La jurisprudence francophone des Cours suprêmes


recherche avancée

19/09/2019 | FRANCE | N°17/03159

France | France, Cour d'appel d'Aix-en-Provence, Chambre 1-8, 19 septembre 2019, 17/03159


COUR D'APPEL D'AIX-EN-PROVENCE

Chambre 1-8



ARRÊT AU FOND

DU 19 SEPTEMBRE 2019



N°2019/202













Rôle N° RG 17/03159 - N° Portalis DBVB-V-B7B-BABNB







[J] [F]

[K] [F] [E]

[N] [F]





C/



[V] [O]

[B] [O]





































Copie exécutoire délivrée le :

à :



Me Oli

vier COMTE



Me Bettina ROUGIER





Décision déférée à la Cour :



Jugement du Tribunal d'Instance de BRIGNOLES en date du 22 Novembre 2016 enregistré(e) au répertoire général sous le n° 1115000673.





APPELANTS



Madame [J] [F], en son nom et venant aux droits de feue [N] [F]

demeurant [Adresse 2]



représentée par Me Olivier ...

COUR D'APPEL D'AIX-EN-PROVENCE

Chambre 1-8

ARRÊT AU FOND

DU 19 SEPTEMBRE 2019

N°2019/202

Rôle N° RG 17/03159 - N° Portalis DBVB-V-B7B-BABNB

[J] [F]

[K] [F] [E]

[N] [F]

C/

[V] [O]

[B] [O]

Copie exécutoire délivrée le :

à :

Me Olivier COMTE

Me Bettina ROUGIER

Décision déférée à la Cour :

Jugement du Tribunal d'Instance de BRIGNOLES en date du 22 Novembre 2016 enregistré(e) au répertoire général sous le n° 1115000673.

APPELANTS

Madame [J] [F], en son nom et venant aux droits de feue [N] [F]

demeurant [Adresse 2]

représentée par Me Olivier COMTE, avocat au barreau de DRAGUIGNAN

Monsieur [K] [F] [E],

demeurant [Adresse 2]

représenté par Me Olivier COMTE, avocat au barreau de DRAGUIGNAN

INTIMES

Madame [V] [O],

demeurant [Adresse 3]

représentée par Me Bettina ROUGIER de la SELASU ROUGIER BETTINA, avocat au barreau de DRAGUIGNAN

Monsieur [B] [O],

demeurant [Adresse 3]

représenté par Me Bettina ROUGIER de la SELASU ROUGIER BETTINA, avocat au barreau de DRAGUIGNAN

*-*-*-*-*

COMPOSITION DE LA COUR

En application des dispositions des articles 785 et 786 du code de procédure civile, l'affaire a été débattue le 18 Juin 2019 en audience publique, les avocats ne s'y étant pas opposés, devant Madame Catherine KONSTANTINOVITCH, Présidente, et Mme Françoise FILLIOUX, Conseiller.

Madame Catherine KONSTANTINOVITCH, Présidente, a fait un rapport oral à l'audience, avant les plaidoiries.

Ces magistrats ont rendu compte des plaidoiries dans le délibéré de la cour, composée de :

Madame Catherine KONSTANTINOVITCH, Présidente

Mme Françoise FILLIOUX, Conseillère

Madame Carole MENDOZA, Conseillère

Greffier lors des débats : Mme Agnès SOULIER.

Les parties ont été avisées que le prononcé de la décision aurait lieu par mise à disposition au greffe le 19 Septembre 2019.

ARRÊT

Contradictoire,

Prononcé par mise à disposition au greffe le 19 Septembre 2019.

Signé par Mme Françoise FILLIOUX, Conseillère pour Madame Catherine KONSTANTINOVITCH, Présidente empêchée et Mme Danielle PANDOLFI, greffier auquel la minute de la décision a été remise par le magistrat signataire.

FAITS ET PROCÉDURE

Par acte sous seing privé en date du 3 mars 2008, Mme [V] [O] et M.[B] [O] donnaient à bail à Mmes [J] [F] et [N] [F] et M. [K] [F] [E] une villa à titre d'habitation principale moyennant un loyer mensuel hors charges de 1.500€

Les consorts [O], agissant par leurs mandataires la société ITC Gestion, faisaient délivrer aux consorts [F] deux commandements de payer les loyers et charges qui visaient la clause résolutoire du bail le 12 août 2015 pour une somme de 5.210,58 € en principal et le 7 février 2016 pour une somme de 3.350,31€ en principal.

