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10/10/2019 | FRANCE | N°18/14976

France | France, Cour d'appel d'Aix-en-Provence, Chambre 1-2, 10 octobre 2019, 18/14976


COUR D'APPEL D'AIX-EN-PROVENCE

Chambre 1-2



ARRÊT

DU 10 OCTOBRE 2019

N° 2019/736













N° RG 18/14976



N° Portalis DBVB-V-B7C-BDCIN





SAS NIKAIADIS



C/



[K] [X] [X]



[D] [X] [S]

épouse [C]



[S] [R] [X]



SA CICOBAIL



SCI [X]



SCI [B]



SA NATIXIS LEASE IMMO



SAS ARKEA CREDIT-BAIL



SA NATIOCREDIBAIL



Copie exécuto

ire délivrée

le :

à :



SCP TOLLINCHI



SELARL LEXAVOUE



Me [W]













DÉCISION DÉFÉRÉE À LA COUR :



Ordonnance de référé rendue par le président du tribunal de grande instance de [Localité 1] en date du 6 Septembre 2018 enregistrée au répertoire général sous le n° 18/00711.


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COUR D'APPEL D'AIX-EN-PROVENCE

Chambre 1-2

ARRÊT

DU 10 OCTOBRE 2019

N° 2019/736

N° RG 18/14976

N° Portalis DBVB-V-B7C-BDCIN

SAS NIKAIADIS

C/

[K] [X] [X]

[D] [X] [S]

épouse [C]

[S] [R] [X]

SA CICOBAIL

SCI [X]

SCI [B]

SA NATIXIS LEASE IMMO

SAS ARKEA CREDIT-BAIL

SA NATIOCREDIBAIL

Copie exécutoire délivrée

le :

à :

SCP TOLLINCHI

SELARL LEXAVOUE

Me [W]

DÉCISION DÉFÉRÉE À LA COUR :

Ordonnance de référé rendue par le président du tribunal de grande instance de [Localité 1] en date du 6 Septembre 2018 enregistrée au répertoire général sous le n° 18/00711.

APPELANTE

SAS NIKAIADIS

dont le siège social est [Adresse 1]

[Adresse 2]

représentée par Me Charles TOLLINCHI de la SCP TOLLINCHI PERRET VIGNERON, avocat au barreau d'AIX-EN-PROVENCE substitué par Me Karine TOLLINCHI de la SCP TOLLINCHI PERRET VIGNERON, avocat au barreau d'AIX-EN-PROVENCE

INTIMÉS

Madame [K] [X] [X]

née le [Date naissance 1] 1955 à [Localité 1]

demeurant [Adresse 2]

Madame [D] [X] [S] épouse [C]

née le [Date naissance 2] 1952 à [Localité 1] ([Localité 1]),

demeurant [Adresse 2]

Monsieur [S] [R] [X]

né le [Date naissance 3] 1960 à [Localité 1],

demeurant [Adresse 2]

SCI [X]

dont le siège social est [Adresse 3]'

[Adresse 2]

SCI [B],

dont le siège social est [Adresse 2]

représentés et assistés par Me Gilles [W], avocat au barreau de [Localité 1]

SA CICOBAIL

dont le siège social est [Adresse 4]

SA NATIXIS LEASE IMMO,

dont le siège social est [Adresse 5]

SAS ARKEA CREDIT-BAIL

dont le siège social est [Adresse 6]

SA NATIOCREDIBAIL

dont le siège social est [Adresse 7]

représentées par Me Romain CHERFILS de la SELARL LEXAVOUE BOULAN CHERFILS IMPERATORE, avocat au barreau d'AIX-EN-PROVENCE substitué par Me Germain LICCIONI, avocat au barreau de MARSEILLE

COMPOSITION DE LA COUR

L'affaire a été débattue le 2 Septembre 2019 en audience publique. Conformément à l'article 785 du code de procédure civile, madame Catherine OUVREL, conseillère, a fait un rapport oral de l'affaire à l'audience avant les plaidoiries.

La cour était composée de :

madame Geneviève TOUVIER, présidente

madame Virginie BROT, conseillère

madame Catherine OUVREL, conseillère

qui en ont délibéré.

Greffier lors des débats : madame Caroline BURON.

