La jurisprudence francophone des Cours suprêmes


recherche avancée

13/11/2019 | FRANCE | N°18/12103

France | France, Cour d'appel d'Aix-en-Provence, Chambre 2-4, 13 novembre 2019, 18/12103


COUR D'APPEL D'AIX-EN-PROVENCE

Chambre 2-4



ARRÊT AU FOND

DU 13 NOVEMBRE 2019

A.R.

N° 2019/324













Rôle N° 18/12103 -

N° Portalis DBVB-V-B7C-BCZWB







COMMUNE/VILLE DE [Localité 7]





C/



[C] [Y]





















Copie exécutoire délivrée

le :

à :





Me Audrey AYALA DUFOUR



Me Julie FEHLMANN


<

br>





Décision déférée à la Cour :



Jugement du Tribunal de Grande Instance de GRASSE en date du 20 Avril 2018 enregistré au répertoire général sous le n° 13/01329.





APPELANTE





COMMUNE/VILLE DE [Localité 7]

représentée par son maire en exercice Monsieur [N] [P] domicilié [Adresse 6] agissant dans le...

COUR D'APPEL D'AIX-EN-PROVENCE

Chambre 2-4

ARRÊT AU FOND

DU 13 NOVEMBRE 2019

A.R.

N° 2019/324

Rôle N° 18/12103 -

N° Portalis DBVB-V-B7C-BCZWB

COMMUNE/VILLE DE [Localité 7]

C/

[C] [Y]

Copie exécutoire délivrée

le :

à :

Me Audrey AYALA DUFOUR

Me Julie FEHLMANN

Décision déférée à la Cour :

Jugement du Tribunal de Grande Instance de GRASSE en date du 20 Avril 2018 enregistré au répertoire général sous le n° 13/01329.

APPELANTE

COMMUNE/VILLE DE [Localité 7]

représentée par son maire en exercice Monsieur [N] [P] domicilié [Adresse 6] agissant dans le cadre de l'article L 2122-22 du code Général des Collectivités Territoriales pour le compte et en qualité de maire de ladite commune selon délibération du Conseil Municipal de ladite ville en date du 5 novembre 2018.

représentée et assistée par Me Audrey AYALA DUFOUR, avocat au barreau de GRASSE, plaidant.

INTIME

Monsieur [C] [Y]

né le [Date naissance 2] 1929 à [Localité 7],

demeurant [Adresse 3]

représenté par Me Julie FEHLMANN de la SELARL LEGIS-CONSEILS, avocat au barreau de GRASSE, assisté par Me Isabelle STAUFFERT-GIROUD, avocat au barreau de GRENOBLE, plaidant.

COMPOSITION DE LA COUR

L'affaire a été débattue le 18 Septembre 2019 en audience publique. Conformément à l'article 785 du code de procédure civile, Mme Annie RENOU, Conseiller , a fait un rapport oral de l'affaire à l'audience avant les plaidoiries.

La Cour était composée de :

M. Jean-Baptiste COLOMBANI, Premier président de chambre

Mme Annie RENOU, Conseiller

Mme Annaick LE GOFF, Conseiller

qui en ont délibéré.

Greffier lors des débats : Mme Dominique COSTE.

Les parties ont été avisées que le prononcé de la décision aurait lieu par mise à disposition au greffe le 13 Novembre 2019.

ARRÊT

Contradictoire,

Prononcé par mise à disposition au greffe le 13 Novembre 2019,

Signé par M. Jean-Baptiste COLOMBANI, Premier président de chambre et Mme Dominique COSTE, greffier auquel la minute de la décision a été remise par le magistrat signataire.

***

Madame [B] [Y] épouse [J] est décédée le [Date décès 1] 2008 sur la commune de [Localité 8].

Elle a établi un testament olographe à [Localité 5] , le 12 janvier 1996 , déposé en l'étude de maître [Z].

Ce testament est rédigé comme suit :

'Je désigne pour légataire universelle la ville de [Localité 7] (Rhône) au profit de ses oeuvres sociales et de préférence en faveur des personnes âgées , à charge pour elle de délivrer les legs particuliers suivants dans les six mois de mon décès :

- l'équivalent au jour de mon décès d'une somme nette de 50 000 Frs à madame [U] [E] épouse divorcée de monsieur [L] [M] , domiciliée 'l' Impératrice' [Adresse 4] ;

- la même somme à son fils , monsieur [F] [M] ,

en souvenir de l'aide que m'ont apportée ces personnes en des circonstances difficiles' .