Dans l'intervalle et par acte extrajudiciaire du 12 octobre 2015, Mmes [J] [F] et [N] [F] et M. [K] [F] [E] assignaient Mme [V] [O] et M. [B] [O] devant le premier juge aux fins d'indemnisation de préjudices résultant de l'inexécution par le bailleur de ses obligations.

Par acte extrajudiciaire du 15 avril 2016, Mme [V] [O] et M. [B] [O] assignaient en garantie la SARL ITC Gestion, gestionnaire pour leur compte du bien loué aux consorts [F].

Par acte extrajudiciaire du 18 avril 2016, Mmes [J] [F] et [N] [F] et M. [K] [F] [E] assignaient Mme [V] [O] et M. [B] [O] aux fins d'annulation de commandements de payer et d'annulation de congé délivrés par les bailleurs, d'indemnisation de préjudices résultant de l'inexécution par le bailleur de ses obligations, et de compensation entre cette indemnisation et leur dette locative.

Par acte d'huissier en date du 30 août 2016 les consorts [O] faisaient délivrer congé pour motifs légitimes aux consorts [F].

Par jugement en date du 22 novembre 2016 le Tribunal d'instance de Bignoles, après jonction des procédures

validait le congé délivré par les bailleurs le 30 août 2016 pour le 2 mars 2017,

condamnait solidairement Mmes [J] [F] et [N] [F] et M. [K] [F] [E] à payer à Mme [V] [O] et M.[B] [O] la somme de 17.002,35 € arrêtée au 13 juin 2016, en deniers ou quittances et celle de 5.300€

ordonnait la compensation des dettes à concurrence de la plus faible

déboutait les parties du surplus de leur demande

*Le premier juge relevait qu'eu égard à la date de signature du contrat et l'article 4p de la loi du 6 juillet 1989 les frais de relance et de procédure ne pouvaient être imputés aux locataires et que les dispositions transitoires de la loi Alur ne s'appliquent pas aux pénalités de retard.

* Il rappelait que la Caisse d'allocations familiales est tiers au contrat de bail qui ne prévoit nullement qu'elle soit tenue de payer partie du loyer, le locataire ne peut se prévaloir de la suspension de l'aide pour se soustraire à l'obligation de payer le loyer, cette suspension est sans incidence sur la validité du commandement de payer.

* Les bailleurs ont fait une juste application de l'article 1253 du code civil en imputant les paiements sur la dette la plus ancienne en l'absence de manifestation de volonté autre des locataires

* Les commandements réguliers et fondés n'ont pas à être annulés; tenant le défaut pérenne et important de paiement du loyer le congé délivré le 30 août 2016 pour le 2 mars 2016 repose sur un motif légitime

*La demande des consorts [F] de révision du loyer pour différentiel de surface est fondée sur le manquement des bailleurs à leurs obligations légales dont ils ne rapportent pas la preuve'; en effet le bail ne comporte aucun indication sur la surface louée, les consorts [F] ne démontrent pas que la superficie annoncée dans l'annonce publicitaire du site " bon coin " ait eu une influence sur leur consentement après visite des lieux et discussion avec le mandataire, cette contestation est élevée 8 ans après l'entrée dans les lieux et par suite de la délivrance de commandements de payer, la surface n'est pas un élément de substantiel de détermination du loyer, enfin l'article 17 b al 8 de la loi du 6 juillet interdit au locataire de contester la surface s'il n'a pas préalablement saisi la commission de conciliation dans les deux mois de la conclusion du contrat.