Les parties ont été avisées que le prononcé de la décision aurait lieu par mise à disposition au greffe le 10 Octobre 2019.

ARRÊT

Contradictoire,

Prononcé par mise à disposition au greffe le 10 Octobre 2019,

Signé par madame Geneviève TOUVIER, présidente et madame Caroline BURON, greffière, à laquelle la minute de la décision a été remise par le magistrat signataire.

***

EXPOSÉ DU LITIGE

Par acte des 12 et 15 janvier 2007, les consorts [X] / [S] aux droits desquels viennent aussi les SCI [X] et [B] ont consenti aux sociétés de crédit baux immobiliers Natixis Lease Immo venant aux droits de Fructibail, Arkéa Crédit-bail, Natiocrédibail et Cicobail la prorogation d'un bail à construction portant sur le lot numéro 2 de la parcelle cadastrée CA [Cadastre 1].

Lesdites sociétés ont laissé ce lot à crédit bail immobilier à la SAS Nikaiadis qui y exploite désormais un centre commercial Leclerc attenant à la parcelle CA [Cadastre 2] à usage de parking dont elle est propriétaire.

Aux termes d'un acte authentique du 19 décembre 1989 conclu entre toutes les parties concernées, une servitude constituée d'une bande de 6 mètres de large avait été créée en bordure du terrain cadastré lot numéro 2 de la parcelle CA[Cadastre 1] (anciennement lot numéro 2 des parcelles CA [Cadastre 1] et CA [Cadastre 1]) avec possibilité d'en faire bénéficier la parcelle CA [Cadastre 1] appartenant à l'indivision [X] et de la déplacer, si bon semble, sur la parcelle CA [Cadastre 2] à usage de parking appartenant à la SAS Nikaiadis.

Courant 2018, cette servitude a été rendue impraticable à la circulation automobile du fait de l'implantation en ses extrémités de poteaux métalliques verticaux.

Saisi par les consorts [X], [S] et les SCI concernées, le juge des référés du tribunal de grande instance de [Localité 1] a, par ordonnance en date du 6 septembre 2018 :

condamné in solidum la SAS Nikaiadis, la SAS Arkea Crédit-bail, la SA Cicobail, la SA Natiocrédibail et la SA Natixis Lease Immo, sous astreinte de 2 000 euros par jour de retard suivant le délai de 30 jours passé la signification de la présente ordonnance, à rétablir l'assiette de la servitude originaire telle que précisée dans l'acte du 19 décembre 1989 et ses annexes, sauf à ce que ces mêmes sociétés précisent par voie officielle et à l'aide d'un plan de situation côté à l'échelle, la nouvelle assiette de servitude de passage grevant leur fonds (lot 2 de la parcelle CA [Cadastre 1] et/ou parcelle CA [Cadastre 2]) devant avoir les mêmes caractéristiques que la servitude originaire (6 mètres de large),

condamné la SAS Nikaiadis à relever et garantir la SAS Arkea Crédit-bail, la SA Cicobail, la SA Natiocrédibail et la SA Natixis Lease Immo des condamnations prononcées à leur encontre,

condamné in solidum la SAS Nikaiadis, la SAS Arkea Crédit-bail, la SA Cicobail, la SA Natiocrédibail et la SA Natixis Lease Immo à payer à madame [K] [X], madame [D] [S] épouse [C], monsieur [S] [X], la SCI [X] et la SCI [B] la somme de 2 000 euros sur le fondement de l'article 700 du code de procédure civile,

rejeté le surplus des demandes,

condamné in solidum la SAS Nikaiadis, la SAS Arkea Crédit-bail, la SA Cicobail, la SA Natiocrédibail et la SA Natixis Lease Immo au paiement des dépens.

Selon déclaration reçue au greffe le 19 septembre 2018, la SAS Nikaiadis a interjeté appel de la décision, l'appel portant sur toutes les dispositions de l'ordonnance déférée dûment reprises.

