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02/07/2019 | FRANCE | N°17/19328

France | France, Cour d'appel d'Aix-en-Provence, Chambre 1-1, 02 juillet 2019, 17/19328


COUR D'APPEL D'AIX-EN-PROVENCE

Chambre 1-1



ARRÊT AU FOND

DU 02 JUILLET 2019

A.D

N° 2019/













N° RG 17/19328 - N° Portalis DBVB-V-B7B-BBMGM







SARL TANKRED APS





C/



DIRECTION GENERALE DES FINANCES PUBLIQUES



























Copie exécutoire délivrée

le :

à :Me Cherfils

Me Rosenfeld







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Décision déférée à la Cour :



Jugement du Tribunal de Grande Instance de NICE en date du 28 Septembre 2017 enregistré(e) au répertoire général sous le n° 16/00704.





APPELANTE



SARL TANKRED APS

prise en la personne de son représentant légal en exercice dont le siège social est [Adress...

COUR D'APPEL D'AIX-EN-PROVENCE

Chambre 1-1

ARRÊT AU FOND

DU 02 JUILLET 2019

A.D

N° 2019/

N° RG 17/19328 - N° Portalis DBVB-V-B7B-BBMGM

SARL TANKRED APS

C/

DIRECTION GENERALE DES FINANCES PUBLIQUES

Copie exécutoire délivrée

le :

à :Me Cherfils

Me Rosenfeld

Décision déférée à la Cour :

Jugement du Tribunal de Grande Instance de NICE en date du 28 Septembre 2017 enregistré(e) au répertoire général sous le n° 16/00704.

APPELANTE

SARL TANKRED APS

prise en la personne de son représentant légal en exercice dont le siège social est [Adresse 3] (DANEMARK)

représentée par Me Romain CHERFILS de la SELARL LEXAVOUE BOULAN CHERFILS IMPERATORE, avocat au barreau d'AIX-EN-PROVENCE,

assistée par Me Aurélien GAZEL, avocat au barreau de PARIS et Me Maximilien SCHMITT, avocat au barreau de PARIS, plaidant

INTIMEE

DIRECTION GENERALE DES FINANCES PUBLIQUES

poursuites et diligences du Directeur Régional des Finances Publiques de Provence-Alpes- Côte d'Azur et du département des Bouches du Rhone, qui élit domicile en ses bureaux, [Adresse 4],

représentée par Me Virginie ROSENFELD de la SCP F. ROSENFELD- G. ROSENFELD & V. ROSENFELD, avocat au barreau de MARSEILLE, plaidant

*-*-*-*-*

COMPOSITION DE LA COUR

En application des dispositions des articles 785,786 et 907 du code de procédure civile, l'affaire a été débattue le 29 Mai 2019, en audience publique, les avocats ne s'y étant pas opposés, devant Madame Anne DAMPFHOFFER, Conseiller, chargé du rapport, qui a fait un rapport oral à l'audience, avant les plaidoiries.

Ce magistrat a rendu compte des plaidoiries dans le délibéré de la Cour, composée de :

Madame Anne VIDAL, Présidente

Madame Anne DAMPFHOFFER, Conseiller

Madame Laetitia VIGNON, Conseiller

Greffier lors des débats : Madame Patricia POGGI.

Les parties ont été avisées que le prononcé de la décision aurait lieu par mise à disposition au greffe le 02 Juillet 2019.

ARRÊT

Contradictoire,

Prononcé par mise à disposition au greffe le 02 Juillet 2019

Signé par Madame Anne VIDAL, Présidente et Madame Patricia POGGI, Greffier, auquel la minute de la décision a été remise par le magistrat signataire.

***

Exposé :

Par jugement contradictoire du 28 septembre 2017, le tribunal de grande instance de Nice, saisi d'un litige relatif à l'exonération de la taxe de 3% prévue par le code général des impôts a rejeté les demandes de la société Tankred APS visant à contester le redressement fiscal dont elle a fait l'objet et l'a condamnée aux dépens.

La décision retient essentiellement que si l'administration a procédé à une vérification de la comptabilité de la société, les rappels opérés en matière de droits d'enregistrement sont néanmoins indépendants des éléments comptables et que le fait que la proposition de rectification soit signée par les mêmes fonctionnaires que ceux ayant effectué la vérification de comptabilité est sans incidence sur la régularité de la procédure de sorte qu' il n'y avait pas lieu à saisir l'interlocuteur départemental ; que la société ne satisfait pas aux exigences légales en ce qui concerne la preuve de ses actionnaires et de la détention prétendue des actions par M [Z] et que l'évaluation retenue par l'administration est justifiée.

