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04/07/2019 | FRANCE | N°18/08208

France | France, Cour d'appel d'Aix-en-Provence, Chambre 1-6, 04 juillet 2019, 18/08208


COUR D'APPEL D'AIX-EN-PROVENCE

Chambre 1-6

(anciennement dénommée la 10ème chambre).

ARRÊT AU FOND

DU 04 JUILLET 2019



N° 2019/275













N° RG 18/08208



N° Portalis DBVB-V-B7C-BCOBD







[I] [O]





C/



Compagnie d'assurances MATMUT

Etablissement CPAM [Localité 1]

Etablissement LA METROPOLE AIX-MARSEILLE-PROVENCE













Copie exécutoire délivrée

le

:

à :



-Me Virgile REYNAUD



-SCP W & R LESCUDIER













Décision déférée à la Cour :



Jugement du Tribunal de Grande Instance de MARSEILLE en date du 22 Février 2018 enregistré au répertoire général sous le n° 16/01061.





APPELANT



Monsieur [I]...

COUR D'APPEL D'AIX-EN-PROVENCE

Chambre 1-6

(anciennement dénommée la 10ème chambre).

ARRÊT AU FOND

DU 04 JUILLET 2019

N° 2019/275

N° RG 18/08208

N° Portalis DBVB-V-B7C-BCOBD

[I] [O]

C/

Compagnie d'assurances MATMUT

Etablissement CPAM [Localité 1]

Etablissement LA METROPOLE AIX-MARSEILLE-PROVENCE

Copie exécutoire délivrée

le :

à :

-Me Virgile REYNAUD

-SCP W & R LESCUDIER

Décision déférée à la Cour :

Jugement du Tribunal de Grande Instance de MARSEILLE en date du 22 Février 2018 enregistré au répertoire général sous le n° 16/01061.

APPELANT

Monsieur [I] [O]

Assuré social sous le n° XXXXXXXXXXXXX

né le [Date naissance 1] 1982 à [Localité 2],

demeurant [Adresse 1]

représenté par Me Virgile REYNAUD, avocat au barreau de MARSEILLE.

INTIMEES

Compagnie d'assurances MATMUT,

demeurant [Adresse 2]

représentée par Me Roland LESCUDIER de la SCP W & R LESCUDIER, avocat au barreau de MARSEILLE substituée par Me Nora MURATSAN, avocat au barreau de MARSEILLE.

CPAM [Localité 1]

Assignée le 21/06/2018,

demeurant [Adresse 3]

Défaillante.

LA METROPOLE AIX-MARSEILLE-PROVENCE

Assignée le 20.06.2018,

demeurant [Adresse 4]

Défaillante.

*-*-*-*-*

COMPOSITION DE LA COUR

L'affaire a été débattue le 21 Mai 2019 en audience publique. Conformément à l'article 785 du code de procédure civile, Madame Françoise GILLY-ESCOFFIER, Conseiller, a fait un rapport oral de l'affaire à l'audience avant les plaidoiries.

La Cour était composée de :

Monsieur Olivier GOURSAUD, Président

Madame Françoise GILLY-ESCOFFIER, Conseiller

Madame Anne VELLA, Conseiller

qui en ont délibéré.

Greffier lors des débats : Madame Charlotte COMBARET.

Les parties ont été avisées que le prononcé de la décision aurait lieu par mise à disposition au greffe le 04 Juillet 2019.

ARRÊT

Réputé contradictoire,

Prononcé par mise à disposition au greffe le 04 Juillet 2019,

Signé par Monsieur Olivier GOURSAUD, Président et Madame Charlotte COMBARET, Greffier, auquel la minute de la décision a été remise par le magistrat signataire.

***

FAITS ET PROCÉDURE

Le 14 juin 2011 à [Localité 2] M. [I] [O] qui circulait au guidon d'un scooter est entré en collision avec un véhicule automobile conduit par M. [K] et assuré auprès de la société MATMUT.

