraite qu'il aurait perçue sans l'accident et celle qu'il devrait percevoir puis par capitalisation en rente viagère ce qui relève de l'incidence professionnelle,

- la perte de gains professionnels futurs pour la période échue jusqu'à l'arrêt, doit être déterminée en fonction des sommes que la victime aurait dû percevoir et celles qu'elle a effectivement perçues, année par année, en déduisant la rente accident du travail et en tenant compte des « autres revenus salariaux » figurant sur les avis d'imposition,

- pour la période à échoir la cour est dans l'incapacité de chiffrer précisément la perte, faute de communication d'un relevé de carrière ou d'une simulation des droits à la retraite de la part de son ou ses organisme de retraite ; elle-même propose deux simulations l'une en fonction d'une retraite à 60 ans et l'autre d'une retraite à 62 ans,

* sur l'incidence professionnelle : si la pénibilité accrue n'est pas contestée la dévalorisation sur le marché du travail est loin d'être démontrée,

* sur le déficit fonctionnel permanent : ce poste a été largement surévalué par le premier juge au regard de la jurisprudence de toutes les cours d'appel.

La CPAM assignée par acte d'huissier du 5 novembre 2018 délivré à personne habilitée et contenant dénonce de l'appel n'a pas constitué avocat.

Par courrier du 28 novembre 2018, elle a fait connaître le montant de sa créance définitive de 76 895,78 euros composée d'indemnités journalières (36'656,92 euros versées du 2 août 2013 au 30 avril 2014), de prestations en nature (25'121,05 euros au titre des frais médicaux, pharmaceutiques, d'appareillage et de transport versés jusqu'au 27 mai 2014 et 3 231,44 euros au titre des frais futurs) et de la rente accident du travail (11'886,37 euros dont 2 055,12 euros au titre des arrérages échus du 1er juillet 2014 au 15 juin 2015).

L'arrêt sera réputé contradictoire conformément aux dispositions de l'article 474 du code de procédure civile.

MOTIFS DE LA DÉCISION

Le droit à indemnisation intégral de M. [J] n'est pas contesté.

Sur le préjudice corporel

Seuls restent en discussion devant la cour les postes de frais d'assistance à expertise, assistance par tierce personne, perte de gains professionnels futurs, incidence professionnelle, souffrances endurées, préjudice esthétique, déficit fonctionnel permanent et préjudice d'agrément.

L'expert le docteur [R] indique dans son rapport en date du 15 décembre 2014, que M. [J] a présenté une fracture de l'angle mandibulaire gauche, une fracture de l'extrémité du radius droit à déplacement antérieur, une fracture du plateau tibial externe gauche, une fracture de la branche ischio et ilio-pubienne gauche et une plaie de l'index droit et qu'il conserve comme séquelles une limitation de l'ouverture buccale à 1 cm avec hypoesthésie dans le territoire du V3, une limitation de flexion du poignet droit avec une limitation de la force, des dysesthésies de l'index gauche, une instabilité du compartiment interne du genou gauche, des mouvements de laxité et un tiroir antérieur, une limitation de la flexion, une amyotrophie modérée de la cuisse et du mollet gauches, et des difficultés pour se relever après accroupissement.

Il conclut à :

- un déficit fonctionnel temporaire total du 1er août 2013 au 5 octobre 2013,

- un déficit fonctionnel temporaire partiel au taux de 50 % du 6 octobre 2013 au 31 janvier 2014 et de 25 % du 1er février 2014 au 10 juin 2014,

- un arrêt des activités professionnelles du 1er août 2013 au 30 avril 2014,

- une aide humaine de 2 heures par jour du 6 octobre 2013 au 31 janvier 2014,

- une consolidation au 10 juin 2014,

- des souffrances endurées de 4/7,

- un déficit fonctionnel permanent de 25 %,

- un préjudice esthétique permanent de 1,5/7,

- un préjudice d'agrément : pour la course à pied, le football et le ski,

- incidence professionnelle : inapte à cette profession ; apte à sa profession à temps partiel,

- frais futurs : l'ablation du matériel d'ostéosynthèse du genou gauche est possible avec une hospitalisation d'un à trois jours, une gêne temporaire partielle de 25 % pendant 15 jours puis de 10 % pendant 15 jours, une interruption des activités professionnelles de 15 jours et de nouvelles souffrances endurées de 2/7.