Par dernières conclusions transmises le 2 juillet 2019, auxquelles il est renvoyé pour plus ample exposé des prétentions et moyens, la SAS Nikaiadis demande à la cour de :

infirmer l'ordonnance entreprise en toutes ses dispositions,

Statuant à nouveau :

'débouter madame [K] [X], madame [D] [S] épouse [C], monsieur [S] [X], la SCI [X] et la SCI [B] de leurs demandes à son encontre, les conditions des articles 808 et 809 du code de procédure civile n'étant pas remplies,

'condamner madame [K] [X], madame [D] [S] épouse [C], monsieur [S] [X], la SCI [X] et la SCI [B] à lui verser la somme de 10 000 euros au titre de l'article 700 du code de procédure civile,

'condamner madame [K] [X], madame [D] [S] épouse [C], monsieur [S] [X], la SCI [X] et la SCI [B] aux entiers dépens de l'instance dont ceux d'appel avec distraction.

La SAS Nikaiadis met en avant le protocole d'accord signé le 14 novembre 2006 entre les consorts [X] et elle-même validant l'extension du centre commercial et la construction d'un plan de stationnement couvert, objet du permis de construire du 3 octobre 2006, mettant fin à la servitude privée précédemment stipulée au profit d'un accès sécurité pompiers, désormais servitude publique et non privée. Elle soutient donc que la servitude alléguée par les intimés n'est plus utilisée depuis 29 ans, que ces derniers y ont renoncé par le protocole de 2006 et que les intimés cherchent par leur action à faire établir une servitude sur les parkings du centre commercial afin de permettre la réalisation d'un projet immobilier sur certaines de leurs parcelles.

La SAS Nikaiadis, fonds servant, soutient qu'aux termes des actes signés entre les parties, elle dispose d'une faculté discrétionnaire de déplacement de l'assiette de la servitude originaire, et pas seulement sur la parcelle CA [Cadastre 2] désormais constituée de parkings couverts à la construction desquels les intimés ont consenti. Elle ajoute que les intimés confondent volontairement l'existence d'une servitude de canalisation avec une servitude de passage pour véhicules légers, sur le plan de masse du site. Elle fait valoir que la création de la servitude d'accès pompier, servitude d'urbanisme, ne peut constituer un trouble manifestement illicite, alors que sa suppression en serait un. Elle entend donc que l'ordonnance entreprise soit infirmée, les intimés ayant renoncé au bénéfice de la servitude de passage privée. Elle explique avoir proposé deux tracés alternatifs comme l'y invitait la première décision, tous deux refusés par les intimés.

Par dernières conclusions transmises le 31 décembre 2018, auxquelles il est renvoyé pour plus ample exposé des prétentions et moyens, la SAS Arkea Crédit-bail, la SA Cicobail, la SA Natiocrédibail et la SA Natixis Lease Immo sollicitent de la Cour qu'elle :

leur donne acte de ce qu'elles se joignent à l'argumentation de la SAS Nikaiadis,

infirme l'ordonnance en ce qu'elle les a condamnées à rétablir l'assiette de la servitude originaire sous astreinte,

Statuant à nouveau :

dise que les conditions du référé ne sont pas remplies,

dise que ne peut constituer un trouble illicite entraînant le rétablissement de l'assiette d'une servitude le fait de l'existence depuis 2007 d'une voie pompiers imposée par un permis de construire réalisé et résultant de l'accord des consorts [X] / [S],

dise que la prétention des consorts [X] / [S] à imposer cette assiette sur la parcelle CA [Cadastre 2], sur laquelle depuis 2007 ont été construits des parkings couverts avec leur accord, est mal fondée,

dise que l'acte constitutif de servitude autorisant unilatéralement la SAS Nikaiadis à déplacer l'assiette de la servitude n'est susceptible d'aucune interprétation,

dise que le juge des référés ne disposait d'aucun pouvoir d'interprétation et ne pouvait que se déclarer incompétent,

réforme en conséquence l'ordonnance entreprise en ce qu'elle les a condamné à rétablir l'assiette de la servitude originaire sous astreinte,

confirme la décision entreprise en ce qu'elle a condamné la SAS Nikaiadis à les relever et garantir des condamnations prononcées contre elles,

condamne in solidum madame [K] [X], madame [D] [S] épouse [C], monsieur [S] [X], la SCI [X] et la SCI [B] à leur payer la somme de 3 000 euros sur le fondement de l'article 700 du code de procédure civile outre les dépens avec distraction.