* S'agissant de l'obligation d'entretien, la défaillance des bailleurs est établie pour ce qui est

-de la fuite des canalisations extérieures d'alimentation d'eau dont l'entretien incombe aux bailleurs, mais seulement à compter de leur information en décembre 2012 et faute pour les consorts [F] de rapporter la preuve d'un préjudice direct et certain antérieur en lien avec la fuite signalée

- du dysfonctionnement de l'alimentation en eau chaude résultant de l'entartrage du circuit, d'une pièce défectueuse et de la vétusté signalé au mandataire

- entretien de la piscine': les locataires ont signalé dès le 5 mai 2015 que " le surpresseur permettant le nettoyage de la piscine appareil ancien est hors service ", dysfonctionnement qui persistait le 13 septembre 2016 ( procès-verbal d'huissier) soit durant deux périodes estivales

Par contre leur défaillance elle n'est pas démontrée pour les frais de fourrière par suite de la fuite des chiens en raison de la défectuosité du portail électrique , cette demande était rejetée en l'absence de lien direct, les chiens étant sous la surveillance de leur détenteurs auxquels ils appartient de prendre toutes mesures utiles pour prévenir leur errance

Les consorts [F] qui font valoir le manquement à l'obligation d'entretien et l'absence de jouissance paisible ne peuvent être indemnisé deux fois pour mes mêmes préjudices; ils ne démontrent pas l'acharnement procédural des bailleurs; les frais de justice qui sont réparés par les articles 696 et 700 du code de procédure civile

*Les bailleurs qui invoquent faute des locataires ne démontrent pas le refus par ceux-ci d'intervention des professionnels, d'autant qu'ils ne justifient d'aucune mise en demeure et ont au contraire fait établir de multiples devis.

**

Mmes [J] [F] et [N] [F] et M. [K] [F] [E] ont relevé appel de ce jugement par déclaration au greffe en date du 16 février 2017

Par ordonnance en date du 16 octobre 2017 le conseiller de la mise en état a rejeté les demande formées

par les époux [O] aux fins d'ordonner le libre accès aux professionnels mandatés par la société ITC Gestion au bien loué, ce sous astreinte de 150€ par jour de retard à compter de la signification de l'ordonnance

par les consorts [F] à fin de désignation d'un expert pour constater et décrire les désordres allégués, préconiser les travaux à entreprendre, déterminer l'ensemble des préjudices

Par une seconde ordonnance en date du 3 juillet 2018 ce magistrat a ordonné aux consorts [F] de procéder à la consignation de la somme de 11.702,35€ entre les mains de M. le Bâtonnier de l'Ordre des Avocats de Marseille, rejeté toute autre demande, dit que les dépens de l'incident suivront ceux de l'instance principale.

Mme [N] [F] est décédée le [Date décès 1] 2017 laissant pour seule héritière sa fille [J] [F] qui a poursuivi l'instance.

Les dernières écritures des appelants ont été déposées le 27 mai 2019 et celles des époux [O] le 11 mars 2019.

L'ordonnance de clôture a été prononcée le 4 juin 2019

PRÉTENTIONS DES PARTIES

En application de l'article 455 du code de procédure civile il est renvoyé aux écritures précitées des parties pour l'exposé exhaustif de leurs moyens.

Mme [J] [F] et M. [K] [F] [E], dans le dispositif de leurs dernières écritures auxquelles il convient de se reporter pour plus ample exposé, demandent à la cour, au visa de l'article 462 du code de procédure civile , des dispositions de la loi n° 89-462 du 6 juillet 1989, du décret n°87-712 du 26 août 1987 , et de de l'article R.111-2 du Code de la Construction et de l'habitation

* avant dire droit

rectifier le jugement déféré et remplacer " condamne solidairement Mmes [J] [F] et [N] [F] et M. [K] [F] [E] à payer à Mme [V] [O] et M. [B] [O] la somme de 5.300€ " par " condamne solidairement Mme [V] [O] et M. [B] [O] à Mmes [J] [F] et [N] [F] et M. [K] [F] [E] la somme de 5.300€ "

constater le décès de Mme [N] [F] (née [I]) et la volonté de Mme [J] [F] de poursuivre la procédure en son nom en sa qualité d'unique ayant-droit

désigner tel expert qu'il plaira avec mission habituelle en la matière et notamment:

se rendre sur les lieux, examiner la villa, constater et décrire les désordres allégués, concernant notamment la chaudière de marque Beretta qui est fortement entartrée et hors-service, la piscine, qui est également hors-service, les canalisations extérieures, affectées de fuites, les équipements gaz (non-conformité de type A2 affectant un tuyau flexible sur plaque de cuisson encastrée), estimer la date à laquelle ces désordres sont apparus, en rechercher les causes et les origines, en donnant toute information sur les moyens d'investigation employés, préconiser les travaux à entreprendre pour mettre fin aux désordres et en chiffrer le coût, déterminer l'ensemble des préjudices et troubles de jouissance engendrés par les désordres et par les travaux de réfection à effectuer.