La société MATMUT a versé à M. [O] des provisions à hauteur de la somme totale de 18'000 € à valoir sur son indemnisation et a mis place une expertise médicale confiée au docteur [I] qui a établi son rapport le 16 décembre 2014.

Par exploit du 6 janvier 2016 M. [O] a assigné devant le tribunal de grande instance de Marseille la société MATMUT, la métropole d'Aix-Marseille Provence communauté urbaine de [Localité 2], son employeur à la date de l'accident, et la caisse primaire d'assurance maladie [Localité 1] (CPAM) pour obtenir la réparation de son préjudice corporel.

Par jugement du 22 février 2018 cette juridiction a :

- dit que M. [O] a commis une faute de conduite de nature à réduire son droit à indemnisation de moitié,

- condamné la société MATMUT à indemniser M. [O] des conséquences dommageables de l'accident du 14 juin 2011 à concurrence de 50 %,

- évalué le préjudice corporel de M. [O] à la somme de 80'566 €,

- condamné en conséquence la société MATMUT à payer à M. [O] avec les intérêts au taux légal à compter du jugement les sommes de :

- 62'566 € en réparation de son préjudice corporel, déduction faite de la provision précédemment allouée

- 1 300 € au titre de l'article 700 du code de procédure civile,

- dit que les intérêts au taux légal seront capitalisés selon les dispositions de l'article 1343-2 du code civil,

- déclaré le jugement commun et opposable à la métropole d'Aix-Marseille Provence et à la CPAM,

- ordonné l'exécution provisoire,

- condamné la société MATMUT aux dépens avec distraction.

Pour statuer ainsi sur le droit à indemnisation le tribunal a considéré que :

- le défaut de permis de conduire de M. [O] expliquait une méconnaissance des règles du code de la route lui faisant obligation de circuler à une vitesse adaptée et impliquait qu'il n'avait pas la maîtrise de la conduite d'un scooter de grosse cylindrée,

- les déclarations de M. [K] et les constatations effectuées par les services de police quant à une trace de freinage sur une distance de 32 m dénotant ainsi un temps assez long de freinage établissaient que M. [O] circulait à une vitesse supérieure à celle autorisée ayant participé au défaut de maîtrise de son engin en présence d'un obstacle normalement prévisible sur une voie de circulation constituée par le véhicule de M. [K] ce qui était de nature à réduire son droit à indemnisation de 50 %.

Il a détaillé le préjudice corporel de M. [O] avant application de la réduction du droit à indemnisation de la façon suivante :

- dépenses de santé actuelles restées à la charge de la victime : 300 €

- frais divers : honoraires d'assistance expertise 1700 €

- assistance temporaire de tierce personne : 6 752 € selon un tarif horaire de 16 €

- perte de gains professionnels actuels : 24'000 € sur la base du contrat fédéral conclu avec le groupe sportif Consola évoluant en CFA pour la saison 2011/2012 moyennant un salaire mensuel net de 2.000 € après rejet de la somme réclamée au titre de la perte sur la prime de 300 € par match gagné prévu par ce contrat, ce type de préjudice étant par nature hypothétique car soumis à différents paramètres ce qui ne permet pas de se prononcer de manière certaine sur un pronostic de sept matchs remportés, et dans la mesure où il n'y a pas eu de perte de salaire au titre de l'emploi de cantonnier- éboueur- ripeur à temps plein auprès de la communauté urbaine de [Localité 2]

- incidence professionnelle : 10'000 € au titre de la de chance de pouvoir occuper un emploi qui exige les pleines capacités physiques, de la dévalorisation consécutive sur le marché du travail et de la pénibilité

- déficit fonctionnel temporaire : 9 200 € sur une base journalière de 25 €

- souffrances endurées : 21'300 €

- déficit fonctionnel permanent : 74'880 €

- préjudice esthétique permanent : 8 000 €

- préjudice d'agrément : 5 000 € au titre de l'activité de football.

