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20/06/2019 | FRANCE | N°18/17370

France | France, Cour d'appel d'Aix-en-Provence, Chambre 1-2, 20 juin 2019, 18/17370


COUR D'APPEL D'AIX-EN-PROVENCE

Chambre 1-2



ARRÊT

DU 20 JUIN 2019



N° 2019/543













N° RG 18/17370



N° Portalis DBVB-V-B7C-BDI7O







SAS [O]





C/



[Y] [U]





















Copie exécutoire délivrée

le :

à :



SCP MAGNAN



Me BROCA













DÉCISION DÉFÉRÉE À LA

COUR :



Arrêt rendu par le président de la 1ère chambre C de la cour d'appel d'AIX-EN-PROVENCE en date du 13 novembre 2014 enregistré au répertoire général sous le n° 13/22400.





APPELANTE



SAS [O]

dont le siège social est [Adresse 8]



représentée par Me Joseph MAGNAN de la SCP MAGNAN PAUL MAGNAN JOSEPH, avocat au barreau d'AIX-EN-PROV...

COUR D'APPEL D'AIX-EN-PROVENCE

Chambre 1-2

ARRÊT

DU 20 JUIN 2019

N° 2019/543

N° RG 18/17370

N° Portalis DBVB-V-B7C-BDI7O

SAS [O]

C/

[Y] [U]

Copie exécutoire délivrée

le :

à :

SCP MAGNAN

Me BROCA

DÉCISION DÉFÉRÉE À LA COUR :

Arrêt rendu par le président de la 1ère chambre C de la cour d'appel d'AIX-EN-PROVENCE en date du 13 novembre 2014 enregistré au répertoire général sous le n° 13/22400.

APPELANTE

SAS [O]

dont le siège social est [Adresse 8]

représentée par Me Joseph MAGNAN de la SCP MAGNAN PAUL MAGNAN JOSEPH, avocat au barreau d'AIX-EN-PROVENCE substitué par Me Nicolas DHUIN de la SELARL B.M.D. - ASSOCIES, avocat au barreau de PARIS, plaidant

INTIMÉ

Monsieur [Y] [U]

né le [Date naissance 1] 1953 à [Localité 7]

demeurant [Adresse 2]

représenté par Me Gilles BROCA, avocat au barreau de NICE substitué par Me Marie-Monique CASTELNAU, avocat au barreau d'AIX-EN-PROVENCE

*-*-*-*-*

COMPOSITION DE LA COUR

L'affaire a été débattue le 14 mai 2019 en audience publique. Conformément à l'article 785 du code de procédure civile, madame Geneviève TOUVIER, présidente, a fait un rapport oral de l'affaire à l'audience avant les plaidoiries.

La cour était composée de :

madame Geneviève TOUVIER, présidente

madame Sylvie PEREZ, conseillère

madame Virginie BROT, conseillère

qui en ont délibéré.

Greffier lors des débats : madame Caroline BURON.

Les parties ont été avisées que le prononcé de la décision aurait lieu par mise à disposition au greffe le 20 juin 2019.

ARRÊT

Contradictoire,

Prononcé par mise à disposition au greffe le 20 juin 2019,

Signé par madame Geneviève TOUVIER, présidente, et madame Caroline BURON, greffière, à laquelle la minute de la décision a été remise par le magistrat signataire.

***

EXPOSE DU LITIGE

Monsieur [Y] [U] est propriétaire d'un bien immobilier édifié sur une parcelle sise sur la commune d'[Localité 7], lieudit [Adresse 13], cadastrée section AH [Cadastre 6], constituant le lot 31 du lotissement [Adresse 9], approuvé par arrêté préfectoral en date du 2 juillet 1936, et dont le cahier des charges a été déposé au rang des minutes de maître [T], notaire à [Localité 15], le 19 août 1926, transcrit au bureau des hypothèques de [Localité 11], le 28 septembre 1926, volume 1470 n°69.

La SARL [O] est propriétaire de la parcelle initialement cadastrée section AH [Cadastre 5], désormais section AH numéros [Cadastre 3] et [Cadastre 4], qui fait également partie du lotissement [Adresse 9].

Par un arrêté du 7 décembre 2010, cette société a été autorisée à édifier plusieurs bâtiments sur la parcelle AH [Cadastre 5] et notamment à procéder à l'extension d'un bâtiment dénommé L'Oliveraie.

Se plaignant de ce que l'emprise au sol de ce bâtiment était supérieure au maximum autorisé par l'article 15 du cahier des charges du lotissement, Monsieur [U] a saisi en référé le président du tribunal de grande instance de Grasse qui, par une ordonnance du 23 décembre 2011, a notamment condamné la société [O] à cesser de mettre en oeuvre tous travaux de construction du bâtiment dénommé L'OLIVERAIE, sous astreinte de 5 000 euros par jour de retard commençant à courir à l'expiration du délai de 3 jours à compter de la signification de la décision, et pendant trois mois.