Son rapport constitue une base valable d'évaluation du préjudice corporel subi à déterminer au vu des diverses pièces justificatives produites, de l'âge de la victime née le [Date naissance 1] 1974 de son activité de fileteur en poissonnerie, de la date de consolidation, afin d'assurer sa réparation intégrale et en tenant compte, conformément aux articles 29 et 31 de la loi du 5 juillet 1985, de ce que le recours subrogatoire des tiers payeurs s'exerce poste par poste sur les seules indemnités qui réparent des préjudices qu'ils ont pris en charge, à l'exclusion de ceux à caractère personnel sauf s'ils ont effectivement et préalablement versé à la victime une prestation indemnisant de manière incontestable un tel chef de dommage.

Par ailleurs, l'évaluation du dommage doit être faite au moment où la cour statue et le barème de capitalisation utilisé sera celui publié par la Gazette du palais le 28 novembre 2017, demande par la victime qui est le plus approprié eu égard aux données démographiques et économiques actuelles.

Préjudices patrimoniaux

temporaires (avant consolidation)

- Frais divers550 euros

Ils sont représentés par :

° les honoraires d'assistance à expertise par le docteur [Z] médecin conseil, soit 550 euros au vu de la note d'honoraires du 15 décembre 2014 ; le surplus allégué au titre de ce poste n'est pas prouvé à défaut d'autre note d'honoraires ou facture ; le jugement sera confirmé.

- Assistance temporaire de tierce personne4 140 euros

La nécessité de la présence auprès de M. [J] d'une tierce personne n'est pas contestée dans son principe, ni son étendue pour l'aider dans les actes de la vie quotidienne, préserver sa sécurité, suppléer sa perte d'autonomie mais elle reste discutée dans son coût.

En application du principe de la réparation intégrale et quelles que soient les modalités choisies par la victime, le tiers responsable est tenu d'indemniser le recours à cette aide humaine indispensable qui ne saurait être réduit en cas d'aide familiale ni subordonné à la production des justificatifs des dépenses effectuées.

Eu égard à la nature de l'aide requise, non spécialisée et du handicap qu'elle est destinée à compenser, des tarifs d'aide à domicile en vigueur dans la région, l'indemnisation se fera sur la base d'un taux horaire moyen de 18 euros.

L'indemnité de tierce personne s'établit ainsi à :

- 2 heures x 115 jours x 18 euros = 4 140 euros.

Préjudices patrimoniaux

permanents (après consolidation)

- Perte de gains professionnels futurs 1 066 348,17 euros

Ce poste est destiné à indemniser la victime de la perte ou de la diminution directe de ses revenus à compter de la date de consolidation, consécutive à l'invalidité permanente à laquelle elle est désormais confrontée dans la sphère professionnelle à la suite du fait dommageable.

La perte de gains professionnels futurs doit être évaluée en fonction du salaire perçu par M. [J] lors de l'accident ; le bulletin de salaire du dernier mois travaillé avant l'accident soit celui du mois de juillet 2013, fait état d'un cumul net imposable de 25 462,91 euros ce qui représente un salaire mensuel net de 3 637,56 euros (25 462,91 euros /7 mois) ramené à 3 637 euros pour rester dans la demande.

Par avis du 22 mai 2014, après deuxième visite de reprise, le médecin du travail a déclaré M. [J] inapte définitivement à son poste antérieur et son employeur la SAS Saint André l'a licencié pour inaptitude et impossibilité de reclassement dans l'entreprise par courrier du 3 juin 2014.

La perte de son emploi par M. [J] est donc la conséquence directe de l'accident.

M. [J] a produit aux débats le contrat à durée indéterminée à temps partiel qu'il a conclu le 5 août 2014 avec la SARL Pêcherie azuréenne, moyennant un salaire mensuel brut de 1 097,43 euros pour 86,67 heures de travail, ce qui représente un salaire mensuel net de 845 euros augmenté à 879,06 euros ainsi que retenu par M. [J].