Par déclaration du 15 mai 2018, M. [O] a interjeté appel de cette décision.

PRÉTENTIONS ET MOYENS DES PARTIES

M. [O] demande à la cour dans ses conclusions du 12 juillet 2018, en application de la loi du 5 juillet 1985 et notamment de son article 4, de :

- le recevoir en son appel et le dire bien fondé,

en conséquence :

- réformer le jugement,

statuant à nouveau :

- juger que son droit à indemnisation est entier,

- condamner la société MATMUT à lui payer les indemnités suivantes

- incidence professionnelle : 30'000 €

- préjudice d'agrément : 30'000 €,

- confirmer pour le surplus le jugement,

- condamner la société MATMUT à lui verser la somme de 3 000 € au titre de l'article 700 du code de procédure civile,

- juger que les sommes allouées en principal seront assorties des intérêts au taux légal à compter de la demande en justice et que les intérêts seront capitalisés par année entière à compter de cette même date en application de l'article 1343-2 du code civil,

- condamner le débiteur à supporter, en cas d'exécution forcée par l'intermédiaire d'un huissier de justice les sommes par lui retenues en application de l'article A444-32 de l'arrêté du 26 février 2016 fixant les tarifs réglementés en sus de l'application de l'article 700 du code de procédure civile,

- condamner la société MATMUT aux dépens avec distraction.

Il soutient que :

' sur le droit à indemnisation :

- l'accident s'est produit en raison de la man'uvre intempestive de M. [K] qui lui a coupé la route pour pénétrer dans un parc privé au mépris des règles du code de la route,

- il ne peut être considéré que la présence de M. [K] au milieu de la chaussée était un obstacle prévisible alors que virant à gauche et coupant la voie des véhicules circulant en sens inverse il n'aurait pas dû s'engager alors même que la circulation ne lui permettait pas d'effectuer cette man'uvre,

- au moment de l'accident s'il n'était plus titulaire du permis A lui permettant de conduire une moto de grosse cylindrée ; il avait obtenu le 9 décembre 2010 un permis de catégorie A délivré par la préfecture des Bouches-du-Rhône de sorte qu'il avait connaissance des règles du code de la route et avait les aptitudes requises pour conduire une moto de cette cylindrée,

- compte tenu de la configuration des lieux de l'accident qui se situent sur une longue portion de ligne droite avec une visibilité dégagée, la vitesse excessive qui lui est reprochée, à la supposer établie ne peut expliquer l'accident, étant précisé que les policiers n'ont pas retenu une quelconque infraction à son encontre sur ce point et que les traces de freinage ont été relevées plus d'une heure après les faits de sorte qu'il est impossible de les rattacher de façon certaine à ceux-ci,

' sur la réparation :

- sur l'incidence professionnelle : les séquelles de l'accident ont conduit l'expert médical à retenir un taux du déficit fonctionnel permanent de 30 % et il n'a pu reprendre son activité professionnelle qu'à un poste aménagé de gardien sédentaire effectuant la préparation de commandes ce qui ne lui permet plus d'exercer une activité décalée de nuit et donc de percevoir des primes ; il subit en outre une pénibilité accrue et une dévalorisation certaine sur le marché du travail,

- sur le préjudice d'agrément : il justifie n'avoir pu intégrer l'équipe fanion qui évoluait en CFA dans le cadre de sa licence pour la saison 2011/2012 et il a dû renoncer à la pratique du football.

