COUR D'APPEL D'AIX-EN-PROVENCE
Chambre 1-9
ARRÊT AU FOND
DU 03 JUILLET 2019
N° 2019/ 546
Rôle N° RG 18/12123 - N° Portalis DBVB-V-B7C-BCZXJ
[U] [H] épouse [X]
C/
SASU FRANFINANCE LOCATION
Copie exécutoire délivrée
le :
à :
Me MUSACCHIA
Me MAGNAN
Décision déférée à la Cour :
Jugement du Juge de l'exécution de DRAGUIGNAN en date du 03 Juillet 2018 enregistré au répertoire général sous le n° 17/08671.
APPELANTE
Madame [U] [H] épouse [X]
née le [Date naissance 1] 1963 à [Localité 1]
de nationalité Française, demeurant [Adresse 1]
représentée par Me Elie MUSACCHIA, avocat au barreau d'AIX-EN-PROVENCE, assisté de Me Emmanuel BONNEMAIN de la SELARL CABINET BONNEMAIN, avocat au barreau de DRAGUIGNAN, plaidant
INTIMEE
SASU FRANFINANCE LOCATION prise en la personne de son représentant légal en exercice domicilié en cette qualité audit siège, demeurant [Adresse 2]
représentée par Me Joseph MAGNAN de la SCP MAGNAN PAUL MAGNAN JOSEPH, avocat au barreau d'AIX-EN-PROVENCE, assisté de Me VAUTRIN-BURG, avocat au barreau de PARIS, plaidant
*-*-*-*-*
COMPOSITION DE LA COUR
L'affaire a été débattue le 16 Mai 2019 en audience publique. Conformément à l'article 785 du code de procédure civile, Dominique TATOUEIX, Magistrat honoraire a fait un rapport oral de l'affaire à l'audience avant les plaidoiries.
La Cour était composée de :
Madame Evelyne THOMASSIN, Président
Madame Pascale POCHIC, Conseiller
Monsieur Dominique TATOUEIX, Magistrat honoraire
qui en ont délibéré.
Greffier lors des débats : Madame Ingrid LAVIGNAC.
Les parties ont été avisées que le prononcé de la décision aurait lieu par mise à disposition au greffe le 03 Juillet 2019.
ARRÊT
Contradictoire,
Prononcé par mise à disposition au greffe le 03 Juillet 2019,
Signé par Madame Evelyne THOMASSIN, Président et Madame Ingrid LAVIGNAC, greffier auquel la minute de la décision a été remise par le magistrat signataire.
***
FAITS ET PROCÉDURE
Mme [U] [H] épouse [X], commerçante, a été placée en liquidation judiciaire par jugement du tribunal de commerce de Senlis en date du 22 juin 1995 puis par jugement du 27 juin 1996, ce même tribunal a prononcé la clôture des opérations de liquidation judiciaire pour insuffisance d'actifs.
Par jugement du 14 décembre 1995, le tribunal de grande instance de Cambrai avait fixé à la somme de 248 890,54 € le montant de la créance de la société FRANFINANCE à l'encontre de Mme [X] et de son mari puis complété sa décision, par jugement du 30 mai 1996, en ce que celle-ci avait omis de statuer « sur la demande de condamnation dirigée à l'encontre de Madame [X] en sa qualité de co-empruntrice.
Suivant procès verbal en date du 27 octobre 2017 délivré entre les mains de la Banque Postale, la société FRANFINANCE a diligenté une procédure de saisie-attribution à l'encontre de Mme [X] pour paiement d'une somme en principal de 49 660,55 €, en vertu du jugement du tribunal de Grande instance de Cambrai du 14 décembre 1995.
Par exploit en date du 6 décembre 2017, Mme [U] [H] épouse [X] a fait assigner la société FRANFINANCE devant le juge de l'exécution du tribunal de grande instance de Draguignan aux fins de voir donner mainlevée de la saisie attribution et voir condamner la société FRANFINANCE au paiement d'une somme de 1500 € sur le fondement de l'article 700 du code de procédure civile ainsi qu'aux dépens.
Par jugement du 3 juillet 2018 dont appel du 18 juillet 2018, le juge de l'exécution du tribunal de grande instance de Draguignan a débouté Mme [X] de l'ensemble de ses demandes et l'a condamnée au paiement d'une somme de 1000 € sur le fondement de l'article 700 du code de procédure civile ainsi qu'aux dépens.