Arguant de l'insanité d'esprit de sa soeur au moment de la rédaction du testament , et de son placement sous tutelle dans les années qui ont suivi , monsieur [C] [Y] , frère de la défunte , a fait assigner la ville de [Localité 7] par acte du 26 février 2013 aux fins de voir , après la mise en cause régulièrement effectuée des légataires particuliers :

- dire et juger que madame [J] n'était pas saine d'esprit à la date du 12 janvier 1996;

- en conséquence annuler le testament ;

- ordonner l'ouverture des opérations de compte , liquidation et partage de la succession de madame [J] avec désignation d'un notaire .

Subsidiairement , il sollicitait la désignation d'un expert médical aux fins de se faire communiquer le dossier médical de madame [J] et de donner son avis sur l'état mental de celle-ci au moment de la rédaction du testament.

La ville de [Localité 7] s'opposait aux demandes de monsieur [Y] et demandait au tribunal, reconventionnellement , de la restituer dans ses droits de légataire universelle s'agissant d'un contrat d'assurance-vie dont le capital , de 404 015,98 , avait été perçu par monsieur [Y].

Elle demandait donc la restitution de cette somme outre la condamnation de monsieur [Y] à lui payer la somme de 70 000 euros à titre de dommages-intérêts .

Monsieur et madame [M] n'ont pas constitué avocat en première instance.

Par jugement du 20 avril 2018 , le tribunal de grande instance de Grasse a :

- débouté monsieur [C] [Y] de l'ensemble de ses demandes ;

- débouté la ville de [Localité 7] de sa demande reconventionnelle et de sa demande de dommages-intérêts ;

- dit n'y avoir lieu à exécution provisoire de la présente décision ;

- condamné monsieur [C] [Y] à payer à la ville de [Localité 7] la somme de 2 500 euros sur le fondement de l'article 700 du code de procédure civile ;

- condamné monsieur [Y] aux dépens de l'instance.

Le tribunal a jugé que monsieur [Y] n'établissait pas l'insanité d'esprit de sa soeur au moment de la rédaction du testament , et qu'il ne pouvait , pour pallier sa carence dans l'administration de la preuve qui lui incombait de cette insanité d'esprit , solliciter une mesure d'expertise.

Sur le contrat d'assurance-vie , il a jugé que , aux termes de l'article L 132-12 du code des assurances , le contrat d'assurance-vie ne peut être intégré à la succession , peu important que la commune de [Localité 7] ait été désignée comme légataire universelle dans la mesure où le bénéficiaire du contrat d'assurance-vie était clairement mentionné ;

Sur les dommages-intérêts , il a estimé que la preuve de manoeuvres frauduleuses et de détournement de fonds de la part de monsieur [Y] n'était pas démontrée et que la ville de [Localité 7] ne rapportait pas la preuve d'un quelconque préjudice résultant de la procédure ni même d'un comportement fautif de monsieur [Y];

Par déclaration d'appel du 18 juillet 2018 , la commune de [Localité 7] a relevé appel partiel concernant le rejet de sa demande reconventionnelle.

Dans ses dernières conclusions notifiées par RPVA le 26 juillet 2019 , la commune de [Localité 7] demande à la cour :

- de la recevoir en son appel partiel et limité ;

- de donner acte à monsieur [C] [Y] de son désistement d'appel incident ;

- de dire et juger en tout état de cause et en tant que de besoin que la commune de [Localité 7] accepte le désistement d'appel incident de monsieur [Y] ;

- de dire et juger que la cour d'appel d'Aix n'est donc désormais saisie par l'effet dévolutif de l'appel principal que d'un appel partiel et limité sur les chefs de jugement critiqué ;

- d'infirmer en le réformant partiellement et limitativement le jugement rendu le 20 avril 2018 en ce qu'il a débouté la commune de [Localité 7] de l'ensemble de ses demandes tendant à la condamnation à paiement de monsieur [C] [Y] à son profit de légitimes dommages-intérêts tant en ce qui concerne la réparation du préjudice subi par ses manoeuvres frauduleuses et illicites afin de percevoir le montant du capital au jour du décès de madame [B] [J] née [Y] du contrat d'assurance-vie SEQUOIA n° 216/3026424-6 auprès de la SOGECAP de son vivant par son gérant de tutelle l' ATIAM qu'en ce qui concerne les autres manoeuvres et agissements dilatoires et de négligence de monsieur [Y] qui , par ce biais , a commis un véritable abus sans élément de preuve et ce au préjudice de la commune de [Localité 7] ;