La société MATMUT demande à la cour dans ses conclusions du 4 octobre 2018, de :

- débouter l'appelant de sa voie de recours,

- la recevoir en son appel incident,

- confirmer le jugement en ses dispositions qu'elle ne remet pas en cause,

- le réformer sur le préjudice d'agrément, les frais irrépétibles et les dépens,

ce faisant :

- juger que les fautes commises par l'appelant ont réduit de moitié son droit à indemnisation conformément à l'article 4 de la loi du 5 juillet 1985,

- juger qu'elle ne sera tenue de réparer que 50 % des dommages invoqués,

- concernant les postes d'incidence professionnelle et de préjudice d'agrément confirmer les estimations du premier juge,

- constater que celles relatives aux autres postes de préjudice ont été acceptées par les parties hormis pour ce qui est du préjudice d'agrément,

- concernant ce poste, surseoir à statuer jusqu'à ce que l'appelant ait déféré à la sommation de communication de pièces qui lui est décernée par les présentes conclusions et à défaut par lui de faire le nécessaire, réformer l'appréciation du premier juge et juger que les conditions d'indemnisation d'un tel dommage ne sont en l'espèce pas réunies en déboutant M. [O] de l'intégralité de sa réclamation,

- tenir compte des provisions réglées à l'appelant à concurrence de la somme globale de 18'000 €,

- réformer le jugement déféré en ce qu'il a accordé à M. [O] la somme de 1 300 € au titre de ses frais irrépétibles, en laissant les dépens à sa charge exclusive,

statuant à nouveau :

- refuser d'appliquer l'article 700 du code de procédure civile au bénéfice de M. [O] et rejeter ses demandes de ce chef,

- juger que les dépens de première instance doivent rester à la charge exclusive de M. [O] et à tout le moins qu'ils doivent être supportés par moitié entre elle-même et M. [O],

- refuser de compenser les frais irrépétibles de M. [O] en cause d'appel,

- condamner M. [O] à supporter les entiers dépens d'appel avec application de l'article 699 du code de procédure civile.

Elle fait valoir que :

' sur le droit à indemnisation :

- le procès-verbal de police indique que M. [O] aurait été détenteur d'un permis A délivré le 9 décembre 2010 sans qu'aucun justificatif de l'obtention de ce permis n'ait été produit de sorte qu'il est permis de se demander si cette information non vérifiée n'est pas le résultat d'une erreur ; en toute hypothèse M. [O] n'était pas titulaire du permis au moment de l'accident ce qui n'est pas inopérant dans la réalisation de celui-ci,

- M. [O] circulait à une vitesse manifestement supérieure à la vitesse maximale autorisée ainsi que cela ressort de la longueur des traces de freinage et du fait qu'il a violemment percuté la voiture de M. [K] malgré un freinage intensif sur une distance conséquente,

- à défaut la cour devra retenir que M. [O] roulait à une vitesse non inadaptée,

- cette vitesse est à l'origine de la perte de contrôle de son engin par M. [O] mais a de surcroît faussé les estimations légitimement faites par M. [K] qui avait le temps d'entreprendre sa man'uvre et de l'achever sans barrer la trajectoire du scooter si celui-ci avait été respectueux de la réglementation,

' sur la réparation :

- sur l'incidence professionnelle : M. [O] a pu conserver une activité professionnelle à plein temps chez le même employeur à un poste aménagé ; M. [O] ne peut donc réclamer que l'indemnisation des incidences périphériques du dommage ; M. [O] ne rapporte pas la preuve d'une pénibilité accrue dans son poste actuel ; il est donc sommé de produire 'par exemple' la fiche détaillée de son poste et d'expliquer en quoi les tâches qu'il est amené à effectuer désormais lui sont pénibles ; il ne justifie pas quant à la dévalorisation au sein de son entreprise et a fortiori sur le marché du travail d'un projet professionnel précis auquel il ne pourrait plus accéder en raison des séquelles de l'accident et il ne peut au mieux prétendre qu'à une perte de chance qui ne saurait être indemnisée au-delà de 10'000 €,