La société Tankred APS a relevé appel de cette décision le 25 octobre 2017.

Elle a conclu, le 24 avril 2019, en demandant de :

- à titre principal constater l'irrégularité de la procédure de redressement,

- prononcer l'annulation des redressements opérés et ordonner le remboursement des sommes mises en recouvrement et payées, soit 673'812€, ainsi que le paiement d'intérêts moratoires décomptés à partir du blocage des fonds dans l'étude notariale de la société Colas, soit à compter du 3 août 2012,

- à titre subsidiaire, constater qu'il est prouvé que M. [Z] est le seul actionnaire de la société au 1er janvier 2009, 2010, 2011 et 2012

- et en conséquence, prononcer l'annulation des redressements opérés et ordonner les remboursements ci-dessus déjà sollicités,

- à titre très subsidiaire, surseoir à statuer et poser à la Cour de justice de l'union européenne la question suivante : 'les articles 49 et 63 du traité sur le fonctionnement de l'union européenne tels qu'interprétés notamment par la Cour de justice de l'union dans son arrêt Elisa font-ils obstacle à ce que l'administration fiscale puisse exiger systématiquement, pour faire la preuve de l'identité d'un actionnaire d'une société résidente d'un État membre aux fins de l'exonération de la taxe prévue aux articles 990 et suivants du code général des impôts, la présentation d'un document retraçant les flux financiers ayant trait à l'acquisition des titres de la société par l'actionnaire et rejette systématiquement tout élément de preuve émanant de la société elle-même, y compris ceux certifiés par des tiers à la société, ou postérieurs au fait générateur de la taxe ou non conformes aux règles de formalisme françaises qui n'existent pas dans la législation de l'État membre de la société étrangère, rendant par là même impossible la preuve réclamée lorsqu'il ne subsiste aucune trace des flux financiers d'acquisition '',

- à titre infiniment subsidiaire, constater que la valorisation de la villa proposée est erronée et fixer sa valeur à 1'800'000 € en 2009, 2010 et 2011 et 3'750'000 € en 2012,

- dire en conséquence que les redressements opérés auraient dû être faits sur cette base,

- en tout état de cause, rejeter les demandes de l'administration fiscale et la condamner à lui payer la somme de 10'000 € par application de l'article 700 du code de procédure civile, ainsi qu'aux dépens.

La direction générale des finances publiques a conclu le 9 avril 2018, en demandant de confirmer le jugement et de lui allouer la somme de 3000 € par application de l'article 700 du code de procédure civile, ainsi que de condamner l'appelante aux dépens.

L'ordonnance de clôture a été prise le 14 mai 2019.

Motifs

Attendu que le litige est relatif à l'application des articles 990 D et suivants du code général des impôts.

Attendu que la société Tankred APS est une société de droit danois dont le capital est divisé en 170 parts sociales et dont le siège social est à [Localité 2] ; que par acte notarié du 24 novembre 2006, publié le 16 janvier 2007, elle a acheté au prix de 1'800'000 € une propriété dénommée [Adresse 7] ; que l'immeuble est construit sur un terrain de 1780 m² et est classé en catégorie 4 ; que la villa est d'une superficie utile de 461 m², comporte 12 pièces, avec un étage sur rez-de-chaussée et sous-sol ; qu'au titre des dépendances, le bien comporte un parking, une piscine et une maison de gardien sur deux niveaux.

Attendu que la villa ainsi que la maison de gardien ont fait l'objet de travaux de rénovation en 2008 pour un montant de travaux de 1'425'000 € ; que le bien a été cédé le 14 août 2012 pour la somme de 3'750'000 €;

Attendu que de 2007 à 2011, le bien a été déclaré à la valeur de 1'800'000 € et qu'en 2012, il a été déclaré pour son prix de vente; que les déclarations faites au titre de la taxe de 3 % selon le modèle 2746 font mention de l'existence d'un associé unique en la personne de M. [Z], ressortissant russe ; que l'administration a demandé des justificatifs de cette situation ; qu'il lui a été répondu que M. [Z] était bien le seul actionnaire de la société et qu'il a alors été produit les déclarations fiscales de la société, des mandats pour ses assemblées générales et trois actes de cessions des actions; que l'administration a fait une proposition de rectification au titre des années 2009 à 2012 au motif que les informations portées dans les déclarations étaient erronées, considérant, à partir de renseignements pris sur le site Orbis, que l'associé était depuis 2009 la société Catalonia consulting .