- Statuant à nouveau :

* de dire et juger que par l'effet du testament olographe du 12 janvier 1996 de madame [J] la commune de [Localité 7] a été instituée seule légataire universelle et donc héritière de madame [B] [J] avec les conséquences de droit y attachées à savoir l'inapplicabilité de l'ordre légal des héritiers dans sa succession ;

* de dire et juger que la commune de [Localité 7] , légataire universelle , s'est donc vu attribuer au jour du décès de madame [J] l'universalité des biens constituant ladite succession;

* de dire et juger qu'en l'état de la succession testamentaire , du legs universel dûment accepté par la commune de [Localité 7] , monsieur [Y] n'étant pas héritier réservataire , ne pouvait pas prétendre à la qualité d'héritier de l'ordre légal et donc au bénéfice du capital d'assurance-vie SEQUOIA souscrit du vivant de madame [J] par son gérant de tutelle l' ATIAM le 12 octobre 2006 , sur autorisation judiciaire du juge des tutelles du 13 juillet 2006 en réorganisation et simplification des comptes bancaires de dépôts et de placements de la défunte et dont la clause bénéficiaire étaient les héritiers légaux ;

* de dire et juger que , de son vivant , madame [B] [J] n'a jamais entendu que monsieur [A] [Y] puisse se prévaloir de la qualité d'héritier en ordre légal dans sa succession , et ce en réalisant et en établissant son testament olographe du 12 janvier 1996 régulièrement adressé à son notaire maître [Z] , en charge des opérations de compte , liquidation , partage de la succession ouverte ;

- de dire et juger que monsieur [Y] , en parfaite connaissance de l'existence de ce testament olographe du 12 janvier 1996 de madame [J] instituant la commune de [Localité 7] légataire universelle n'avait plus la qualité d'héritier d'ordre légal de madame [J] , seule la commune de [Localité 7] étant héritière en sa qualité de légataire universelle;

- de dire et juger que le contrat d'assurance-vie SEQUOIA n° 216/3026424-6 de la SOGECAP souscrit du vivant de madame [J] ne désigne comme seuls bénéficiaires du capital restant au jour du décès que les seuls héritiers légaux et non pas nommément monsieur [C] [Y] qui n'avait pas vocation à une quelconque dévolution successorale par l'effet du testament olographe du 12 janvier 1996 de madame [J] ;

- de dire et juger que lors de la souscription du contrat SEQUOIA l'ATIAM organisait simplement pour une meilleure rentabilité des comptes de placement de madame [J] selon ordonnance du juge des tutelles du 13 juillet 2006 ;

- de dire et juger que l' ATIAM ne bénéficiait d'aucune autorisation ni de madame [J] ni judiciaire lui permettant de modifier la volonté de la première comme exprimée dans le testament olographe du 12 janvier 1996 qui , en instituant la commune de [Localité 7] légataire universelle , entendait la gratifier de tout son patrimoine mobilier et immobilier en ce compris le capital de l'assurance-vie SEQUOIA souscrit auprès de la SOGECAP par l' ATIAM pour le compte de la testatrice puisqu'il venait en remplacement de différentes valeurs en placement existantes ;

- de dire et juger que , par une manoeuvre frauduleuse , en parfaite connaissance du testament olographe de madame [J] du 12 janvier 1996 , instituant comme légataire universelle et donc comme héritière légale en l'absence d'héritiers réservataires la commune de [Localité 7] , monsieur [Y] s'est fait remettre par la SOGECAP sur la base d'une simple attestation notariale d'établissement d'un acte de notoriété le capital SEQUOIA souscrit auprès de la SOGECAP par l' ATIAM pour le compte de la testatrice madame [J] représentant la somme en capital de 404 015,98 euros au jour de son décès et ce en fraude des droits de la commune de [Localité 7] ;

- de dire et juger que par l'utilisation de ses agissements et manoeuvres frauduleuses , monsieur [Y] a bien commis une faute et qu'il a engagé sa responsabilité délictuelle pleine et entière à l'égard de la commune de [Localité 7] ce dont il lui doit réparation ;

- de dire et juger que le témoignage de l'épouse de monsieur [Y] , madame [S] épouse [Y] , est irrecevable et n'a aucune force probante ;