* en tout état de cause

constater les manquements de M. et Mme [O] à leurs obligations de bailleur et leur mauvaise foi

constater les préjudices qu'ils ont subis

condamner M. et Mme [O] à leur payer les sommes de :

3.000€ au titre du préjudice résultant de la fuite des canalisations extérieures

103.199€ au titre de la privation d'eau chaude, privation de chauffage et privation d'un débit normal d'eau courante, résultant de la panne de chaudière jusqu'au 22 avril 2018, montant à parfaire jusqu'au jour des réparations effectives

5.000€ au titre des préjudices résultant de la dangerosité des installations de gaz

1.500€ au titre du préjudice résultant du défaut d'entretien de la piscine

1.160€ au titre du préjudice résultant de la défectuosité du portail électrique

52.978,84€ au titre de la révision du loyer

dire et juger que le loyer mensuel en rapport avec la surface réelle, ne pouvait être supérieur, dès la signature du bail, à un montant mensuel de 1.102€ toutes charges comprises

constater qu'ils sont des débiteurs de bonne foi et sont fondés à invoquer une exception d'inexécution à l'encontre de M. et Mme [O] tant que ces derniers n'auront pas procédé aux réparations qui leur incombent

annuler le congé du 30 août 2016

condamner M. et Mme [O] à leur payer la somme de 3.000€ au titre des dispositions de l'article 700 du Code de procédure civile, outre les dépens

ordonner la compensation entre les sommes respectivement dues par les parties

Ils font valoir qu'ils ont consigné la somme mise à leur charge par le conseiller de la mise en état.

La cour devra rectifier l'erreur matérielle figurant au dispositif du jugement qui comporte une inversion des noms la somme de 4.800€ due en réparation du préjudice de jouissance étant mise à la charge des bailleurs les époux [O] et non des locataires les consorts [F] par les motifs du jugement.

Leur demande d'expertise qui a été rejetée par le conseiller de la mise en état devra être ordonnée par la cour.

Depuis l'avis de la cour de cassation en date du 16 février 2015 confirmé par un arrêt du 17 novembre 2016 (pourvoi n°15-24.552), la loi Alur régit immédiatement les effets légaux des situations juridiques ayant pris naissance avant son entrée en vigueur et non définitivement réalisées. Le contrat de bail, bien que conclu en 2008 est donc soumis aux dispositions de la loi Alur et la clause pénale prévoyant des pénalités de retard doit être réputée non écrite.

S'agissant des loyers impayés ils ont de bonne foi, ils ont consigné la somme fixée par le conseiller de la mise en état, il appartient aux bailleurs de leur produire un décompte détaillé pour qu'ils puissent le confronter aux règlements qu'ils ont effectués, les sommes dues devront être compensées avec celles qui leur seront dues par les bailleurs

Seul le bailleur de bonne foi peut se prévaloir de la clause résolutoire tel n'est pas le cas en l'espèce les bailleurs ayant refusé d'effectuer les travaux qui leur incombaient

Ils démontrent les nombreux défauts d'entretien du logement qui persistent depuis le jugement, l'intervention Enedis du 22 août 2018 l'atteste , ils sont privés d'eau chaude et de chauffage depuis 2009, la piscine est hors service depuis 2015

L'annonce de location indiquait 136 m², alors que la surface est de 86,53 m² le loyer doit être révisé

Ils contestent formellement refus d'intervention de professionnels non démontré par les bailleurs

Mme [V] [O] et M.[B] [O], dans le dispositif de leurs dernières écritures auxquelles il convient de se reporter pour plus ample exposé, demandent à la cour, au visa de la loi du 6 juillet 1989, du décret n°87-712 du 26 août 1987, de l'article R111-2 de Code de la Construction et de l'Habitation,

