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21/06/2019 | FRANCE | N°16/20932

France | France, Cour d'appel d'Aix-en-Provence, Chambre 4-3, 21 juin 2019, 16/20932


COUR D'APPEL D'AIX-EN-PROVENCE

Chambre 4-3



ARRÊT AU FOND



DU 21 JUIN 2019



N° 2019/ 197



RG 16/20932

N° Portalis DBVB-V-B7A-7TFT



[K] [S]





C/



[R] [U]

Association UNEDIC-AGS CGEA [Localité 1]

SA SOCIETE AVIGNONAISE IMPRESSION TISSUS (SAIT)











Copie exécutoire délivrée

le :



à :



- Me François MAIRIN, avocat au barreau de TARASCON



- Me Frédéric LACROIX, a

vocat au barreau d'AIX-EN-

PROVENCE



- Me Carole MAROCHI, avocat au barreau d' AIX EN PROVENCE



- Maître [R] [U]









Décision déférée à la Cour :



Jugement du Conseil de Prud'hommes - Formation paritaire d'ARLES en date du 10 Novembre 20...

COUR D'APPEL D'AIX-EN-PROVENCE

Chambre 4-3

ARRÊT AU FOND

DU 21 JUIN 2019

N° 2019/ 197

RG 16/20932

N° Portalis DBVB-V-B7A-7TFT

[K] [S]

C/

[R] [U]

Association UNEDIC-AGS CGEA [Localité 1]

SA SOCIETE AVIGNONAISE IMPRESSION TISSUS (SAIT)

Copie exécutoire délivrée

le :

à :

- Me François MAIRIN, avocat au barreau de TARASCON

- Me Frédéric LACROIX, avocat au barreau d'AIX-EN-

PROVENCE

- Me Carole MAROCHI, avocat au barreau d' AIX EN PROVENCE

- Maître [R] [U]

Décision déférée à la Cour :

Jugement du Conseil de Prud'hommes - Formation paritaire d'ARLES en date du 10 Novembre 2016 enregistré au répertoire général sous le n° F 16/00043.

APPELANTE

Madame [K] [S]

née le [Date naissance 1] 1958 à [Localité 2], demeurant [Adresse 1]

représentée par Me François MAIRIN, avocat au barreau de TARASCON substitué par Me Tiffanie TABEAU, avocat au barreau d'AIX-EN-PROVENCE

INTIMES

SA SAIT LES OLIVADES représentée par Maître [R] [U] ès qualités de Mandataire judiciaire

né le [Date naissance 2] 0963 à [Localité 3] (92), demeurant [Adresse 2]

défaillant

Association UNEDIC-AGS CGEA [Localité 1], demeurant [Adresse 3]

représentée par Me Frédéric LACROIX, avocat au barreau d'AIX-EN-PROVENCE

SA SOCIETE AVIGNONAISE IMPRESSION TISSUS (SAIT), demeurant [Adresse 4]

représentée par Me Carole MAROCHI, avocat au barreau d' AIX EN PROVENCE et Me Ariane BOUIC-LEENHARDT, avocat au barreau de MONTPELLIER

*-*-*-*-*

COMPOSITION DE LA COUR

En application des dispositions des articles 785 et 786 du code de procédure civile, l'affaire a été débattue le 21 Mai 2019, en audience publique, les avocats ne s'y étant pas opposés, devant Madame Hélène FILLIOL, Conseiller, chargée du rapport, qui a fait un rapport oral à l'audience, avant les plaidoiries.

Ce magistrat a rendu compte des plaidoiries dans le délibéré de la cour, composée de :

Madame Catherine LE LAY, Président de Chambre

Madame Ghislaine POIRINE, Conseiller faisant fonction de Président

Madame Hélène FILLIOL, Conseiller

Greffier lors des débats : Mme Nadège LAVIGNASSE.

Les parties ont été avisées que le prononcé de la décision aurait lieu par mise à disposition au greffe le 21 Juin 2019.

ARRÊT

REPUTE CONTRADICTOIRE

Prononcé par mise à disposition au greffe le 21 Juin 2019

Signé par Madame Catherine LE LAY, Président de Chambre et Madame Florence ALLEMANN-FAGNI, Greffier, auquel la minute de la décision a été remise par le magistrat signataire.