- de condamner en conséquence monsieur [C] [Y] au paiement au profit de la commune de [Localité 7] de la somme de 404 015,98 euros correspondant au montant du capital du contrat SEQUOIA au jour du décès à titre de légitimes dommages-intérêts , ladite somme devant être productive d'intérêt légal avec anatocisme depuis le jour de la délibération du conseil municipal de la ville de [Localité 7] ayant accepté le legs universel soit du 16 novembre 2009 au parfait paiement ;

- de dire et juger que monsieur [Y] a volontairement et sciemment , par ses différents agissements , manoeuvres frauduleuses et dilatoires , par l'introduction de la procédure et alors qu'il ne pouvait prouver l'insanité d'esprit de madame [J] lors de l'établissement , de la rédaction et de la signature de son testament du 12 janvier 1996 , bloqué la commune de [Localité 7] dans la réalisation des dernières volontés de madame [J] comme exprimées dans ledit testament portant legs universel au profit de la commune ;

- de dire et juger qu'il a donc commis sciemment une faute délictuelle et a donc engagé sa responsabilité à l'égard de la commune dont il doit réparation ;

- de dire et juger que la commune de [Localité 7] prouve la conséquence préjudiciable des agissements et manoeuvres de monsieur [Y] à son encontre ;

- de la condamner en conséquence au paiement de la somme de 70 000 euros en réparation du préjudice subi par la commune et à titre de légitimes dommages-intérêts ;

- sur les conclusions de l'intimé , de dire que monsieur [Y] procède par voie d'affirmation sans verser aux débats de pièces ou éléments de preuves permettant de corroborer et de prouver lesdites affirmations ;

- de dire et juger irrecevable la demande par monsieur [Y] de la commune de [Localité 7] en paiement de la somme de 70 000 euros à titre de dommages-intérêts ;

- de débouter monsieur [Y] de toutes ses demandes ;

- de le condamner au paiement de la somme de 15 000 euros sur le fondement de l'article 700 du code de procédure civile ainsi qu'aux entiers dépens d'appel dont distraction au profit de maître Audrey AYALA DUFOUR , avocate aux offres de droit en application de l'article 699 du code de procédure civile.

Par dernières conclusions du 8 août 2019 , monsieur [C] [Y] demande à la cour :

- de constater son désistement de son appel incident sur le fondement de l'article 901 du code civil ;

- pour le surplus , de confirmer le jugement du tribunal de grande instance de Grasse du 20 avril 2018 , en ce qu'il a débouté la commune de [Localité 7] de ses demandes ;

- en conséquence , de débouter la commune de [Localité 7] de ses demandes ;

- de la condamner à la somme de 70 000 euros de dommages-intérêts pour procédure abusive;

- de la condamner à la somme de 15 000 euros sur le fondement de l'article 700 du code de procédure civile ainsi qu'aux entiers dépens de première instance et d'appel dont distraction au profit de la SELARL LOGIS CONSEIL , avocat postulant.

Il fait valoir que c'est l' ATIAM qui l'a informé du décès de sa soeur , et le cabinet de généalogistes [W] , commis par le notaire , de ses droits ; que le notaire a établi deux actes le même jour , à savoir deux actes de notoriété et une attestation dans laquelle il affirme que 'monsieur [Y] est habile à se porter unique héritier légal de madame [J]';

Que c'est dire que l' ATIAM et le notaire le considéraient comme seul bénéficiaire du contrat SEQUOIA ;

Il précise que , depuis le placement de sa soeur en maison de retraite , il avait repris des liens avec elle ; qu'elle était proche de sa femme et que celle-ci atteste qu'elle lui avait dit qu'elle leur laisserait quelque chose .

Il soutient que la jurisprudence en matière de contrat d'assurance-vie est clairement établie ; que tout dépend du point de savoir si le souscripteur a eu la volonté ou non de faire bénéficier le légataire des capitaux garantis par le contrat ; que c'est aux juges du fond de rechercher cette volonté ; qu'en l'espèce , en l'état des relations entre madame [J] et son frère et sa belle-soeur , il est constant que madame [J] n'a pas voulu déshériter son frère ; que d'ailleurs le notaire , dans la connaissance dans laquelle il se trouvait de la qualité de légataire universel de la commune , n'en a pas moins avisé monsieur [Y] de l'existence du contrat d'assurance-vie ; que c'est donc qu'il le considérait comme bénéficiaire dudit contrat.