- sur le préjudice d'agrément : l'attestation produite par M. [O] permet de penser que s'il n'a pas intégré l'équipe du groupe sportif Consolat pour la saison 2011/2012 ce n'est pas des suites de l'accident qui est survenu le 14 juin 2011 de sorte que la saison des matchs de l'année 2011 avait commencé mais en raison d'autres paramètres ; ses recherches Internet lui ont permis de constater que M. [O] a joué comme footballeur amateur jusqu'en 2001 puis a pratiqué le football en tant que joueur professionnel jusqu'en 2011 puis a intégré à [Localité 2] le 'Football club algérien' en tant que joueur pendant un an puis aurait ensuite assuré la direction de ce club jusqu'en 2015 ; il est donc sommé de produire ses licences pour les saisons 2010/2011 et 2011/2012 la copie de son contrat fédéral et les justificatifs du versement de ses primes (déclaration de revenus notamment).

La métropole Aix-Marseille Provence et la CPAM assignées par exploits respectivement délivrés le 20 juin 2018 et le 21 juin 2018 à personne habilitée et contenant dénonce de l'acte d'appel n'ont pas constitué avocat.

Par courrier du 1er octobre 2018 la CPAM a indiqué le montant de ses débours de 106'839,03 € correspondant à hauteur de 94'291,66 € à des frais hospitaliers, médicaux, pharmaceutiques et de transport avant consolidation, de 5 660,90 € à des frais futurs et à hauteur de 6 887,34 € à des indemnités journalières versées du 14 juin 2011 au 20 février 2012.

Par lettre du 21 mai 2019, le conseil de M. [O] a sollicité la réouverture des débats en indiquant qu'un projet de conclusions n° 2 avait été rédigé et était dans l'attente de communication de pièces par son client, qu'il n'avait pas été destinataire de l'ordonnance de clôture et qu'il souhaitait communiquer ces nouvelles conclusions.

MOTIFS DE LA DÉCISION

Sur la procédure

Il n'y a pas lieu d'ordonner la réouverture des débats dans la mesure où le conseil de M. [O] a été informé par l'avis de fixation, qu'il a reçu par RPVA, de la date de la clôture de la procédure et de la date de l'audience et qu'en toutes hypothèse il n'a pas conclu ni sollicité la révocation de la clôture par conclusions déposées pour l'audience.

Sur le droit à indemnisation

En vertu des articles 4 et 5 de la loi du 5 juillet 1985, d'application autonome, le conducteur victime d'un accident de la circulation est indemnisé des dommages qu'il a subis sauf s'il a commis une faute ayant contribué à la réalisation de son préjudice qui a pour effet de limiter ou d'exclure son indemnisation et qui doit s'apprécier en faisant abstraction du comportement du conducteur de l'autre véhicule impliqué.

En l'espèce, M. [K] a déclaré aux services de police qu'il circulait en voiture sur l'avenue des Aygalades en direction des Aygalades, lorsqu'arrivé à hauteur du n°151 il avait voulu tourner sur sa gauche pour entrer dans un parc privé, que lors de cette manoeuvre un scooter était arrivé très vite et avait fait un freinage d'urgence, que le bruit en avait duré un bon moment puis que le scooter l'avait percuté.

Les policiers ont relevé qu'au niveau de l'accident la vitesse autorisée était limitée à 50 km/h et ont constaté d'une part, des traces de freinage sur près de 32 mètres, dans la voie de circulation du scooter, ce qui correspond aux dires de M. [K] selon lesquels le bruit de freinage a duré longtemps et permet d'attribuer ces traces à celle du scooter piloté par M. [O], d'autant que les policiers sont arrivés rapidement sur les lieux et que M. [K] et de nombreuses personnes étaient encore présentes, et, d'autre part, des dégâts importants sur l'automobile de M. [K] au niveau de la porte latérale du côté passager, du bas de caisse et de la roue, qui a été crevée.