La SAS Arkea Crédit-bail, la SA Cicobail, la SA Natiocrédibail et la SA Natixis Lease Immo font valoir que le juge des référés n'a pas compétence pour interpréter des clauses claires et précises qui prévoyaient la possibilité pour la SAS Nikaiadis de déplacer unilatéralement la servitude de passage originaire aux termes de l'acte du 19 décembre 1989. En tout état de cause, elles indiquent que la SAS Nikaiadis a régularisé par procès-verbal d'huissier de justice du 22 octobre 2018 un nouveau tracé de servitude sur l'assiette de son fonds.

Par dernières conclusions transmises le 21 décembre 2018, auxquelles il est renvoyé pour plus ample exposé des prétentions et moyens, madame [K] [X], madame [D] [S] épouse [C], monsieur [S] [X], la SCI [X] et la SCI [B] sollicitent de la Cour qu'elle :

confirme en toutes ses dispositions l'ordonnance entreprise en ce qu'elle a condamné l'appelante et les premières intimées à rétablir l'assiette de la servitude originaire sous astreinte, ainsi qu'en ce qu'elle les a condamnées au paiement d'une somme au titre de l'article 700 du code de procédure civile,

condamne la SAS Nikaiadis à leur payer la somme de 5 000 euros sur le fondement de l'article 700 du code de procédure civile outre les dépens avec distraction.

Madame [K] [X], madame [D] [S] épouse [C], monsieur [S] [X], la SCI [X] et la SCI [B] indiquent n'avoir jamais contesté la possibilité pour la SAS Nikaiadis de modifier l'assiette de la servitude de passage de sa seule volonté, ni avoir requis que la nouvelle assiette de la servitude requise se situe sur la parcelle CA [Cadastre 2]. En revanche, les intimés contestent, par le protocole transactionnel du 14 novembre 2006, avoir renoncé au bénéfice de leur servitude de passage originaire telle que stipulée à l'acte du 19 décembre 1989 et soutiennent qu'aux termes du plan de masse de 2006 aucune construction n'a été édifiée sur la servitude de passage originaire. Les intimés ajoutent qu'en tout état de cause la nouvelle assiette de la servitude de passage ne peut valablement se situer sur une voie publique, alors que l'acte de 1989 prévoyait qu'en cas de modification, la nouvelle implantation se situerait sur le seul lot 2 de la parcelle [Cadastre 1] ou sur la parcelle CA [Cadastre 2], et nulle part ailleurs.

L'instruction de l'affaire a été close par ordonnance en date du 4 juillet 2019.

MOTIFS DE LA DÉCISION

Sur la demande tendant au rétablissement de la servitude de passage

Aux termes de l'article 809 du code de procédure civile, le président peut toujours, même en présence d'une contestation sérieuse, prescrire en référé les mesures conservatoires ou de remise en état qui s'imposent, soit pour prévenir un dommage imminent, soit pour faire cesser un trouble manifestement illicite. Dans les cas où l'existence de l'obligation n'est pas sérieusement contestable, le président peut accorder une provision au créancier, ou ordonner l'exécution de l'obligation même s'il s'agit d'une obligation de faire.

Aux termes de l'acte du 19 décembre 1989 conclu entre les consorts [X], d'une part, et la SAS Nikaiadis ainsi que les sociétés de crédit bail, d'autre part, a été constitué au profit des premiers une servitude de passage grevant le fonds servant cadastré CA [Cadastre 1]. Il était précisé que cette servitude consistait 'en un droit d'accès à sens unique, d'Ouest en Est, depuis la contre-allée de la RN 202, en tous temps, et pour tous véhicules légers, à l'exclusion de tout droit de stationnement, à travers le lot 2 de l'ensemble immobilier cadastré CA [Cadastre 1] et [Cadastre 1] pour accéder au fond dominant'. De même, il était prévu que 'l'emprise de cette servitude soit constituée par une bande de 6 mètres côté Nord du lot de l'ensemble immobilier cadastré CA [Cadastre 1] et [Cadastre 1]". Il était encore prévu que 'le fonds servant ait la faculté de déplacer à ses frais l'emprise de la servitude, soit à l'intérieur de son propre périmètre soit sur la propriété contiguë (devenue également depuis la propriété de la SAS Nikaiadis), dès lors que la servitude constituée sur cette dernière propriété présenterait les mêmes caractéristiques et notamment un caractère réel et perpétuel'. Il est expressément stipulé que 'ce déplacement serait opéré au seul gré de la SAS Nikaiadis ou des titulaires du bail à construction dont elle est crédit preneur, pendant toute la durée du bail à construction et à la cessation de celui-ci, au gré des consorts [X] ou de leurs ayants droits, propriétaires du lot 2".