Le juge de l'exécution énonce en ses motifs :
- Mme [X] ne justifie pas de l'existence de la procédure de liquidation judiciaire alléguée, seule une page du jugement du 27 juin 1996 prononçant la clôture des opérations de liquidation judiciaire pour insuffisance d'actifs étant versée, et à titre surabondant, le jugement du tribunal de Grande instance de Cambrai étant postérieur à la liquidation judiciaire de Mme [X], il lui appartenait d'indiquer cette occurrence dans le cadre de cette procédure, de sorte que Mme [X] ne peut arguer de ce que la défenderesse n'aurait pas déclaré sa créance puisqu'il n'est pas démontré que cette dernière ait bénéficié de l'extension de la procédure ouverte au bénéfice de son époux, ni que le jugement d'ouverture ait été régulièrement publié au BODACC,
- le délai de prescription du titre exécutoire litigieux expirait le 30 mai 2026, de sorte que la saisie attribution du 27 octobre 2017 n'était pas prescrite,
- les délais de dénonciation de la saisie ont été parfaitement respectés.
Vu les dernières conclusions déposées le 21 décembre 2018 par Mme [U] [H] épouse [X], appelante, aux fins de voir :
- Constater que la société FRANFINANCE ne justifie pas avoir déclaré sa créance au passif de la procédure de liquidation judiciaire de Mme [X].
- Constater l'extinction de la créance de la société FRANFINANCE à l'encontre de la concluante faute de déclaration à son passif ;
A titre surabondant, vu le jugement de clôture de la procédure de liquidation judiciaire de Madame [X] pour insuffisance d'actifs,
- Constater l'irrecevabilité des poursuites individuelles engagées par la société FRANFINANCE à l'encontre de Madame [X].
Par suite,
- Réformer en toutes ses dispositions le jugement rendu le 03 juillet 2018 par le Juge de l'exécution du Tribunal de Grande Instance de DRAGUIGNAN.
- Dire et juger nulle la saisie attribution pratiquée le 27 octobre 2017 au préjudice de la concluante ;
- Ordonner à l'intimée restitution des sommes versées en exécution de ladite saisie attribution et du caractère exécutoire du jugement dont appel.
- Condamner la société FRANFINANCE au paiement de la somme de 5000 € au titre de l'article 700 du code de procédure civile
- Condamner la société FRANFINANCE au paiement des entiers dépens, ceux d'appel distrait au profit de Me Elie MUSACCHIA avocat sous ses offres et affirmations de Droit.
Mme [U] [H] épouse [X] fait valoir que la législation antérieure reste applicable aux procédures ouvertes avant la modification de la loi et la société FRANFINANCE n'ayant jamais déclaré quelque créance que ce soit au passif, ni formé aucune demande de relevé de forclusion dans le délai d'un an à compter de la date du jugement, sa créance est éteinte et à supposer qu'elle ne le soit pas, la société FRANFINANCE a de toute façon perdu le droit de reprendre ses poursuites individuelles sous l'effet du jugement de clôture.
Vu les dernières conclusions déposées le 15 mai 2019 par la SASU FRANFINANCE LOCATION, intimée, aux fins de voir :
- Dire et juger que la société FRANF1NANCE LOCATION vient valablement aux droits de la société FRANFINANCE EQUIPEMENT,
- Dire et juger qu'en l'état des pièces qu'elle communique, Madame [X] ne rapporte pas la preuve qui lui incombe au regard de l'article 1353 du code civil de l'extinction de la créance de la société FRANFINANCE LOCATION.
- Débouter Madame [X] de l'ensemble de ses demandes, fins et conclusions,
- Confirmer en toutes ses dispositions le jugement du juge de l'exécution en date du 3 juillet 2018 qui a validé la saisie-attribution du 27 octobre 2017 diligentée par la société FRANFINANCE LOCATION sur les comptes bancaires de Madame [X],
Y ajoutant
- Condamner Madame [X] à verser à la société FRANFINANCE LOCATION la somme de 2.500 euros sur le fondement de l'article 700 du CPC pour la présente procédure d'appel ;
- Condamner Madame [X] aux entiers dépens de première instance et d'appel.
La SASU FRANFINANCE LOCATION fait valoir que Mme [X] ne justifie pas de la publication au BODACC des jugements d'ouverture et de clôture de sa liquidation judiciaire.