Un arrêt de la Cour de céans du 06 décembre 2012, 3ème chambre A, a confirmé sur ce point l'ordonnance qui lui était déférée.

Exposant que la société [O] n'avait pas suspendu l'exécution des travaux mais les avait achevés, Monsieur [U] a de nouveau saisi en référé le président du tribunal de grande instance de Grasse qui, par ordonnance n° 2013/584 du 28 octobre 2013, a, sur le fondement de l'article 809 alinéa 1er du code de procédure civile :

- condamné la société [O], sous astreinte de 500 euros par jour de retard, commençant à courir deux mois après la signification de l'ordonnance, et pendant six mois, à faire procéder aux travaux de démolition de l'extension du bâtiment L'OLIVERAIE, édifié en vertu de l'arrêté de la commune d'[Localité 7] en date du 07 décembre 2010 ;

- condamné la société [O] à payer à Monsieur [U] la somme de 1000 euros en application de l'article 700 du code de procédure civile ;

- condamné la société [O] aux dépens.

Sur appel de la société [O], la cour d'appel d'Aix-en-Provence, 1ère chambre C, a, par arrêt n° 2014/821 du 13 novembre 2014 :

- confirmé l'ordonnance du 28 octobre 2013 ;

- dit que l'astreinte provisoire de 500 euros par jour de retard s'appliquera à nouveau, sans limitation de durée, à compter de la signification de l'arrêt ;

- condamné la société [O] à payer à [Y] [U] la somme de 3000 euros sur le fondement de l'article 700 du code de procédure civile ;

- condamné la société [O] aux dépens d'appel.

Invoquant un fait nouveau à savoir un arrêté du maire d'[Localité 7]-Juan les Pins en date du 1er juin 2017, modifiant le coefficient de construction dans le cahier des charges du lotissement [Adresse 9], la société [O] a fait assigner monsieur [U] en référé pour obtenir la rétractation de l'ordonnance de référé du 28 octobre 2013. Par ordonnance en date du 25 juillet 2018, le juge des référés du tribunal de grande instance de Grasse s'est déclaré incompétent pour statuer sur la demande de rétractation, a renvoyé la société [O] à mieux se pourvoir, et a condamné la société [O] aux dépens ainsi qu'au paiement de la somme de 1000 euros à monsieur [U] sur le fondement de l'article 700 du code de procédure civile.

C'est dans ces conditions que la SAS [O] a fait assigner directement [Y] [U] devant la cour d'appel d'Aix-en-Provence en rétractation de l'arrêt rendu le 13 novembre 2014.

Par dernières conclusions du 3 mai 2019, la SAS [O] demande à la cour :

- de la déclarer recevable et bien fondée en son action ;

- de rapporter l'arrêt du 13 novembre 2014 ;

- d'infirmer l'ordonnance de référé du 28 octobre 2013 ;

- de condamner [Y] [U] à lui payer la somme de 5000 euros sur le fondement de l'article 700 du code de procédure civile ainsi qu'aux entiers dépens distraits au profit de son avocat.

Par conclusions du 16 novembre 2018, [Y] [U] demande à la cour :

- de déclarer irrecevable ou en tout état de cause non fondée la demande de la société [O] ;

- subsidiairement, de débouter la société [O] de sa demande de rétractation de l'arrêt du 13 novembre 2014 ;

- très subsidiairement, d'ordonner le sursis à statuer dans l'attente de l'issue de son recours formé devant le tribunal administratif de Nice contre l'arrêté du maire de la commune d'Antibes en date du 1er juin 2017 ;

- de condamner la société [O] au paiement de la somme de 5000 euros en application de l'article 700 du code de procédure civile ainsi qu'aux entiers dépens.

Il est renvoyé aux écritures susvisées des parties pour un plus ample exposé de leurs moyens.

MOTIFS DE LA DECISION

1- sur la recevabilité de l'action

En application de l'article 488 du code de procédure civile, une ordonnance de référé qui n'a pas au principal l'autorité de la chose jugée peut être modifiée ou rapportée en cas de circonstances nouvelles. Ce texte s'applique également à l'arrêt statuant sur l'appel formé contre une ordonnance de référé, comme c'est le cas en l'espèce.

La SAS [O] invoque l'arrêté du maire de la commune d'Antibes Juan les Pins en date du 1er juin 2017 modifiant le cahier des charges du lotissement Domaine de la Brague notamment l'article 15 en ce sens que ' le coefficient de construction est déterminé par le PLU de la commune d'Antibes Juan les Pins et le PPR ( Plan de Prévention des Risques) en vigueur au moement des constructions entreprises', ce qui conduit à la suppression de la limitation à 250 m² de la surface de construction au sol prévue à l'origine dans ledit cahier des charges.