La longueur des traces de freinage de M. [O] et la violence du choc avec le véhicule de M. [K] établissent que si M. [O] était prioritaire il a roulé à une vitesse très importante ce qui ne lui a pas permis d'entreprendre une manoeuvre d'évitement ou un freinage efficace et qu'il a ainsi contrevenu à l'article R. 413-17 du code de la route qui prescrit que les vitesses maximales autorisées par les dispositions de ce code ne dispensent en aucun cas le conducteur de rester constamment maître de sa vitesse et de régler cette dernière en fonction de l'état de la chaussée, des difficultés de la circulation et des obstacles prévisibles.

M. [O] a ainsi commis une faute de conduite qui a concouru à son dommage dans une proportion qu'il convient de fixer à 50 %.

En revanche, il n'est pas établi que le défaut de possession par M. [O] du permis de conduire A est en lien de causalité avec son dommage.

Le jugement doit donc être confirmé sur l'étendue du droit à indemnisation.

Sur le préjudice corporel

Seuls ont en discussion devant la cour les postes d'incidence professionnelle et de préjudice d'agrément.

L'expert le docteur [I], indique dans son rapport en date du 16 décembre 2014 que M. [O] a présenté une fracture multi-fragmentaire de la diaphyse fémorale droite comminutive ouverte, une fracture du col du fémur homolatérale pertrochantérienne, une plaie à la face antérieure de la rotule droite avec atteinte des fibres superficielles du tendon quadricipital et dilacération des fibres du vaste interne, un syndrome secondaire de loge post-traumatique de la jambe gauche sans fracture associée, une atteinte tronculaire du sciatique droit au niveau de la cuisse et des sciatiques poplités externe et interne au niveau de la jambe gauche et une contusion pancréatique et qu'il conserve comme séquelles une douleur et une restriction de la mobilité de la hanche droite, une restriction d'amplitude sans douleur majeure de la hanche gauche, une légère laxité antéro-postérieure du genou droit, un déficit d'extension du releveur de l'hallux gauche, des troubles sensitifs à la piqûre à la cuisse droite et au pied gauche, une claudication alternative douloureuse et des cicatrices.

Il conclut notamment à :

- une consolidation au 17 décembre 2013,

- un déficit fonctionnel permanent de 30 %,

- un préjudice d'agrément pour la pratique du football,

- une inaptitude à la reprise de l'activité professionnelle antérieure ; un aménagement de poste en lien avec le sinistre est déclaré.

L'évaluation des postes d'incidence professionnelle et de préjudice d'agrément de M. [O] sera faite sur la base de ce rapport dont les conclusions ne sont pas contestées.

- Incidence professionnelle

Ce chef de dommage a pour objet d'indemniser non la perte de revenus liée à l'invalidité permanente de la victime mais les incidences périphériques du dommage touchant à la sphère professionnelle en raison, notamment, de sa dévalorisation sur le marché du travail, de sa perte d'une chance professionnelle ou de l'augmentation de la pénibilité de l'emploi qu'elle occupe imputable au dommage, ou encore l'obligation de devoir abandonner la profession exercée au profit d'une autre en raison de la survenance de son handicap.

Il est indiqué dans le rapport d'expertise et il n'est pas dénié par la société MATMUT que M. [O] était au jour de l'accident employé par la métropole Aix-Marseille Provence en tant que cantonnier éboueur ripeur ; si M. [O] a indiqué à l'expert qu'il avait bénéficié d'un aménagement de poste et si la nature de ce poste n'est pas connue, M. [O] a dû abandonner les fonctions qu'il exerçait lors de l'accident et il est certain que compte tenu de ses séquelles il va subir une pénibilité accrue dans de nombreux types d'emplois ce qui va entraîner sa dévalorisation sur le marché du travail ; la communication des pièces sollicitées par la société MATMUT n'est donc pas nécessaire et ce chef de préjudice doit être évalué à 30 000 €.

Compte tenu du taux de réduction du droit à indemnisation la société MATMUT est tenue à hauteur de la somme de 15 000 € qui revient à M. [O].

- Préjudice d'agrément/

Ce poste de dommage vise exclusivement l'impossibilité ou la difficulté pour la victime à poursuivre la pratique d'une activité spécifique sportive ou de loisir.