* avant dire droit sur la rectification de l'erreur matérielle remplacer " condamne solidairement Mmes [J] [F] et [N] [F] et M. [K] [F] [E] à payer à Mme [V] [O] et M. [B] [O] la somme de 5.300€ " par " condamne solidairement Mme [V] [O] et M. [B] [O] à Mmes [J] [F] et [N] [F] et M. [K] [F] [E] la somme de 5.300€ "

* en tout état de cause :

confirmer le jugement entrepris s'agissant de la validité du congé délivré le 2 mars 2017

le confirmer en ce qu'il condamne solidairement Mmes [J] [F] et [N] [F] et M. [K] [F] [E] à leur payer la somme de 17.002,35€ arrêtée au 13 juin 2016

condamner solidairement Mme [N] [F] et M. [K] [F] [E] les locataires restant à leur payer la somme de 66.522,17€ correspondant aux impayés de loyers pour la période du 13 juin 2016 au 31 mars 2019 sauf à parfaire

débouter les consorts [F] de leurs demandes relatives à la révision du loyer et en réparation des divers troubles de jouissance allégués mais non démontrés

condamner les consorts [F] au paiement de la somme de 6.000€ au titre de l'article 700 du code de procédure civile outre les entiers dépens.

SUR QUOI LA COUR

* rectification d'erreur matérielle

Les parties n'ont pas formée de requête en rectification d'erreur matérielle avant renvoi devant la cour, cette demande est sans objet au stade du renvoi du jugement devant la cour.

* expertise

Cette demande déjà présentée au conseiller de la mise en état a déjà été rejetée.

En effet et en application de l'article 9 du code de procédure civile il incombe à chaque partie de prouver conformément à la loi les faits nécessaires au succès de sa prétention, il n'appartient pas au juge de se substituer aux parties, en conséquence de quoi la demande d'expertise formée par les locataires sera rejetée et il sera statué au regard des pièces versées par les deux parties.

* pénalités de retard

L'article 4 i) de la loi du 6 juillet 1989 dans la rédaction issue de la loi du 24 mars 2014 ( loi dite Alur) répute non écrite toute clause qui autorise le bailleur à percevoir des pénalités en cas d'infractions aux clauses du contrat.

Le premier juge a rappelé qu'en application de l'article 14 de la loi dite Alur, l'article 4 dans la rédaction issue de cette loi ne s'applique pas aux baux en cours au jour de son entrée en vigueur.

Les consorts [F] contestent cette analyse et font valoir que depuis l'avis de la cour de cassation en date du 16 février 2015, la loi Alur régit immédiatement les effets légaux des situations juridiques ayant pris naissance avant son entrée en vigueur et non définitivement réalisées. Le contrat de bail, bien que conclu en 2008 est donc soumis aux dispositions de la loi Alur et la clause pénale prévoyant des pénalités de retard doit être réputée non écrite.

Les consorts [O] soutiennent que l'article 14 de la loi Alur prévoit expressément que les contrats en cours au jour de l'entrée en vigueur de la loi restent soumis aux dispositions antérieures, la loi nouvelle ne saurait, sans avoir d'effet rétroactif, régir rétrospectivement les conditions de validité ni les effets passés d'opérations juridiques antérieurement achevées.

La cour rappelle que l'article 14 de la loi du 24 mars 2014 dispose que les contrats de location en cours au 27 mars 2014, date d'entrée en vigueur du texte, demeurent soumis aux dispositions qui leur étaient applicables.

L'avis de la haute juridiction dont se prévalent les locataires est fondé sur l'article 2 du code civil, il précise que l'article 24 de la loi du 6 juillet 1989 s'applique aux baux en cours au jour de l'entrée en vigueur de la loi du 24 mars 2014, ce conformément à la volonté du législateur de ne pas cumuler dans le temps des régimes juridiques différents ce qui serait source d'insécurité juridique, article qui donne faculté au juge d'accorder un délai de paiement au locataire pour apurer la dette locative, faculté qui n'est pas soumise à la liberté contractuelle des parties. Cet avis ne saurait s'étendre aux clauses soumises à la liberté contractuelle des parties.