L'ordonnance de clôture a été rendue le 4 septembre 2019.

MOTIFS DE LA DECISION

Attendu qu'il y a lieu de donner acte dès l'abord à monsieur [Y] [C] de ce qu'il se désiste de son appel incident concernant la nullité du testament rédigé par madame [B] [Y] épouse [J] le 12 janvier 1996 ;

Attendu que le litige ne porte donc plus désormais que sur la qualité de bénéficiaire ou non de monsieur [Y] [C] du contrat d'assurance-vie SEQUOIA n° 216/3026424-6 souscrit par la tutrice de madame [J] , l' ATIAM , selon ordonnance du juge des tutelles du 13 juillet 2006 ;

Attendu que l'article L 132-8 du code des assurances dispose que :

'Le capital ou la rente garantis peuvent être payables lors du décès de l'assuré à un ou plusieurs bénéficiaires déterminés.

Est considérée comme faite au profit de bénéficiaires déterminés la stipulation par laquelle le bénéfice de l'assurance est attribué à une ou plusieurs personnes qui , sans être nommément désignées , sont suffisamment définies dans cette stipulation pour pouvoir être identifiées au moment de l'exigibilité du capital ou de la rente garantis.

Est notamment considérée comme remplissant cette condition la désignation comme bénéficiaire des personnes suivantes :

- les enfants nés ou à naître du contractant , de l'assuré ou de toute autre personne désignée ;

- les héritiers ou ayants-droit de l'assuré ou d'un bénéficiaire prédécédé.

L'assurance faite au profit du conjoint profite à la personne qui a cette qualité au moment de l'exigibilité.

Les héritiers ainsi désignés ont droit au bénéfice de l'asurance en proportion de leurs parts héréditaires. Ils conservent ce droit en cas de renonciation à la succession' ;

Attendu que le testament de madame [B] [Y] éouse [J] est ainsi rédigé:'Je désigne pour légataire universelle la ville de [Localité 7] (Rhône) au profit de ses oeuvres sociales et de préférence en faveur des personnes âgées , à charge pour elle de délivrer les legs particuliers suivants dans les six mois de mon décès :

- l'équivalent au jour de mon décès d'une somme nette de 50 000 Frs à madame [U] [E] épouse divorcée de monsieur [L] [M] , domiciliée 'l' Impératrice' [Adresse 4] ;

- la même somme à son fils , monsieur [F] [M] ,

en souvenir de l'aide que m'ont apportée ces personnes en des circonstances difficiles' .

Attendu que le contrat d'assurance-vie SEQUOIA signé par l' ATIAM en sa qualité de représentante légale de madame [J] le 17 octobre 2006 porte comme bénéficiaire en cas de vie de l'assurée au terme l'adhérent assuré , donc madame [J] , et , en cas de décès , 'les héritiers légaux de l'assurée' ;

Attendu que la commune de [Localité 7] , légataire universelle de madame [J] aux termes du testament susvisé , demande à la cour de dire et juger qu'en l'état de la succession testamentaire , du legs universel dûment accepté par la commune de [Localité 7] , monsieur [Y] n'étant pas héritier réservataire , ne pouvait pas prétendre à la qualité d'héritier de l'ordre légal et donc au bénéfice du capital d'assurance-vie SEQUOIA souscrit du vivant de madame [J] par son gérant de tutelle l' ATIAM le 12 octobre 2006 , sur autorisation judiciaire du juge des tutelles du 13 juillet 2006 en réorganisation et simplification des comptes bancaires de dépôts et de placements de la défunte et dont la clause bénéficiaire étaient les héritiers légaux ;

Attendu qu'effectivement , monsieur [C] [Y] , frère de madame [B] [J] , n'est pas héritier réservataire de celle-ci , et ne peut par suite prétendre à une part de sa succession entièrement dévolue , en l'état du legs universel du 12 janvier 1996 , à la commune de [Localité 7] ;

Attendu toutefois que l'article L 132-12 du code des assurances dispose que 'le capital ou la rente stipulés payables lors du décès de l'assuré à un bénéficiaire déterminé ou à ses héritiers ne font pas partie de la succession de l'assuré' ; qu'il en résulte que , comme l'a justement dit le tribunal , le capital décès est hors succession ; que même si monsieur [C] [Y] n'est pas héritier réservataire , il demeure héritier légal au sens des articles 734 et suivants du code civil ; que le contrat SEQUOIA de la cause , même hors succession , stipule comme bénéficiaires 'les héritiers légaux' de madame [J] ; que son frère [C] [Y], intimé en la cause, a bien cette qualité ;