***

PROCEDURE ET PRETENTIONS DES PARTIES

Madame [K] [S] est régulièrement appelante d'un jugement rendu le 10 novembre 2016 par le conseil de prud'hommes d'Arles qui a notamment :

- dit que l'employeur a respecté son obligation de formation tout au long de la relation contractuelle,

- dit que son licenciement pour motif économique repose sur une cause réelle et sérieuse,

- dit que l'ordre des licenciements a été respecté,

- en conséquence débouté Madame [K] [S] de l'ensemble de ses demandes,

- dit n'y avoir lieu à application de l'article 700 du code de procédure civile,

- laissé les éventuels dépens à sa charge.

Par jugement du 23 février 2018 le tribunal de commerce de TARASCON a ouvert une procédure de sauvegarde à l'égard de la SA SOCIETE AVIGNONNAISE IMPRESSION TISSUS ;

Par arrêt avant dire droit en date du 5 avril 2019 la cour a ordonné la réouverture des débats à l'audience du 21 mai 2019 afin de permettre aux parties de régulariser la procédure avec rabat de l'ordonnance de clôture.

L'ordonnance de clôture a été rendue le 17 mai 2019.

A l'audience du 21 mai 2019, Madame [K] [S] sollicite le bénéfice de ses conclusions du 15 mai 2019 et demande à la cour de :

' - voir l'appel de la concluante comme étant régulier en la forme et juste au fond';

- réformer la décision entreprise en toutes ses dispositions.

Au principal

Vu les dispositions des articles L1233-2, L1233-3, L1233-4 du Code du Travail';

- dire et juger que le licenciement de Madame [K] [S] est dépourvu de cause réelle et sérieuse'pour les causes sus énoncées.

- en conséquence, condamner la SAIT LES OLIVADES au paiement de la somme de 25.000 € à titre de dommages et intérêts pour licenciement sans cause réelle ni sérieuse';

- condamner la SARL SETA au paiement de la somme de 3.794 € 10 à titre d'indemnité compensatrice de préavis, outre celle de 379 € 41 à titre d'incidence congés payés.

Subsidiairement

Vu les dispositions de l'article L1233-5 du Code du travail.

- dire et juger que l'ordre des licenciements n'a pas été respecté par la SAIT LES OLIVADES.

- en conséquence, la condamne au paiement de la somme de 25.000 € à titre de dommages et intérêts pour rupture abusive du contrat de travail.

En tout état de cause

Vu les dispositions de l'article L6321-1 du Code du travail';

- dire et juger que la SAIT LES OLIVADES n'a pas respecté son obligation de formation tout au long de la vie professionnelle de la concluante';

- en conséquence, condamner la SAIT LES OLIVADES au paiement de la somme de 6.000 € en réparation du préjudice subi.

- condamner la SAIT LES OLIVADES au paiement de la somme de 2.500 € au titre des dispositions de l'article 700 du CPC.

- condamner la SAIT LES OLIVADES aux entiers dépens.

- dire et juger que les condamnations porteront intérêts au taux légal à compter la saisine du Conseil de Prud'hommes et seront capitalisés.'.

La SA SOCIETE AVIGNONNAISE IMPRESSION TISSUS (SAIT) sollicite le bénéfice de ses conclusions du 15 mai 2019 et demande à la cour :

' Vu les dispositions du code du travail

Vu la jurisprudence précitée et les pièces visées

il est demandé à la cour d'appel d'Aix en Provence de :

- confirmer en toutes ses dispositions le jugement rendu par le Conseil de Prud'hommes d'Arles le 10 Novembre 2016

En conséquence

A titre principal :

- dire et juger que le salaire mensuel moyen de Mme [S] précédant la rupture de son contrat de travail s'élevait à 1.748, 16 €

- dire et juger que le licenciement pour motif économique de Mme [S] repose incontestablement sur une cause réelle et sérieuse

- débouter Mme [S] de ses demandes tendant à voir la société condamnée à lui verser :

. 25.000 € à titre de dommages et intérêts pour licenciement sans cause réelle et sérieuse

. 3.794, 10 € à titre d'indemnité compensatrice de préavis, outre 379, 41 € au titre des congés payés afférents,

A titre subsidiaire

- dire et juger que la société a parfaitement respecté les critères d'ordre des licenciements

- débouter Mme [S] de sa demande tendant à voir la société condamnée à lui verser 25.000 € à titre de dommages et intérêts pour rupture abusive du contrat de travail