Attendu que la valeur vénale était alors retenue pour 4'007'679 €, mais qu'après saisine de la commission de conciliation la valeur a été ramenée à la somme de 3'794'000 €; qu'enfin, la saisine de l'interlocuteur départemental a été refusée comme réservée aux procédures de contrôle sur place, effectuées dans le cadre des articles L. 12 et 13 du livre de procédure fiscale.

Sur le premier grief tiré de la régularité de la procédure :

Attendu que la société Tankred a été informée de la mise en oeuvre d'une procédure de vérification de comptabilité par un avis de vérification numéro 3927 du 11 avril 2012 ; que cette procédure concernait les déclarations fiscales et opérations des années 2009 et 2010;

Attendu que ces opérations se sont déroulées sur place entre le 29 mai 2012 et le 9 juillet 2012 et se sont terminées par une absence de réhaussement .

Attendu par ailleurs, que l'administration a effectué un contrôle sur pièces de la taxe de 3 % sans aucunement asseoir ce contrôle sur les éléments comptables de la société et que cette procédure a fait l'objet d'une proposition de rectification numéro 2120, sans lien avec la vérification de comptabilité ; que cette vérification concerne les années 2009 à 2012.

Attendu qu' ainsi, la procédure relative à la taxe de 3 %, qui en l'espèce, concerne des droits d'enregistrements, lesquels ne sont pas dus à l'occasion de l'exercice de l'activité professionnelle, a été régulièrement menée par l'administration en dehors de la procédure de vérification de comptabilité et par un contrôle sur pièces, la concommitance dans le temps de ces deux procédures ne pouvant dans ces conditions s'assimiler à une confusion des procédures fiscales ni avoir causé un préjudice au contribuable dont il sera par ailleurs retenu ci- dessous que ses droits n'ont pas non plus été enfreints.

Attendu que la procédure ne peut donc être critiquée de ce chef.

Attendu encore que le seul fait que l'avis de vérification de comptabilité et la demande d'information ainsi que la proposition de rectification relative à la taxe de 3 % ont été signés par des fonctionnaires identiques est sans incidence sur la régularité de la procédure ;

Qu'enfin, le fait que la société n'ait pas reçu une pièce de procédure relative à la vérification de comptabilité ( en l'espèce la lettre avertissant de l'absence de réhaussement, l'administration ne démontrant en effet pas son envoi en recommandé) est également sans incidence sur la régularité de la procédure, distincte, de rectification relative à la taxe de 3 %.

Sur le refus de la saisine de l'interlocuteur départemental :

Attendu que la faculté de solliciter la saisine de l'interlocuteur départemental est réservée aux procédures de contrôle sur place effectuées dans le cadre des articles L 12 et L 13 du code des procédures fiscales et qu'elle n'est pas possible dans le cas des procédures de redressement avec contrôle sur pièces ; que tel est le cas de la procédure de redressement relative au rappel de taxe de 3 % dont il été retenu ci-dessus qu'elle avait été menée indépendamment de celle de vérification sur place et qu'ainsi, l'appelant ne peut critiquer la position de l'administration qui a refusé la saisine de l'interlocuteur départemental.

Sur le bien-fondé de l'exonération de la taxe de 3 % en application des articles d et e de l'article 990 E 3°:

Attendu sur le bien-fondé de l'exonération de la taxe de 3 % en application des articles d et e de l'article 990 E 3°, que l'administration dispose en vertu de l'article L 10 du livre des procédures fiscales du droit de contrôler les déclarations déposées pour s'assurer de leur caractère complet, exact et sincère et qu'il est donc exigé par les textes spécifiques sus-cités, notamment que l'identité des associés soit justifiée et que soit établi le nombre d'actions, de parts ou de droits détenus par chacun.

Qu'à cet égard, les textes sont dérogatoires comme permettant au contribuable de bénéficier d'une exonéraion fiscale; qu'ils sont donc d'interprétation stricte et que ne sont notamment pas tenus pour des éléments utiles de preuve les affirmations ou documents univoques tels que par exemple ceux émanant de la société elle-même et confortés par ses seuls administrateurs.

