COUR D'APPEL D'AIX-EN-PROVENCE
Chambre 1-8
ARRÊT SUR RENVOI DE CASSATION
DU 26 SEPTEMBRE 2019
N°2019/218
Rôle N° RG 18/15201 - N° Portalis DBVB-V-B7C-BDC33
[O] [V]
[F] [Y] [D] épouse [V]
C/
SA CREDIT LYONNAIS
Copie exécutoire délivrée le :
à :
Me Isabelle DURAND
Me Alexandra BOISRAME
Décision déférée à la Cour :
Arrêt de la Cour d'Appel d'AIX EN PROVENCE en date du 13 Septembre 2016 enregistré(e) au répertoire général sous le n° 15/12429, qui confirmait le jugement du tribunal d'insatnce de TOULON du 26 Mars 2015, cassé par l'arrêt de la Cour de Cassation du 5 avril 2018.
DEMANDEURS AU RENVOI
Monsieur [O] [V]
né le [Date naissance 1] 1959 à [Localité 1],
demeurant [Adresse 1]
représenté par Me Isabelle DURAND, avocat au barreau de TOULON
Madame [F] [Y] [D] épouse [V]
née le [Date naissance 2] 1969 à [Localité 2] (ANGLETERRE),
demeurant [Adresse 1]
représentée par Me Isabelle DURAND, avocat au barreau de TOULON
DEFENDERESSE AU RENVOI
SA CREDIT LYONNAIS au capital de 1.847.860.375 €, agissant poursuites et diligences de son représentant légal en exercice domicilié en cette qualité audit siège, [Adresse 2]
représentée par Me Alexandra BOISRAME, avocat au barreau d'AIX-EN-PROVENCE substitué par Me Johanna CANO, avocat au barreau d'AIX-EN-PROVENCE
assistée par Me Emmanuel PLATON, avocat au barreau de TOULON.
*-*-*-*-*
COMPOSITION DE LA COUR
En application des dispositions des articles 785 et 786 du code de procédure civile, l'affaire a été débattue le 11 Juin 2019 en audience publique, les avocats ne s'y étant pas opposés, devant Madame Catherine KONSTANTINOVITCH, Présidente, et Mme Françoise FILLIOUX, Conseillere.
Mme Françoise FILLIOUX, Conseiller, a fait un rapport oral à l'audience, avant les plaidoiries.
Ces magistrats ont rendu compte des plaidoiries dans le délibéré de la cour, composée de :
Madame Catherine KONSTANTINOVITCH, Présidente
Mme Françoise FILLIOUX, Conseillere
Madame Carole MENDOZA, Conseillère
Greffier lors des débats : Mme Agnès SOULIER.
Greffier lors du prononcé : Mme Priscille LAYE
Les parties ont été avisées que le prononcé de la décision aurait lieu par mise à disposition au greffe le 26 Septembre 2019..
ARRÊT
Contradictoire,
Prononcé par mise à disposition au greffe le 26 Septembre 2019.
Signé par Mme Françoise FILLIOUX, Conseillère pour Madame Catherine KONSTANTINOVITCH, Présidente empêchée et Mme Priscille LAYE , greffier auquel la minute de la décision a été remise par le magistrat signataire.
FAITS, PROCÉDURE, PRÉTENTIONS :
Le 7 juillet 2007, les époux [V] ont souscrit auprès du Crédit Lyonnais un prêt de 252 800€ remboursable en 300 mensualités au taux d'intérêt de 4,05% et au TEG de 4,76% et un prêt au taux zéro de 17 200€
Par jugement contradictoire du 26 mars 2015, le tribunal d'instance de Toulon a rejeté l'exception d'incompétence et le moyen tiré de la nullité de l'assignation du 1er octobre 2013, constaté la prescription de la demande indemnitaire fondée sur le non-respect par la banque de son devoir de conseil et sur le débit des frais de caution et de la demande de déchéance du droit aux intérêts de la banque par suite de l'application d'un TEG erroné, rejeté la demande de report des échéances des prêts immobiliers présentée par Monsieur et Madame [V] en raison d'échéances restées impayées, ainsi que leur demande de dommages et intérêts et celle présentée sur le fondement de l'article 700 du code de procédure civile.
La juridiction a estimé que l'absence de mention de l'identité du représentant de la personne morale n'est pas de nature à causer un grief, que la demande relative à un manquement au devoir de conseil et de mise en garde et à un TEG erroné, dénoncée dans une assignation du 1er octobre 2013 pour un crédit octroyé le 7 juillet 2007 est prescrite, qu'il en est de même pour le débit contesté de la somme de 3 010€ effectué le 16 août 2007, que l'édition tardive de l'offre de prêt n'est pas établie, pas plus que l'éventuel dommage que ce retard leur aurait causé, que leur demande de report d'échéance portant sur une période e 6 mois n'était pas conforme aux clauses contractuelles, que les époux [V] reprochent à la banque l'affectation des sommes versées au solde débiteur du compte courant mais ce n'est qu'à compter du 13 juillet 2013 que Monsieur [V] justifie de la demande d'affectation de ces sommes sur les échéances de prêt, que faute d'affectation formelle par les débiteurs, il ne peut être reproché à la banque d'avoir en priorité apurer le solde débiteur du compte courant.
Par arrêt du 13 septembre 2016, la cour d'appel a confirmé le jugement sus visé en relevant que ce n'est que par un courrier du 8 février 2011 que les débiteurs ont sollicité l'imputation, alors qu'il existait des impayés antérieurs justifiant le refus de report des échéances.