En tout état de cause,

- dire et juger que la société a parfaitement respecté son obligation de formation tout au long de la vie professionnelle de Mme [S]

- débouter Mme [S] de sa demande tendant à voir la société condamnée à lui verser la somme de 6.000 € en réparation du préjudice subi

- débouter Mme [S] de l'ensemble de ses autres demandes

- condamner Mme [S] à payer la somme de 2.500 € au titre de l'article 700 du Code de Procédure Civile

- condamner Mme [S] aux éventuels dépens

Etant précisé que :

Si par extraordinaire la Cour devait réformer le jugement rendu par le Conseil de Prud'hommes d'Arles le 10 novembre 2016, elle ne pourrait, du fait de la procédure ed sauvegare en cours, que fixer l'éventuelle créance de Mme [S] au passif de la société'.

Le CGEA [Localité 1], en lieu et place du CGEA [Localité 4], demande à la cour aux termes de ses conclusions du 14 mai 2019:

' Vu l'ouverture d'une mesure de sauvegarde par le Tribunal de commerce de TARASCON le 23/02/2018 au bénéfice de la société AVIGNONAISE D'IMPRESSION DES TISSUS LES OLIVADES';

Vu l'assignation en intervention forcée du CGEA [Localité 4] du 30/10/2018';

- prendre acte de l'intervention du CGEA [Localité 1] en lieu et place du CGEA [Localité 4], en raison du lieu d'ouverture de la procédure collective, qui est géré dans son ressort'de compétence';

Vu les articles L. 620-1 et suivants et L. 625-1 et suivants du code de commerce, vu les articles L. 3253-6 et suivants du code du travail';

- mettre hors de cause le CGEA [Localité 1] délégation UNEDIC-AGS'dès lors qu'en matière de procédure de sauvegarde seul le débiteur ou l'administrateur lorsqu'il a pour mission d'assurer l'administration, doit être mis en cause au terme de l'alinéa 3 art. L. 625-1 du code de commerce';

Subsidiairement,

- mettre hors de cause le CGEA [Localité 1] délégation UNEDIC-AGS dès lors qu'en matière de procédure de sauvegarde l'AGS n'a pas à garantir les conséquences d'un licenciement sans cause réelle et sérieuse intervenu avant l'ouverture d'une sauvegarde';

- condamner l'appelant aux entiers dépens.'

Maître [U], ès qualités de mandataire judiciaire à la procédure judiciaire de la SA SOCIETE AVIGNONNAISE IMPRESSION TISSUS régulièrement assigné le 30 octobre 2018 n'a pas conclu. L'arrêt sera réputé contradictoire à son encontre.

MOTIFS DE LA DECISION

Attendu qu'il est établi par les éléments de la cause :

- que Madame [K] [S] a été embauchée par la SA SAIT LES OLIVADES, à compter du 5 novembre 2001, en qualité d'employée aux stocks, coefficient 160, statut ETAM dans le cadre de deux contrats de travail à durée déterminée à temps complet ;

- que les relations contractuelles, soumises aux dispositions de la convention collective des industries textiles, se sont poursuivies à compter du 16 février 2002 dans le cadre d'un contrat de travail à durée indéterminée ;

- que Madame [K] [S] a bénéficié d'une formation en 2003 d'une durée de 25 heures 30 sur le thème ' postures, contraintes et gestes professionnels' ;

- que par courrier du 12 décembre 2012, la SA SAIT faisant notamment état d'une 'perte d'exploitation significatives de l'entreprise' a proposé à Madame [S] une réduction de son temps de travail à 18 heures par semaine à compter du 14 janvier 2013 ;

- que par courrier du 2 janvier 2013 Mme [S] a refusé cette proposition ;

- que par courrier du 2 juillet 2014, évoquant à nouveau des difficultés économiques, la SA SAIT a proposé à Madame [K] [S] une réduction de son temps de travail à 24 heures par semaine à compter du 1er septembre 2014 ;

- que par courrier du 29 juillet 2014 Madame [S] a refusé cette modification de son contrat de travail ;

- que l'employeur a réitéré sa proposition par courrier du 4 août 2014 laquelle a été à nouveau refusée par courrier du 6 août 2014 ;