Depuis lors la loi du 10 juillet 2015 est venue préciser les conditions d'application dans le temps des dispositions de la loi du 24 mars 2014, elle précise qu'à compter de la date d'effet de leur renouvellement ou de leur reconduction tacite, les contrats des locations mentionnés au deuxième alinéa de l'article 2 de la loi n° 89-462 du 6 juillet 1989 sont régis par l'ensemble des dispositions de cette même loi en vigueur au jour du renouvellement ou de la reconduction, à l'exception de ses articles 3, 17 et 17-2, qui ne s'appliquent qu'aux nouveaux baux et aux baux faisant l'objet d'un renouvellement.

En l'espèce le bail a été conclu le 3 mars 2008 pour une durée de 3 ans renouvelable par période de 3 ans, en application de l'article 10 de la loi du 6 juillet 1989, en l'absence de congé délivré dans les termes de l'article 15 , il n'a pas été renouvelé et s'est poursuivi tacitement; la loi dite Alur était en vigueur seulement à la 4ème prorogation tacite le 3 mars 2017 , en conséquence de quoi au jour des assignations délivrées le 12 octobre 2015, 15 avril 2016, et 18 avril 2016, l'article 4 de la loi du 6 juillet 1989 dans la version résultant de la loi du 24 mars 2014 n'était pas applicable au bail en cours , le jugement sera donc confirmé de ce chef.

* dette locative

Il incombe à chaque partie de prouver conformément à la loi les faits nécessaires au succès de sa prétention

Le paiement des loyers et charges aux termes convenus dans le contrat est une obligation essentielle du locataire résultant tant des dispositions contractuelles du bail signé entre les parties que de l'article 7 a) de la loi du 6 juillet 1989.

Les consorts [F] ne contestent pas l'existence d'une dette locative mais en renversant la charge de la preuve concluent à la production par les consorts [O] d'une décompte détaillé aux fins de le confronter aux règlements effectués.

Les consorts [O] produisent un décompte des arriérés de loyers de janvier 2013 à février 2018, dont il résulte que les consorts [F] n'ont pas réglé avec régularité le montant des loyers, charges de sorte qu'à ce titre il restait due à la date 1er février 2018 la somme de 55.579,16€ auquel s'ajoutent les loyers de mars 2018 à mars 2019 inclus 21.363,03 soit un total de 77.215,19€ dont les consorts [F] ne justifient pas s'être acquittés et qu'ils seront condamnés à payer en deniers ou quittances

* congé

Les consorts [O] demande confirmation du jugement qui a dit le congé délivré pour motifs légitime le 30 août 2016 pour le 2 mars 2017 régulier.

Les consorts [F] excipent la mauvaise foi des bailleurs et de l'exception d'inexécution aux fins de suspendre le paiement des loyers et se maintenir dans les lieux.

En droit le locataire peut être autorisé uniquement par le juge à suspendre le paiement du loyer et seulement si le bailleur n'exécute pas ses obligations et que le logement est inhabitable, ce qui n'est pas établi au cas d'espèce.

Avant la délivrance des commandements les locataires ne se sont pas prévalu de l'article 20-1 de la loi du 6 juillet 1989, ils n'ont pas mis les bailleurs en demeure de satisfaire à leurs obligations aux fins d'obtenir l'autorisation du juge de se substituer à lui pour faire des travaux.

En l'espèce la mauvaise foi des bailleurs n'est pas caractérisée par les locataires, elle ne saurait se confondre avec les manquements à l'obligation de réparation et jouissance paisible, c'est par une juste appréciation des faits et à bon droit que le premier juge a tenant l'importance de la dette et son ancienneté, a jugé justifié le congé délivré pour motifs graves et légitime, les causes d'indécence invoquées par les locataires étant postérieures au commandements des 12 août 2015 et 17 février 2016 et au congé.

* défaut d'entretien et préjudice de jouissance

Les consorts [O] font valoir le défaut d'entretien locatif des consorts [F] qui auraient fait obstruction aux professionnels mandatés pour procéder aux réparations et pour en justifier font valoir qu'ils ont en vain fait délivrer une sommation interpellative.

En cause d'appel les consorts [F] modifient partiellement le fondement de leurs demandes, ils font valoir l'indécence pour ce qui est de la privation de chauffage depuis 2016 et y ajoutent la privation d'eau chaude depuis 2009 pour demander réparation du préjudice de jouissance consécutif à hauteur de 50'% de la valeur du loyer , ils maintiennent le manquement des bailleurs à l'obligation de réparation pour ce qui est des désordres affectant la piscine et le portail.