M. [O] justifie par l'attestation de M. [E] [Y], président du Groupe sportif Mingallon, avoir signé une licence pour la saison 2011-2012 pour intégrer l'équipe fanion évoluant en CFA et n'avoir pu intégrer l'équipe en raison de l'accident.

Il n'y a pas lieu en cet état d'ordonner la communication des pièces supplémentaires sollicitée par la société MATMUT.

L'expert retient un préjudice d'agrément pour la pratique du football.

Ce poste de dommage justifie l'allocation d'une indemnité de 8 000 € ; compte tenu du taux de réduction du droit à indemnisation la société MATMUT doit verser à ce titre la somme de 4 000 €.

Les intérêts des sommes allouées par le présent arrêt courront au taux légal à compter du jugement du 22 février 2018 à hauteur de 7 500 € et à compter de ce jour à hauteur de ce jour à hauteur de 11 500 € en application de l'article 1231-7 du code civil, M. [O] ne rapportant pas la preuve d'un préjudice supplémentaire non indemnisé, avec capitalisation annuelle conformément à l'article 1343-2 du même code.

L'arrêt n'étant pas susceptible d'un recours suspensif, la demande d'exécution provisoire est sans objet.

M. [O] ne peut exiger, en cas de recours à l'exécution forcée pour obtenir paiement des sommes allouées, que les frais de recouvrement et d'encaissement visés à l'article A 444-32 de l'arrêté du 26 février 2016 fixant les tarifs réglementés des huissiers de justice en matière civile et commerciale soient supportés par les débiteurs, ce texte les mettant à la charge du créancier.

Sur les demandes annexes

Les dispositions du jugement relatives aux dépens et aux frais irrépétibles doivent être confirmées.

La société MATMUT qui succombe partiellement dans ses prétentions et qui est tenue à indemnisation supportera la charge des dépens d'appel.

L'équité commande d'allouer à M. [O] une indemnité de 1 200 € au titre des frais irrépétibles exposés devant la cour.

PAR CES MOTIFS

La Cour,

- Dit n'y avoir lieu d'ordonner la réouverture des débats ni la production de pièces,

- Confirme le jugement,

hormis sur l'évaluation de l'incidence professionnelle et du préjudice d'agrément,

Statuant à nouveau sur les points infirmés et y ajoutant,

- Fixe l'incidence professionnelle subie par M. [I] [O] à la somme de 30 000 €,

- Fixe le préjudice d'agrément supporté par M. [I] [O] à la somme de 8 000 €,

- Condamne la société MATMUT à payer à M. [I] [O] :

*19 000 € au titre de l'incidence professionnelle et du préjudice d'agrément consécutifs à l'accident du 14 juin 2011, avec les intérêts au taux légal à hauteur de 7 500 € à compter du 22 février 2018 et à compter de ce jour 4 juillet 2019 à hauteur de 11 500 € et capitalisation annuelle à compter de ces mêmes dates conformément à l'article 1343-2 du même code,

* 1 200 € sur le fondement de l'article 700 du code de procédure civile en cause d'appel,

- Déboute M. [I] [O] de sa demande au titre des droits d'encaissement et de recouvrement prévus à à l'article A 444-32 de l'arrêté du 26 février 2016,

- Condamne la société MATMUT aux dépens d'appel.

Le greffier Le président


Synthèse
Tribunal : Cour d'appel d'Aix-en-Provence
Formation : Chambre 1-6
Numéro d'arrêt : 18/08208
Date de la décision : 04/07/2019

Références :

Cour d'appel d'Aix-en-Provence 10, arrêt n°18/08208 : Confirme la décision déférée dans toutes ses dispositions, à l'égard de toutes les parties au recours


Origine de la décision
Date de l'import : 27/03/2024
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.appel;arret;2019-07-04;18.08208 ?
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