Attendu que l'appréciation au fond du litige exige par suite que soient appréciés l'ensemble des éléments versés par la société au soutien de ses prétentions contre l'administration.

Attendu que lors de ses discussions avec l'administration elle a ainsi produit les documents relatifs à des cessions de parts dont il n'est pas contesté :

- qu'ils ont été établis entre le 29 octobre 2008 et le 14 novembre 2008,

- qu'ils consistent dans des actes sous seing privé,

- et qu'ils relatent trois transactions de 170 actions initiées par M. [Z] et revenant finalement à M. [Z] en un peu plus de deux semaines, les société Washington Partners et Catalonia consulting étant concernées par les transactions intermédiaires;

Or, attendu qu'au moins en ce qui concerne les ventes du 29 octobre et du 14 novembre 2008 elles n'ont été accompagnées d'aucun justificatif de la réalité des flux financiers y correspondant et qu'elles ne sont donc pas suffisantes pour prouver la propriété des parts sociales telle que présentement revendiquée au seul nom de M.[Z] depuis le 31 décembre 2008 ;

Attendu, s'agissant des éléments versés relativement au financement de l'achat immobilier, que l'acte notarié du 24 novembre 2006 indique que la société a payé son acquisition par un prêt immobilier contracté auprès du crédit foncier de Monaco à hauteur de 1'260'000€ et par ses deniers sociaux à hauteur de 540'000 €, mais que cette information est en contradiction avec l'argument de l'appelante selon lequel la villa a été financée par un prêt de M.[Z] à la société d'un montant de 2 millions d'euros le 10 novembre 2006, étant de surcroît observé qu'aucune indication n'est donnée dans l'acte sur la destination de ce prêt, qu'il s'agit d'un acte sous seing privé non enregistré par aucune autorité et que les tirages dont il est justifié permettent, en toute hypothèse, de retenir que seul celui de 660 000euros fait en novembre 2006 pourrait y être relié.

Attendu qu'il est, en outre, produit :

- le registre des actions interne à la société, mais que l'on retiendra :

*que pour les années concernées il n'a fait l'objet d'aucune certification ou enregistrement auprès des autorités danoises,

* que sa certification par un notaire ne vise que la conformité de la copie produite par rapport au document original sans qu'il soit démontré qu'elle ait été donnée au vu d'un contrôle de l'exactitude des informations y portées;

- un avis juridique sur le droit des sociétés

*qui expose qu'au moins pour les années en litige il n'existait pas d'obligation d'enregistrement du registre des actions par une autorité publique,

* qui de surcroît, pour affirmer que M [Z] est l'unique actionnaire ne se fonde que sur le registre des titres,

* qui ne présente aucun des autres documents examinés comme contenant d'information sur la détention du capital ,

* qui précise, certes, que les déclarations de revenus de la société devaient inclure les informations relatives aux actionnaires détenant 5 % du capital social représentant au moins 5 % de l'ensemble des droits de vote, mais que la force probante de ces déclarations fiscales telles que présentement versées aux débats ne pourra pas être considérée pour les motifs développés plus avant ;

- l'attestation d'un cabinet d'audit danois agréé par l'État

*qui déclare avoir fait ses audits annuels pour la période couvrant les exercices concernés par le litige et qui conclut que M [Z] est le seul propriétaire de la société depuis le 31 décembre 2008,

*qui toutefois, ne donne aucun élément sur la consistance et la portée exacte du contrôle des comptes ainsi analysés, dont on ne sait s'ils ont pu être confrontés, notamment aux mouvements financiers réels, de sorte qu'il n'est pas établi que la conclusion en résultant procède de l'étude de documents autres que des documents univoques consistant dans les seules déclarations ou écritures de la société, étant en outre relevé que la conclusion à laquelle cette attestation parvient est émise avec la plus grande prudence ainsi qu'il résulte de sa rédaction in fine, de surcroît au mode conditionnel : 'Lors de l'audit nous n'avons trouvé aucun élément laissant à penser que M [Z] ne serait pas le propriétaire légitime de cette société';

- l'attestation des autorités fiscales et douanières danoises dont il résulte que M.[Z] s'est déclaré dans 6 déclarations et à compter du 1 janvier 2008 comme l'actionnaire de la société, mais dont on retiendra :

*que ce document, comme les déclarations de revenus fournies pour les exercices 2009, 2010 et 2011, ne sont pas des documents accessibles au public ;