A l'audience, avant l'ouverture des débats, à la demande de la société FRANFINANCE LOCATION et avec l'accord exprimé oralement par la partie adverse, l'ordonnance de clôture signée le 23 avril 2019 a été révoquée et la procédure a été de nouveau clôturée par voie de mention au dossier, ce dont les parties ont été avisées verbalement sur le champ ;
MOTIFS DE LA DÉCISION
Attendu que Mme [X] argue de ce que la société FRANFINANCE, qui avait nécessairement connaissance de la procédure de liquidation judiciaire ouverte à son encontre puisque le jugement du tribunal de grande instance de Cambrai du 14 décembre 1995 fixe sa créance au passif des époux [X] et que rien ne l'empêchait de lever un extrait K bis entre ce jugement et le jugement rectificatif du 30 mai 1996, n'ayant pas déclaré sa créance, celle-ci est désormais éteinte par voie de forclusion, la société FRANFINANCE ne pouvant plus en outre former une demande de relevé de forclusion dans la mesure où elle n'était recevable à le faire que dans le délai d'un an suivant le jugement d'ouverture, tout comme elle se trouve privée de la possibilité d'une reprise des poursuites individuelles par l'effet du jugement de clôture de la procédure de liquidation judiciaire pour insuffisance d'actif ;
Mais attendu que conformément aux dispositions de la loi du 25 janvier 1985, seules effectivement applicables en l'espèce, en l'absence de publication du jugement d'ouverture au BODACC, le délai pour déclarer la créance n'a pas couru, l'éventuelle publication du jugement de liquidation étant en outre sans influence sur le délai de déclaration de créances, de sorte que faute par Mme [X] de justifier de la publication du jugement d'ouverture de la procédure de redressement judiciaire à son encontre, la société FRANFINANCE n'encourt aucune forclusion et par voie de conséquence, ni l'extinction de sa créance telle que prévue à l'article 53 de la loi du 25 janvier 1985 ;
Que la société FRANFINANCE relève par ailleurs à bon droit que Mme [X] ne produit toujours pas la requête aux fins de dispense de vérification du passif chirographaire, de sorte qu'il n'est pas possible de savoir si la créance de la société FRANFINANCE figure sur l'état des créances que le mandataire a été autorisé à ne pas vérifier et si elle a été admise ;
Que de même, Mme [X] ne peut soutenir qu'il appartenait à la société FRANFINANCE de déduire de la procédure collective ouverte contre M. [X] aux termes de laquelle le tribunal de grande instance de Cambrai a fixé sa créance au passif des époux [X], l'existence d'une procédure collective distincte ouverte à l'encontre de Mme [X], la créance n'étant en effet fixée au passif des époux qu'en ce que la déclaration de créance à l'encontre de l'époux a effet à l'encontre du patrimoine des époux, par extension ;
Qu'en conséquence, le moyen tiré de l'extinction de la créance de la société FRANFINANCE ne peut prospérer ;
Attendu par ailleurs que si conformément à l'article 169 de la loi du 25 janvier 1985 le jugement de clôture de liquidation judiciaire pour insuffisance d'actif ne fait pas recouvrer aux créanciers l'exercice individuel de leurs actions contre le débiteur, par exception, les créanciers peuvent recouvrer ce droit de poursuite en cas de fraude du débiteur à l'égard des créanciers ;
Et attendu qu'en s'abstenant lors de l'action en paiement initiée par la société FRANFINANCE en 1992 d'informer son créancier ainsi que la juridiction saisie, de la procédure collective ouverte à son encontre, Mme [X], qui est encore restée taisante lorsque la société FRANFINANCE a mis en 'uvre à son encontre une procédure de saisie vente en février 1998, s'est rendue coupable d'une fraude au sens de l'article 169 de la loi du 25 janvier 1985, de sorte que le moyen tiré de ce que la société FRANFINANCE aurait de toute façon perdu le droit de reprendre ses poursuites individuelles par l'effet l'effet du jugement de clôture, ne peut davantage prospérer ;
Que le jugement dont appel doit être en conséquence confirmé en toutes ses dispositions ;
PAR CES MOTIFS
La Cour,
Confirme le jugement dont appel en toutes ses dispositions ;
Y ajoutant,
Vu l'article 700 du code de procédure civile,
Condamne Mme [U] [H] épouse [X] à payer à la SASU FRANFINANCE LOCATION la somme de 2000 € (deux mille euros) ;
Déboute les parties de leurs demandes autres ou plus amples ;
Condamne Mme [U] [H] épouse [X] aux dépens qui seront recouvrés conformément à l'article 699 du code de procédure civile.
LE GREFFIER LE PRÉSIDENT