Cet arrêté modificatif du cahier des charges d'un lotissement n'est pas un texte législatif ou réglementaire de portée générale et constitue un élément nouveau par rapport à l'arrêt de la cour d'appel d'Aix-en-Provence du 13 novembre 2014 qui s'est fondé sur la rédaction de l'article 15 du cahier des charges prévoyant à l'époque la limitation du coefficient de construction au sol de 250 m² pour confirmer l'ordonnance de référé du 28 octobre 2013. L'action de la SAS [O] pour solliciter le rapport de cet arrêt est ainsi recevable.

2- sur le rapport de l'arrêt

C'est sur le fondement du trouble manifestement illicite que le premier juge a condamné sous astreinte la SAS [O] à faire démolir l'extension du bâtiment L'Oliveraie édifiée en vertu de l'arrêté de la commune d'Antibes en date du 7 décembre 2010 et que la cour d'appel a confirmé cette décision.

Le trouble manifestement illicite se caractérise par toute perturbation résultant d'un fait qui directement ou indirectement constitue une violation évidente de la règle de droit. Son existence s'apprécie au moment où le juge statue.

En l'espèce, il n'est pas discuté que la SAS [O] a procédé à une extension par emprise au sol supplémentaire de 389 m², soit au-delà des 250 m² autorisés par l'article 15 du cahier des charges du lotissement Domaine de la Brague dans sa rédaction originelle. Cependant, ce coefficient de 250 m² a été modifié par l'arrêté municipal du1er juin 2017 précité qui permet une emprise au sol conformément aux dispositions du PLU et du PPR.

Les développements de monsieur [U] sur l'absence de publication de la modification du cahier des charges sont inopérants dès lors que lui-même a connaissance de l'arrêté modificatif contre lequel il a formé un recours devant la juridiction administrative qui est toujours en cours.

La requête de monsieur [U] aux fins de suspension de l'exécution de cet arrêté ayant été rejetée par décision du juge des référés du tribunal administratif de Nice en date du 28 juillet 2017, l'arrêté est exécutoire. Il n'y a pas lieu de surseoir à statuer dans la présente instance jusqu'à l'issue du recours au fond devant le tribunal administratif dès lors que la décision de la cour statuant en référé n'a pas autorité de la chose jugée.

Compte tenu de la modification du cahier des charges sur le coefficient de construction et du fait qu'il n'est pas contesté que l'extension litigieuse est conforme aux dispositions du PLU et du PPR, la violation d'une règle de droit n'est pas établie avec l'évidence requise en référé de sorte que l'existence d'un trouble manifestement illicite n'est pas caractérisée. Il convient en conséquence de rapporter l'arrêt du 13 novembre 2014 et d'infirmer l'ordonnance de référé du 28 octobre 2013 sur la condamnation de la société [O] à faire démolir la construction litigieuse sous astreinte.

3- sur l'article 700 du code de procédure civile et les dépens

Au vu des circonstances de la cause, l'équité commande d'allouer à la société [O] la sommes de 2500 € au titre des frais, non compris dans les dépens, qu'elle a exposés pour la présente procédure, les condamnations prononcées à son encontre sur ce fondement par l'arrêt du 13 novembre 2014 et l'ordonnance de référé du 28 octobre 2013 étant pour l'une rapportée et pour l'autre infirmée.

S'agissant des dépens, chacune des parties supportera ceux qu'elles ont exposés en première instance et lors de la procédure d'appel ayant donné lieu à l'arrêt du 13 novembre 2014, monsieur [U] supportant en revanche les dépens de la présente instance.

PAR CES MOTIFS

La cour,

Déclare recevable l'action de la SAS [O] ;

Dit n'y avoir lieu à surseoir à statuer ;

Rapporte en toutes ses dispositions l'arrêt n° 2014/821 rendu le 13 novembre 2014 entre les parties par la cour d'appel d'Aix-en-Provence 1ère chambre C ;

Infirme en toutes ses dispositions l'ordonnance n° 2013/584 rendue le 28 octobre 2013 entre les parties par le juge des référés du tribunal de grande instance de Grasse ;

Statuant à nouveau et y ajoutant,

Condamne [Y] [U] à payer à la SAS [O] la somme de 2500 € en application de l'article 700 du code de procédure civile ;

Dit que chaque partie supportera la charge des dépens qu'elle a exposés en première instance et lors de la procédure d'appel ayant donné lieu à l'arrêt du 13 novembre 2014;

Condamne [Y] [U] aux dépens de la présente instance, lesquels pourront être recouvrés conformément à l'article 699 du code de procédure civile.

Le greffier, La présidente,


Synthèse
Tribunal : Cour d'appel d'Aix-en-Provence
Formation : Chambre 1-2
Numéro d'arrêt : 18/17370
Date de la décision : 20/06/2019

Références :

Cour d'appel d'Aix-en-Provence 1C, arrêt n°18/17370 : Infirme la décision déférée dans toutes ses dispositions, à l'égard de toutes les parties au recours


Origine de la décision
Date de l'import : 27/03/2024
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.appel;arret;2019-06-20;18.17370 ?
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