*que ces déclarations fiscales, qui sont produites pour ces trois exercices, certes ont été reçues par les autorités danoises en ce qu'elles portent leur cachet, mais ne procèdent en toute hypothèse que de la déclaration unilatérale de la société, sans certification, ni authentification d'une autorité publique, la seule réception de cette déclaration ne pouvant valoir au titre d'une telle formalité ;

*qu'en outre, cette attestation contredit la position de la société, qui prétend qu'au moins jusqu'à la fin de l'année 2008, son actionnaire était la société Catalonia Consulting, puisqu'elle fixe la date de l'actionnariat plein de M [Z] au 1er janvier 2008, étant relevé que la déclaration pour cette année 2008 n'est pas fournie;

- enfin, un document de la direction danoise du commerce, qui certes, émane d'une autorité officielle, et qui est public démontrant qu'il a été procédé à l'enregistrement de la société, mais :

*qui est en date du 18 avril 2019, et qui curieusement n'a jamais été précédemment produit, ni même invoqué,

* et dont on relèvera :

1er avril 2009, mais aussi M [U],

er avril 2009, sans en outre qu'il puisse être sérieusement envisagé que , pour ce type de document, il s'agirait seulement d'une seule date d'enregistrement, sans mention de la date de prise d'effet.

Attendu, en définitive, que les éléments produits par la société appelante , tels que ci-dessus analysés, procèdent :

- soit d'information ou de documents univoques lesquels n'ont pas été publiés, ne sont confortés par aucun élément objectif extérieur aux déclarations ou écritures de la société elle-même ou de ses membres, et également ne sont certifiés par aucune autorité ayant un pouvoir d'authentification de la situation déclarée de ce chef,

- soit d'autorités officielles, mais dont le contenu est alors porteur de contradictions non seulement avec les prétentions de la société, mais aussi entre eux, de telle sorte qu'ils ne seront pas considérés comme ayant une force probante suffisante des allégations de l'appelante et comme de nature à lever l'opacité reprochée par l'administration, laquelle est, en revanche, en droit, vu le caractère dérogatoire des dispositions dont le bénéfice est revendiqué par la société Tankred, d'exiger la production d'éléments faisant une preuve claire et cohérente de la composition du capital, étant encore de ce chef considéré que, les cessions d'actions s'accompagnant nécessairement de mouvements financiers dont la preuve peut-être rapportée, le contribuable ne se trouve pas dans l'impossibilité de verser les éléments de nature à justifier de l'exonération fiscale à laquelle il prétend.

Attendu, enfin, qu'il ne peut être tiré de moyen utile des incertitudes et approximations alléguées relativement aux renseignements délivrés à l'administration par l'organisme Orbis dès lors qu'il appartient au contribuable de satisfaire à la preuve qui lui incombe lorsque l'administration lui demande de justifier de la détention de son capital social pour bénéficier de l'exonération fiscale de la taxe de 3 %.

Attendu par suite, et vu les observations ci-dessus sur l'absence de valeur probante des éléments versés, qu'il sera donc retenu qu'il n'est pas démontré par la société appelante qu'elle ait satisfait aux exigences légales des articles 990D et suivants du code général des impôts.

Sur la demande de sursis à statuer et sur la question préjudicielle :

Attendu que la Cour de justice des communautés européennes a, dans son arrêt du 11 octobre 2007, rappelé qu'aucune disposition du droit communautaire n'empêchait les autorités fiscales nationales d'exiger du contribuable les preuves qu'elle juge nécessaires pour l'établissement correct des impôts et taxes concernés et le cas échéant de refuser l'exonération demandée si ces preuves ne sont pas fournies ;

Attendu qu'il appartient la société qui entend bénéficier des dispositions dérogatoires et d'interprétation stricte prévues aux articles 990 D et suivants du livre des procédures fiscales de se donner les moyens de remplir complètement la déclaration prévue par l'article 990 E du code général des impôts en fournissant le nom de ses actionnaires pour en bénéficier ;

Attendu qu'en l'état des principes ainsi posés et des observations déjà ci-dessus faites, il n'y a donc pas lieu de saisir la Cour de justice de l'union européenne de la question préjudicielle telle qu'elle est sollicitée.

Sur la critique de l'évaluation du bien :

Attendu que le bien a été évalué par le contribuable, dans les déclarations 2007 à 2011, à 1'800'000 € et dans la déclaration 2012, à 3'750'000 €.