Attendu que , certes , selon une jurisprudence désormais constante et qui a évolué , le terme 'héritiers' englobe tous les successeurs , dont le légataire universel , et la cour de cassation décide désormais qu'en présence d'un legs universel et d'un contrat d'assurance-vie désignant comme bénéficiaires en cas de décès 'mes héritiers' , il convient de procéder à l'interprétation de la volonté du souscripteur pour savoir si , par le terme 'mes héritiers' , le souscripteur a eu l'intention de gratifier le seul légataire universel , excluant par suite les autres héritiers , en l'espèce monsieur [Y] , ou l'ensemble de ses héritiers;

Attendu toutefois que cette interprétation de volonté n'a lieu d'être que si la clause bénéficiaire vise 'mes héritiers' , donc l'ensemble des successeurs dont le légataire universel , et non 'mes héritiers légaux' ; qu'en l'espèce , la clause du contrat SEQUOIA vise 'mes héritiers légaux'; que c'est donc monsieur [C] [Y] qui doit en être considéré comme le bénéficiare , et non la commune de [Localité 7] , et ce sans qu'il y ait lieu à l'interprétation de la volonté de madame [J] ;

Attendu que la commune de [Localité 7] soutient également que , en souscrivant le contrat SEQUOIA, l' ATIAM , qui avait connaissance du testament de madame [J] , avait pour seul objectif de réorganiser les comptes de la majeure protégée pour une meilleure rentabilité ;

qu'elle n'avait pas d'autorisation du juge des tutelles , et donc pas qualité , pour modifier la volonté de madame [J] tel qu'exprimée dans son testament de gratifier exclusivement la commune de [Localité 7] à l'exclusion de son frère ;

Attendu que , par ordonnance du 13 juillet 2006 , le juge des tutelles du tribunal d'instance de Cannes a :

' autorisé l' ATIAM , gérant de tutelle de madame [B] [Y] veuve [J] , à procéder auprès de la Société Générale aux opérations bancaires suivantes :

* vendre les titres ci-après du portefeuille titres n° 08050012450 :

. Société générale : 5,6 % : 45 ;

. Sogeoblig Revenus : 398 ;

. Société générale : 4,75 % :20 ;

. Alcatel : 90 ;

* céder 4 actions France Télécom du PEA titres n° 088383300337 ;

* clôturer le PEA espèces par suite du placement du solde de ce compte dans le cadre de la souscription du contrat d'assurance-vie SEQUOIA ;

* souscrire un contrat d'assurance-vie SEQUOIA assorti de rachats programmés à hauteur de 1 150 euros mensuels pour un montant de 410 375 euros provenant des comptes suivants :

. compte courant n° 00051436831 : 40 000 euros ;

. compte courant n° 00036534507 : 191 000 euros ;

. compte-titres n° 08050012450 : 132 000 euros ;

. PEA espèces n° 00038305476 : 47 375 euros ;

* clôturer le compte courant n° 00051716505 et virer le solde sur le compte courant

n° 00051436831 ;

* clôturer le CSL n° 00036534507 et virer le solde sur compte courant n° 00051436831";

Attendu que l'ordonnance ne prévoyait rien sur le bénéficiaire du contrat SEQUOIA et indiquait dans les motifs que ses dispositions 'tendaient à réorganiser , simplifier et valoriser l'épargne de madame veuve [J] ' et à combler le déficit mensuel lié à son entrée en EHPAD;

Attendu que la commune de [Localité 7] ne tire aucune conséquence sur la validité de la clause bénéficiaire 'mes héritiers légaux' des termes de l'ordonnance ; que cette clause s'impose donc à tous , y compris à l'appelante ;

Attendu de surcroît qu'en optant pour la clause 'mes héritiers légaux' , l' ATIAM a agi en représentation de madame [J] du fait de son mandat de tutrice ; qu'il n'est pas établi que cette clause ait pu être contraire à la volonté de celle-ci , au regard du testament rédigé plus de 10 ans auparavant , et en l'état de la reprise de contact avec son frère dont témoignent les lettres de celui-ci adressées notamment au corps médical et se souciant du rapprochement de sa soeur dans une structure située à [Localité 7] pour lui permettre , ainsi qu'à des cousins dont elle était restée proche , de venir la visiter ; que , dans ce contexte , l'attestation de madame [S] [H] , épouse de monsieur [C] [Y] , régulière en la forme , qui indique que sa belle-soeur lui avait dit qu'elle leur 'laisserait un petit quelque chose' , n'apparaît pas mensongère et prend tout son sens ;