- que par courrier du 20 novembre 2015 la SA SAIT a informé à Madame [K] [S] qu'elle envisageait de lancer une procédure de licenciement individuel pour motif économique la concernant, qu'elle menait actuellement des recherches de reclassement dans l'entreprise et dans l'ensemble des sociétés du groupe et lui a demandé de lui renvoyer un questionnaire de reclassement joint au courrier et de lui transmettre un exemplaire de son curriculum vitae ainsi que de ses diplômes et qualifications professionnelles ; que ce courrier a été reçu par la salariée le 27 novembre 2015 ;

- que par courrier daté du même jour elle a interrogé les responsables des sociétés SETA et SPEM afin qu'elles lui transmettent l'ensemble des postes à pourvoir ;

- qu'un formulaire de recherche de reclassement portant mention du tampon de la SPEM, de la date du 26 novembre 2015 et de l'absence de poste à pourvoir, a été transmis à la SA SOCIETE AVIGNONNAISE IMPRESSION TISSUS à une date non déterminée ;

- que ce même formulaire de reclassement portant mention du tampon de la SETA, de la date du 27 novembre 2015 et de l'absence de poste à pourvoir a été transmis à la SA SOCIETE AVIGNONNAISE IMPRESSION TISSUS à une date non déterminée ;

- que Madame [K] [S] a été convoquée par courrier du 30 novembre 2015 à un entretien préalable fixé le 11 décembre 2015;

- qu'au cours de cet entretien, Madame [S] a accepté le contrat de sécurisation professionnelle ;

- que par courrier du le 11 décembre 2015 la SA SOCIETE AVIGNONNAISE IMPRESSION TISSUS lui a transmis le document de présentation du CSP ;

- qu'elle a été licenciée par courrier du 22 décembre 2015 pour motif économique en ces termes exactement reproduits :

«'L'exercice 2013 a été marqué par de très mauvais résultats et l'année 2014 n'a pas permis de relancer l'activité. Depuis maintenant 3 années consécutives, la société SAIT présente un résultat d'exploitation négatif.

En effet, pour les années 2013, 2014 et la situation arrêtée au 31 août 2015, la société présente les résultats d'exploitation suivants':

Un résultat d'exploitation en négatif de 262.110,42 € en 2013';

Un résultat d'exploitation en négatif de 297.443,50 € en 2014';

Un résultat d'exploitation en négatif de 31.731,76 € au 31 août 2015.

Malgré les mesures prises, notamment la vente de biens immobiliers au cours de l'exercice 2014, la situation économique de la société ne s'est pas améliorée.

En raison de ces difficultés économiques, la société est contrainte d'alléger ses charges et en particulier la masse salariale et donc de supprimer le poste que vous occupez au sein du service expédition.

Nous avons recherché un poste de reclassement au sein de notre groupe. Malgré nos efforts, aucune solution de reclassement n'a à ce jour pu être trouvée.

En conséquence, nous sommes contraints de prononcer votre licenciement.'» ;

- que contestant le bien fondé de son licenciement, Madame [K] [S] a saisi le 27 janvier 2016 la juridiction prud'homale ;

- que c'est dans ces circonstances qu'a été rendu le jugement 10 novembre 2016 ;

Sur l' indemnité au titre du manquement en matière de formation professionnelle

Attendu que la salariée fait valoir que tout au long de la relation contractuelle, soit durant 14 ans, elle n'a jamais bénéficié de formation professionnelle ;

Attendu que l'employeur soutient qu'elle a bénéficié de formation et ce nonobstant les graves difficultés financières qu'il connaît depuis plusieurs années liées à la crise du textile et que cette dernière n'a en tout état de cause jamais demandé à bénéficier de formation, ni fait part de la moindre difficulté durant 14 ans ;

*

Attendu que l'article L 6321-1 du code du travail prévoit dans sa version applicable qu'il appartient à l'employeur d'assurer l'adaptation des salariés à leur poste de travail et de veiller au maintien de leur capacité à occuper un emploi au regard de l'évolution des emplois, de la technologie et des organisations;

*

Attendu que si l'employeur a le devoir d'assurer une formation professionnelle continue, y compris sans demande expresse du salarié, et en l'état de difficultés économiques, il convient d'observer que contrairement à ce qu'indique Madame [K] [S], il ne peut être considéré comme acquis qu'une formation professionnelle lui aurait permis de bénéficier d'un coefficient supérieur ;