Attendu que l'administration fiscale a fixé la valeur du bien à 3'794'000 € pour l'ensemble de la période.

Attendu que l'administration a pris en compte quatre mutations de propriété intervenues en 2004, 2006, et 2008 et qu'elle a calculé la valeur du bien à partir de la comparaison avec ces éléments, ne s'étant à aucun moment référée à la valeur des travaux réalisés par la société, de sorte qu'aucun moyen utile ne peut être soulevé pour critiquer l'évaluation retenue.

Attendu que si les caractéristiques des biens de comparaison sis à [Localité 6] n'en font pas des éléments de comparaison strictement identiques, ils sont néanmoins intrinsèquement similaires dans le temps, l'environnement, et l'espace ; qu'ils sont en effet constitués de trois immeubles, de construction ancienne, ayant des superficies allant de 320 m² à 382 m², relevant de la catégorie cadastrale 3 (pour l'un d'entre eux) et 4 ( pour deux) et que l'un est exactement dans le quartier du [Adresse 5].

Attendu que le quatrième bien proposé par l'administration est situé à [Localité 1] ; que cette transaction ne sera cependant pas considérée par la cour, car d'une part, le bien présente une spécificité tenant à la proximité de sa situation par rapport à la mer , d'autre part la transaction est trop ancienne, pour remonter au 7 mai 2004.

Attendu qu'il résulte des trois termes de comparaison retenus un prix moyen de 7050,66 € le mètre carré, prix qu'il n'y a pas lieu de moduler par rapport à la crise de 2008 dès lors qu'il n'est produit par la société appelante aucun élément sérieux en ce sens en ce qui concerne le type de bien en cause, que cette situation n'a eu qu'un faible et bref impact vu la spécificité du marché de l'immobilier des villas vendues sur la côte d'azur dans cette gamme de transactions, que la commission de conciliation a relevé, sans que cela ne soit contesté, que la société, elle même, avait écrit que la valeur de l'actif immobilisé au 31 décembre 2008 pour ce bien s'établit comptablement à 3 446 310€ et que les années concernées sont celles allant de 2009 à 2012 de telle sorte que la valorisation du bien en cause sera retenue pour :

3 250 354€ en 2009, puis régulièrement ré-évalué de 5% chaque année pour se voir fixer à :

3 412 871€ en 2010,

3 583 514€ en 2011,

et 3 762 689€ en 2012.

Attendu en conséquence que les redressements de l'administration devront être faits sur ces bases et que le jugement sera donc réformé mais sur les seules les évaluations ainsi arrêtées.

Vu les articles 696 et suivants du Code de Procédure Civile et la succombance de la société Tankred sur le principe de l'exonération prétendue.

Attendu que l'équité ne commande pas l'application de l'article 700 du Code de Procédure Civile.

Par ces motifs

La cour, statuant publiquement, contradictoirement, en matière civile et en dernier ressort,

Confirme le jugement en ce qu'il a rejeté les demandes de la société Tankred APS tendant à l'annulation du redressement opéré par l'administration fiscale et au remboursement des sommes mises en recouvrement par elle, mais le réforme sur l'évaluation du bien et statuant à nouveau de ce chef :

Fixe pour les années 2009,2010, 2011 et 2012 la valeur de la villa appartenant à la société Tankred APS à [Localité 6] aux sommes respectives suivantes :

3 250 354 € en 2009,

3 412 871 € en 2010,

3 583 514 € en 2011,

et 3 762 689 € en 2012,

et dit que les redressements de l'administration fiscale devront intervenir sur ces bases,

y ajoutant :

Rejette la demande de sursis à statuer et la demande de question préjudicielle,

Dit n'y avoir lieu à l'application de l'article 700 du code de procédure civile,

Condamne la société Tankred APS aux dépens et en ordonne la distraction conformément à l'article 699 du code de procédure civile.

LE GREFFIER LE PRESIDENT


Synthèse
Tribunal : Cour d'appel d'Aix-en-Provence
Formation : Chambre 1-1
Numéro d'arrêt : 17/19328
Date de la décision : 02/07/2019

Références :

Cour d'appel d'Aix-en-Provence 1A, arrêt n°17/19328 : Infirme partiellement, réforme ou modifie certaines dispositions de la décision déférée


Origine de la décision
Date de l'import : 27/03/2024
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.appel;arret;2019-07-02;17.19328 ?
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