Selon protocole d'accord du 14 novembre 2006, conclu entre les mêmes parties, celles-ci sont convenues de procéder à une prorogation du bail à construction et se sont mises d'accord sur les modalités de celle-ci, dans l'attente de la rédaction de l'acte authentique à intervenir au plus tard le 15 décembre 2006. Tel était l'objet de ce protocole d'accord devant permettre à la SAS Nikaiadis d'accroître sa surface de 8 242 m²(parc de stationnement couvert). Dans ce cadre, le bail à construction expirant le 31 mars 2026 a été prorogé au 31 mars 2050, et le montant du loyer initial de 120 353,60 euros annuels a été porté à 715 000 euros HT annuels. Des cessions gratuites de terrain conformes aux articles L 332-6-1 et R 332-15 du code de l'urbanisme ont été stipulées; Etaient annexés au protocole les plans de masse de l'existant et du projet des constructions envisagées, telles que résultant des 4 permis de construire précités et figurant les accès tels qu'ils existeront après réalisation des ouvrages. En aucun cas, ce protocole emporte renonciation à l'une ou l'autre des servitudes expressément consenties dans l'acte de 1989 et notamment pas de celle visée ci-dessus. En effet, la renonciation à une telle servitude réelle et perpétuelle ne peut qu'être expresse et non déduite d'un plan de masse, qui, au demeurant ne le prévoit pas. Certes, les annexes mentionnent que 'l'espace réservé entre les parkings (nouvelle construction) et le centre commercial serait occupé par la voie pompier longeant la façade principale du bâtiment et par un espace vert engazonné et planté d'arbres à hautes tiges'. Il s'en déduit que l'assiette même de la servitude litigieuse est demeurée vierge de toute construction puisque désormais employée pour la voie pompier.

Selon acte authentique du 12 janvier 2007, le bail à construction a effectivement été prorogé sans qu'une renonciation à la servitude de passage ne soit davantage stipulée.

Or, ainsi que le met en évidence le procès-verbal d'huissier de justice du 24 janvier 2018, la voie goudronnée constituant la servitude de passage initialement consentie au profit de la parcelle CA [Cadastre 1] sur la parcelle CA [Cadastre 2] est fermée à la circulation par de petits poteaux métalliques et des poteaux rétractables qui sont installés à ses extrémités Est et Ouest. En effet, cette voie est désormais réservée au passage des pompiers et des piétons afin de permettre l'accès entre le parking et le centre commercial.

Si cette obstruction à la servitude de passage consentie est susceptible de constituer un trouble manifestement illicite, c'est sans tenir compte du droit expressément réservé à la SAS Nikaiadis de modifier l'assiette de cette servitude, dès lors qu'elle en respecte les caractéristiques initiales. Or, cette dernière justifie par acte d'huissier de justice du 22 octobre 2018 avoir notifié aux intimés un nouveau tracé de servitude, mentionné en bleu, qui contourne le parc de stationnement couvert plus récemment construit, se situe sur la parcelle lui appartenant et dessert la propriété des consorts [X] / [S]. De même, par notification aux intimés par huissier de justice le 27 décembre 2018, la SAS Nikaiadis a produit un plan de situation côté à l'échelle de la nouvelle assiette de servitude proposée. Ce tracé bleu correspond à un déplacement de la servitude justifié par les travaux d'agrandissement et d'aménagement auxquels l'ensemble des parties ont consenti, également rendu nécessaire par la constitution parallèle d'une servitude légale d'urbanisme pour l'accès pompiers s'imposant à tous. Or, il n'est aucunement établi par les intimés que ce nouveau tracé n'est pas conforme aux conditions initiales, à savoir notamment un passage en sens unique de 6 mètres de large sur la parcelle CA [Cadastre 2] ou la parcelle contiguë, propriété de l'appelante. Les éléments produits tendent au contraire à en démontrer la conformité.