Attendu qu'il n'est donc pas établi de lien de causalité entre la quasi absence de formation (une seule en 2003) et l'absence d'amélioration catégorielle, l'objectif des formations n'étant pas cette dernière et qu'en conséquence le préjudice allégué n'est pas établi ; que le rejet des dommages-intérêts sollicités à ce titre est confirmé ;

Sur le licenciement

Attendu que pour conclure au caractère abusif du licenciement, Madame [K] [S] invoque notamment le non respect par l'employeur de son obligation de reclassement ;

*

Attendu que le respect par l'employeur de son obligation de reclassement conditionne la légitimité du licenciement pour motif économique ;

Attendu que l'article L.1233-4 du code du travail dans sa version applicable, dont se prévaut la salariée dispose : ' Le licenciement pour motif économique d'un salarié ne peut intervenir que lorsque tous les efforts de formation et d'adaptation ont été réalisés et que le reclassement ne peut être opéré dans l'entreprise ou dans les entreprises du groupe auquel l'entreprise appartient.

Le reclassement du salarié s'effectue sur un emploi équivalent relevant de la même catégorie que celui qu'il occupe ou sur un emploi équivalent assorti d'une rémunération équivalente. A défaut, et sous réserve de l'accord exprès du salarié le reclassement s'effectue sur un emploi de catégorie inférieure.

Les offres de reclassement proposées au salarié sont écrites et précises ' ;

Attendu que lorsque l'entreprise appartient à un groupe, ce qui est le cas en l'espèce, c'est dans le cadre du groupe dont les activités, l'organisation ou le lieu de travail ou d'exploitation permettent la permutation de tout ou partie du personnel qu'il faut se placer ;

Attendu enfin qu'il revient à l'employeur d'établir qu'il a respecté loyalement son obligation de reclassement laquelle est de moyen ;

*

Attendu que c'est à bon droit que la salariée fait valoir que l'employeur n'a pas mis en oeuvre de façon loyale son obligation de reclassement ;

Attendu en effet qu'il ressort des éléments de la cause tels que ci-dessus rappelés que l'employeur n'a pas attendu que la salariée lui retourne le questionnaire de reclassement qui comportait 3 rubriques (1. profil professionnel, 2. mobilité géographique : êtes vous mobile ' Si oui, précisez dans quel périmètre géographique , 3. type de reclassement : accepteriez vous un CDD ' Seriez vous opposé à un changement d'emploi ' Si oui lesquels ' Seriez vous opposé à occuper un poste de catégorie inférieure ' ) pour interroger les responsables des sociétés SETA et SPEM sur les postes à pourvoir, les courriers envoyés à Madame [S] et auxdites sociétés ayant été envoyés le même jour, soit le 20 novembre 2015 ; qu'il n'a pas plus attendu le retour de ce questionnaire reçu par la salariée le 27 novembre 2015, ni les réponses des deux sociétés précitées pour engager dès le 30 novembre 2015 la procédure de licenciement;

Attendu dans ces circonstances que l'employeur ne peut sérieusement soutenir qu'il 'a tout fait pour favoriser le reclassement de Madame [K] [S]' ou affirmer sans en rapporter la preuve que le reclassement de cette dernière était impossible ;

Attendu qu'il s'ensuit que le licenciement est sans cause réelle et sérieuse;

Attendu que la salariée fait valoir qu'elle n'a pas retrouvé d'emploi ;

Qu'elle justifie avoir bénéficié de la rupture jusqu'au mois de mars 2016, l'allocation de sécurisation professionnelle ; qu'elle ne produit aucune pièce relative à sa situation professionnelle après cette date ;

Attendu qu'au regard de son ancienneté (14 ans), de son âge au moment de la rupture (Elle est née en 1958), de son salaire mensuel brut de 1748€ 16, en application de l'article L.1235-3 du code du travail, il y a lieu de condamner la SA SOCIETE AVIGNONNAISE IMPRESSION TISSUS à lui payer la somme de 17.500€ ;

Sur l'indemnité compensatrice de préavis

Attendu qu'en l'absence de cause réelle et sérieuse du licenciement le contrat de sécurisation professionnelle devient sans cause, l'employeur étant alors tenu à l'obligation de préavis, le contrat de travail se poursuivant jusqu'à son terme ; qu'il importe donc peu que l'employeur ait réglé auprès de Pôle Emploi pour le compte de Madame [K] [S] l'indemnité de préavis ;