Par arrêt du 5 avril 2018, la cour de cassation a cassé l'arrêt du 13 septembre 2016 seulement en ce qu'il a rejeté la demande de dommages et intérêt au titre de la non-imputation de leurs paiements au règlement des échéances au motif que les emprunteurs avaient produit les lettres recommandées avec accusé de réception adressées à la banque entre le 8 décembre 2007 et le 13 janvier 2011 dans lesquelles cette imputation était requise.
Par conclusions du 21 novembre 2018, les époux [V] demandent à la cour de reformer la décision du tribunal d'instance de Toulon du 26 mars 2015 en ce qu'il a rejeté la demande de dommages et intérêts, et de condamner la banque à leur verser la somme de 217 089€ à titre de dommages et intérêts et 3 000€ sur le fondement de l'article 700 du code de procédure civile avec distraction au profit de Maître Durand, avocat sur son affirmation de droit.
Ils font valoir que dès le 8 décembre 2007 ainsi que l'a constaté la cour de cassation, Monsieur [V] a, sans interruption, affecté chaque versement au paiement de ses échéances de prêt et ce jusqu'en septembre 2017, que le crédit lyonnais, par courrier du 25 janvier 2011, informait les emprunteurs de sa volonté de passer outre ces lettres et d'affecter les versements au comblement du découvert, que le 21 septembre 2017, la banque prononçait la déchéance des deux crédits en raison d'échéances impayées entraînant une demande en paiement de 217 089€ réglé par leur caution.
Ils sollicitent le paiement de dommages et intérêts à hauteur de cette somme.
La société Crédit Lyonnais n'a pas déposé de nouvelles conclusions suite au renvoi après cassation dans le délai de l'article 1037-1 du code de procédure civile. Il convient dès lors de se reporter à ses précédentes écritures soumises à la cour le 7 décembre 2015
Par ces conclusions la société Crédit lyonnais demandait à la cour de confirmer la décision de première instance, de dire et juger l'action prescrite, que sa responsabilité n'était pas engagée du fait du retard dans l'édition de l'offre et les débouter de leur demande et les condamner au paiement d'une somme de 2 500€ au titre de l'article 700 du code de procédure civile.
L'ordonnance de clôture est intervenue le 29 mai 2019.
Sur ce :
Attendu que les époux [V] exposent que leur compte bancaire était dédié aux opérations relatives au crédit immobilier et que la banque, nonobstant leur demande récurrente d'affectation de leur versement à la régularisation des échéances impayées, a imputé les sommes versées sur le solde débiteur de leur compte courant ;
Attendu que par courrier du 25 janvier 2011, le Crédit Lyonnais, expliquant alors imputer en priorité les versements sur le solde du compte courant, indiquait que le solde du compte de dépôt redevenu créditeur étant alors déduit de l'échéance de prêt la plus ancienne, que la banque se prévalait d'échéances de décembre 2010 et de janvier 2011 restées impayées ;
Attendu que conformément aux dispositions de l'article 1342-10 du code civil, le débiteur de plusieurs dettes peut indiquer lorsqu'il paie, celle dont il entend s'acquitter en priorité et ce n'est qu'au défaut d'indication que le créancier doit imputer le paiement sur celle que le débiteur a le plus intérêt à régler ;
Attendu que l'examen des pièces des époux [V] permet de retenir que dès le 8 décembre 2007 et jusqu'au 16 mai 2016, ils ont par courrier recommandé requis l'imputation de leurs versements sur les échéances de prêts en priorité et notamment le 14 décembre 2010 et le 13 janvier 2011 ; que la banque a procédé à des imputations sur le solde débiteur du compte courant en contravention avec les instructions qui lui étaient données par les emprunteurs et en violation de l'article 1342-10 du code sus visé ; que les époux [V] sont fondés à reprocher au crédit lyonnais ce mode d'imputation des sommes reçues ;
Attendu que le 21 septembre 2017, la banque a prononcé la déchéance du terme de façon abusive en se prévalant d'échéances demeurées impayées sans pour autant dater les incidents de paiement, les courriers de relance adressés en 2009 et 2010 par l'organisme bancaire aux prêteurs faisant uniquement référence à des découverts non autorisés ; que cette résiliation injustifiée a causé un préjudice certain aux emprunteurs, attraits en justice par leur caution afin qu'ils soient condamnés à lui rembourser la somme de
217 089€ qu'elle a dû verser au Crédit lyonnais en remboursement du prêt litigieux suivant quittance du 15 novembre 2017 et du 16 novembre 2017 ;
Attendu qu'il convient de condamner le Crédit lyonnais au paiement d'une somme de
3 000€ au titre de l'article 700 du code de procédure civile ;
PAR CES MOTIFS
La cour statuant publiquement, par arrêt contradictoire, mis à la disposition des parties au greffe de la Cour, conformément à l'article 450 al 2 du Code de procédure civile.
- INFIRME le jugement du 26 mars 2015,
- Condamne le Crédit lyonnais à payer à Monsieur et Madame [V] la somme de
217 089€ à titre de dommages et intérêts et 3 000€ sur le fondement de l'article 700 du code de procédure civile,
- Condamne le Crédit lyonnais aux entiers dépens y compris ceux de première instance avec distraction au profit de Maître Durand, avocat sur son affirmation de droit.
LE GREFFIER Mme Françoise FILLIOUX, Conseillère pour la Présidente empêchée