Au vu de l'ensemble de ces données, l'indemnité due pour ce poste de dommage doit être chiffrée à partir du dernier salaire perçu avant l'accident, actualisé à ce jour pour la période à échoir afin de tenir compte de l'érosion monétaire et en fonction des revenus de M. [J] après la consolidation dans le cadre de son emploi à temps partiel tels qu'ils ressortent des avis d'imposition qui ont été communiqués étant précisé d'une part, que seuls seront pris en considération les salaires et non les 'autres revenus salariaux' soit rente accident du travail qui sera imputée sur ce poste de dommage et allocations d'aide au retour à l'emploi qui sont des revenus de solidarité, et, d'autre part, qu'il est certain eu égard aux séquelles de l'accident qui entraînent sa dévalorisation sur le marché du travail et à son âge, que M. [J] ne pourra pas retrouver un emploi d'un niveau de rémunération supérieur à celui qu'il occupe actuellement et équivalent à celui qu'il avait avant l'accident.

La perte théorique est ainsi la suivante :

- de la consolidation du 10 juin 2014 au 4 août 2014 (veille du nouvel emploi) :

3 637 euros x 96 jours/30 jours = 11 638,40 euros,

- du 5 août 2014 à ce jour 21 novembre 2019 :

en fonction du différentiel entre son salaire avant l'accident et son salaire actuel :

(3 637 euros - 879,06 euros) x 64 mois = 176 508,16 euros,

- à compter de ce jour :

sur la base du différentiel entre son dernier salaire avant l'accident, actualisé en fonction de l'érosion monétaire à 3 706,10 euros et du salaire actuel et par capitalisation par un euro de rente temporaire d'un homme âgé de 45 ans à la liquidation jusqu'à la retraitre à 65 ans (compte tenu de l'année de naissance de M. [J]) soit 17,952 :

(3 706,10 euros - 879,06 euros) x 12 mois x 17,952 = 609 012,27 euros,

- total : 797 158,83 euros (11 638,40 euros + 176 508,16 euros + 609 012,27 euros).

Sur cette indemnité, s'impute la rente accident du travail réglée par la CPAM soit 11'886,37 euros qu'elle a vocation à réparer.

Le solde est de 785 272,46 euros (797 158,83 euros - 11'886,37 euros).

Le préjudice de retraite, que la cour est en mesure de déterminer, même en l'absence de relevé de carrière ou de justificatif édité par la caisse de retraite de M. [J], étant précisé que la SA Axa France IARD n'a pas fourni de simulation précise des montants de retraite à 60 ans ou 65 ans de cette victime, doit être calculé sur la base du différentiel entre 50 % du dernier salaire avant l'accident actualisé en fonction de l'érosion monétaire et 50 % du salaire actuel et par capitalisation par un euro de rente viagère d'un homme âgé de 65 ans à la liquidation soit 17,236

(3 706,10 euros - 879,06 euros) x 50 % x 12 mois x 17,236 = 292 361,17 euros.

La perte totale est ainsi de 1 077 633,63 euros (785 272,46 euros + 292 361,17 euros) ramené à 1.054.461,80 euros pour rester dans la demande.

L'assiette du poste est donc de 1 066 348,17 euros (1.054.461,80 euros + 11'886,37 euros).

- Incidence professionnelle 30 000 euros

Ce chef de dommage a pour objet d'indemniser non la perte de revenus liée à l'invalidité permanente de la victime mais les incidences périphériques du dommage touchant à la sphère professionnelle en raison, notamment, de sa dévalorisation sur le marché du travail, de sa perte d'une chance professionnelle ou de l'augmentation de la pénibilité de l'emploi qu'elle occupe imputable au dommage, ou encore l'obligation de devoir abandonner la profession exercée au profit d'une autre en raison de la survenance de son handicap.

En l'espèce, M. [J] subit une pénibilité accrue et une dévalorisations sur le marché du travail, ce qui justifie l'indemnité de 30 000 euros allouée par le premier juge.

Préjudices extra-patrimoniaux

temporaires (avant consolidation)

- Souffrances endurées20 000 euros

Ce poste prend en considération les souffrances physiques et psychiques et les troubles associés supportés par la victime en raison du traumatisme initial, de l'hospitalisation, de l'intervention chirurgicale, des examens et soins ; évalué à 4/7 par l'expert, il justifie l'octroi d'une indemnité de 20 000 euros.