Attendu qu'il y lieu d'accueillir ses demandes au titre de l'indemnité compensatrice de préavis et au titre des congés payés y afférents à hauteur des sommes de 3.496.32€ et de 349.63€ lesquelles seront fixées au passif de la procédure de sauvegarde ;

Sur la garantie de l'AGS

Attendu que c'est à bon droit que le CGEA fait valoir pour solliciter sa mise hors de cause que d'une part l'article L.625-3 du code de commerce ne prévoit pas la mise en cause des institutions mentionnées à l'article L.3253-14 du code du travail en cas d'ouverture d'une procédure de sauvegarde au cours de l'instance prud'homale et que, d'autre part, qu'il résulte de l'article L.3253-8 du code de travail que, dans ce cas, seules sont garanties les créances résultant de ruptures intervenues pendant la période d'observation et dans le mois suivant le jugement qui arrête le plan de sauvegarde ;

Attendu que les créances de la salariée étant antérieures au jugement d'ouverture de la sauvegarde, il y a lieu de mettre hors de cause le CGEA [Localité 1] ;

Sur les intérêts et leur capitalisation

Attendu que les intérêts au taux légal sur les créances salariales (indemnité de préavis et congés payés y afférents) courent à compter de la convocation de l'employeur en justice soit à compter du 28 janvier 2016 et jusqu'à l'ouverture de la procédure de sauvegarde soit à compter du 23 février 2018 ;

Attendu que les intérêts sur les sommes allouées seront capitalisés dans les conditions de l'article 1343-2 du code civil, étant précisé que cette capitalisation est réservée pour les intérêts dus au moins pour une année entière ;

Sur l'article 700 du code de procédure civile et les dépens

Attendu que le jugement doit être infirmé en ses dispositions relatives à l'article 700 du code de procédure civile et aux dépens ;

Attendu qu'il apparaît inéquitable de laisser à la charge de Madame [K] [S] les frais qu'elle a du engager non compris dans les dépens ; qu'une somme de 2000€ lui sera allouée à ce titre en application des dispositions de l'article 700 du code de procédure civile laquelle sera fixée au passif de la procédure de sauvegarde ;

Attendu que les dépens de première instance et d'appel seront également fixés au passif de la procédure de sauvegarde ;

PAR CES MOTIFS

La Cour,

Statuant par arrêt réputé contradictoire, par mise à disposition au greffe, les parties en ayant été préalablement avisées dans les conditions prévues à l'article 450 du code de procédure civile, en matière prud'homale,

Confirme le jugement du conseil des prud'hommes en ce qu'il a débouté Madame [K] [S] de sa demande d'indemnité au titre du manquement de l'employeur à son obligation de formation.

L'infirme pour le surplus et statuant à nouveau :

Constate que le licenciement pour motif économique de Madame [K] [S] est sans cause réelle et sérieuse.

Fixe au passif de la procédure de sauvegarde de la SA SOCIETE AVIGNONNAISE IMPRESSION TISSUS les créances de Madame [K] [S] aux sommes suivantes :

- 17.500€ à titre de dommages et intérêts pour licenciement sans cause réelle et sérieuse.

- 3.496.32€ à titre d'indemnité de préavis,

- 349.63€ au titre des congés payés y afférents ;

- 2000€ en application de l'article 700 du code de procédure civile.

Dit que les intérêts au taux légal sur l'indemnité de préavis et les congés payés y afférents courent à compter du 28 janvier 2016 et jusqu' au 23 février 2018 ;

Dit que ces intérêts seront capitalisés dans les conditions de l'article 1343-2 du code civil.

Rappelle que le jugement d'ouverture de la procédure de sauvegarde a entraîné l'arrêt des intérêts légaux et conventionnels ;

Met le CGEA [Localité 1] hors de cause.

Fixe les dépens de première instance et d'appel au passif de la procédure de sauvegarde de la SA SOCIETE AVIGNONNAISE IMPRESSION TISSUS.

LE GREFFIERLE PRESIDENT


Synthèse
Tribunal : Cour d'appel d'Aix-en-Provence
Formation : Chambre 4-3
Numéro d'arrêt : 16/20932
Date de la décision : 21/06/2019

Références :

Cour d'appel d'Aix-en-Provence 9C, arrêt n°16/20932 : Infirme partiellement, réforme ou modifie certaines dispositions de la décision déférée


Origine de la décision
Date de l'import : 27/03/2024
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.appel;arret;2019-06-21;16.20932 ?
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