' réparations locatives et obligation d'entretien à la charge du bailleur

En application de l'article 1719 du code civil le bailleur est obligé, par la nature du contrat, et sans qu'il soit besoin d'aucune stipulation contractuelle, d'entretenir la chose en état de servir à l'usage pour laquelle elle a été loué , il appartient au preneur d'informer le bailleur des travaux qui ne peuvent être perçus qu'en pénétrant dans les lieux où seul le locataire a accès

Le décret du 26 août 1987 pris en application de l'article 7 de la loi n° 86-1290 du 23 décembre 1986 définit les réparations locatives comme étant les travaux d'entretien courant, et de menues réparations, y compris les remplacements d'éléments assimilables aux dites réparations, consécutifs à l'usage normal des locaux et équipements à usage privatif qu'ils listent.

En application de ces textes le premier juge a justement retenu que les réparations des canalisations extérieures d'eau à l'origine de la fuite d'eau, de la chaudière ( vétuste et entartrée) et celles du sur presseur de la piscine sont des réparations qui incombent aux bailleurs, lesquels tentent vainement d'imputer aux locataires les pannes des matériels anciens et vétustes et la fuite de canalisation extérieures

C'est à bon droit qu'il a écarté la demande formée au titre des frais de fourrière faute de lien direct entre l'errance des chiens et le dysfonctionnement du portail.

Il a justement recherché et établi la date à laquelle les bailleurs ou leur mandataire avaient eu connaissance des désordres et la date à laquelle les réparations ont été réalisées , en soulignant que les bailleurs ne rapportaient pas la preuve du refus par les locataires de laisser pénétrer les professionnels mandatées pour les réparations.

Ce même moyen est réitéré en cause d'appel par les bailleurs qui produisent les mêmes pièces outre le projet de sommation interpellative sur lequel la réponse des locataires est absente.

S'agissant de la fuite d'eau en cause d'appel les locataires produisent leurs factures de 2008 à 2011 et arguent d'une surconsommation à compter du second semestre 2011, néanmoins comme justement relevé par le premier juge ils ne rapportent pas la preuve que le bailleur ait été informé avant décembre 2012, la facturation intervenant par semestre.

En conséquence le jugement parfaitement motivé sera confirmé en ce qu'il a accordé des dommages et intérêts aux locataires pour les préjudices résultant des manquements des bailleurs à ses obligations d'entretien et de réparation.

' indécence

Aux termes de l'article 6 de la loi du 06 juillet 1989, le bailleur est tenu de remettre au locataire un logement décent ne laissant pas apparaître de risques manifestes pouvant porter atteinte à la sécurité physique ou à la santé et doté des éléments le rendant conforme à l'usage d'habitation.

Ces caractéristiques sont définies dans le décret n°2002-120 du 30 janvier 2002 dont il ressort que le logement doit notamment disposer de réseaux et branchements d'électricité et de gaz et des équipements de chauffage et de production d'eau chaude conformes aux normes de sécurité définies par les lois et règlements et en bon état d'usage et de fonctionnement.

L'article 3 prévoit que le logement comporte les éléments d'équipement et de confort suivants : (...) une installation permettant un chauffage normal, munie des dispositifs d'alimentation en énergie et d'évacuation des produits de combustion et adaptée aux caractéristiques du logement.

' eau chaude et chauffage

Les partis font valoir les mêmes pièces que devant le premier qui y a parfaitement répondu en soulignant que le compte rendu d'intervention d'Engie en date du 3 octobre 2016 relevait l'entartrage de la chaudière, sa vétusté et la défectuosité d'une pièce

En effet si le décret du n°87-712 du 26 août 1987 prévoit que le rinçage et nettoyage des corps de chauffe et tuyauteries sont à la charge du locataire, obligation réitérée par l'article 2.3.2 du bail en application duquel le locataire doit faire entretenir à ses frais et au moins une fois l'an les appareils dont le chauffe-eau et souscrire un contrat d'entretien, pour autant le bailleur n'est pas dispensé de son obligation d'entretien et de réparation.