- Préjudice esthétique temporaire3 000 euros

Ce poste de dommage cherche à réparer les atteintes physiques et plus généralement, les éléments de nature à altérer l'apparence physique.

Qualifié de 1,5/7 au titre des cicatrices, il a été justement indemnisé.

permanents (après consolidation)

- Déficit fonctionnel permanent60 000 euros

Ce poste de dommage vise à indemniser la réduction définitive du potentiel physique, psychosensoriel ou intellectuel résultant de l'atteinte anatomo-physiologique à laquelle s'ajoutent les phénomènes douloureux et les répercussions psychologiques et notamment le préjudice moral et les troubles dans les conditions d'existence (personnelles, familiales et sociales).

Il est caractérisé par une limitation de l'ouverture buccale à 1 cm avec hypoesthésie dans le territoire du V3, une limitation de flexion du poignet droit avec une limitation de la force, des dysesthésies de l'index gauche, une instabilité du compartiment interne du genou gauche, des mouvements de laxité et un tiroir antérieur, une limitation de la flexion et des difficultés à l'accroupissement, ce qui conduit à un taux de 25 % justifiant l'indemnité de 60 000 euros allouée par le premier juge pour un homme âgé de 40 ans à la consolidation.

- Préjudice d'agrément8 000 euros

Ce poste de dommage vise exclusivement l'impossibilité ou la difficulté pour la victime à poursuivre la pratique d'une activité spécifique sportive ou de loisir.

M. [J] justifie ne plus pouvoir pratiquer certaines activités sportives auxquelles il s'adonnait régulièrement avant l'accident, à savoir le football, la corse à pied et le ski suivant attestations concordantes versées aux débats, ce qui justifie l'octroi de l'indemnité de 8 000 euros allouée par le premier juge.

Le préjudice corporel global subi par M. [J], s'établit ainsi à la somme de 1 253 864,88 euros soit, après imputation des débours de la CPAM, une somme de 1 185 299,10 euros lui revenant, provisions non déduites, ce qui représente 956 969,10 euros après déduction des provisions de 220 000 euros précédemment versées.

Sur les demandes annexes

Les dispositions du jugement relatives aux dépens et aux frais irrépétibles doivent être confirmées.

La SA Axa France IARD qui succombe partiellement dans ses prétentions et qui est tenue à indemnisation supportera la charge des dépens d'appel avec application de l'article 699 du code de procédure civile.

L'équité commande d'allouer à M. [J] une indemnité de 3 500 euros au titre des frais irrépétibles exposés devant la cour.

PAR CES MOTIFS

La Cour,

Statuant dans les limites de l'appel,

- Confirme le jugement,

hormis sur le montant de l'indemnisation des postes de perte de gains professionnels futurs et souffrances endurées et des sommes revenant à la victime,

Statuant à nouveau sur les points infirmés et y ajoutant,

- Fixe le poste de perte de gains professionnels futurs à 1 066 348,17 euros avant imputation de la rente accident du travail et le poste de souffrances endurées à 20 000 euros,

- Fixe en conséquence le préjudice corporel global de M. [H] [J] à la somme de 1.253.864,88 euros,

- Dit que l'indemnité revenant à cette victime s'établit à 1 176 969,10 euros,

- Condamne la SA Axa France IARD à payer à M. [H] [J] les sommes de :

* 956 969,10 euros, provisions de 220 000 euros déduites,

* 3 500 euros sur le fondement de l'article 700 du code de procédure civile en cause d'appel,

- Condamne la SA Axa France IARD aux dépens d'appel qui seront recouvrés conformément aux dispositions de l'article 699 du Code de procédure civile.

Le greffier Le président


Synthèse
Tribunal : Cour d'appel d'Aix-en-Provence
Formation : Chambre 1-6
Numéro d'arrêt : 18/13058
Date de la décision : 21/11/2019

Références :

Cour d'appel d'Aix-en-Provence 10, arrêt n°18/13058 : Confirme la décision déférée dans toutes ses dispositions, à l'égard de toutes les parties au recours


Origine de la décision
Date de l'import : 27/03/2024
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.appel;arret;2019-11-21;18.13058 ?
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