Attendu que c'est donc à bon droit que monsieur [C] [Y] a fait valoir sa qualité d'héritier légal , sur le fondement de surcroît de l'attestation établie par le notaire , maître [Z] , le 10 novembre 2009 , attestant de sa qualité d'héritier 'légal' ( légal inscrit en gras) à la suite du premier acte de notoriété établi par le même notaire le même jour , et à la suite d'une étude généalogique du cabinet [W] en date du 22 septembre 2009 duquel il résultait que l'intimé était 'le seul héritier légal' de madame [J] ;

Attendu , par suite , que , sans avoir à étudier le problème d'une éventuelle faute de monsieur [Y] comme le soutient la commune de [Localité 7] , il y a lieu de confirmer le jugement déféré en en ce qu'il a débouté la ville de [Localité 7] de sa demande , et sans qu'il y ait lieu de reprendre un par un dans le dispositif les nombreux 'dire et juger' qui ne constituent que la reprise de la motivation de l'appelante , la cour n'étant saisie que des demandes de condamnation ;

Attendu que , la commune de [Localité 7] perdant son procès , aucun abus de droit d'ester en justice ne peut être reproché à monsieur [Y] ; que le jugement déféré sera donc aussi confirmé en ce qu'il l'a déboutée de sa demande de dommages-intérêts de 70 000 euros à ce titre ;

Attendu qu'il sera également jugé qu'aucun abus de procédure ne peut être reproché à la commune de [Localité 7] en l'état de la difficulté de déterminer la notion de 'bénéficiaire' à telle enseigne qu'une loi a été prise sur ce point le 10 décembre 2012, non applicable dans le temps aux faits de la cause , mais qui a pour objet de faciliter pour l'avenir la détermination des bénéficiaires d'un contrat d'assurance-vie ;

Attendu qu'il ne paraît pas inéquitable de condamner la commune de [Localité 7] à payer à monsieur [C] [Y] la somme de 5 000 euros sur le fondement de l'article 700 du code de procédure civile en cause d'appel et de débouter la commune de [Localité 7] de sa demande à ce titre;

PAR CES MOTIFS

LA COUR , statuant publiquement , contradictoirement et en dernier ressort ,

DONNE acte à monsieur [C] [Y] de son désistement concernant son appel incident;

CONFIRME le jugement déféré sur le débouté des demandes de la commune de [Localité 7] , l'article 700 du code de procédure civile et les dépens ;

Y AJOUTANT :

DEBOUTE monsieur [Y] [C] de sa demande de dommages-intérêts ;

CONDAMNE la commune de [Localité 7] aux entiers dépens de l'instance d'appel , dont distraction au profit de la SELARL LEGIS-CONSEILS ;

CONDAMNE la commune de [Localité 7] à payer à monsieur [C] [Y] la somme de 5 000 euros au titre de l'article 700 du code de procédure civile en cause d'appel ;

LAISSE à la charge de la commune de [Localité 7] ses propres frais irrépétibles d'appel.

LE GREFFIERLE PRÉSIDENT


Synthèse
Tribunal : Cour d'appel d'Aix-en-Provence
Formation : Chambre 2-4
Numéro d'arrêt : 18/12103
Date de la décision : 13/11/2019

Références :

Cour d'appel d'Aix-en-Provence 6D, arrêt n°18/12103 : Confirme la décision déférée dans toutes ses dispositions, à l'égard de toutes les parties au recours


Origine de la décision
Date de l'import : 27/03/2024
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.appel;arret;2019-11-13;18.12103 ?
Association des cours judiciaires suprmes francophones
Organisation internationale de la francophonie
Juricaf est un projet de l'AHJUCAF, l'association des Cours suprêmes judiciaires francophones. Il est soutenu par l'Organisation Internationale de la Francophonie. Juricaf est un projet de l'AHJUCAF, l'association des Cours suprêmes judiciaires francophones. Il est soutenu par l'Organisation Internationale de la Francophonie.
Logo iall 2012 website award