Dans ces circonstances, aucun trouble manifestement illicite n'est caractérisé, ni actuel. Aucun rétablissement de la servitude de passage dans son assiette initiale ne peut être ordonné, ni n'est justifié par les documents contractuels conclus et les servitudes légales acquises. En outre, le déplacement de la servitude auquel les consorts [X] / [S] peuvent prétendre est réalisé par l'appelante, qui en avait seule l'initiative, dans des conditions dont il n'est pas démontré qu'elles ne sont pas conformes aux conventions passées et aux conditions fixées.

L'infirmation de l'ordonnance entreprise s'impose donc.

Sur la demande de relever et garantie

La demande de relever et garantie de la SAS Arkea Crédit-bail, la SA Cicobail, la SA Natiocrédibail et la SA Natixis Lease Immo par la SAS Nikaiadis est sans objet puisqu'il n'y a plus de condamnation de la SAS Arkea Crédit-bail, la SA Cicobail, la SA Natiocrédibail et la SA Natixis Lease Immo.

Sur l'article 700 du Code de procédure civile et les dépens

Madame [K] [X], madame [D] [S] épouse [C], monsieur [S] [X], la SCI [X] et la SCI [B] qui succombent au litige seront déboutés de leur demande sur le fondement de l'article 700 du code de procédure civile. Il serait en revanche inéquitable de laisser à la charge de la SAS Nikaiadis d'une part, et de la SAS Arkea Crédit-bail, la SA Cicobail, la SA Natiocrédibail et la SA Natixis Lease Immo, d'autre part, les frais, non compris dans les dépens, qu'elles ont exposés pour leur défense. L'indemnité qui a été mise à leur charge en première instance sera infirmée et il convient d'allouer respectivement à la SAS Nikaiadis, d'une part, et aux sociétés de crédit ensemble, d'autre part, une indemnité de 2 000 euros chacune en cause d'appel.

Madame [K] [X], madame [D] [S] épouse [C], monsieur [S] [X], la SCI [X] et la SCI [B] supporteront en outre les dépens de première instance et d'appel.

PAR CES MOTIFS

La cour,

Infirme l'ordonnance entreprise en toutes ses dispositions,

Statuant à nouveau et y ajoutant :

Déboute madame [K] [X], madame [D] [S] épouse [C], monsieur [S] [X], la SCI [X] et la SCI [B] de leur demande tendant au rétablissement ou au déplacement de l'assiette de la servitude originaire sous astreinte,

Condamne madame [K] [X], madame [D] [S] épouse [C], monsieur [S] [X], la SCI [X] et la SCI [B] à payer à la SAS Nikaiadis la somme de 2 000 euros sur le fondement de l'article 700 du code de procédure civile,

Condamne in solidum madame [K] [X], madame [D] [S] épouse [C], monsieur [S] [X], la SCI [X] et la SCI [B] à payer globalement à la SAS Arkea Crédit-bail, la SA Cicobail, la SA Natiocrédibail et la SA Natixis Lease Immo la somme de 2 000 euros sur le fondement de l'article 700 du code de procédure civile,

Déboute madame [K] [X], madame [D] [S] épouse [C], monsieur [S] [X], la SCI [X] et la SCI [B] de leur demande sur ce même fondement,

Condamne in solidum madame [K] [X], madame [D] [S] épouse [C], monsieur [S] [X], la SCI [X] et la SCI [B] au paiement des dépens de première instance et d'appel, qui seront recouvrés conformément aux dispositions de l'article 699 du code de procédure civile.

Le greffier,La présidente,


Synthèse
Tribunal : Cour d'appel d'Aix-en-Provence
Formation : Chambre 1-2
Numéro d'arrêt : 18/14976
Date de la décision : 10/10/2019

Références :

Cour d'appel d'Aix-en-Provence 1C, arrêt n°18/14976 : Infirme la décision déférée dans toutes ses dispositions, à l'égard de toutes les parties au recours


Origine de la décision
Date de l'import : 27/03/2024
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.appel;arret;2019-10-10;18.14976 ?
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