En l'espèce la vétusté ne relève pas des réparations locatives et la privation d'eau chaude caractérise l'indécence qui n'est établie au titre de l'alimentation en eau chaude que postérieurement au premier commandement et au congé délivré le 30 août 2016, en conséquence de quoi les locataires sans droit ni titre ne peuvent prétendre à indemnisation.

' tuyau flexible

En cause d'appel les locataires argent au surplus de la non conformité du tuyau de flexible de la plaque de cuisson qui est mentionné dans un compte rendu d'intervention d'Engie du 3 octobre 2016, mais aussi de celui d'évacuation de gaz brûlé de la chaudière qui n'est pas établi par les pièces produites.

Le désordre résultant de la flexibilité du tuyau alimentant la plaque de cuisson ayant été constaté postérieurement au commandement visant la clause résolutoire et au congé délivré le 30 août 2016 les locataires ne peuvent s'en prévaloir au titre de l'indécence.

* révision du loyer / surface louée

Les consorts [F] forment une demande de révision du loyer tenant la surface habitable réellement mise à disposition , ils font valoir que l'article 3 de la loi du 6 juillet 1989 ne leur impose pas de saisir la commission de conciliation comme jugé à tort par le premier juge , mais leur donne seulement la faculté de mettre les bailleurs en demeure dans le délai de 6 mois à compter de la prise d'effet du contrat.

Si la mention de la surface habitable doit figurer dans le contrat de bail , antérieurement à la loi du 24 mars 2014 l'absence de cette mention n'était pas sanctionnée.

De plus et comme relevé par le premier juge , si le bail ne mentionne aucune surface habitable, ils ont visité les lieux avant la signature, les ont occupé durant 8 ans avant d'élever cette contestation en réponse aux commandements de payer délivrés par le bailleur , ils ne démontrent pas que la surface mentionnée sur le site internet ait été dans ces conditions déterminante de leur volonté de contracter.

En conséquence de quoi le jugement qui a débouté les consorts [F] de leurs demandes sera confirmé.

* frais et dépens

Dit n'y avoir lieu à application de l'article 700 du code de procédure civile

Les consorts [F] qui succombent dans leur appel seront condamnés aux entiers dépens de l'incident et d'appel

PAR CES MOTIFS

La cour statuant publiquement par arrêt contradictoire, mis à la dispositions des parties conformément à l'article 450 alinéa 2 du Code de procédure civile

CONFIRME le jugement déféré en ce qu'il a

validé le congé délivré par les bailleurs le 30 août 2016 pour le 2 mars 2017,

condamné solidairement Mme [V] [O] et M.[B] [O] à payer à Mmes [J] [F] et M. [K] [F] [E] à la somme de 5.300€

ordonné la compensation des dettes à concurrence de la plus faible

débouté les parties du surplus de leur demande

INFIRME le jugement déféré pour le surplus et statuant à nouveau

condamne solidairement à Mme [J] [F] et M. [K] [F] [E] à payer Mme [V] [O] et M.[B] [O] la somme de 77.215,19€ en deniers ou quittances , assortie des intérêts au taux légal

Y AJOUTANT

Dit n'y avoir lieu à application de l'article 700 du code de procédure civile

Condamne Mme [J] [F] et M. [K] [F] [E] aux entiers dépens de l'incident et d'appel

LE GREFFIER Mme Françoise FILLIOUX, Conseillère pour la Présidente empêchée


Synthèse
Tribunal : Cour d'appel d'Aix-en-Provence
Formation : Chambre 1-8
Numéro d'arrêt : 17/03159
Date de la décision : 19/09/2019

Références :

Cour d'appel d'Aix-en-Provence B1, arrêt n°17/03159 : Infirme partiellement, réforme ou modifie certaines dispositions de la décision déférée


Origine de la décision
Date de l'import : 27/03/2024
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.appel;arret;2019-09-19;17.03159 ?
Association des cours judiciaires suprmes francophones
Organisation internationale de la francophonie
Juricaf est un projet de l'AHJUCAF, l'association des Cours suprêmes judiciaires francophones. Il est soutenu par l'Organisation Internationale de la Francophonie. Juricaf est un projet de l'AHJUCAF, l'association des Cours suprêmes judiciaires francophones. Il est soutenu par l'Organisation Internationale de la Francophonie.
Logo iall 2012 website award